Des sacrifices ? Les Grecs ont déjà beaucoup donné

Et la Grèce a dit "non"

Quelques réflexions sur la "crise" grecque. J’ai entendu des absurdités du type : "les français comprennent maintenant et s’opposent à ce "référendum" ; il y a plus pauvre que les grecs en Europe, comme les roumains, les slovaques ... ; et ce n’est pas à eux, ni à nous de payer pour ces grecs qui ne font aucun effort".

Je rêve !!!

Un peu d’histoire récente est nécessaire pour relativiser tout cela.

La crise commence avec Reagan et Thatcher ; ils imposent leur modèle libéral, et le font valider par l’Union Européenne, dans le cadre d’une division internationale du travail où il s’agit de profiter au maximum de l’exploitation des forces de travail du Tiers Monde. Avec comme exemple type, les industries de main d’œuvre, qui permettent d’obtenir à bas prix des produits textiles/habillement, au départ ; puis avec l’entrée dans l’OMC de la Chine, de généraliser à l’ensemble de l’industrie ce modèle, avec les conséquences que l’on connaît en Europe, mais également aux EU : délocalisations, chômage, désindustrialisation ... et économie de plus en plus financière.

Ceci tombe très bien pour les EU et le Royaume-Uni, qui se sont spécialisés sur ces "créneaux" de la finance : en d’autres termes, des activités nuisibles, qui ne servent à rien, sinon à spéculer comme les populations américaine et européenne ont pu le constater dans diverses crises (2008, 2011, aujourd’hui ...).

Ce modèle est difficilement validé en Europe, et notamment en France, où le référendum s’achève par un "non" aux modifications des traités européens allant dans le sens d’une libéralisation débridée, sans volet social ... Les gouvernements français (successifs - UMP/LR et PS) se sont assis sur le vote des français, et ont validé les mécanismes de la monnaie unique sans comprendre qu’une monnaie implique tout un ensemble de conditions économiques, politiques, fiscales, sociales etc .... Puisque Reagan et Thatcher vous assuraient que le marché allait suppléer à toutes les régulations étatiques alors en place en Europe, et notamment les régulations permettant de sauvegarder le modèle social européen au regard du modèle anglo-saxon.

Ces incohérences se traduisent par un double constat :

- Dans une économie ouverte (au libre échange, à la concurrence sans autre règle que le marché ... Mais c’est quoi, le marché ?), la tendance "naturelle" est l’ajustement vers le bas, pour rester compétitif. Schröder l’a immédiatement compris en Allemagne, économie dépendant fortement des exportations mondiales, et le "social-démocrate" a pris toute une série de mesures visant à restaurer la "compétitivité" de l’économie allemande, avec la baisse des salaires, la remise en cause des acquis sociaux ... En d’autres termes, du Thatcher bis, relayé bientôt par Merkel, et accentué. Non mais ! Ce ne sont quand même pas les salariés qui vont faire la loi dans la question du partage des salaires et des profits. Car sur le fond, il s’agit bien d’une remise en cause du partage des richesses entre le capital et le travail, qui se traduit très prosaïquement par la montée en puissance des grandes fortunes partout dans le monde. Parmi les plus riches du monde, des gens comme le patron d’Inditex-Zara, qui a fait fortune dans l’habillement, et exploité au maximum l’ensemble de la main d’œuvre textile mondiale. Mais on trouve également des pays européens qui se sont fait leur "trou", en spécialisant leurs économies sur la fiscalité différentielle, comme l’Irlande, la Belgique, le Luxembourg (n’est-ce pas, Mr Jean-Claude Juncker) ... Des micro états vivant de la rente financière !!! Et qui veulent donner des leçons de démocratie ... La France a su résister longtemps, lorsque la droite était au pouvoir, et que la gauche contestait ce pouvoir. Cette gauche politicienne (le PS) qui a utilisé à fond les problèmes économiques que rencontraient tous les jours les français pour se faire élire. Et oublier (comme le résultat du référendum) immédiatement leur programme ! Hollande est le président (il ne mérite pas une majuscule) le plus "traître" à ses engagements électoraux. C’est le petit factotum de Merkel et des américains. Rien de bien glorieux. Et qui se sert (comme les autres gouvernements libéraux) des turpitudes ayant mené aux conflits "pseudo" de civilisation, comme dirait le sous-factotum Valls, pour détourner l’attention des vrais problèmes que rencontrent de plus en plus les français : chômage, perte de pouvoir d’achat, lois liberticides ...

