Mohammad Raad, Chef du bloc parlementaire du Hezbollah et figure historique du Hezbollah, réfute ici la propagande mondiale (qui ne cesse d’annoncer la chute imminente du Président syrien Bachar al-Assad) en lui opposant la vision stratégique du Hezbollah. Les forces loyalistes sont en position de force, et tous les indices assurent l’exceptionnelle solidité de l’Etat syrien, ainsi que la force et la détermination de son Armée (dont les exploits sont occultés) et de ses alliés. Mohammad Raad révèle pour la première fois le nombre de martyrs du Hezbollah en Syrie, inférieur à 500 (contre une centaine dans la guerre de 2006), et réaffirme le caractère incontournable de la personne de Bachar Al-Assad dans toute résolution du conflit.
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Journaliste : D’après vous, au Hezbollah, quand est-ce que cette guerre (en Syrie) pourra prendre fin ? Peut-elle encore durer des années ?
Mohammad Raad : Lorsque le gouvernement américain et l’Occident qui gravite dans son orbite, ainsi que les agents et hommes de main régionaux qui soutiennent les terroristes armés, se décideront à cesser le financement (des terroristes), à leur fermer les frontières et à les empêcher de s’introduire en Syrie, la crise en Syrie prendra fin, et l’opportunité d’un dialogue national se présentera, ce qui aurait dû être le cas dès le début de la crise (s’il n’y avait pas eu l’ingérence terroriste).
Journaliste : Est-ce que par agents régionaux, vous entendez l’Arabie Saoudite, la Turquie, le Qatar et Israël ?
Mohammad Raad : Je veux désigner tous ceux qui soutiennent les terroristes armés.
Journaliste : Il y a actuellement un point de vue selon lequel l’Arabie Saoudite, que vous accusez sans cesse, continue à les soutenir, alors qu’il y aurait des pays qui auraient commencé à faire machine arrière, comme le Qatar, par exemple, ou la Turquie qui au contraire ne cesse pas de soutenir très largement les terroristes.
Mohammad Raad : Afin d’éviter toute analyse erronée de la situation, parlons de manière générale et laissons les dénominations à ceux qui sont concernés.
Journaliste : Quelle est l’analyse générale ?
Mohammad Raad : En général, quiconque supporte, finance et facilite l’infiltration en Syrie aux terroristes afin de détruire et de saboter ce pays doit cesser immédiatement.
Journaliste : Il se peut donc que la guerre perdure encore des années ?
Mohammad Raad : Eh bien oui, la résolution militaire du conflit peut prendre du temps.
Journaliste :Aujourd’hui, après ce qui a été accompli dans le Qalamoun, cette grande victoire que vous nous avez présentée dans cette région difficile, et où les combats ont été âpres d’après ce que nous avons compris, mais les dernières nouvelles qui nous parviennent sont que Palmyre est tombée aujourd’hui, ainsi qu’ Al Mastouma hier, et d’autres régions, comme si cette guerre consiste en une victoire ici, puis une défaite là, puis une victoire, une défaite, etc. On dirait que personne ne peut remporter militairement de victoire décisive.
Mohammad Raad : Sami, à présent, les médias et la machine de propagande oeuvrent à diffuser des nouvelles hâtives et fausses au sujet d’événements mineurs qui n’ont aucune incidence à l’échelle stratégique ni sur le champ de bataille qui décidera de l’issue de cette guerre. Nous avons une évaluation militaire de la situation en Syrie : sur le terrain, la situation militaire est en faveur du régime et va dans le sens d’un raffermissement du contrôle du gouvernement sur les régions qu’il domine.
Journaliste : Comment pouvez-vous nous expliquer cela ? L’image qui circule actuellement dans les médias est que le gouvernement ne contrôle pas beaucoup de zones et il y a une nouvelle offensive des terroristes armés de l’Armée du Fatah et d’autres groupes, et l’opposition armée, ou les rebelles, takfiris ou terroristes, appelez-les comme vous voulez, réalisent des victoires significatives sur le terrain. Comment pouvez-vous voir, dans votre évaluation stratégique, que votre côté, avec votre allié le Président Bachar Al-Assad, commencé à réaliser des victoires sur le terrain ?
Mohammad Raad : Avant que je réponde à votre question, après toutes les expériences précédentes où la propagande a parlé de ces terroristes en exagérant leurs victoires, leurs nombres, et leurs situations, n’est-il pas temps pour l’opinion publique de réaliser que cette image gonflée de la situation des terroristes n’est pas vraie ?
