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La question kurde face au nationalisme arabe

Le 9 octobre 2019, après l’annonce du retrait des troupes étasuniennes au Nord-Est syrien, la Turquie lance une opération militaire qui achève d’enterrer le projet d’un Kurdistan syrien autonome. Les forces du régime de Damas reprennent alors les enclaves kurdes le long de la frontière turque, suite à un accord conclu avec le plus grand parti kurde de Syrie, le Parti de l’union démocratique. Cet épisode marque l’arrêt du processus d’autonomisation territoriale des Kurdes syriens au Rojava et semble souligner encore une fois l’impossible territorialisation de la question kurde.

Le territoire est défini comme « l’un des attributs essentiels d’une communauté politique, dont il marque les limites géographiques ». La territorialisation permet d’ancrer géographiquement la kurdicité dans un espace donné. Le peuple kurde, qui représente entre 35 et 45 millions de personnes, est une ethnie originaire du Kurdistan, un territoire historiquement à cheval entre quatre États (Iran, Irak, Syrie, Turquie). Il ne s’agit pas d’une identité homogène de par la fragmentation géographique et politique des différentes entités kurdes, mais la matrice commune est la kurdicité, l’identification à l’identité culturelle et linguistique kurde.

À la genèse de la revendication d’une autonomie territoriale kurde

« L’identité kurde est étroitement liée au territoire » analyse Massoud Sharifi Dryaz, spécialiste de l’espace kurde. Cette citation met en exergue la dimension fondamentale du processus de territorialisation pour inscrire géographiquement le projet politique kurde. Mais la mise en place d’un tel projet politique est complexifiée par les lignes de fractures historiques du nationalisme kurde, mais aussi par la difficile affirmation des entités kurdes sur les scènes politiques nationales. Au début du XXème siècle, les principaux partis kurdes espèrent un territoire kurde unifié. Mais progressivement, on assiste à une polarisation de la question kurde de par la fragmentation géographique et politique des différentes entités kurdes. Le géopolitiste Didier Billion note ainsi que : « La question kurde est éminemment plurielle et chaque dynamique nationale, encore traversée par des lignes de fractures entre Kurdes ». L’unification géographique du Kurdistan relève d’un imaginaire politique kurde, mais n’a jamais véritablement été une feuille de route des partis kurdes.

La revendication politique kurde d’une autonomie géographique apparaît dans les années 1880 d’après le politiste Hamit Bozarslan. Peu de temps après, des organisations autonomistes kurdes voient le jour dans chaque État, comme par exemple le Hevî en Irak en 1912, puis le Parti démocratique du Kurdistan (PDK) syrien en 1957. L’échec d’un premier processus d’autonomisation au Kurdistan irakien dans les années 1970 rebat les cartes des stratégies politiques kurdes avec l’apparition d’un conglomérat de nouvelles organisations, parmi lesquelles le Parti ouvrier du Kurdistan (PKK) qui voit le jour en Turquie en 1977 et œuvre également en Syrie dès les années 1990. Le Parti Union démocratique (PYD) naît ensuite en 2003 en Syrie, il s’agit d’une projection du PKK turc avec lequel il est lié. Chaque mouvement défend un projet territorial propre aux enjeux du pays dans lequel il s’inscrit. Les mouvements kurdes sont ainsi historiquement hétérogènes malgré une matrice identitaire commune, et un désir d’autonomie territorial.

Les Kurdes, longtemps mis au banc des politiques nationalistes arabes

Le Kurdistan n’a jamais été un État, il s’agit davantage d’un territoire aux frontières poreuses. Suite à la bataille de Tchaldiran (1514), les partages du territoire du Kurdistan entre l’Empire perse et l’Empire ottoman, peuvent cependant être considérés comme les prémices du découpage actuel de ce territoire. Les accords franco-anglais de Sykes-Picot en 1916 sont également régulièrement pointés du doigt pour expliciter la problématique frontalière du Moyen-Orient, mais ils n’ont jamais été appliqués dans leur tracé et ne représentent pas les frontières actuelles (seulement 16 % et 26 % d’après le géographe Michel Foucher). Dans chacun des quatre États sur lesquels s’étend le territoire du Kurdistan a eu lieu un processus d’autonomisation inachevé, ainsi qu’un processus de marginalisation étatique qui peuvent apparaître comme la matrice commune des trajectoires différenciées entre Irak, Syrie, Iran, et Turquie.