- Toute l’Union Européenne veut mettre au pas les salariés à la sauce libérale, en appliquant partout les mêmes "réformes" qui doivent nous sortir de l’ornière économique dans laquelle les gouvernements nous ont mis. Il suffit de voir partout les mêmes recettes appliquées pour

revenir aux bonnes dispositions "libérales". Quelles sont en effet les mesures jugées "bonnes" par l’Union Européenne pour figurer parmi les bons élèves : allongement de l’âge de la retraite (68 ans en Irlande, réforme en Italie, 67 ans en Espagne, en cours en France – voir les mesures Macro-Rebsamen) ; attaques sur le SMIC (modification des règles de calcul du salaire minimum en Irlande, liberté de baisser les salaires en Espagne, en cours en France avec Macron et Rebsamen) ; attaques sur les règles des licenciements (assouplissement du droit du licenciement en Irlande, mise en place du contrat de travail unique en Italie, allégement des contraintes de licenciement en Espagne et au Portugal, plafonnement des indemnités en cas de licenciement abusif en France ...) ; attaques sur les acquis des travailleurs (baisse des indemnité de chômage en Irlande, réformes des retraites en Italie, suppression de certains jours de congés payés/fériés au Portugal, assouplissement du code du travail en Espagne, lois Macron et Rebsamen en France ...) ; "libéralisation" des professions protégées (en Italie, en France, en Espagne et au Portugal) ; TVA sociale (Irlande, France – un peu, Italie, Portugal) ; baisse des coûts de la protection sociale pour les firmes (CICE en France), coupes drastiques dans les dépenses de l’Etat (non remplacement de fonctionnaires partant à la retraite ... ; dérégulation de secteurs entiers de l’économie, au profit des firmes) ... Incroyable mais vrai. Toutes ces mesures ont une seule fonction : donner le pouvoir aux firmes par rapport aux salariés, et remettre en cause dans toute l’Union Européenne les acquis sociaux issus des luttes de la fin du XIXème siècle et du XXème siècle. Aux oubliettes les maîtres des forges qui ont conduit aux guerres mondiales, à l’industrie chimique qui a été "stimulée" par ces conflits ... aux oubliettes les guerres locales qui permettent de vendre des "rafales", de promouvoir les industries liées aux TIC (drones armés, espionnage, atteintes aux libertés individuelles ... ). Vive le modèle étatique américain de l’après 11 septembre ... Beau modèle de "démocratie" ...

Ces sacrifices, les grecs ont déjà beaucoup donné (comme les autres peuples européens), avec une baisse des revenus, des retraites, une augmentation du chômage ... Et l’Union Européenne (avec le FMI) en demande encore : le peuple grec n’est pas encore assez à genoux ? Il faut faire un dernier exemple. Pauvres français – c’est vous les prochains : vous avez déjà des baisses de revenus, du chômage, etc ... Tout cela n’est pas suffisant : d’ailleurs, votre dette atteint ce dernier mois pratiquement 100% du PIB. Vive les résultats du tandem Hollande-Valls. Des nuls en économie ? Mais non ; ils font la politique que le patronat veut appliquer partout dans le monde, et dans l’Europe qui avait réussi à se préserver jusque la dernière crise (2008, amenée par les spéculations américano-britanniques). Et vous voulez ça ?

J’espère que les grecs vont résister, et donner une leçon de démocratie à tous nos journaleux à la petite semaine qui glosent à longueur "d’éditos" sur les autres pauvres européens (vous savez, mon bon monsieur, les slovaques sont bien plus pauvres que les grecs ... et vous voulez que les slovaques paient pour les grecs !!!). Bonne manière de poser la mauvaise question. L’idéologie patronale dans tous ses excès. Attention quand les exploités vont comprendre !!!

J’espère que ce petit billet va y contribuer.

 http://richessem.eklablog.com/art-185-et-la-grece-a-dit-non-a118064548

COMMENTAIRES  

03/07/2015 10:57 par D. Vanhove

Dire que la Grèce a dit "non", c’est peut être aller un peu vite, vu que le "oui" semble remonter et dépasser maintenant le "non" dans les derniers sondages... hélas !
Faut dire que ceux du camp néolibéral, ceux-là mêmes qui ont plongé le pays dans un tel état, ont les moyens (et ils ne s’en privent pas, à travers la mainmise qu’ils ont sur les grands médias) pour faire paniquer la population en cas du "non", et ils utilisent cette bonne vieille méthode qui consiste à entretenir la terreur... je suppose que vous me suivez pour d’autres exemples où la terreur est bien entretenue, juste de quoi détourner les citoyens des vrais problèmes, quand ils s’en approchent d’un peu trop près...

