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Aux origines du malaise enseignant

Ce n’est un secret pour personne, la vocation de prof est aujourd’hui en péril. Les académies peinent à recruter, le niveau scolaire n’a jamais été aussi bas, les troubles du comportement et de l’apprentissage se généralisent chez nos élèves, bref le tableau n’est pas des plus enthousiasmants.

On entend souvent dire qu’il y a en France une crise de l’autorité, sans jamais pour autant en désigner les raisons profondes. Les néofascistes vous diront qu’il est temps de remettre tout le monde au pas, les dévots qu’il faut retrouver le chemin de la foi, et les escrocs que c’est là l’évolution normale de nos sociétés modernes.

Pour avoir exercé ces treize dernières années auprès de publics divers, des gamins des bidonvilles du Caire aux rejetons de la haute bourgeoisie parisienne, je dirais en substance que la mauvaise éducation — comme la bonne — n’a ni classe ni frontières : elle est universelle.

Par « mauvaise éducation » j’entends cette tendance manifeste à l’irrespect, y compris de la parole adulte et de la fonction enseignante, héritage d’une politique parentale défaillante — ou volontairement malhonnête — qui fait du prof un auxiliaire éducatif au service de l’enfant-roi, méprisant ainsi sa mission initiale qu’est l’instruction. Car le temps passé à faire la discipline est du temps pris sur la transmission du savoir.

C’est pourquoi, au lieu de parler de crise de l’autorité, je parlerais d’abord de crise du couple et de la famille. Comment un enfant peut-il se construire sainement avec pour référents des géniteurs démissionnaires, tantôt négligents tantôt étouffants, soumis à la moindre injonction de leurs maîtres capitalistes, qui ne s’aiment et ne communiquent plus qu’au moyen de smartphones ?

La religion du consumérisme, à travers le désintérêt pour la collectivité et l’absence de vision, a saboté le droit à l’éducation. Partisans de l’effort minimum et de l’immédiateté, nos élèves souffrent en réalité de ne pas avoir de projet viable ni de modèles sûrs. Plus profonde encore que les autres, c’est là la crise de l’engagement.

Le phénomène des « dys » (dyslexie, dyspraxie...) n’a rien de nouveau, mais c’est aujourd’hui la proportion de « cas » qui inquiète, si bien que l’on a désormais la triste impression de faire cours à des classes de handicapés légers, incultes et insolents — que l’épisode du Covid et la virtualisation forcée de nos modes de vie n’auront pas aidés.

On ne peut véritablement en vouloir à ces jeunes — premières victimes de l’insidieuse révolution numérique —, que la société de consommation a rendus infirmes et arrogants, les amputant de leur curiosité naturelle et substituant à l’envie d’apprendre un individualisme décomplexé. Car devant le manque de perspective, c’est avant tout de la pitié qu’ils inspirent.

En revanche on peut déplorer la lâcheté de leurs parents, qui se déchargent toujours plus de leurs responsabilités sur des enseignants moqués et sous-payés, et dont la patience a des limites ! Pas étonnant que beaucoup désertent la fonction, dépriment, craquent : il faut avoir les nerfs solides pour ne pas distribuer des paires de claques au quotidien et faire preuve, en toutes circonstances, de pédagogie. Mais où sont les pères ? Ceux qui corrigent, montrent et forment ?

Si les beaux yeux d’une collègue me persuadaient à chaque fois, en dernier recours, de continuer, j’ai récemment pris la décision de ne plus enseigner. Il est épuisant, à terme, de rivaliser contre un système basé sur le mensonge. Sans doute suis-je trop exigeant, désespéré par le niveau de langue et de réflexion, à l’oral comme à l’écrit, d’élèves en qui je ne parviens à percevoir l’étincelle de l’espoir.

Par ailleurs je ne souhaite pas m’engager dans l’enseignement privé, car en tant qu’enfant de l’école publique, je crois sincèrement à l’égalité des chances. Et j’ai pu constater à l’étranger les ravages sociaux et humains d’un système ouvertement discriminatoire qui pratique la préférence de classe, méprisant le principe même de mérite au travail.

Nous le savons, celui qui s’agite le plus s’avère en général être le moins compétent d’entre tous. Et je pense à cette minorité d’élèves volontaires, qui secrètement résistent, de leur esprit et d’une intelligence pudique, pour ne pas finir écrasés sous la botte idéologique de l’institution ou la basket ignorante de leurs camarades.

Car c’est précisément de ces jeunes-là que nous avons besoin pour penser et construire le monde de demain. Mais je ne m’inquiète pas pour eux : qu’ils soient riches, pauvres, du Nord ou du Sud, leur « bonne éducation » — c’est-à-dire leur éducation à l’indépendance — les sauvera toujours de la folie des hommes.

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