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La crise… A gauche, du nouveau ?

Les principales Bourses du monde fonctionnent en réseau électronique vingt- quatre heures sur vingt-quatre. Une volatilité à Wall Street se répand aussitôt sur les marchés financiers d’Europe et d’Asie. L’expérience récente a amplement prouvé le rôle déstabilisateur des systèmes de cotations informatisés : à présent, l’indice d’une Bourse peut gagner ou perdre plusieurs centaines de points en quelques minutes grâce à un système électronique Superdot qui permet le traitement simultané d’une moyenne de trois cent soixante-quinze ordres d’achat groupés par seconde, ce qui correspond à une capacité de traitement de deux milliards d’actions par jour.

C’est une folie !

Déclare le Président, dans son discours à Toulon du 25 septembre 2008. Il a utilisé ce terme cinq fois. Pour fustiger « l’idée de la toute puissance du marché qui ne devrait être contrarié par aucune règle, par aucune intervention politique… »

En inscrivant cette folie dans le passé, le Président espère semer l’illusion que le marché est en voie de guérison. Ce que démentent quotidiennement les températures des différentes places boursières et le climat aux portes des usines. Maniant une rhétorique de gauche, il dénonce « les conditions dans lesquelles l’industrie se trouvait soumise à la logique de la rentabilité financière à court terme. »

« Etait », « se trouvait » l’imparfait sert à persuader que l’action politique est en marche et que ses effets agissent déjà sur la toute puissance du marché.

Les « On » du Président

Dans le même discours, le Président dénonce ce que travailleurs et chômeurs subissent, à savoir : « On a caché les risques toujours plus grands qu’on était obligé de prendre pour obtenir des rendements de plus en plus exorbitants. »

Il lui a fallu l’emploi d’une dizaine de « On » pour faire croire que, d’une part, les mesures ont été prises pour libérer le marché de sa folie et que, d’autre part, les responsables démasqués ne sont plus aux commandes. Afin d’appuyer ses affirmations tout en voulant rassurer, N. Sarkozy souligne que « la peur empêche d’entreprendre, de s’engager… » Et qu’ « Il faut vaincre cette peur… »

« Peur », employé six fois, est suivi de « Vérité », employé également six fois car « ... On ne la [peur] vaincra pas, on ne rétablira pas la confiance en mentant mais en disant la vérité. »

Ce qui relève du bon sens.

Tout en reconnaissant que cette crise est sans équivalent depuis les années 30, il souligne que c’est la fin d’un monde et bien sûr, il ne peut qu’accoucher d’un nouveau plein d’espoir : le capitalisme du 21° siècle. C’est ainsi qu’apparaît cinq fois « rêve » dans son message de Toulon.

Mais pour que ce rêve se réalise, N. Sarkozy pose ses conditions : il faut « accepter de changer nos manières de penser et nos comportements. Faire l’effort nécessaire pour nous adapter aux réalités nouvelles qui s’imposent à nous… »

Tout en affirmant que la crise financière n’est pas la crise du capitalisme, il nous rappelle que l’anticapitalisme n’est pas une solution à la crise actuelle et appelle de ses voeux à la refondation du système capitaliste basé sur « une éthique de l’effort. » Bien sûr, il faut « moraliser » le système car « l’impunité est immorale », précise t-il, par ailleurs. S’ensuit une série de « il faut ». Neuf en tout mais aucune proposition de loi pour poursuivre en justice ceux qui spéculent sur les licenciements et les denrées alimentaires. Dénoncer la crise financière et bancaire tout en martelant qu’en dehors du capitalisme point de salut telle est la mission des pouvoirs démocratiques.

Dénoncer le crime pour mieux absoudre le criminel est la stratégie adopter par les Etats démocratiques, en particulier ceux de l’Union Européenne.

Pour arriver à ses fins, pouvoir politique et pouvoir financier redécouvrent des vertus économiques à l’Etat pour « socialiser pertes et faillites » tout en garantissant la « Privatisation des profits ».

Pile, je gagne, face, tu perds.

« C’est fini », dit le Président en parlant de « l’autorégulation, le laisser faire, le marché qui a toujours raison… » Ce qui n’empêchent pas les salaires, la précarité de l’emploi, les licenciements, la privatisation des biens communs d’être toujours des variables d’optimisation du profit d’un système capitaliste occidentale en perte de vitesse dans la compétition économique mondiale.

Or pour mettre fin à ces mouvements de capitaux dévastateurs de l’économie réelle, quatre mesures immédiates sont nécessaires : suppression des « paradis fiscaux » ; augmentation de la fiscalité des revenus du capital ; taxation des transactions financières, interdiction de spéculer sur les denrées alimentaires comme les céréales et les ressources énergétiques.

En effet, la mondialisation du capital financier est en train de mettre les peuples en état d’insécurité généralisée. Elle contourne et rabaisse les nations et leurs Etats en tant que lieux pertinents de l’exercice de la démocratie et garants des biens communs. Elle creuse les déficits publics et, par ailleurs, incite les fonds de pension, qui manient des centaines de milliards de dollars, à réclamer aux entreprises des dividendes de plus en plus élevés. Les salariés sont les premières victimes de cette « chasse » au profit au seul bénéfice de l’employeur. (1)

…Et à gauche ?

