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L’UNESCO et le «  symposium international sur la liberté d’expression » : entre instrumentalisation et nouvelle croisade (il fallait le voir pour le croire)

Le 26 janvier 2011, la presse Cubaine a annoncé l’homologation du premier vaccin thérapeutique au monde contre les stades avancés du cancer du poumon. Vous n’en avez pas entendu parler. Soit la presse cubaine ment, soit notre presse, jouissant de sa liberté d’expression légendaire, a décidé de ne pas vous en parler. (1)

Le même jour, à l’initiative de la délégation suédoise à l’UNESCO, s’est tenu au siège de l’organisation à Paris un colloque international intitulé « Symposium international sur la liberté d’expression ». Lorsqu’on voit une telle affiche, on n’a qu’une envie : s’inscrire pour y participer et pouvoir baigner pendant toute une journée en compagnie d’un gotha mondial de la liberté d’expression. L’absence de Chomsky et quelques autres aurait dû me mettre la puce à l’oreille et me faire préférer passer la journée au Monoprix du coin. L’organisation du colloque par la délégation suédoise (Julian Assange ? Ca vous dit quelque chose ?) et son comportement aura été le dernier clou sur le cercueil de mes illusions. Quant au contenu général des exposés, que dire, sinon qu’après avoir passé une journée entière, autant vous en faire le compte-rendu...

A l’issue donc d’une journée de conférences et de quelques courtes séances de questions/réponses avec la salle, la première impression que laisse ce colloque est qu’il aurait pu être rebaptisé « comment asséner des énormités devant un parterre de personnalités sans provoquer la moindre réaction », car le constat est clair : l’UNESCO a été l’objet d’une tentative de manipulation destinée à transformer une des dernières organisations internationales « indépendantes » en un vecteur de propagande supplémentaire sous couvert de lutte pour la « liberté d’expression », présentée comme une nouvelle mission. Le tout devant - et avec l’apparent assentiment - d’une salle de conférence pleine à craquer de personnalités de tous horizons. A peine quelques voix discordantes dans la salle se sont fait entendre devant une avalanche de platitudes, d’amalgames et d’incohérences entrecoupés de quelques rares moments de vérité (mais un coup de chapeau malgré tout au modérateur, Helge Ronning, professeur au département Médias de Communication de l’université d’Oslo)

Parmi les intervenants, on a retrouvé notamment l’ineffable Jean-François Julliard (secrétaire général de Reporters Sans Frontières) et, sous son air bonhomme et décontracté, genre mec sympa, le terrifiant Robert O. Boorstin (présenté comme le Directeur des affaires publiques de Google).

La journée a débuté (assez logiquement) par la session d’ouverture. Interventions de Irina Bokova, directrice générale de l’UNESCO suivie de celle de Birgitta Ohlsson, ministre suédoise pour la démocratie et les affaires européennes. Je consulte mes notes : rien, juste « banalités/clichés » rédigé d’une main apparemment déjà agacée. Ah si, j’ai aussi noté « citations Orwell, Newton, Camus ». Je n’ai pas noté lesquelles. Ca vous intéresse vraiment ?

L’intervention de Frank La Rue, rapporteur spécial des Nations Unies sur la promotion et la protection du droit à la liberté d’opinion et d’expression, est décousue et improvisée. Je note au passage qu’il nous apprend que le Guatemala, son pays d’origine, vient d’inventer le « délit fiscal », c’est-à -dire l’interdiction de « faire paniquer les marchés ». Il sera aussi le seul de la journée à mentionner le Droit à l’information, le Droit à l’accès à l’information (j’y reviendrai) ainsi que le droit à l’éducation et au développement.

Le statut de la liberté de la presse dans le monde

Après une courte pause, la conférence suivante s’intitulait « le statut de la liberté de la presse dans le monde ». En guest star : Reporters Sans Frontières, véritable couteau-suisse à tout faire et VRP de toutes les causes médiatisées, spécialisée en : liberté de la presse, liberté d’expression, liberté tout court, et même de la démocratie en Chine ; vendeurs occasionnels de calendriers : distributeurs de gilets pare-balle, de rapports super-précis avec classement numéroté ; encaisseurs de fonds distribués par des états, des organisations gouvernementales, des organisations semi-gouvernementales, des organes de presse, et - grande nouveauté, enfin - d’une « totale transparence » et dont « les comptes sont au siège et disponibles à tous ceux qui voudront les consulter, tout est là » (J-F Julliard).

