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La cas haïtien ou l’échec de l’International.

On se souvient encore du séisme génocidaire de 7.0 sur l’échelle de Richter qui ravagea Haïti le 12 janvier 2010. Laissant derrière une capitale, Port au Prince, totalement en ruine, elle qui représentait le poumon de l’économie stagnante du pays. Un séisme qui a emporté 120% du PIB national conduit nécessairement tout état du tiers-monde dans un sinistre. Donc, les appels précipités à l’aide internationale sous forme de solidarité humaine étaient légitimes. Ainsi les Nations Unies, coordonnant encore l’aide internationale, choisissaient l’ancien président américain, Bill Clinton, pour prendre la tête d’une commission qui allait être baptisée Commission Intérimaire pour la Reconstruction d’Haïti, avec pour sigle CIRH.

Plus d’un an après, l’opinion publique haïtienne et des critiques indépendants restent perplexes quant aux résultats concrets. Des participants à l’armada internationale mise en place pour s’assurer de la reconstruction expriment leurs profondes inquiétudes. Le cas de Ricardo Seintefus, ce citoyen Brésilien qui représenta l’organisation des Etats américains OEA en Haïti, est une référence à citer en matière de courage, parce qu’il a révolutionnairement émis des réserves profondes sur les chances de succès de l’ONU en Haïti. Conséquence de cette hardiesse, il fut expéditivement remercié après avoir donné une interview au journal suisse «  Le temps », dans laquelle l’homme du Brésil a fustigé le principe même de l’aide internationale. «  S’il existe une preuve de l’échec de l’aide internationale, c’est Haïti…La communauté internationale a le sentiment de devoir refaire chaque jour ce qu’elle a terminé la veille ». Cette déclaration lui a coûté son job, il a été révoqué deux mois seulement avant l’expiration de son mandat, l’OEA ne pouvait plus tolérer l’impertinence de ses déclarations. Le gouvernement sortant, par un geste exceptionnel, l’a décoré de «  l’ordre de grand croix d’honneur », très prestigieux en Haïti.

Haïti est un pays doublement occupé. Le coup d’état des militaires «  navy seal » de l’armée américaine contre le président légitime, Jean B. Aristide, le 29 février 2004, a permis l’invasion franco-américaine du pays, suivi de son occupation. Rappelons qu’à cette date, c’est-à -dire depuis l’invasion d’Irak de 2003, fortement contestée par la France, les relations entre ces deux puissances impérialistes étaient branlantes. Le coup d’Haïti a permis le rapprochement indispensable entre les deux états dans le domaine de la coopération militaire subversive et de l’ingérence dans le tiers-monde.

Ce coup a introduit les forces militaires onusiennes dans le pays, sous le sigle de MINUSTAH, mission des nations unies pour la stabilisation d’Haïti, ayant pour objectif officiel de stabiliser Haïti. Plus de 7 ans après, le pays reste suffisamment instable à un point tel que le Département d’Etat renouvelle régulièrement ses appels aux ressortissants américains de rester loin d’Haïti, à cause de l’instabilité chronique qui y règne. Et pourtant, l’ONU dépense près de 600 millions de dollars américains chaque année en Haïti pou financer l’opération de près de 12000 hommes de troupes et employés civils. Le pays reste et demeure instable. Les kidnappings se poursuivent, l’impasse politique se perpétue, l’international semble être en retard de phase vue son impuissance à formuler ou mettre en place une politique garantissant la stabilité.

Pendant que le peuple combatif d’Haïti s’enlise dans des exercices spectaculaires de survie, l’international renforce sa grippe, en plaçant au pouvoir un pantin de la bourgeoisie avec une histoire fraîche d’extrême droite. Michel Martelly, le nouveau valet de l’occident, s’identifie comme un «  grand démocrate ». Comme quoi on s’endort un soir pour se réveiller le lendemain en «  grand démocrate ». Le président a participé activement aux deux derniers coups d’état contre la légitimité constitutionnelle de 1991 et de 2004, interrompant brutalement le processus démocratique chancelant alors en cours. D’après des informations fiables, l’actuel président d’Haïti fut un indicateur de la police et de l’armée, il les accompagnait le soir dans des missions de type «  black OP » d’assassinats politiques. Il faisait partie des escadrons de la mort qui violaient, pillaient, torturaient et assassinaient d’honnêtes citoyens haïtiens.