En Irak et en Syrie notamment, la fin de la colonisation occidentale consacre le renouveau du projet de nation panarabe, avec l’émergence du parti Baath’. Le processus d’affirmation d’une nation arabe entre en contradiction avec l’expression d’une kurdicité sur ces mêmes territoires. Situés en périphérie de chacun de ces États, les territoires kurdes apparaissent comme de potentiels bastions de contre-pouvoir. L’affirmation du nationalisme arabe passe dès lors par le contrôle de la population sur ces territoires ruraux alors isolés, et par la quasi absence de développement de ces régions, ce qui conditionne une dépendance économique à l’État central.

En Syrie et en Irak, la lente reconnaissance des Kurdes

En Irak, le poète Hadji Qadirî Koyî peut être considéré comme un père du nationalisme kurde, il a fait de la langue un outil de combat. La revendication linguistique a ainsi été longtemps la matrice identitaire des kurdes, jusqu’à la fin de la monarchie irakienne (en 1958). Les Kurdes irakiens demandaient notamment à avoir accès à l’enseignement de leur langue. Les Constitutions irakiennes ont successivement reconnu (1925), puis nié (1963) l’existence de l’ethnie kurde. Mais dans les années 1960, après plusieurs insurrections kurdes, l’Irak durcit le ton et mène une politique d’assimilation. Le régime encourage l’abandon de l’ethnicité kurde, conformément à l’idéologie panarabe du régime baath’iste. Ainsi, lors des recensements, les Kurdes sont incités à se déclarer arabe. À la fin des années 1970, après l’échec d’un premier processus d’autonomisation (qui avait été entériné par Saddam Hussein en mars 1970), les Kurdes prennent à nouveau les armes face au régime. Dès lors, des campagnes génocidaires sont menées par le régime dans les territoires kurdes. Parmi celles-ci, le génocide d’Anfal en 1988, perpétré par le régime de Saddam Hussein, où environ 180 000 Kurdes ont été assassinés, parfois à l’arme chimique comme dans la bourgade d’Halabja. A la chute de Saddam Hussein, et suite au retrait étasunien, les Kurdes irakiens obtiennent la reconnaissance par le gouvernement central de leur territoire autonome, dont la capitale est Erbil. Le kurde est finalement reconnu comme langue officielle dans la Constitution irakienne de 2005. L’État central irakien tolère l’autonomie territorial mais reste cependant frileux aux revendications indépendantistes, usant régulièrement de leviers de pression pour limiter celles-ci (ainsi, après l’annonce d’un référendum indépendantiste en 2017, Bagdad suspend les liaisons internationales des aéroports du Kurdistan irakien).

En Syrie, les Kurdes sont présents dans différentes régions mais trois espaces sont géographiquement prépondérants : Kobané, Afrin et Djéziréh. Historiquement, les politiques assimilationnistes furent longtemps la donne. Dans les années 1960, on assiste à la mise en place d’une politique répressive envers les Kurdes, avec une stratégie d’arabisation pour asseoir la souveraineté du régime Baath’iste, qui se revendique du panarabisme. Ainsi, le programme de la « ceinture arabe » entre 1973 et 1976 consiste en l’installation de fermes de colons arabes entre le territoire kurde syrien et turc, dans la région de Djéziréh, afin de créer une zone tampon arabe, et de prévenir tout risque d’autonomisation du territoire. Le pouvoir syrien avait mis en place une politique d’ingénierie démographique pour qu’aucune des régions ne soit à majorité kurde. Il mobilise également des leviers économiques avec des politiques de marginalisation ethnique de l’emploi (les kurdes ne pouvaient ainsi pas accéder aux emplois publics). La nationalité syrienne fut également retirée à certains Kurdes en 1962. Ces politiques assimilationnistes ont eu pour effets le renforcement du nationalisme kurde. En Syrie, les première revendications autonomistes kurdes peuvent être datés des manifestations de 2005. La révolution syrienne de 2011 apparaît ensuite comme une fenêtre d’opportunité pour remettre sur le devant de la scène les revendications kurdes puisque les forces militaires kurdes s’imposent comme incontournables (l’armée kurde regrouperait 35 000 volontaires). Dès lors, le Parti de l’union démocratique (PYD) affirme un relatif soutien au régime de Damas, en usant de méthodes autoritaires pour que les kurdes ne montrent pas de velléités anti-régime. En 2011, commence l’ouverture de négociations entre le PYD et le régime syrien pour le contrôle kurde du Nord-est syrien, zones peuplées majoritairement de Kurdes, en échange de la sécurisation du territoire face à Daesh. On ne peut parler véritablement d’une alliance entre les deux partis, il s’agit davantage d’un compromis avec le régime de Damas. Laisser ces zones sous contrôle kurde a permis à celui-ci de se focaliser sur les grandes villes clefs et contre l’Armée syrienne libre. La lutte contre l’État islamique va, à ce titre, permettre au PYD d’acquérir une légitimité, et ses victoires ont été ainsi le catalyseur de son affirmation autonomiste. Mais cette affirmation reste intrinsèquement liée aux visées stratégiques du régime de Damas, limitant de fait la possibilité d’un ancrage temporel.

