Pour les néo-colonisateurs disciples de Daoud, soutenir un Algérienne martyrisée c’est soutenir le "régime" d’Alger.

Kamel Daoud a écrit a livre "Pharaon" où les islamistes sont de gentils garçons... Oublié ce temps. Après ce forfait il a fait honteusement propspérer la fake news des viols de Cologne. Il déteste l'islam, les arabes et les palestiniens. Voilà un maghrében rêvé pour les français nostalgiques ou honteux : un messager né en Afrique du Nord peut dire ce qu'ils n'osent exprimer. Daoud est leur porte mensonges.

Subtile ironie de l’histoire. Voilà donc que Maître William Bourdon se voit à son tour accusé de participer à un « complot » pro-régime algérien, et donc d’en être l’instrument, volontairement ou à son corps défendant. C’est là du moins la défense de Kamel Daoud et de son éditeur Gallimard, telle que la rapporte ces jours-ci la presse française (Le Monde et Libération notamment) dans le scandale de l’affaire Saada Arbane.

Une première audience a eu lieu mercredi 7 mai, à Paris, suite au dépôt de plainte de cette femme, défendue par Maîtres Lily Ravon et William Bourdon. Ces derniers accusent Kamel Daoud et l’éditeur Gallimard, « d’avoir pillé l’histoire » (selon l’expression du journal Le Monde) de Saada pour construire le roman Houris.

Il a fallu six mois pour que la presse française commence à évoquer cette affaire que nous avons signalé en novembre dernier. Plus que de pillage, il s’agit en fait d’un viol collectif, violation du secret médical et de la vie privée, un crime encore plus odieux qu’il a pour proie une miraculée, une rescapée de la barbarie terroriste qui a sévit en Algérie, et qu’il se déroule quelques temps après que ses protecteurs (ses parents adoptifs, kafâla), Zahia Mentouri et Tayeb Chentouf, ne décèdent.

Entre temps, il a fallu aussi surtout le travail et l’opiniâtreté de Judith Bouilloc, Jacques-Marie Bourget – également transformés en relais du « régime algérien » –, du journaliste Faris Lounis, et de quelques personnes honnêtes pour tenter de rompre le silence honteux sur ce sujet ; et enfin la plainte et le travail des avocats Lily Ravon et William Bourdon pour que la presse française daigne mettre un peu de côté son mépris de l’Algérie pour se pencher, l’air de rien et avec quelques pincements, sur le fond de cette histoire. Que se serait-il passé sans le dépôt de plainte de ces célèbres avocats français ?
Après six mois de déni, l’affaire Saada Arbane semble donc timidement commencer, du moins en France. Car, en Algérie, la chose est prise au sérieux depuis que la victime s’est manifestée auprès de la télévision (One TV) et de la justice (Saada Arbane est défendue en Algérie par Maitre Fatima Benbraham).

Si nous prenons le temps de revenir sur cette affaire, c’est aussi parce qu’elle peut être pensée comme une illustration de la relation entre la France et l’Algérie. C’est une histoire qui en comporte tous les ingrédients : la violation, la falsification de l’histoire, le déni, le mépris et l’inversion de la charge accusatoire.

Au fondement de l’histoire de Houris, comme de la relation franco-algérienne, il y a le crime : la violation du secret médical et de la vie privée d’un côté et le viol d’un pays et d’un peuple, de l’autre. Ne parle-t-on pas de pénétration coloniale dans les livres d’histoire ?
Mais le viol colonial, tout comme le viol, s’accompagne d’une falsification de l’histoire. La parole de l’agresseur prime sur celle de la victime ; il faut éluder ou minimiser la réalité, omettre les vérités sur le crime perpétré, inverser les rôles et faire peser la suspicion sur la victime. Il faut contrôler le narratif, quitte à falsifier les faits. Il faut en somme gagner la bataille idéologique.

Comme nous l’expliquions dans une série de textes parus dans Le Soir d’Algérie en 2022 : l’Algérie n’est pas, en France, un terrain discursif neutre. La colonisation française n’a pas été qu’une entreprise humaine, matérielle, économique. Elle a constitué aussi, et peut être avant tout, un affrontement idéologique, qui a encore ses effets et se prolonge parfois, d’une autre manière, de nos jours.

Dans cet affrontement idéologique, les « contrebandiers de l’histoire » (formule de l’écrivain Rachid Boudjedra) – comme Kamel Daoud et bien d’autres – sont des alliés de poids pour la doxa néocoloniale française. Adoubés par le gotha français, portés aux nues, ils servent, en tant qu’autochtones, de cautions morales et donnent du crédit au récit néocolonial. Ils sont, à leurs manières, les nouvelles « courroies de transmission » du (néo)colonialisme, pour reprendre les mots de Mohamed Lakhdar Hamina.