Martelly avait lui-même reconnu avoir utilisé de la cocaïne et du crack jusqu’à récemment. Arrête t-il de les utiliser ? On n’en sait rien. On connaît la mentalité des drogués, en général ils s’entourent toujours de personnes partageant cette même faiblesse qu’eux-mêmes. Donc, ceux qui ne reniflent pas de la drogue, ne sont pas les bienvenus dans le cercle des intimes (inner circle). Lorsqu’on considère l’entourage immédiat bourgeois et bon vivant de Martelly qui, en Haïti possède une longue tradition dans l’utilisation et circulation de stupéfiants, on est en droit de se demander si l’environnement du «  président » n’est pas truffé de toxicomane et de dealers. Si c’est le cas, on a des hommes et des femmes sous influence de narcotiques qui prennent quotidiennement des décisions pour les 10 millions d’âmes du pays.

D’après une source crédible, Martelly aurait confié à un proche de Miami que, la décision de se présenter à la présidence était au départ une blague. En lui-même, il ne s’attendait pas à ce qu’il fût pris au sérieux. En 2010, lors de son premier voyage de campagne à Jacmel, département du sud-est, avant de descendre de la voiture, il eut à dire à sa femme : si on commence à nous lancer des pierres, nous mettrons fin à la plaisanterie et rentrerons gentiment chez nous. A sa plus grande surprise, la ville de Jacmel avait été mobilisée par son ami de toujours, le sénateur fraîchement élu, Edwin Zenny pour l’accueillir en triomphateur. Des lors, il s’est pris au sérieux. Voilà l’homme que l’international a repêché en troisième position au premier tour des élections présidentielles pour le parachuter à la présidence au détriment de la sorbonnarde, Mme Myrlande Manigat.

Maintenant on a le seul régime d’extrême droite au pouvoir dans l’hémisphère. Beaucoup d’analystes pensent que le grand voisin du nord avait toujours eu un plan pour Haïti. Si globalement, cette assertion se révèle vraie, son essence n’est rien d’autre que l’annihilation d’Haïti. Ceci explique l’échec de l’international en Haïti. La situation est trop complexe pour l’aborder sans un conceptuel préalable. En ce sens, Ricardo Seintefus a eu raison, lorsqu’il déclara que : «  …Personne ne prend le temps ni n’a le goût de tenter de comprendre ce que je pourrais appeler l’âme haïtienne », j’ajouterais de préférence la pensée haïtienne. Donc, tout empressement démagogique accélérera l’effondrement d’Haïti, Ricardo a observé juste que les «  les coopérants sont trop pressés ».

D’après le gouvernement le séisme du 12 Janvier a fait plus de 230.000 morts, d’autres sources l’estiment a plus de 300.000 dans la capitale et les régions avoisinantes. Paradoxalement, la population a augmenté à Port-au-Prince après cette immense catastrophe. Le statisticien et démographe haïtien, Jacques Hendry Rousseau, a déclaré «  c’est clair que la zone métropolitaine a atteint sa saturation » sous un rythme annuel de croissance élevé à 4.5 %. Entre-temps, la commission de reconstruction encourage inconsciemment l’explosion démographique à partir de la capitale. Les habitants des autres régions envahissent la ville dévastée, car c’est là qu’est concentré le «  flot d’aide internationale ». Jusqu’à présent, 37.2 % de l’aide promise à Haïti est en cours d’être dépensée ou l’a déjà été, soit environ 4.6 milliards de dollars. Cependant, en parcourant la capitale, visiblement cette forte somme n’a matériellement rien transformé, et les habitants de Port-au-Prince s’en plaignent.

L’échec international en Haïti sera double. La première mission de l’ONU envoyée en Haïti en 2004, après le coup d’état de l’armée américaine, avec pour objectif de stabiliser le pays a lamentablement échoué. A part quelques chefs de bande sommairement exécutés, au prix de centaines de victimes innocentes, la situation reste explosive. L’exemple le plus concret est ce qui se passe actuellement. L’exécutif, issu des élections frauduleuses et misérables du mois de mars dernier, n’arrive pas à être opérationnel à défaut de ne pas pouvoir imposer un Premier ministre au parlement. Deux longs mois se sont déjà écoulés et, certains entêtés de la classe politique commencent à exprimer des réactions d’impatience en privé. Allant même jusqu’à confier que si dans trois mois le président Martelly n’arrive pas encore à mettre un gouvernement en place, cela étalera publiquement son incompétence, et de ce constat on devrait procéder à de nouvelles élections présidentielles, ou générales.