Mais si un président d’une droite décomplexée ose tenir un discours à tonalité de gauche, c’est qu’une gauche au gouvernement ne dirait et ne ferait guère plus, à quelques nuances près…comme à l’accoutumée. Aussi, il ne faut pas s’étonner, outre mesure.
La gauche de la cohabitation a permis la soumission du politique à l’idéologie dominante. Tandis que la gauche de gouvernement a servi de pompier au système capitaliste tout en légitimant idéologiquement cet Etat financier mondial, hors de portée de tout contrôle démocratique.

L’appel du Premier Ministre, F. Fillon à l’unité nationale est superflu dans la mesure où celle-ci est inscrite dans le cadre institutionnel. Partis politiques de gauche comme syndicats ne présentent plus un contre pouvoir mais des oppositions qui disputent à d’autres forces politiques une gouvernance pour, en fin de compte, servir le même système.

Il faut remonter à 1945, pour déceler les origines de ce processus et à « Mai 68 » pour constater sa maturation. En effet, face au dilemme « prendre le pouvoir avec le risque de tout perdre » et « assurer sa place dans les institutions », le parti communiste avait choisi. Il s’est débarrassé de son habit révolutionnaire pour endosser celui d’un réformiste qui s’ignore. L’abandon de sa raison d’être a été dicté par la défense de sa place dans la société. Pour cela, il faut être crédible aux yeux de la classe dominante. En fin de compte, la mutation du PCF a accouché d’une escroquerie idéologique « Changer de société sans changer d’Etat ». En inversant le programme, il a assuré la classe dominante tout en donnant à l’urne un pouvoir qu’elle ne possède pas.

Résultats des courses : il a perdu sa raison d’être et sa place dans la société.
Depuis, il vacille entre deux tactiques stériles. Celle du « lundi » qui dénonce la droitisation de son partenaire de gauche et celle du « dimanche électoral » qui lui loue des vertus de gauche.

Sur le plan syndical, le grenelle a permis au patronat d’avoir enfin un partenaire social mais encore fallait-il que la direction du principal syndicat entame une révision idéologique en profondeur. Crédibilité, toujours. Aujourd’hui, c’est chose faite.

Les renoncements du PCF conjugués à la mutation d’un syndicalisme de classe en un syndicalisme corporatiste a ouvert aux tenants du système capitaliste un large horizon des possibles, y compris, celui d’être réactionnaire tenant un discours de gauche.

Alors que faire ?

Une alternative progressiste en France et en Europe est possible. Elle doit avoir comme objectif le renversement du pouvoir financier, la nationalisation du capital financier et sa socialisation démocratique. Elle passe par la construction d’un rapport des forces sociales et politiques capables d’imposer au capital les revendications des classes populaires. Cela devrait être la réponse au « Pacte présidentiel à la Nation ». Mais encore faut-il que les luttes sociales ne soient pas fragmentées et sur la défensive telles qu’elles le sont, aujourd’hui. Pour cela, il faut se débarrasser du mythe libéral de l’individu sujet de l’histoire et de l’opportunisme politique des périodes électorales.

Sur le plan international, le poids de la crise du système capitaliste occidental va être porté pour une grande part sur les peuples du Sud par la baisse des prix des matières premières et la hausse de ceux des produits d’importation. L’une des conséquences est l’aggravation et la propagation de la pauvreté avec son corollaire, l’immigration. (2)

Enfin, « si les Etats-unis se sont donnés l’objectif du contrôle militaire de la planète, c’est parce qu’ils savent que sans ce contrôle ils ne peuvent pas s’assurer l’accès exclusif à ces ressources. Comme on le sait, la Chine, l’Inde et le sud dans son ensemble ont également besoin de ces ressources pour leur développement. Pour les Etats-Unis, il s’agit impérativement d’en limiter l’accès et, en dernier ressort, il n’y a qu’un moyen, la guerre. » (3) Ce qui implique la sortie du consensus de défense des privilèges vis-à -vis des peuples du Sud, autrement dit, traduire la solidarité par la lutte anti-impérialiste, non l’humanitaire.

M. El Bachir - 1 novembre 2008

(1) http://www.monde-diplomatique.fr/1997/12/RAMONET/9665.html#nb1

(2) http://www.legrandsoir.info/spip.php?article6969

(3) http://www.michelcollon.info/articles.php?dateaccess=2008-10-30%2015:5...

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"Lorsque j’ai pris mes fonctions, j’étais déterminé à faire entrer les Etats-Unis dans le 21ème siècle, toujours comme le plus grand facteur de paix et de liberté, de démocratie, de sécurité et de prospérité."

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"A travers le monde, chaque jour, un homme, une femme ou un enfant sera déplacé, torturé, assassiné ou "porté disparu", entre les mains de gouvernements ou de groupes politiques armés. Et la plupart du temps, les Etats-Unis en sont complices. "

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