Exacerbé par l’idéologie panarabe en Syrie et en Irak, le processus de formation des États-nations a conditionné une centralisation de l’identité, en niant toute spécificité des minorités kurdes. D’après le politiste Sami Zubeida, « l’identité kurde n’a acquis de signification politique qu’avec la création, souvent sur des critères ethniques des États-nations dont les Kurdes ont été écartés ». La stratégie politique kurde et sa marge d’action sont avant tout conditionnées par les évolutions sociopolitiques des pays dans lesquels ils évoluent. La crise de légitimité de l’État-nation, est dès lors apparue comme une fenêtre d’opportunité pour les revendications autonomistes. À l’instar d’Erbil, qui joue la carte de la coopération avec le gouvernement central, l’on assiste à un changement de paradigme dans la revendication territoriale kurde. Elle passe d’une stratégie de guérilla face au pouvoir central pour conquérir une indépendance, à une coopération avec celui-ci pour la reconnaissance d’une autonomie territoriale de type fédéraliste.

Bibliographie

Nay, Olivier. Lexique de science politique, Paris : Dalloz, 2011
Sharifi Dryaz, Massoud. « Les Kurdes du Moyen-Orient : une minorité nationale trans- étatique », Maghreb – Machrek, vol. 235, no. 1, 2018, pp. 45-67.
Billion, Didier. « L’improbable État kurde unifié », Revue internationale et stratégique, vol. 95, no. 3, 2014, pp. 18-31.
Bozarslan, Hamit. « Les Kurdes et l’option étatique », Politique étrangère, vol. eté, no. 2, 2014, pp. 15-26.
Foucher, Michel. Le retour des frontières. C.N.R.S. Editions, 2016

15 septembre 2020

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COMMENTAIRES  

24/09/2020 09:00 par carlito

Fédéralisme ou région(s) plus ou moins autonome(s) ?
en tout cas pas de nation kurde à l’horizon.

et pour la raison impérative pour la Turquie où, et il aurait été bon de le rappeler qu’y vivent (mal) 20 à 25 millions de Kurdes soit une bonne moitié des Kurdes.
s’y ajoutent les récurentes erreurs des Kurdes constament en Irak comme en Syrie manipulés par les USA puis abandonnés par les même et leurs abjects alliés (dont la France).

24/09/2020 10:36 par juan

toutes les factions kurdes ne s’entendent pas déjà , en Syrie croyaient que les états unis aller leur permettre d’obtenir un territoire , il est bien évident que les syriens ne sont pas d’accord , ce serait aux états unis de tout décider dans le monde ? si je comprends bien
c’est aussi la position de la direction du PCF sur la situation des kurdes
la Bretagne demanderait son autonomie , l’Alsace , la Corse , le pays basque , la Polynésie , les Antilles , l’île de la Réunion ont eux aussi ont des cultures , des langues différentes de la France que resterait il de la nation française ? du territoire de la France

24/09/2020 11:14 par lama

"unité linguistique" "kobane" et pas un mot sur l’Anatolie ...