[Et soudain je remarque au passage l’absence d’Amnesty International à un colloque sur la liberté d’expression. Et je me souviens que cette organisation a garanti son indépendance dés sa création en refusant les fonds d’origine gouvernementale ou, d’une manière générale, toute source pouvant créer un conflit d’intérêts avec sa mission. Et je remarque aussi que cette organisation - dont tout le monde adore citer le rapport qui confirmerait ses propres préjugés - a disparu des médias ces dernières années. Les grands médias préfèrent RSF et nous verrons plus loin pourquoi.]

Omar Faruk Osman (Président de la Fédération des journalistes africains - FAJ), Gayathry Venkiteswaran (Directrice de l’Alliance de Presse de l’Asie du sud-est) et Khaled Abu Aker, (Directeur du Réseau Internet des médias arabes) ont chacun, pour leurs régions respectives, dressé l’état de la liberté de la presse.

Quant à Jean-François Julliard (RSF), il n’a pas déçu : le bilan habituel, le classement habituel, la cartographie habituelle de la situation de la liberté de la presse dans le monde, les clichés habituels, et les affirmations erronées habituelles assénées régulièrement par son organisation. Une nouveauté toutefois, RSF surveille désormais les risques encourus par les journalistes qui travaillent sur les questions d’environnement.

Dans le classement « impartial » de Reporters Sans Frontières, un pays, appelons-le X, où aucun journaliste n’a été assassiné ces 50 dernières années est classé en « situation inacceptable ». Inacceptable, pour qui ? A l’inverse, une grand puissance, appelons la Y, dont différentes forces officielles ont bombardé des sièges de médias, tiré sciemment sur un hôtel rempli de journalistes, interdit la présence de journalistes sur les terrains d’opération, enfermé à Guantanamo un journaliste d’Al Jazeera et dont récemment de hautes personnalités ont appelé à l’élimination physique de Julian Assange est classée - vous l’aurez deviné - en « satisfaisante ». Satisfaisante, pour qui ?

J-F Julliard argumenterait probablement que dans le cas du pays X, il y a des « journalistes » qui sont toujours en prison. Ce à quoi on lui répondra que dans le cas de la puissance Y, il y a encore plus de journalistes qui sont toujours morts.

La conférence suivante s’intitulait « La liberté de la presse sur internet ». Guy Berger (Directeur de l’Ecole du journalisme et des Médias en Afrique du sud) a présenté une étude sur les propos tenus dans les forums internet en Afrique du Sud lors des émeutes xénophobes de 2008. Premier constat : dans une ambiance de violence et de haine, de nombreux propos publiés sur des forums de journaux y compris « progressistes » - et filtrés par des modérateurs - violaient toutes les règles et codes de déontologie. Interrogés, les modérateurs ont répondu que les propos reflétaient « l’air du temps » et que leur publication permettait à d’autres internautes d’apporter une contradiction. Guy Berger a souligné que les lois en vigueur limitant la liberté d’expression datent pour la plupart de l’époque de la presse écrite, où la posture de l’utilisateur était celle d’une « lecture » et non celle d’une « conversation ».

Gordana Vilovic (maître de conférences à l’université de Zagreb, Croatie) a doctement admis qu’elle n’avait pas grand chose à dire et a passé dix minutes à nous expliquer pourquoi. Son intervention s’est résumée à une série de questions qu’elle offrait à la réflexion de chacun (Wikileaks, une question d’éthique ou de liberté de la presse ? Faisons-nous confiance à toute l’information publiée sur Internet ? Comment résoudre le problème du plagiat ? Faut-il porter plainte ou pas ? L’internet est-il dangereux ? Et, bouquet final : WWW n’est PAS un acronyme pour « Wild Wild Web » dixit Roger Darlington.) William Dutton (Directeur de l’Institut Oxford Internet) a commencé par préciser qu’il n’avait pas l’intention de pointer du doigt tel ou tel pays coupable d’appliquer une censure à l’internet parce que de plus en plus de pays s’y livraient...

