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La marche de nulle part vers zéro

Dans pratiquement tous les domaines, les Etats-Unis ne savent pas du tout quoi faire. Nous ne savons pas quoi faire pour résoudre la crise économique qui grandit. Nous ne savons pas quoi faire dans nos relations avec les autres nations dans ce contexte tendu de l’économie mondiale. Nous ne savons pas quoi faire au sujet de notre propre culture et de nos traditions, nous ne sommes pas capables d’évaluer ce qui est utile et ce qui est dépassé. Nous ne savons absolument pas quoi faire dans les relations entre les hommes et les femmes. Et nous sommes carrément paralysés dans nos relations avec l’écosystème de la planète.

Pour apaiser ces doutes agaçants nous nous contentons de surfer sur l’élan donné par les machines existantes – le flot de produits industriels proposé à des clients qui n’ont pas les moyens de les acquérir ; les infrastructures de transport gigantesques qui se dégradent impitoyablement ; Les opérations malhonnêtes des banques centrales qui minent toutes les structures mondiales d’établissement des prix et des coûts ; les idéologies politiques basées sur des mensonges comme la croissance illimitée ; les transgressions culturelles de la police de la pensée et de la protection institutionnalisée des puissants.

C’est une société en grand danger mais qui ne veut pas le savoir. La panacée d’un PIB en croissance infinie n’est qu’un artifice statistique pour satisfaire de nouveaux éditeurs sans cervelle, dilapider de l’argent dans des entreprises hasardeuses et embobiner les électeurs. Si nous regardions les choses en face, nous nous préparerions activement à la fin de la voiture individuelle, mais nous préférons colporter le conte des fée du “miracle de la fraction hydraulique” parce qu’il nous offre l’illusoire mais réconfortante assurance que nous pourrons continuer à aller à WalMart indéfiniment (dans notre voiture !). Est-ce qu’on se rend seulement compte que nous n’avons même plus assez d’argent pour entretenir le vaste réseau de routes, rues, autoroutes et ponts dont ont besoin toutes ces voitures ? Ou qu’il n’y aura bientôt plus assez de capital pour garantir les prêts dont les Américains ont besoin pour acheter leurs voitures ?

L’économie mondiale se rétracte rapidement parce qu’elle n’était que la manifestation de la fin de l’ère du pétrole bon marché. Maintenant nous entrons dans l’ère du pétrole cher et beaucoup de choses qui semblaient très bien marcher jusqu’ici, ne marchent plus aussi bien. Les produits chinois bons marché fabriqués en série qui abondent dans les rayons des magasins WalMarts et Target ne se vendent plus aussi bien quand les Étasuniens perdent leurs salaires et doivent utiliser les allocations du gouvernement pour payer leur essence parce qu’ils sont nés dans un monde où on est obligé d’aller partout en voiture, et parce que les traficotages de la banque centrale contribuent à augmenter terriblement le prix de la nourriture.

En ce moment, on entend beaucoup parler de la "renaissance industrielle" aux Etats-Unis, basée sur l’emploi des robots. Quel espèce de film fantastique dégoûtant et ridicule à la Popular Mechanics* se joue-t-on ? S’il ne reste plus aux êtres humains qu’un petit rôle administratif dans la production, comment vont faire les 200 millions d’Etasuniens pour survivre ? Et qui achètera ces produits ? Vous pouvez être sûrs que les peuples de Chine, Brésil et Corée auront assez d’usines pour fabriquer tout ce dont ils ont besoin. Vont-ils se mettre à acheter nos produits maintenant ? Vont-ils robotiser leurs propres usines et appauvrir des millions de leurs propres travailleurs ?

Cette dynamique révèle un manque de réflexion effarant, particulièrement du fait qu’elle ne prend pas en compte les conséquences éventuelles - c’est à dire la possibilité d’un soulèvement, d’une révolution, de désordres civils, de cruauté, de pagaille et de mort ; elle est dans la droite ligne des expériences menées par des gouvernements psychopathes au 20ième siècle. Les populations au désespoir deviennent folles. Vous pouvez être sûrs que le manque est la mère des génocides.

Qu’est-ce qui préoccupe les Etats-Unis aujourd’hui, en juin 2014 ? Si l’on en juge par la couverture de Time Magazine : le triomphe du “transgenre.” N’est-ce pas magnifique de célébrer la confusions des sexes comme la plus récente et la plus glorieuse réussite de notre culture ? Ce n’est pas étonnant que les Russes pensent que nous sommes fous et ne veuillent plus rien avoir à faire avec l’Occident. Je dois le dire à la rédaction du Time Magazine : ce n’est pas l’extase devant la confusions sexuelle qui va faire entrer la civilisation américaine au coeur du nouveau siècle.

Ce sera, en réalité, exactement l’inverse. On n’a pas besoin de confusion de quelque nature que ce soit. On a besoin d’ordre et d’une notion claire des limites dans toutes les sphères de l’action et de la pensée. On n’a pas besoin des pleurnicheries, ni des excuses, ni des voeux sur la comète, ni de la pompeuse autosatisfaction qui caractérisent le cours normal de notre vie nationale.

James Howard Kunstler

Notes :

* Popular Mechanics est un magazine mensuel étasunien consacré à la science et à la technologie.

** Le titre a été emprunté à P. Grasset qui fait l’analyse de cet article ici : http://www.dedefensa.org/article-la_marche_de_nulle_part_vers_z_ro_04_06_2014.html

Traduction : Dominique Muselet

»» http://kunstler.com/clusterfuck-nation/coasting-toward-zero/
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Je n’ai aucune idée à quoi pourrait ressembler une information de masse et de qualité, plus ou moins objective, plus ou moins professionnelle, plus ou moins intelligente. Je n’en ai jamais connue, sinon à de très faibles doses. D’ailleurs, je pense que nous en avons tellement perdu l’habitude que nous réagirions comme un aveugle qui retrouverait soudainement la vue : notre premier réflexe serait probablement de fermer les yeux de douleur, tant cela nous paraîtrait insupportable.

Viktor Dedaj

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