Journaliste : Considérez ce qui s’est passé dans le Qalamoun, combien étaient les terroristes dans le Qalamoun ? Combien de temps ont-ils pu tenir leurs positions ? Certains vous objecteraient qu’ils sont aussi aux environs de Damas, dans le Jobar et dans des régions adjacentes à Damas, ainsi qu’à Alep...
Mohammad Raad : Il y a parfois des zones ou des positions auxquelles le régime tourne le dos parce qu’elles ne sont pas importantes, et qu’il peut les reprendre à n’importe quel moment. Mais il se concentre sur les régions stratégiques dont dépend la préservation de la structure de l’Etat. N’est-il-pas surprenant de l’aveu de tous les observateurs internationaux qu’après 4 ans et demi d’une telle guerre, des institutions de l’Etat puissent encore fonctionner ?
Journaliste : Excellent, c’est un point très important car l’Armée continue à combattre après plus de 4 ans, la diplomatie syrienne continue à fonctionner, et peut-être même plus activement qu’auparavant. Aujourd’hui même, j’ai vu de mes propres yeux qu’il y a le chef d’une mission diplomatique syrienne en Egypte, le Docteur Riadh Sneih, presque à un niveau d’ambassadeur, et il est de fait un ambassadeur car il était à l’étranger. Et de même, les institutions étatiques continuent à payer les salaires, que ce soit à l’Armée ou même les bourses des étudiants, et d’autres choses encore. Tout cela est très important et en dit beaucoup.
Mohammad Raad : Peux-tu imaginer un pays subissant une guerre aussi dévastatrice que celle qui frappe la Syrie, et dans lequel on trouverait encore des policiers qui mettent des contraventions aux automobilistes ?
Journaliste : C’est vrai, Hajj Mohammad Raad, mais par contre, on dit que sans le soutien financier direct d’un pays comme l’Iran, l’Etat syrien n’aurait peut-être pas pu fonctionner jusqu’à présent, en plus du soutien militaire, bien sûr.
Mohammad Raad : Cela n’indique pas un manquement de la Syrie et une incapacité à résister. A la base, pourquoi des alliances sont-elles forgées entre les pays et entre les forces ? N’est-ce pas pour pouvoir en bénéficier dans les temps de crise et de difficultés ?
Journaliste : On insiste beaucoup sur cela aujourd’hui, et on joue de cette impression, en prétendant que c’est l’Iran qui contrôle la Syrie, alors que les Syriens et l’Armée Syrienne continuent de combattre après plus de 4 ans. Expliquez-nous cela.
Mohammad Raad : Cela fait partie de la désinformation et des fausses images qui sont répandues.
Premièrement, ne croyez pas que quiconque puisse se battre pour quelqu’un d’autre sans raison ou contrepartie. Il peut y avoir des intérêts stratégiques ou tactiques communs qui imposent à deux parties de combattre sur un même terrain dans un même but. Mais chaque partie défend ses propres intérêts dans le cadre de cette lutte conjointe.
De même, l’Iran soutient la Syrie non pas seulement par gratitude envers la position syrienne vis-à-vis de la guerre de 8 ans imposée par Saddam Hussein à l’Iran, et qui a été financée par tous ceux qui participent aujourd’hui à la guerre contre la Syrie. L’Iran soutient la Syrie car ils font tous deux partie d’une alliance qui a fait un même choix stratégique.
Mais si la structure de l’Etat syrien n’était pas capable de préserver son choix de Résistance (contre US-Israël), tout le soutien que reçoit la Syrie ne suffirait pas à sauver la situation. Cessons de simplifier les choses. Aujourd’hui, on parle du fait que nous (le Hezbollah) aidons l’Armée Syrienne. Bien sûr que nous avons un rôle d’appoint de l’Armée Syrienne dans les régions où nous avons un intérêt à être présents, ...
Journaliste : Dans le Qalamoun.
Mohammad Raad : ...que ce soit pour défendre la Résistance ou pour préserver la position syrienne très bénéfique de soutien à la Résistance. Mais pourquoi l’héroïsme et la bravoure des soldats syriens sont-ils passés sous silence, alors que c’est elle qui tient les clés du combat sur le terrain et mène la lutte jusqu’à présent ?
Journaliste : Est-ce que vous combattez dans le nord (de la Syrie), Hajj Mohammad Raad ? A Alep par exemple, y a-t-il des combattants du Hezbollah ?
Mohammad Raad : Je ne peux pas parler des détails, mais je peux vous dire que partout où nous devons combattre, nous combattons.
Journaliste : Et c’est ce qu’a déclaré Hassan Nasrallah. Il a récemment déclaré que dans la bataille de Qalamoun, le Hezbollah avait perdu 13 martyrs. Peut-on connaître le nombre de martyrs du Hezbollah depuis le début de la guerre en Syrie ? Approximativement ? Il se dit que ce nombre a atteint le millier. Est-ce vrai ?