03/07/2015 11:42 par reymans

Ce billet parvient bien à me faire comprendre, non seulement je vous en remercie grandement à titre personnel moi qui suis une bille en économie en général, mais comptez sur moi pour faire circuler le plus largement possible, avec mes petits moyens
Cordialement

03/07/2015 13:49 par jean

@ l’auteur.
Merci pour cette analyse que je partage sauf pour votre dernière phrase lorsque vous dites attention quand ils vont comprendre.
Pour ma part j’ai le sentiment qu’ils ne veulent pas comprendre ce qui est bien plus pathétique encore. Ils préfèrent dormir, manger boire travailler et se sentir en sécurité dans une Europe qui les protège.

même si ils se réveillent un jour, alors il sera sans doute trop tard. Mais j’espère me tromper et penser que nous, tous ensemble, allons dire stop , cela suffit.

Merci encore pour votre analyse

03/07/2015 14:57 par reymans

Ah, merci Mr Vanhove je croyais l’affaire pliée en fait, attendu que je ne suis plus aucun média, ca a tendance à faire tourner mon lait ces derniers temps...
Wait and see donc, mais avec tous les didis croisés, pour les Grecs comme pour le reste du monde qq part...

04/07/2015 01:54 par alain harrison

Bonjour.

Quel mensonge.

« « Puisque Reagan et Thatcher vous assuraient que le marché allait suppléer à toutes les régulations étatiques alors en place en Europe, et notamment les régulations permettant de sauvegarder le modèle social européen au regard du modèle anglo-saxon. » »

Le marché est tronqué depuis le départ, les multinationales n’ont fait que conforter leur position dominante.
Dans les années 70, 80, les monopoles ont été même contesté par des lois (si je ne me trompe).
Il y avait la monté en puissance du new manadgment, aujourd’hui à valeur ajouté : austérité, fonds vautour, guerre humanitaire.......Le manadgment socio-culturel-économique pour les ressources, comment voler légalement.
Mais, c’est comme les annonces, que les paradis fiscaux étaient en voie de disparaître....Kedal.
Cette annonce, par un sbire, avait été faite sur l’excellente émission RDI économie, une émission qui est bien rodée dans les demis-vérités, comme le reste des médiats un temps soi peu encore quelques -uns encore plus ou moins in-tègres, demi intègre, disons un équilibrage, un équilibre entre le faux et le vrai selon qui parle et surtout selon ce qui n’est pas dit...bla nla bla...si vous me suivez sur la libre information occidentale.

Les médiats sont démocratiques, ils appartiennent à des monopoles de riches qui ont des actions dans l’armement.
Les US privatisent progressivement le militaire.
Des guerres sous-traitées.

Le néo-libéralisme a plus d’un tour dans son sac.
Facile, un coup que la population, la classe moyenne est bien habituée a son rythme consumérisme (passé trois mois dans le sud,..........) et que la peur reste comme le feu qui couve, juste une sensibilité, sufisante pour bien les attacher.
J’appelle ça du conditionnement.
Et bien le néo-libéralisme peut avancer ses pièces sans complexe.
Allons-nous nous faire dire quoi mettre, comme des enfants, ou bien allons-nous devenir adulte et décider ce qui revient naturellement à l’individu et à la communauté.
Il va faloir redéfinir la place de l’autorité qui prend de biens mauvais plis.
Je conseille, pour se réveiller, de lire le chapitre 1 et 9 du livre de Jean-Marie Abgrall, tous manipulés tous manipulateurs.

04/07/2015 13:17 par benzekri

Extrait de la déclaration de la Présidente du Parlement Grec pour celles et ceux qui refusent la propagande et la désinformation des médias aux ordres :

Et maintenant, puisqu’ils ont échoué dans cette tentative, ils font tout ce qu’ils peuvent pour en modifier le résultat, rendre floue et dénaturer la question très claire, en adressant au peuple un nouveau chantage :

Que soi-disant, si les citoyens disent « non », nous devrons quitter l’Union Européenne ou la zone euro ;
Que s’ils disent « non », il n’y aura aucune nouvelle négociation ;
Que s’ils disent « non », cela signifiera qu’ils « ne veulent pas d’aide ».

Certains – chefs d’État mais aussi représentants de la Commission et d’autres institutions et organismes – n’hésitent pas à s’immiscer grossièrement dans les affaires internes du pays et à suggérer au peuple ce qu’il doit voter au référendum, en modifiant la vraie question.

Ce qui est important c’est non seulement ce qu’ils disent, mais qui le dit.

Le disent les représentants des gouvernements qui se sont alliés aux gouvernements qui ont détruit le pays et ont fait des accords et échanges avec eux.

