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L’espoir du papayer mâle

Le temps révèle tout : c’est un bavard qui parle sans être interrogé. "
Confucius

Dans la tradition Antillaise, le papayer mâle est symbole d’espoir vain – le papayer étant une plante dioïque dont le fruit est prisé comme aliment et médicament – certains prétendent que l’arbre mâle fructifierait aussi selon que l’on serait à son chevet quoi qu’il en coûte au veilleur. Cette même vanité se retrouve gravée dans le marbre de l’idéologie néolibérale. Depuis tantôt presque quarante années, et surtout depuis la honteuse trahison du sieur "Gorby" sans contrat écrit, nous avons une meute d’"experts", ces fous du Dieu Argent, qui veillent à nous inculquer la religion cette économie qui ne jure que par le refus de la dépense pour tous au nom de l’impératif enrichissement des "entreprises", qui seraient à leurs yeux les seules garantes de l’emploi pour tous quoiqu’il en coûte aux travailleurs.

Ainsi, serait-il normal que des milliards produits sur le sol national aillent ailleurs, de préférence en lieu sûr et sans domicile fisc, alors que l’on ferme le robinet des services publiques ? Bien-sûr, il parait que les services publiques coûtent trop chers et que les fonctionnaires seraient des fainéants... C’est une lapalissade n’est-ce-pas ? Et bien entendu, depuis plus de trois décennies que l’on défiscalise les "entrepreneurs", nous assistons à la création de millions d’emplois. Absolument ! Ce sont les chômeurs qui sont aussi des fainéants et qui refusent les emplois ubérisés qui leur sont offerts avec tant de générosité. Que faire donc de ces fainéants qui n’ont qu’une idée en tête : vivre dignement ? Quand on constate avec quelle indécence que l’on accepte l’idée pour d’anciens Présidents de se faire payer des sommes faramineuses pour hâbler devant un parterre de gens prétendument sérieux, le dernier en date est Barack Obama venu en France pour ... 400.000 Dollars la séance verbale ! Un individu qui s’est déjà enrichi au service des riches tout en ayant la responsabilité de guerres destructrices sous le couvert d’un prix Nobel de la Paix. Il y a tellement d’argent qui circulent que l’on préfère les dépenses ineptes et aristocratiques en lieu et place de l’intérêt général et c’est encore là tout le sens profond de cette idéologie néolibérale : La République En Marche... vers la Monarchie.

En fait et de nos jours, le néolibéralisme vit exactement le même phénomène qu’à vécu le soviétisme dans les années 1980 : le bilan ! Et nous sommes les témoins oculaires de cette déchéance qui, refusant de se regarder dans un miroir et de faire le mea culpa qu’il exigeait des communistes à l’époque, préfère s’inventer des ennemis ou accuser ses contradicteurs de "réticence au changement" si ce n’est de conspirationisme. Il y a fort longtemps que l’Humanité sait, par expérience, que se tromper jusqu’à aller droit dans le mur relève plus de la tyrannie que de la raison, mais la raison néolibérale est vraisemblablement une raison hors-sol à l’image du roi soleil. Ainsi, on étrangle l’un des meilleurs services publiques de santé au monde pour faire la démonstration que l’on a raison sur la question de la dépense qui devrait être maitrisée. L’intérêt général n’est pas la préoccupation de cette idéologie, c’est l’intérêt de certains particuliers, 1 % de la population, qui prime. Pour faire passer la pilule, on nous rétorque à tue-tête qu’il n’y a pas d’argent ou que nous dépenserions trop.

La situation sanitaire de toute la France est très critique parce que nous nous sommes laissé prendre à la théorie des économies nécessaires. Il faut rappeler que c’est la théorie keynésienne qui a sorti les Etats de l’après-guerre. L’économiste Keynes affirmait en effet, sans être marxiste mais ayant un certain bon sens, que l’investissement de l’Etat avait forcément des conséquences positives sur l’économie en ce que distribuant des salaires pour la consommation, le cycle était assuré. Les travailleurs pouvaient même épargner et contribuer aux côtés de l’Etat à l’investissement publique. Les libéraux, devenus néolibéraux, n’ont jamais avalé Keynes qu’ils considéraient comme un rejeton Marxiste.

