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Bloc BAO : retour sur clichés

L’un des reporteurs-vedette de The Independent, Robert Fisk, grand spécialiste des affaires moyennes-orientales, a publié en cette fin d’année 2012 quelques textes qui reprennent la somme de ces expériences de l’année, sur les divers terrains de la région, en y ajoutant quelques prévisions diverses. Cela forme un ensemble rafraîchissant, notamment pour ce qui concerne les déclarations officielles des pays du bloc BAO et les stocks de clichés que la presse-Système a utilisé comme autant de munitions interventionnistes et absolument morales, comme autant de marques d’indépendance de l’esprit…

- Dans The Independent du 24 décembre 2012*.

« … Et c’est la même chose en Syrie. Dès le printemps dernier, les commentateurs occidentaux avaient scellé le sort de Bashar al-Assad. Il ne méritait pas "d’être sur terre" selon le ministre français des Affaires Etrangères, Laurent Fabius. Il devait "démissionner", "céder la place". Son régime n’en avait que pour quelques semaines, peut-être même quelques jours. On en était au "point de non retour". Puis à l’été, quand le "point de non retour" a eu fait long feu, on nous a dit qu’Assad allait utiliser des armes chimiques "contre son propre peuple". Ou que ces réserves d’armes chimiques allaient "tomber dans les mauvaises mains" (les "bonnes mains" étant sans doute encore celles d’Assad).

 » Les rebelles syriens ne cessaient "d’atteindre" Homs, puis Damas, puis Alep, puis à nouveau Damas. L’Occident soutenait les rebelles. L’argent et les armes arrivaient à flot du Qatar, d’Arabie Saoudite, le soutien moral était apporté par Obama, Clinton, le pathétique Hague, Hollande, et toute la machine à faire le bien - jusqu’à ce qu’il devienne clair, que les rebelles étaient évidemment surtout composés de Salafistes, d’assassins, de tueurs sectaires et, dans un cas précis, d’un jeune coupeur de tête, et qu’ils se conduisaient tous comme le régime impitoyable qu’ils combattaient. La machine à faire le bien a été obligée de se mettre en marche arrière. Les Etats-Unis ont continué à soutenir les bons rebelles laïques tout en qualifiant les horribles rebelles salafistes "d’organisation terroriste"… […]

 » Obama pourrait ne pas bombarder l’Iran, il n’en avait pas vraiment envie, mais - comme vous le savez par coeur - "toutes les options" étaient "sur la table". Et c’était bien sûr pareil pour Israël, qui voulait bombarder l’Iran parce qu’il se pourrait que ce dernier soit en mesure de fabriquer des armes nucléaires ou avait commencé à le faire, et pourrait en avoir dans 6 mois, ou un an, ou plusieurs années mais - là aussi - "toutes les options" étaient "sur la table". "La fenêtre d’opportunité" de Netanyahu se fermerait avec l’élection du président des Etats-Unis. Et on a entendu toutes ces sottises.... eh bien jusqu’aux élections présidentielles, date à laquelle on a recommencé à nous prévenir que l’Iran était en train de fabriquer, ou était en capacité, ou avait peut-être l’intention de fabriquer une arme nucléaire…[…]

 » En Libye, comme il fallait s’y attendre, les Etats-Unis avaient plus d’ennemis qu’ils ne le pensaient ; l’ambassadeur a été assassiné - et le jury doit rester en alerte malgré les manoeuvres d’obstruction de Clinton - par une milice du genre d’al-Qa’ida. En réalité la Maison Blanche, avant la réélection d’Obama, considérait virtuellement comme acquise la disparition d’al-Qa’ida - déjà politiquement anéanti quand un escadron de l’armée étasunienne a assassiné Osama bin Laden en 2011. Mais les desperados fantomatiques du Wahhabisme ont le talent apprécié des montres du cinéma : ils sont capables de renaître sous différentes formes dans différents endroits. Le Mali a remplacé l’Afghanistan, exactement comme la Libye a remplacé le Yémen, et la Syrie, l’Irak.