Mohammad Raad : Je ne crois pas qu’on en soit arrivé là, mais ce nombre s’approche des 500.
Journaliste : Environ 500 ?
Mohammad Raad : On approche des 500.
Journaliste : Moins, ou un peu plus ? Enfin, s’il s’approche des 500, cela veut dire moins... Est-ce que le gouvernement de Bachar Al-Assad est parvenu à se sauver de l’effondrement ? Peut-il encore tomber ? Car nous entendons actuellement, à nouveau, des propos selon lesquels il ne peut y avoir de solution avec la présence du Président Syrien, et même certaines factions armées, 13 factions, se sont récemment réunies en Turquie et ont à nouveau soulevé ce slogan, à savoir qu’on le fera tomber par la force, alors qu’il tient depuis 4 ans et qu’on entre dans la 5e année et qu’il est toujours là. Le régime de Bachar Al-Assad est-il sauvé ?
Mohammad Raad : Nous croyons fermement que toute résolution de la crise syrienne passe par la présence et la participation du Président Bachar Al-Assad.
Journaliste : Lui en personne ?
Mohammad Raad : Lui en personne.
Journaliste : Pouvez-vous nous expliquer, Hajj Mohammad Raad, pourquoi les alliés du Président Assad tels que l’Iran et le Hezbollah en premier lieu, peut-être aussi la Russie au même degré que vous, ou moins, je ne sais pas, sont-ils si attachés à la personne du Président Bachar Al-Assad. Car certains affirment que si Assad partait, la situation de la Syrie s’améliorerait. Est-ce que sa personne est la base incontournable en ce qui vous concerne ?
Mohammad Raad : Non, nous sommes attachés à lui mais ce n’est pas une question de personne. Il s’agit plutôt de la position et des choix pour lesquels cette personne est engagée. Tu pourrais me répondre qu’il pourrait y avoir d’autres personnes qui s’astreignent à maintenir cette position. Eh bien, s’il y avait d’autres personnes, et qu’il y avait aussi cette personne qui a défendu la Syrie à cause de son engagement en faveur de cette cause (la Résistance), pourquoi faudrait-il la remplacer ?
Journaliste : Il se dit que sa présence même à la tête de l’Etat syrien actuel est ce qui a maintenu, l’Etat en fin de compte, du fait de ses caractéristiques personnelles, sa grande maîtrise de soi, etc. J’entends surtout auprès de vous qu’il a beaucoup de sang-froid, que c’est un homme qui a survécu à nombre de ses alliés historiques, même au Liban...
Mohammad Raad : Cela prouve qu’il devrait être partie prenante de la résolution de la crise.
Journaliste : Mais ses ennemis à l’intérieur de la Syrie et à l’étranger le jugent également responsable de la situation que nous voyons maintenant. Je voudrais savoir si le Hezbollah et l’Iran (car la Russie ne s’exprime pas là-dessus) insistent pour que la personne de Bachar Al-Assad fasse partie de toute solution : aucune solution ne peut être trouvée sans inclure Bachar Al-Assad ?
Mohammad Raad : Premièrement, tant que le peuple syrien est attaché à Bachar Al-Assad, personne ne peut négliger cette opinion publique.
Journaliste : La moitié du peuple ? Plus de la moitié du peuple syrien soutient le Président Bachar Al-Assad ?
Mohammad Raad : Bien sûr !
Journaliste : Comment le savez-vous ? Comment peut-on le savoir ? Qui mesure l’opinion publique syrienne pour nous afin que nous puissions savoir qui est avec lui et qui ne l’est pas ?
Mohammad Raad : Premièrement, qui peut prétendre qu’il se trouve quiconque dans le monde qui accepterait de voir détruire son pays ? Ceux qui hésitaient au début de la crise syrienne se sont maintenant joints à ceux qui soutiennent le Président Assad, car ils se sont rendu compte que l’alternative est la destruction de la Syrie et la fin de sa position et de son statut, et sa transformation en un satellite de l’Occident soumis aux diktats d’Israël.
Journaliste : Donc selon vous, le Président Assad restera en place jusqu’au dernier jour de son mandat ?
Mohammad Raad : Et peut-être au-delà...
Samedi 6 juin 2015
Interview du 22 mai 2015 sur la chaîne libanaise Al-Mayadeen
Vidéo sous-titrée :
Source : https://www.youtube.com/watch?v=QVYFUQv7GeE
Traduction & sous-titres : http://www.sayed7asan.blogspot.fr