Le cas de la Guadeloupe est d’école car nous sommes sur un archipel à risques divers (Volcanismes – séismes – cyclones – submersions) et pourtant le plan néolibéral doit s’appliquer à la lettre comme partout ailleurs. Pas de spécificités possibles, pas de réalités territoriales à l’horizon, le maitre-mot est la rigueur. L’incendie au CHU de la Guadeloupe est, d’un certain point de vue, pathétique en ce qu’il révèle l’engagement des fonctionnaires, et même des retraités venus à la rescousse, pour répondre à la vacuité administrative trop occupée à faire ses comptes. Ce personnel tant décrié en d’autres circonstances alors qu’il manque de moyens pour répondre aux exigences de la prise en charge des patients. Sans son engagement, la catastrophe était assurée, de même que sans l’accueil des autres sites sanitaires – Publiques et privés – et malgré les impréparations de l’ARS, il est claire qu’aucun redéploiement n’aurait était aussi efficient... On dit merci aux fonctionnaires et autres travailleurs qui n’ont pas démérité et de manière très autonomes.

Mais supposons que ce feu avait lieu en plein ouragan ou après un séisme ? Supposons que les maternités de deux des sites sanitaires d’accueil avaient été déjà fermé comme le veut le plan néolibéral ? Supposons que les bâtiments publiques (halle des sports) qui ont servi de base arrière en urgence n’avaient pas été là ? Supposons que le personnel (fonctionnaires) était vraiment les fainéants dont on nous abreuve sur les chaines à grandes écoutes pour nous convaincre de la nécessité de réduire les moyens ? Supposons plein de choses que refusent de voir en face le néolibéralisme sous prétexte de pragmatisme comptable ? Qui serait responsable ? Le système ou les individus ? La vie de 400 patients était en jeu et la preuve a été faite que les restructurations et autres mutualisations ne sont pas la réponse adéquate mais bien au contraire, des génératrices de problématiques dont nul ne sait encore où tout cela va nous conduire sinon à l’impasse.

Les moqueries à l’encontre du système Cubain sont à l’épreuve des faits. Jamais Cuba ne saurait prendre des risques aussi inconsidérés pour sa population. D’ailleurs, nombreux sont les cubains partis en "boat-people" qui reviennent dans leur pays après avoir découvert ce qu’était vraiment l’eldorado libéral car ils ont vite compris qu’au moins à Cuba, on mange et boit bien et on est très bien soigné sans dépenser une pièce. Même pour l’esthétique, voire même pour changer de sexe, le citoyen cubain bénéficie du plateau technique sans comptabilité. Ces boat-peoples inversés ne font pas la une des presses puisque cela dérange et contredit la propagande anticastriste. Même beaucoup de citoyens de pays "libres" s’en vont à Cuba en touristes avisés pour se refaire une santé. Cela enrage nos inconditionnels du chiffre mais c’est bien là la différence fondamentale entre une société socialiste et une société individualiste. La première fait des sacrifices individuels au bénéfice du collectif, la seconde fait l’inverse.

L’idéologie néolibérale s’est imposée et détruit tout sur son passage au nom de la santé financière plutôt que de la santé humaine. Tous les Hôpitaux de France sont touchés par des restructurations, des mutualisations et autres groupements hospitaliers de territoire qui n’ont pour but que de réduire l’accès aux soins nonobstant les difficultés des différents territoires. Au contraire, ces difficultés deviennent des atouts, des segments de marché, pour un capitalisme débridé et en crise après s’être fait devancé par une Chine communiste que les néolibéraux pensaient "mater" comme les soviétiques. La mondialisation ne suffit pas d’autant que l’unipolarité du temple néolibéral qu’est les Etats-Unis, est déjà contesté par les BRICS. Il faut faire vite et multiplier les attaques contre les travailleurs y compris les travailleurs sanitaires et même les travailleurs sociaux car ce sont les nouvelle niches de l’affairisme.

Du temps de Staline, on aimait s’adonner à la critique de la planification, il faut dire que depuis cette dernière permet à nos "penseurs" de la main invisible d’imposer l’impensable. Un responsable politique national ne s’est-il pas permis d’annoncer la venue, enfin, des lits debout. Et pourquoi pas des tombes debout pour répondre au manque de place dans les cimetières ? Il n’y a que dans l’esprit tortueux et cupide des néolibéraux que peuvent sortir ce genre d’idées inhumaines et asociales.

