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Ben Ali-Kadhafi : Histoire d’un amour impossible ! [I]

Remarque Préliminaire

Cet Article est le premier d’une série d’Articles dont les Têtes de Chapitre sont :

1. De l’Union avortée Egypto-Libyenne jusqu’à « L’Incident du Palmarium »

2. De l’Union mort-née Tuniso-Libyenne jusqu’au Coup de Force de Gafsa

3. Interlude Familial

4. Du Coup de Force de Gafsa jusqu’au « Coup d’Etat Médical » de 1987

5. Pendant les Années Zinochet Ben Ali

6. Après la Révolution de Jasmin

7. Les Défis de Demain

1. De l’Union avortée Egypto-Libyenne jusqu’à « L’Incident du Palmarium »

Le Couple Ben Ali-Kadhafi s’est constitué au début des années soixante dix, à l’ombre et dans le dos d’un Bourguiba septuagénaire qui commence à être affaibli par la vieillesse et la maladie, et dont la succession attise, déjà , toutes les convoitises. A cette époque, le Capitaine Kadhafi, autoproclamé Colonel, vient d’obtenir du Président Anouar el-Sadate un Projet de Fusion totale de l’Egypte et de la Lybie, approuvé par référendum dans les deux pays, le 1er septembre 1972, et devant prendre effet le 1er septembre 1973, date du quatrième anniversaire de son Coup d’Etat qui lui a permis de prendre le pouvoir. Entre temps, Kadhafi a déployé tous ses efforts, pour enrôler la Tunisie dans le dit Projet. La suite des événements montre que, dans sa tentative d’enrôler la Tunisie ou d’influer sur sa politique, aussi bien extérieure qu’intérieure, jusqu’à la déstabiliser, le Colonel Kadhafi a disposé de deux chevaux de Troie, pour ne pas dire de deux agents : l’un est un homme politique mondialement connu et l’autre est un militaire, homme du silence, discret, très timide qui a pris, peu à peu, de l’aisance, taciturne et morose, tout en étant ambitieux, calculateur et obstiné, d’après ceux qui l’ont côtoyé, complètement inconnu du public de l’époque. Le premier, c’est Mohamed Masmoudi, Ministre Tunisien des Affaires étrangères du 12 juin 1970 jusqu’à la date de son limogeage définitif le 14 janvier 1974, principal Instigateur-Artisan, du coté tunisien, de l’Union Tuniso-Libyenne, mort-née le 12 janvier 1974, qui a accepté, plus tard, en octobre 1984, la proposition du Colonel Kadhafi de le nommer ambassadeur de la Jamahiriya libyenne auprès des Nations unies à New York, mais qui s’est, par la suite, désisté, devant l’opposition de Bourguiba. En effet, quand Bourguiba a été mis au courant de cette proposition par Béji Caïd Essebsi (Ministre Tunisien des Affaires Etrangères du, 15 avril 1981 au 15 septembre 1986, et actuellement, Premier Ministre du Gouvernement Transitoire), il a déclaré à Mohamed Mzali, Premier Ministre de l’époque : « il faut aviser Masmoudi par écrit que son acceptation signifie la destitution de sa nationalité tunisienne. Il faut aussi prendre les dispositions en conséquence pour ne pas nous laisser prendre de vitesse ». Quant au second, c’est un Officier Supérieur, déjà , « au physique de déménageur et à l’élégance voyante », qui a fait l’essentiel de sa carrière dans les Services de Sécurité, après son passage d’une année à l’Ecole Militaire Française Interarmes de Saint-Cyr, au sein d’une promotion spéciale composée d’élèves-officiers tunisiens baptisée « Promotion Bourguiba », ayant suivi, eux, une scolarité de deux ans, et qui a passé un séjour de quelques mois dans une école américaine de renseignement (la Senior Intelligence School de Fort Holabird, Maryland), sans être bachelier, et répondant, plus tard, au sobriquet « Monsieur Bac moins 3 » inventé par les étudiants contestataires. Il convient de souligner que la « Promotion Bourguiba » était "parallèle" à celle des « Cyrards » français qui suivaient à cette époque une scolarité, aussi, de deux ans. Cet Officier, qui avait le grade de sous-lieutenant, fut, à l’âge de vingt huit ans, le chef de la Sécurité Militaire de 1964, année de son mariage « stratégique » avec Naïma, la fille de son Patron, le Général Kéfi, (un des plus hauts gradés de l’Armée Tunisienne, ancien officier de l’Armée Française, devenu le chef d’état-major de l’Armée Tunisienne), jusqu’à son « éloignement » temporaire « doré », aussi en 1974 (sic), à Rabat, avec le titre d’Attaché Militaire. Cet « éloignement » est la conséquence du fait que le nom de ce militaire a figuré, sur proposition de Kadhafi, sur la liste des Membres du Gouvernement de ladite Union mort-née Tuniso-Libyenne, et ce en tant que Secrétaire d’Etat Chargé des Services de Renseignement et de la Sécurité Militaire : son nom est Zine el-Abidine Ben Ali. La Fusion Egypto-Libyenne fut enterrée, de fait, dès sa naissance, à cause de l’ego des chefs, et fut abandonnée , officiellement, en 1977, année où le Colonel Kadhafi fait main basse sur la Libye en faisant du pays une, soi-disant, « Jamahiriya », terme arabe qui signifie « État des masses », gouverné, théoriquement, selon un système de Démocratie Directe, alors qu’il s’agit, en réalité, d’une Dictature à la mesure du despote, sans Institutions Politiques, ni Constitution, et en le baptisant officiellement « Grande Jamahiriya Arabe Libyenne Populaire et Socialiste »(sic). La fiction d’un « Pouvoir des Masses », supposé être le Pivot de la gouvernance dans la Jamahiriya Libyenne, s’est traduit, en réalité, par l’émergence de « Comités Révolutionnaires », Pivots d’un Régime sanguinaire et répressif contre tous les opposants, réels ou supposés, allant jusqu’à décréter « La mort est la peine pour toute personne qui formerait un parti politique », Régime dont le plus solide et constant soutien, parmi les Chefs d’Etats Arabes, fut le Président déchu Ben Ali.