Jackpot du crétinisme médiatique sur les Kurdes

24/09/2020 19:09 par juan

le retrait des états unis de l’Irak , de la Syrie, les états unis n’ont rien à y faire , c’est du fantasme médiatique , je voudrais que Mme Lavignon se déplace en Amérique Latine pour voir comment se comportent les états unis
et puis en suivant le résonnement du texte , le Panama reviendrait à la Colombie , la Californie et le Texas reviendraient au Mexique
Guantanamo reviendrait en totalité à Cuba , terminé la prison illégale

24/09/2020 22:27 par Feufollet

Sommairement dit, les Kurdes ne s’entendent avec personne
Ni avec le les Perses iraniens, ni avec l’Irak, ni avec la Syrie, ni avec la Turquie
Quand c’était encore possible, après la chute de l’empire ottoman
Les architectes occidentaux de l’établissement des frontières
Pouvaient créer un nouveau pays indépendant du Kurdistan
Ils ne l’on pas fait, maintenant, c’est trop tard
Les Kurdes maintenant doivent vivre dans différentes nations
Différentes nations qui leur sont plus ou moins hostiles
La Turquie apparait comme la plus cruelle envers les Kurdes
Avec un fou comme Erdogan il ne faut espérer aucune compassion
J’aimerais imaginer une intégration des Kurdes dans leurs différentes nations
Avec les respects de leur langue, de leurs traditions, de leurs cultures, etc..
Peut-être un jour viendra ou l’humanité cessera de se massacrer pour tout et pour rien
J’ai fait un rêve, j’ai rêvé pour vous et pour moi
Pour vos enfants et pour les miens et aussi pour le Palestiniens

24/09/2020 23:01 par Peuimporte

En bref : Sans parler des massacres des Arméniens et des Syriaques par la Turquie avec la participation active des Kurdes de Turquie en 1915/1916, la présence kurde en Syrie remonte à 1925 ! 1925 est l’année au cours de laquelle les Turcs du jeune État dirigé par Atatürk ont exécuté leur chef Saïd Birane puis incendié 210 villages kurdes de la région de Diar Bakr, avant d’expulser leurs habitants vers la Syrie. C’est ainsi qu’environ 300 000 Kurdes ont été accueillis dans le nord-est du pays et au nord d’Alep. À l’époque la Syrie comptait un peu plus de 3 millions d’habitants. Leur pourcentage a donc grimpé vers les 10 % alors qu’il était inférieur à 2% avant cette date. Les 3 régions à majorité kurde, citées par l’auteure, étaient au maximum peuplées d’1/3 de Kurdes en 2011, les kurdes ne sont devenus majoritaires qu’à force d’expulsions, de confiscations et d’épurations ethniques ; une partie de ceux qui s’opposent à l’État syrien dans les rangs des prétendues Forces Démocratiques Syriennes/ FDS soutenues par les USA étant des Kurdes venus des montagnes de Qandil (Irak). Alors de grâce, il faudrait cesser de parler de territoire kurde en Syrie et de Kurdes bridés par un régime baathiste... Il n’y a pas de Kurdistan syrien et le fédéralisme est la porte ouverte à la partition de la Syrie, essentiellement soutenue par les États-Unis, la France et Israël. Pour les Syriens, il y a des frères kurdes d’un côté, et des traîtres kurdes de l’autre. L’auteure aurait mieux fait d’étudier la question kurde face au nationalisme turc, redevenu ottoman, au grand dam de la France si l’on croît les déclarations du Président Macron et de son MAE…