Il faut nous faut faire montre de grandes mémoires pour resituer les faits antérieurs qui nous ont conduit à cette impasse. Et cela commence avec la fin de la dernière guerre où les oligarques du libéralisme qui avaient soutenu Hitler, directement ou indirectement, ont dû se mettre en sourdine et faire profil bas. Mais pas tant que cela, car ils s’organisaient diversement à travers le monde et finançait tout ce qui pouvaient les aider à reprendre le pouvoir. Ils ont pris leur temps et ont réussi leur coup en vérolant les politiciens et en imposant, progressivement, des lois qui contraignaient d’abord les Etats puis les citoyens, leurs plus belles réussites furent l’endettement des Etats auprès d’organismes privés et l’endettement de masse de par la surconsommation. C’est la seule et unique raison qui explique la mauvaise répartition des richesses et le retrait de l’Etat dans l’investissement publique. De ce fait, nul ne doit nous accuser d’être les responsables de la situation, bien au contraire nous en sommes les victimes.

Les orientations néolibérales de l’Union Européennes s’imposent aux Etats membres qui ont lâché leurs souveraineté au profit de ce "machin", comme disait le général De Gaule, et malgré le NON démocratique de 2005 c’est bien ce machin – cette machine pour être plus précis – qui nous gouverne et nous conduit droit au mur pour satisfaire l’appétit des ogres de l’oligarchie. C’est donc, au nom de "nobles" règles comptables que nous serions dans l’obligation de travailler comme des esclaves à seule fin de réduire les dépenses publiques. Sauf que cette théorie n’a aucun fondement économique mais n’est autre qu’une injonction idéologique. Posons-nous la question de qui profite vraiment des fonds publics et nous nous rendrons vite compte que ce sont les grandes entreprises via des largesses fiscales au niveau national et un lobbying efficace au niveau Européen, qui tirent leurs épingles du jeu. Ainsi, l’abandon de l’Etat social (partage de la richesse) pour nous au profit de l’Etat providence (distribution à qui on veut) pour les oligarques vas générer la situation dans laquelle nous sommes empêtrés parce que nous avons cru aux clameurs néolibérales qui semblent si évidentes que nous avons oublié les combats du passé et les conquis sociaux qui en ont découlé.

Mais comment se fait-il que des femmes et des hommes, se prétendant viscéralement républicains – en clair pour la chose publique – soient atteints de cette cécité bien arrangeante pour ne pas reprendre le bâton de combat des hommes d’Etat qui faisaient la fierté de la politique ? Tous, tétanisés et complices, font l’éloge de la chose privée comme leurs prédécesseurs, en 1939, faisaient l’éloge du national-socialisme pressés en cela par le MEDEF de l’époque qui disait clairement, et il faut le répéter à satiété pour les nouvelles générations qui n’ont connu que le néolibéralisme, "Plutôt Hitler que le front populaire". Les générations ont changé mais les intérêts sont les mêmes... Comme on dit si bien en créole : "Républicain en gueule".

En tout état de cause, nous voilà face au bilan de plus de trente années de mensonges et d’injonctions néolibérales nous livrant, nombreux que nous sommes, à espérer voir un jour le fruit du papayer mâle pendant que d’autres, peu nombreux qu’ils sont, mangent en gloutons dans un vaste champs de papayers femelles. A nous, syndicalistes, progressistes, humanistes et tous autres combattants du fait social de savoir nous mettre, à nouveau, ensemble pour envahir ce champ qui nous revient de droit puisque c’est nous qui l’entretenons.

Philippe BELAIR

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« Cuba mi amor », un roman sur le Che de Kristian Marciniak (Rebelion)
Leyde E. Rodri­guez HERNANDEZ
Publié chez Publibook, une maison d’édition française, le roman de Kristian Marciniak : « Cuba mi amor » circule dans Paris ces jours-ci. Dans un message personnel adressé au chroniqueur de ce papier, l’auteur avoue que Cuba a été le pays qui lui a apporté, de toute sa vie, le plus de bonheur, les plus grandes joies et les plus belles émotions, et entre autres l’orgueil d’avoir connu et travaillé aux côtés du Che, au Ministère de l’Industrie. Le roman « Cuba mi amor » est un livre (…)
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