C’est en pressentant, dès le départ, la faillite du Projet de Fusion avec l’Egypte et en sachant que l’Idéal de l’Unité Maghrébine figure dans la Constitution Tunisienne, que le Colonel Kadhafi a planifié le coup de force de ladite Union Tuniso-Libyenne. A ce stade, Il convient de mentionner qu’il fut, pendant très longtemps, dominé par un panarabisme primaire, primitif et obsessionnel, état d’âme qui est, malheureusement, partagé par une frange importante de la population arabe et qui ne fait que renvoyer aux calendes grecques l’Unité tant souhaitée par les Peuples Arabes. Ses manoeuvres ont débuté le 15 décembre 1972 en s’auto-invitant en Tunisie, auto-invitation qui va conduire au fameux incident, devenu le célèbre « Incident du Palmarium », au cours duquel Bourguiba, dans un discours d’une heure moins le quart, improvisé en urgence, dans des conditions non protocolaires, prononcé devant un Kadhafi abasourdi et interloqué en lui infligeant, devant une assistance de plus de deux mille personnes, une brillante leçon de Politique Internationale et de réalisme politique. Compte tenu du caractère parano et mégalomaniaque de Kadhafi, de son ego surdimensionné, je pense que cet affront, infligé, publiquement, au Leader Libyen par « le Combattant Suprême », (affront d’autant plus grave que la scène a été filmée et diffusée, en boucle, lors des Journaux télévisés tunisiens et non libyens, évidemment), a conditionné la rancoeur, manifestée par la suite, de Kadhafi envers Bourguiba et le Peuple Tunisien, Rancoeur qui s’est exprimée au grand jour lors de la Révolution de Jasmin ; cf. dans ce cadre :

http://www.lepost.fr/article/2011/02/23/2415868_le-con-lonel-moudammar...