Le disent les représentants d’organisations internationales qui ont participé à des programmes catastrophiques qui ont décomposé la société et causé d’indicibles malheurs.

Le disent des dignitaires qui ont admis s’être trompés dans le cas de la Grèce, encore et encore.

Mais le disent aussi les représentants du système politique corrompu des anciens partis, de la corruption et des combines, ceux qui ont créé une dette illégale, odieuse et insoutenable et qui veulent la mettre sur le dos du peuple, de la jeunesse et des générations futures, sans rendre de comptes.

Le oui ne signifie pas oui à l’Europe.

Il signifie oui à l’ultimatum adressé par la Troïka au gouvernement grec.

Le oui signifie oui aux mémorandums, à la soumission et à la servitude.

• Oui à des diminutions supplémentaires des salaires et des retraites ;

• Oui au chômage et à la précarité de l’emploi ;

Il signifie oui à l’abandon de la souveraineté et de la démocratie, au bradage des biens publics, à de lourds impôts sans fin.

Il signifie aussi oui à la dégradation de la Grèce de pays membre à part égale de l’UE en pays paria et en colonie de la dette.

Le non signifie non aux tactiques et pratiques antidémocratiques

• Non aux chantages anti-européens et aux ultimatums ;

• Non aux blocages artificiels ;

• Non à l’asphyxie du peuple, avec les banques fermées ;

• Non à l’asservissement d’États-membres par d’autres États-membres ;

• Non à la soumission économique et politique.

Le gouvernement s’est redressé. Il n’a pas cédé, il n’a pas capitulé en trahissant la confiance des citoyens.

04/07/2015 20:52 par alain harrison

Bonjour M. Benzekri.

Votre compte rendu est claire.

Et, me fait penser que l’UE agit en Grèce, la destruction du tissu social et de
sa culture comme le fait l’EI au Moyen-Orient.

À qui le prochain.

Vive le peuple Islandais qui a compris.
Les peuples de l’UE n’auront que s’en prendre à eux-mêmes.
Moi, je ne vois pas de différence entre la fascisme et le financisme.

Les travailleurs et les citoyens qui trahissent la démocratie, crachent sur le futur de leurs enfants.
À moins que des sbires leur eut promis un avenir radieux pour leurs enfants à eux.
Mais selon la bible, il y a 144,000 élus.
Dans la réalité, c’est la classe moyenne, convertie à la prédation, qui a la trouille que leur soit enlever quelque miette.
Une classe moyenne qui goutte, parfois, à l’allégresse de la richesse, illusion du consumérisme à valeur ajoutée.
Voyages dans le SUD...........Un petit égocentrisme marche sur le même principe qu’un grand égocentrisme bien grand et gras.
Le tourisme à grande échelle a muté et fait parti des outils d’accaparement et de la corruption....
Maintenant des citoyens participent, pour se donner bonne conscience, ils engagent les pauvres de la place pour faire le ménage.
Mais qui sont ces promoteurs de bungallow de rêve ?

Penser globalement agir localement..Qu’est ça veut dire..ZZZZZZZ....... pour la pluspart.

04/07/2015 21:05 par alain harrison

Le consumérisme, endore à coup sûr.

Aux enfants, il devrait être interdit toute technologie, ce qui les rends aliéner à mon avis.
Qu’ils aillent courir dehors, qu’ils se socialisent, qu’ils apprennent par eux-mêmes...
Attention, la maturité artificielle a un prix à long terme.
Parfois je renconte des gens âgés dépourvus de toute réflexion autre que nombriiste.
Vous savez, les baby boomers, je fais parti de cette cohorte, et sa vote pour le néo-libéralisme, derrière leur masque de gagnant et qu’ils vont crever bientôt, très peu de sagesse, leurs intérêts avant tout et tous ceux qui suivent.
Au Québec ça vote à 90. 2 3 % pour le néo-libéralisme, soit PLQ et CAQ.
Le PQ, la seule différence est l’indépendance pour leur néo-libéralisme.

05/07/2015 09:45 par AF30

D’accord sur tout sauf sur l’affirmation selon laquelle Hollande serait le petit factotum de Merckel. D’ailleurs il n’est pas non plus un capitaine de pédalo ou je ne sais encore quel individu hésitant ou faible. Non, c’est un homme de droite qui applique la seule politique à laquelle il croit. C’est un individu qui n’a aucune hésitation ou trouble, qui n’a aucune empathie pour les autres. Son ’humour’ d’ailleurs n’est pas une forme de relativisme ou de réserve c’est tout simplement une totale indifférence aux autres. Sa politique le prouve. Il ira ainsi jusqu’au bout. Ses complices de même. Il n’y a rien à garder chez cet homme.

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