25/09/2020 03:40 par Serge WASTERLAIN

Quand j’entends parler du ‘’rojava’’, mes poils se hérissent, car pour qui s’intéresse à l’histoire du Moyen-Orient sait que cette appellation ‘’marketing’’ de cette région de Syrie est un non-sens, pire, une falsification de l’histoire.
Cette partie de l’histoire du Moyen-Orient commence avec la première guerre mondiale et plus particulièrement en 1916 avec les accords Sykes/Pico, deux diplomates représentant le Royaume-Uni pour le premier, la France pour le second, chargés par leur gouvernement respectif de se partager l’Empire Ottoman ayant eu la fâcheuse idée de s’allier avec l’Allemagne lors de la première guerre mondiale (pour des raisons objectives qu’il serait bien trop long d’évoquer ici).
Sans rentrer dans le détail, ces accords prévoyaient, cartes à l’appui, le dépeçage de la dépouille ottomane en 5 zones d’influence française et anglaise. Parmi celles-ci, les zones bleues et A (sur les territoires de l’actuelle Turquie, Liban, Syrie et Irak) sous administration française. Au passage, signalons également la zone brune, d’administration internationale comprenant Saint-Jean-D’acre, Haïfa et Jérusalem, mais dans les faits sous administration de la Grande-Bretagne qui aura le contrôle des ports d’Haïfa et d’Acre (mais c’est aussi une autre histoire, celle qui verra commencer le martyre des palestiniens toujours d’actualité). Cet accord fut entériné par le traité de Versailles de 1919 et les traités de Saivres et de San Remo de 1920, nonobstant quelques modifications, notamment le transfert de la partie de la zone A située dans l’actuel Irak, car l’armée anglaise occupant cette zone voulait conserver le pétrole de Mossoul et Kirkouk (de mémoire, une compensation de 20% des bénéfices d’extraction fut accordée à la France comme compensation – ils n’allaient quand même pas se faire la guerre…).
Mais revenons à nos moutons : dans la zone A, il était prévu la création d’un état arménien situé entièrement sur la Turquie et d’une région autonome /état kurde lui aussi ESSENTIELLEMENT sur l’actuel Turquie et l’Irak. Pourquoi cette région autonome/état était-elle ESSENTIELLEMENT prévue sur la Turquie et l’Irak ? He bien tout simplement parce que sur le prétendu ‘’rojava’’ syrien actuel vivaient très peu de kurdes, en tout cas, moins que les 20% qui étaient le critère pour déterminer le futur territoire kurde.
Mais ce qu’avait prévu le traité de Sèvres en 1920 (ci-après, je résume à gros traits), ne fut pas confirmé par le traité de Lausanne de 1923 qui mit fin à la guerre avec l’Empire Ottoman, devenant par la même occasion la Turquie ; car entre Sèvres et Lausanne, le sultan qui avait accepté les termes du traité de Sèvre, le Sultan donc, fut renversé par Atatürk qui fit la guerre aux français, français qui ne purent pas militairement imposer à la toute jeune nation turque les termes du traité de Sèvres. Adieu Arménie dans les limites prévues à Sèvres et adieu tout court au Kurdistan… …qui ne valaient pas un mort français ou anglais que le peuple de ces pays sortant de la ‘’grande guerre’’ n’auraient d’ailleurs pas accepté ! Il n’en fut cependant pas de même pour la partie arabe des accords Sykes-Picot confirmés à San Remo (actuel Liban et Syrie pour la zone A française), où les moyens militaires nécessaires furent mis en œuvre tant par la France que par l’Angleterre, allant même jusqu’à inaugurer le bombardement aérien de villes et de leurs civils (Damas fut la première ville au monde à subir un bombardement aérien massif – et aussi, des gaz furent utilisés dans cette guerre faites aux arabes, informations que vous ne trouverez pas sur la toile…), car là, les enjeux pétroliers étaient bien trop importants.
Bref, après la défaite française face aux turcs (appelons un chat un chat) et le traité de Lausanne de 1923, il y eut un exode massif des kurdes de Turquie vers le prétendu ‘’rojava’’ syrien actuel, exode encouragé et aidé par la France qui, sans doute prise de remords envers le peuple kurde envisageait la création d’un état kurde en Syrie dont elle avait le mandat (c’est une hypothèse de ma part et pas, à ma connaissance, un fait historique établi).
Faisons un peu de politique fiction : imaginez qu’à partir de 1923, il y eut un exode massif en Belgique de français du nord persécutés par l’état français et qu’aujourd’hui, ces mêmes français, à qui nous aurions accordé la nationalité belge, demandent leur indépendance en appuyant par les armes une armée étrangère occupant illégalement cette partie de notre pays, qu’en penseriez-vous (le YPG appuie les USA dans leur guerre larvée contre l’état syrien dont il occupe illégalement une partie du territoire), ceci malgré que ce mouvement soit communisant, car quand il y a du pétrole en jeu, au diable les détails idéologiques) ?
Ce qui n’est plus de la politique fiction : 3,5 millions de Syriens, sont actuellement réfugiés dans le sud de la Turquie, principalement des opposants au gouvernement (légitime au regard du droit international, rappelons-le), Trouveriez-vous normal que dans quelques dizaines d’années, ces 3,5 millions de syriens réclament l’indépendance sur cette partie du territoire turc au prétexte qu’au contraire des turcs ils sont arabes ?
Poser ces deux questions, c’est me semble-t-il y répondre. Et pensez à la réponse que vous faites à ces deux questions quand on vous bassinera encore avec le ‘’rojava’’ des malheureux kurdes syriens…
Et je m’adresse particulièrement à mes amis communistes, ce n’est pas parce que le YPG est communisant qu’il faut approuver des menées impérialistes qui n’ont d’autres buts que de déstabiliser la Syrie ! Parce que ne nous trompons pas, derrière la compassion apparente de la ‘’communauté internationale’’, c’est bien de ça dont il s’agit…

25/09/2020 09:53 par Assimbonanga

L’important c’est les Tibétains et les Ouïghours. Faites pas ch... avec vos Kurdes ! Ecoutez France Inter bon sang et la gentille Leïla Boudadi. Elle a appris son Ouïghour par cœur.

