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Les élections italiennes et la « gauche de la gauche »

Comme nous l’avons souligné [1], SEL, une formation issue de Refondation Communiste à la suite de la désastreuse expérience de soutien au gouvernement Prodi entre 2006 et 2008, a fait partie de la coalition menée par Bersani. En échange de quelques postes à la Chambre et au Sénat, Nichi Vendola a donc agi en caution de gauche du PD austéritaire, au moment même où, dans les couloirs, les négociations avec la coalition de Monti allaient bon train.

Le discours de Vendola, dont on connaît ici aussi la petite musique, consistait à dire que plus on allait renforcer le poids de SEL au sein de la coalition de centre-gauche, plus on faisait contre-poids à Monti. Comme SEL s’était engagé à respecter à la lettre l’ensemble des engagements économiques et financiers pris par le Professore pour 2013, il ne s’agissait donc que de pure hypocrisie.

Ancien modèle, pour certains, de « nouveau parti de gauche radicale large » au cours des années 1990 et 2000, Refondation Communiste, en crise profonde depuis sa participation au gouvernement Prodi, avait choisi d’intégrer une coalition « de la société civile » hétéroclite alliant les Verts, les Communistes Italiens, l’Italie des Valeurs de Di Pietro et surtout des juges et magistrats « de gauche » comme Luigi de Magistris, maire de Naples, ou Antonio Ingroia, tête de liste de la coalition Révolution Citoyenne (« Rivoluzione civile »). Défendant un programme axé sur la défense de la moralité en politique et l’anti-corruption, avec quelques touches réformiste de gauche, Révolution Citoyenne a été perpétuellement à la remorque du PD. Ingroia a même reproché à Bersani, au soir des élections de « lui avoir fermé la porte au nez, sans quoi "ils’ auraient gagné ». Résultat, donc, d’une politique parfaitement illisible et d’une alliance politique recyclant anciens néolibéraux comme Di Pietro et ancien ministre des « affaires sociales » sous Prodi comme Paolo Ferrero, Rivoluzione Civile et Refondation Communiste n’ont pas pu atteindre leur objectif fondamental, à même de garantir leur survie politique, à savoir dépasser le seuil minimal de voix permettant de rentrer au Parlement dont RC et les Communistes italiens (PdCI) étaient absents depuis 2008.

Quoique SEL sauve les meubles en retrouvant quelques sièges au Parlement, tant la formation de Vendola que Refondation Communistes ont fait, au final, un score piteux. C’est le prix que SEL et RC paient pour avoir soutenu par intermittence, pendant plus de quinze ans, les pires politiques néolibérales sous les différents gouvernements de centre-gauche, en 1996 notamment, puis entre 2006 et 2008, et pour avoir joué, lorsque c’était nécessaire, les pompiers sociaux

A l’extrême gauche, le spectre politique italien est traversé par de multiples groupes et mouvements locaux, et surtout par les différentes tendances et organisations du syndicalisme de base, présent souvent dans les luttes comme dans le cas du SiCobas, qui est à la tête des luttes récentes à Ikea et sur la SdA. Cette extrême gauche politico-syndicale oscille cependant généralement entre l’abstentionnisme stratégique et le soutien à des listes de gauche réformiste plus ou moins radicales, notamment au niveau local.

Pour ce qui est de l’extrême gauche se revendiquant du trotskysme, Sinistra Critica, lié au Comité International (exSU) et au NPA en France, a choisi de ne pas intégrer Rivoluzione Civile au dernier moment, non pas parce qu’il s’agissait d’une coalition peuplée de juges, de flics et de bureaucrates recyclés sous couvert de « société civile », mais en raison notamment de la présence « des partis politiques ». Au lendemain des élections, Sinistra Critica ne craignait pas de faire un nouveau virage à 180% en qualifiant Grillo et son M5S de « réponse, générique, certes, mais radicale, contre la crise, l’austérité et une politique de continuité avec les vingt dernières années, avec la "caste’ [en omettant de dire que, si l’on adhère à la logique populiste de Grillo que semble reprendre SC, en ayant fait partie du groupe dirigeant de RC pendant de nombreuses années et après avoir soutenu pendant de longs mois, au Sénat, le second gouvernement Prodi, ou encore en ayant occupé le poste de vice-président de la province de Rome, dans le cas de Nando Simeone, Sinistra Critica en fait un peu partie, de la "caste’ en question] ». (…) Nous faisons face à la fin, politique et idéologique, du vieux mouvement ouvrier, poursuit SC de façon péremptoire. (…) Le chemin de la reconstruction demande à ce que l’on fasse des expériences intelligentes, audacieuses, courageuses [à l’image du soutien, de par le passé, au gouvernement Prodi, exprimé à la Chambre et au Sénat par les audacieux parlementaires « trotskystes » de SC Salvatore Cannavò et Franco Turigliato ?] » [2]. Le mouvementisme intrinsèque de Sinistra Critica lui fait redonner un coup de barre, en pleine marée populiste, cette fois-ci.

Pour ce qui est du Parti Communiste des Travailleurs (PCL), se présentant de façon indépendante et sur un programme de classe, il a perdu la moitié des voix réalisées en 2008 (208.000 pour la Chambre contre 89.000 en 2013), alors que son activité ces derniers mois avait été quasi exclusivement tournée vers la préparation de cette échéance électorale.

27/02/13

C.T.

Source : http://www.ccr4.org/Les-elections-italiennes-et-la-gauche-de-la-gauche


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