Entretien réalisé par Victor Loupan à Munich, en juin 1999, quelques jours avant le retour définitif d’Alexandre Zinoviev en Russie ; extrait de "La grande rupture", aux éditions l’Âge d’Homme.
Victor Loupan : Avec quels sentiments rentrez-vous après un exil aussi long ?
Alexandre Zinoviev : Avec celui d'avoir quitté une puissance respectée, forte, crainte même, et de retrouver un pays vaincu, en ruines. Contrairement à d'autres, je n'aurais jamais quitté l'URSS, si on m'avait laissé le choix. L'émigration a été une vraie punition pour moi.
V. L. : On vous a pourtant reçu à bras ouverts !
A. Z. : C'est vrai. Mais malgré l'accueil triomphal et le succès mondial de mes livres, je me suis toujours senti étranger ici.
V. L. : Depuis la chute du communisme, c'est le système occidental qui est devenu votre principal objet d'étude et de critique. Pourquoi ?
A. Z. : Parce que ce que j'avais dit est arrivé : la chute du communisme s'est transformée en chute de la Russie. La Russie et le communisme étaient devenus une seule et même chose.
V. L. : La lutte contre le communisme aurait donc masqué une volonté d'élimination de la Russie ?
A. Z. : Absolument. La (…)Lire la suite »