25/09/2020 11:34 par juan

complètement d’accord avec vous Serge , le vers introduit dans le fruit , la Syrie pouvant voler en éclat , l’OTAN réclamait même une zone tampon pour pouvoir mieux bombarder les forces syriennes

25/09/2020 15:06 par Manant

J’éprouve comme un malaise chaque fois que, dans la sphère progressiste, je constate une régression dans l’approche analytique des situations. A une lecture marxiste basée sur la lutte des classes et sur le matérialisme dialectique, on retombe dans une grille de lecture bien arpentée par les orientalistes français, basée sur l’ethnie ou la religion. Bref : l’identité. C’est ainsi que le colonialisme a dressé les juifs contre les Arabes en Algérie, justifié la colonisation de la Palestine et que les étasuniens ont envisagé le remodelage du Grand Moyen Orient en restaurant les "frontières ethniques" (Ralph Peter, dans le magasine US Army, en 2006). L’auteur tait particulièrement le fait que la profonde division des Kurdes aujourd’hui oppose les féodaux (Les Barzani) aux marxistes du PKK. Ce qui n’empêche pas ces derniers de s’allier à l’envahisseur US et à piller avec lui le pétrole syrien, acheminé vers Israel et vers le Kurdistan irakien des… Barzani. Et cela en étant en Syrie depuis 1925 comme le rappelle Peuimporte. Quand on navique dans les eaux identitaires, on n’est pas à une contradiction près, et l’on peut tout justifier… au nom de l’identité.
Passons sur l’expression "régime de Damas", indigne de figurer dans les colonnes du Grand Soir, seul média a répercuter régulièrement la voix officielle syrienne, à travers certaines interventions du représentant permanent de la Syrie à L’ONU, M. Jaafari.

26/09/2020 21:49 par Feufollet

C’est vrai. le régime de Damas, cette évocation m’a échappée
Parle-t-on du régime de Paris ? ou du régime de Berlin ?
Pourtant je connaissait déjà cet équivoque du langage de la communication du système
En ce qui concerne la Rajova, qui est devenue une référence des libertaires de gauches
Par défaut d’en savoir mieux apprécier la situation
Je me méfie d’un piège à bobos de gauche occidentaux, comme on en a vu d’autres
A part mon scepticisme de mise dans les beaux projets des sorosiens
Que sait nous proposer le soft power globaliste ?
Il ne me reste que le recul des faits pour essayer de juger
Et pour ça, il faut trouver des sources d’informations alternatives
Le Grand Soir est pour ça et pour moi important

29/09/2020 20:54 par Danael

Même malaise et refus que vous, Manant, de souscrire à une principe ethnique du droit. Ce qui me dérange profondément chez les nôtres c’est leur double discours : à nous la revendication d’une république socialiste indivisible ( non basée sur la religion ou l’ethnie) mais pour les autres , on pourra admettre éventuellement de soutenir un mouvement ethnique parce qu’il est à gauche et contre Assad. Pour moi c’est encore un réflexe de type colonial . Serge et Peuimporte soulignent bien qu’historiquement les faits contredisent cette ambition kurde en Syrie. Depuis le début je trouvais contradictoire que cette fraction communiste kurde se revendique aussi d’un droit ethnique qui va franchement à l’encontre d’un principe communiste basé essentiellement sur une réalité et des revendications de classe . Pas étonnant que cette fraction kurde ait fait des alliances douteuses pour ne pas dire scandaleuses avec l’ennemi pour renforcer son pouvoir dans la région.

29/09/2020 20:56 par François de Marseille

Cette article, à 1 (et 1 seul) mérite : celui d’avoir appelé quelques commentaire très pertinents et instructifs. Merci à leurs auteurs.
Bien m’en a pris de les lire parce que cette dévotion médiatique autour des problèmes kurdes ( et aussi ouïghour, tibétain, ... ) sent aussi mauvais que les autres.

30/09/2020 09:25 par Assimbonanga

On peut gloser sur l’ethnicisme kurde... C’est pas comme si c’était pas une question de vie ou de mort pour eux. Glosons !

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