Adoubés, portés aux nues, ils sont in fine défendus, protégés par toute une classe politico-médiatique qui n’a que faire de la parole des premiers concernés. Et, c’est ainsi qu’une victime du terrorisme, dépossédée de son histoire, se voit transformée, ainsi que ses avocats, en simples instruments du « régime algérien ». Et comble de l’histoire, cette accusation est le fait de ceux-là même qui ont abusé d’elle et qui l’ont donc considéré comme un simple objet – Kamel Daoud, sa seconde épouse (psychiatre) et son éditeur.

Vient ensuite l’inversion de la charge accusatoire. Saada Arbane réclame vérité et justice. Comme l’Algérie exige vérité et reconnaissance des torts de la part de la France pour tous les crimes coloniaux perpétrés. Par le même procédé d’inversion, Kamel Daoud, sa seconde épouse et son éditeur se présentent comme victimes d’un complot. Et la France, comme otage d’une « rente mémorielle ». Elle serait même agressée, humiliée par l’Algérie, selon les termes de quelques responsables politiques et de certains médias.

À vrai dire, cette crapulerie n’est guère étonnante. Cette forfaiture a lieu non seulement dans l’ex-puissance coloniale où règne un climat algérophobe nauséabond, et, concomitamment, un lourd refus de reconnaitre les crimes coloniaux d’hier et ceux d’aujourd’hui (Palestine, Sahara Occidental, Kanaky-Nouvelle Calédonie). Mais aussi dans un pays, la France métropolitaine, où des Algériens ont été tués à la pelle par la police, l’extrême droite ou les deux – 14 juillet 1953, 17 octobre 1961, attentat du consulat de Marseille en 1973, Malik Oussekine, Zineb Redouane, Nahel Marzouk, Amar Slimani, Djamel Bendjaballah, etc. – sans qu’une seule fois justice ne soit rendue.

Il faut donc, à coup de Kamel Daoud et d’autres, contrôler le récit sur l’Algérie. Quant aux Algériens de France qui manifesteraient un peu de sympathie pour le « régime algérien », ils sont vite rappelés à l’ordre. Comme a pu l’être par exemple l’Algérien à la fois le plus populaire et le plus discret de France, en décembre 2006. « Zidane Boutefliké » titrait alors Libération, sous la plume de la journaliste José Garçon (12 décembre 2006) – un autre chantre du « qui-tue-qui » – pour dénoncer la réception de Zinedine Zidane et de ses parents par le président algérien de l’époque, lors de sa visite en Algérie.

Mais il faudrait maintenant aller plus loin et se poser quelques questions. Que nous dit l’affaire Kamel Daoud/Saada Arbane de la manière dont les paroles des premiers concernés sont dominées, confisquées, mises sous cloche ? Qui, en France, écoute vraiment les Algériennes et Algériens ?
Qui, en France, écoute vraiment les journalistes, intellectuels, chercheurs, universitaires en poste en Algérie – et non les seuls avatars de Kamel Daoud, Boualem Sansal et autres Mohamed Sifaoui – sur les sujets qui les concernent directement : notamment la colonisation, la guerre de libération nationale, la décennie noire (waqt al irhab, la période du terrorisme selon l’expression locale), la thèse du « qui-tue-qui », le hirak, etc. ?

Qui s’affranchit des pesanteurs de cette relation coloniale pour écouter sincèrement, sans préjugé, ni piège, ni manipulation, les Algériennes et Algériens ?

Subtile ironie de l’histoire pour finir. Voilà donc que François Burgat – qui promouvait avec François Geze la thèse de la « sale guerre » du « régime algérien » et celle du « qui-tue-qui » – et qui se trouve actuellement victime, en France, d’une inquiétante répression judiciaire que nous condamnons, est interviewé par Radio Alger Chaine 3 (27 avril 2025), chaine publique du « régime algérien ». C’est une bonne chose qu’il soit écouté en Algérie. Peut-être pourrait-il, en retour, aussi entendre ses collègues restés dans ce pays ? Beaucoup de journalistes – comme ceux du Soir d’Algérie, un des quotidiens à avoir payé un lourd tribu pendant la décennie noire – et d’universitaires que nous connaissons personnellement sont vent debout contre les thèses promues par Francois Gèze, José Garçon et d’autres à propos de cette période...

Mais qui les écoute ?

Et tous n’ont pas la même vision romancée, manichéenne et franco-centrée sur le hirak qu’un Serge Quadruppani.

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(Yazid Hounet est chercheur au CNRS et attaché au Collège de France)

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