La deuxième mission, toujours de l’ONU, dite de reconstruction, a pris place dans le pays après le séisme du 12 janvier 2010. Sa mission consiste à reconstruire toutes les infrastructures nationales détruites. Sous le label de Bill Clinton, ancien président américain, des dizaines de réunions sont organisées partout dans le monde, notamment en Europe et aux Etats-unis pour lever des fonds. Plus de 9 milliards de dollars sont promis sur une période de 10 ans. Rappelons que ce même Bill Clinton, co-président de la CIRH, avait admis l’année dernière sa participation dans le processus de destruction de la structure de production agricole d’Haïti. Et avait ordonné l’envoi de 20.000 soldats lourdement armées pour envahir et occuper Haïti en 1994, après avoir perpétré un coup d’état sanglant le 30 septembre 1991. Paradoxalement, le président Martelly l’a décoré de «  l’ordre de grand croix d’honneur » pour les bons services rendus au pays. A cette occasion, il a alloué 500,000 dollars américains au bureau de la présidence haïtienne pour financer les conseillers du chef d’état. L’homme politique américain fait de la politique en Haïti.

Tous les secteurs sont inquiets de la façon dont la CIRH avance sur le terrain. Il y a beaucoup plus de bruits que de résultats. Plus de coopérants étrangers que de nouvelles maisons construites. Haïti est devenue un grand brassage de cultures, comme si la mondialisation dans le tiers-monde est en gestation ici, a Port-au-Prince. Toutes les nations sont représentées. Dans les restaurants chics et boites de nuit de Petionville, on entend toutes les langues et on fait face à toutes les races. Ce monde dépense à gogo l’argent de la manne internationale. Entre-temps, une génération végète dans la misère, sous les tentes et dans le désespoir.

L’international n’est plus en vedette en Haïti. Surtout après l’addition du choléra aux calamités du peuple haïtien par les troupes d’occupation, venues d’ailleurs. L’ONU, dans une étrange désinvolture, continue de nier l’origine du mal. Pourtant, des organisations et experts internationaux fiables, spécialisés dans le dépistage des pandémies ne cessent de présenter des résultats d’enquête impliquant directement les casques bleus Népalais. L’international se ridiculise.

L’imposition de Martelly à la tête de l’état crée une situation de haute tension. Les bourgeois se croient en récupération totale du pouvoir politique, ils expriment dans les discours comme dans les actes un comportement arrogant et péjoratif à l’égard des masses, majoritairement pauvres. Les néo-duvaliéristes qui font leur retour aux affaires après 25 ans comme outsiders, pensent pouvoir revenir à l’époque d’antan. Ainsi, ils lancent déjà des flèches à la presse pour qu’elle se taise. En présence des manitous de l’international, le président profère des menaces à peine voilées contre la presse indépendante. Le conseiller politique de celui-ci, Stanley Lucas, ancien représentant de l’Institut républicain en Haïti (IRI), est allé jusqu’à citer des noms de journalistes. Parmi eux, les plus célèbres, tels que : Liliane Pierre-Paul, Valéry Numa, Lucien Jura, Rotchild François Junior…comme des ennemis du pouvoir en place. En Haïti, quand on pointe du doigt un journaliste dans cette circonstance, il s’agit d’un édit de mise à mort par élimination physique. Donc, l’international se fait complice de la dérive dictatoriale que connaît le pays à l’heure actuelle.

En guise d’apporter de la stabilité, l’international réveille les vieux démons de la société haïtienne. Les préjuges de couleur, et la lutte des classes sont au bord du paroxysme à l’heure actuelle. Si rien n’est fait dans un bref délai, les groupes sociaux s’affronteront. L’international, ayant pour mission de reconstruire physiquement le pays, accuse un retard vertigineux, pendant que 4.6 milliards ont été déjà dépensés. L’avènement de Michel Martelly au pouvoir exacerbe les passions. Bourgeois et néo-duvaliéristes dans leur ivresse de pouvoir attisent les vieux démons de la société haïtienne, mettant en péril le plus grand acquis démocratique depuis 1986, la liberté d’expression. En fin de compte, l’international a rendez-vous avec l’échec en Haïti, s’il n’entame pas un processus de rectification.

JOEL LEON

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