 » Je me permets donc de donner un conseil aux potentats du Moyen Orient, aux dictateurs, aux poseurs occidentaux, aux présentateurs de journaux télévisés et autres journalistes. N’utilisez pas les expressions ou mots suivants en 2013 : modéré, démocratie, démissionner, céder la place, point de non retour, tomber dans de mauvaises mains, atteindre, propagation, options sur la table ou terrorisme, terrorisme, terrorisme. C’est trop demander ? Evidemment ! Tout ce à quoi on aura droit de la part de la machine à faire le bien, c’est à un autre lot de clichés pour remplacer celui qui lui a servi cette année à atteindre ses objectifs. »

- Dans The Independent du 31 décembre 2012.

« L’Iran ? Eh bien les Iraniens comprennent l’Occident bien mieux que nous ne les comprenons -un bon nombre d’entre eux, vous vous souvenez, ont été éduqués aux Etats-Unis. Et ils ont une manière étonnante de s’en sortir quoiqu’il arrive. George Bush (et Lord Blair de Kut al-Amara) ont envahi l’Afghanistan et débarrassé les Iraniens shiites de leurs ennemis sunnites qu’ils appelaient toujours "les Talibans noirs". Puis Bush-Blair ont envahi l’Irak et se sont débarrassé du pire ennemi de la République Islamique Saddam Hussein. L’Iran a donc tiré bénéfice de la guerre afghane et de la guerre irakienne sans tirer un seul coup de fusil.

 » Il n’y a aucun doute que l’Iran se livrerait à un tir ou deux de représailles si Israël/Etats-Unis -les deux sont interchangeables en Iran comme dans beaucoup d’autres pays du Moyen-Orient- attaquaient ses installations nucléaires. Mais Israël n’a pas les épaules assez larges pour déclencher une vraie guerre avec l’Iran -il la perdrait - et les Etats-Unis, qui ont déjà perdu deux guerres au Moyen Orient n’ont aucune envie d’en perdre une troisième. Les sanctions - qui sont le vrai ennemi potentiel de l’Iran - lui causent plus de tort que ne le feraient les F-18 israéliens. Et pourquoi exactement les Etats-Unis menacent-t-ils l’Iran ? Ils n’ont pas menacé L’Inde de bombarder ses installations nucléaires quand ce pays a développé la bombe atomique. Il est vrai que l’on a entendu des menaces récemment -au cas où les têtes nucléaires "tomberaient dans les mauvaises mains" ou à propos des armes chimiques qui pourraient "tomber dans les mauvaises mains" en Syrie ; ou a Gaza, si on va par là , où la démocratie est "tombée dans les mauvaises mains" quand le Hamas a gagné les élections en 2006. […]

 » Alors que reste-t-il pour 2013 ? Assad, bien sûr ! Il essaie déjà de convaincre certaines forces rebelles de rejoindre son impitoyable camp - une tactique intelligente mais dangereuse - et l’Occident est enfoncé jusqu’aux genoux dans la barbarie rebelle. Oui Assad va partir. Un jour. Il le dit lui-même. Mais n’espérez pas que ce soit tout de suite. A moins que ça ne soit comme kadhafi. Le vieux mantra est toujours valable. L’Egypte n’est pas la Tunisie, et le Yémen n’était pas l’Egypte, et la Libye n’était pas le Yémen, et la Syrie n’est pas la Libye. […]

 » Et le Golfe ? L’Arabie, qui a connu le premier réveil arabe ? L’Arabie, d’où la première révolution arabe - l’avènement de l’Islam - a déferlé sur le monde. Il y en a qui disent que les royaumes du Golfe se maintiendront intactes pendant des années encore. N’y comptez pas. Regardez l’Arabie Saoudite. Rappelez-vous ce qu’a écrit ce diplomate britannique, il y a 130 ans : "Même à la Mecque... »**

Notes :
* http://www.independent.co.uk/voices/comment/could-saudi-arabia-benext-...

** Allusion à Mark Sykes qui aurait dit, comme le rapporte un voyageur Français en 1883, : "D’après ce que je sais... l’idée de liberté agite aujourd’hui certains esprits, même à la Mecque..."

Pour consulter l’original : http://www.dedefensa.org/article-bloc_bao_retour_sur_clich_s_03_01_2013.html

Traduction : Dominique Muselet

URL de cet article 18856
  

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