Afin que le lecteur puisse saisir l’importance de « L’Incident du Palmarium », je reproduis, ci-dessous, un extrait du passage que lui a réservé Tahar Belkhodja, Ministre Tunisien de l’Intérieur du 17 mars 1973 au 23 décembre 1977, dans son ouvrage « Les trois décennies Bourguiba. Témoignage » (Publisud, Tunis, 1998) :

« Le scénario va encore s’enrichir : le colonel Kadhafi, dans la foulée de ce projet de fusion égypto-libyenne et dans l’espoir d’enrôler la Tunisie, revient à Tunis, le 15 décembre. Ce sera alors l’incident, devenu fameux, dit du « Palmarium » entre lui et Bourguiba. Un incident dû à des circonstances tout à fait imprévues. Notre hôte, en effet, dont on redoutait les foucades, devait seulement s’adresser aux députés tunisiens réunis en séance solennelle. Mais, comme en 1971, il demanda expressément à s’adresser à la jeunesse et aux cadres du pays. On n’osa pas le lui refuser et une réunion fut organisée en hâte dans la salle du cinéma Le Palmarium, qui pouvait contenir plus de deux mille personnes, en l’occurrence des jeunes cadres du parti et de l’administration. S’y ajoutèrent manifestement un certain nombre de libyens venus spécialement par la route et qui s’attachèrent à créer l’ambiance. Mouammer Kadhafi se lance, aussitôt, dans un grand appel aux jeunes générations. Il commence, bien sûr, par un hommage à la Tunisie qu’il présente artificiellement comme ayant été, depuis des siècles, un bastion de l’arabisme. Mais, enchaîne-t-il :

’’ Les luttes de libération nationale doivent maintenant déboucher sur un combat pour l’édification d’une nation arabe unifiée, du Golfe à l’Atlantique. Les dirigeants doivent répondre aux aspirations des masses, et les monarchies sont moins à même de le faire que les régimes républicains qui doivent savoir briser avec le passé. En Tunisie, la frontière avec la Libye est artificielle, elle a été inventée par le colonialisme (…) Le monde arabe doit répondre au défi de certaines puissances étrangères, au premier chef les Etats-Unis’’.

Bourguiba qui, depuis une heure, au palais de Carthage, écoute ce discours à la radio, n’y tient plus et décide d’aller porter la réplique. Il noue mal ses chaussures, monte dans une voiture de police et entre en trombe au Palmarium à la stupéfaction générale. Coupant presque la parole à son hôte abusif, il improvise une de ces harangues politico-historiques dans lesquelles il excelle, associant son destin personnel à celui de son pays, tout en insérant l’un et l’autre dans le mouvement des siècles. En quelques phrases, il commence par apostropher un Kadhafi interloqué :

’’Bourguiba ne doit pas sa charge à une révolution ou à un coup d’État, mais à une lutte héroïque d’un demi-siècle, qui a été celle de la Tunisie. Et cela, pour une patrie tunisienne et non pour devenir un fragment d’on ne sait quelle nation arabe(…) L’unité arabe ? D’accord sur l’objectif final, mais la réalisation exige des délais(…) Le président Kadhafi est venu ici préconiser l’unité arabe et va jusqu’à me proposer la présidence d’une république commune. Son dévouement et sa sincérité ne sont pas en doute, mais il manque d’expérience. On peut, certes, concevoir une unité entre nos deux pays, mais toute action improvisée se solderait par un échec ’’. »

Une vidéo du discours de Bourguiba était, pendant une période, disponible sur YouTube, avant d’être censurée, à la demande des Services de la Jamahiriya ; cf. dans ce cadre :

http://www.youtube.com/watch?v=L28434Xqmus

Par contre, le lien suivant

http://www.dailymotion.com/video/xhbx5_bourguiba-palmarium_news

présente un extrait du dit discours où (sans être arabophone, l’image se suffisant d’elle-même) on aperçoit, par moment, nettement, surtout vers la fin de la vidéo, la nervosité, le rire jaune et le « mal à l’aise » de Kadhafi à coté d’un Bourguiba bien à l’aise et éblouissant.

(à suivre)

HORCHANI Salah

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(Cité dans : Labor’s Untold Story, de Richard O. Boyer and Herbert M. Morais, NY, 1955/1979.)

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