Enfin, Robert Boostin, de Google, a passé la moitié de sa courte intervention à parler de lui-même et l’autre moitié à rassurer tout le monde sur les intentions et l’éthique de Google. Étrangement, certains participants dans la salle semblaient confondre Google avec un fournisseur d’accès à Internet (« Ne pourriez-vous pas enregistrer les numéros d’IP des internautes ? »). Étrangement, Boostin n’a rien dit pour lever l’ambiguïté. Boostin a dit qu’il n’était pas un « cyber-utopiste » (l’informatique résoudra tous nos problèmes) pas plus qu’un « cyber-pessimiste ». Il a estimé qu’en matière de censure les choses allaient probablement s’empirer avant de s’améliorer et qu’il ne fallait pas oublier que la radio et la télévision constituaient encore la principale source d’information pour la grande majorité des gens et qu’il en sera ainsi pendant encore 20 ans. Boostin a aussi rassuré l’auditoire : Google ne fournissait pas d’informations à la police, afin de protéger les dissidents, chinois notamment. Il a précisé que c’est pour cela que Google n’installait pas de serveurs dans certains pays, tels que l’Iran, où la confidentialité des données ne pouvait pas être garantie. Personne ne lui a demandé si la notion de « dissident » incluait un américain sous la loi Patriot Act et devant une demande d’informations émanant du FBI et non de la police chinoise ou iranienne. Mais il aurait probablement répondu « Bien-sûr que non », et la salle aurait probablement hoché la tête en signe d’approbation. En réponse à une de ses remarques sur la démocratisation de l’usage d’Internet, l’ambassadrice de la Chine a rappelé que le nombre de connectés à l’Internet en Chine dépassait la population totale des Etats-Unis.

La conférence suivante portait sur « la liberté de la presse et la sécurité des journalistes », Monica Gonzalez, victime elle-même d’attentats, a rappelé que le Mexique était devenu l’un des pays les plus dangereux pour les journalistes et que la puissance et l’impunité des cartels était telle que des rédactions entières avaient décidé de ne plus enquêter sur le crime organisé. Nancy Roc (Directrice exécutive d’Inca Productions en Haïti), a dressé de son côté un portrait sombre de l’état du journalisme en Haïti et a rendu hommage à des camarades assassinés, là aussi par des bandes qui semblent bénéficier d’une impunité quasi-totale. Elle a fermement dénoncé aussi le récent retour de l’ancien dictateur Duvalier sur l’île ainsi que le risque d’un retour de l’ancien président Aristide (en fait, président légalement en exercice mais exilé en Afrique du Sud - NdA). Elisabeth Witchel (Centre de Protection des Journalistes - CPJ, Etats-Unis) a elle aussi dressé un constat alarmant, rappelant le récent massacre aux Philippines de 30 journalistes. Et enfin, Rodney Pinder (Directeur de News Safety Institute) a exposé les actions de son organisation qui forme les journalistes à mieux se protéger (http://www.newsafety.org)

Tous se sont accordés pour souligner l’impunité qui régnait quant aux assassinats de journalistes. Selon le CPJ, 8 assassinats sur 10 ne sont pas punis. Nancy Roc révèle que des assassins d’un de ses collègues en Haïti ont avoué leur crime lors d’une conférence de presse et... se promènent toujours libres comme le vent. Rodney Pinder indique que 90% des journalistes trouvent une mort violente localement, en temps de paix et non sur des terrains de conflits et qu’en 2010, les pays qui détiennent le palmarès d’assassinats de journalistes sont le Mexique, le Honduras et le Pakistan. Le CPJ a dressé un « indicateur d’impunité », basé sur le rapport entre le nombre de meurtres impunis commis contre des journalistes et la population du pays. Selon leur classement, arrivent en tête l’Irak, la Somalie, les Philippines...

Lors de la séance de clôture, l’ambassadeur permanent de la Suède auprès de l’UNESCO, Mats Ringborg, a prononcé une courte allocution qui a étrangement viré vers une agression verbale, peu diplomatique et plutôt inattendue, contre Cuba en citant au passage l’organisation « Freedom House » (2) qui n’est pas moins que l’un des principaux réseaux d’ingérence des Etats-Unis. L’ambassadrice de Cuba auprès de l’UNESCO a aussitôt protesté ainsi que le représentant du Sri Lanka qui a laissé clairement entendre que les choses avaient pris une tournure très peu diplomatique et que si certains voulaient jouer à ce petit jeu, ils trouveraient à qui parler.

Sur le plan personnel, cette journée fut une longue et pénible frustration. Frustration devant les questions abordées, devant leur traitement, devant les réponses esquissées mais surtout devant les questions non posées et une impression générale d’un pénible exercice de propagande à peine déguisé et d’un « amateurisme » général qui, à ce niveau, n’est pas de bon augure.

La « neutralité » mythique de Google

Le colloque a connu un moment totalement surréaliste. Le directeur de Google a rassuré l’auditoire quant à l’attachement de son entreprise à la neutralité de l’Internet, la démocratie et le respect de la vie privée. Google ne cède pas aux pressions politiques. Si Monsieur Boorstin le dit, c’est que ça doit être vrai.

Le 11 janvier 2011, Google a fermé sans préavis le compte Youtube (site propriété de Google) de Cubadebate. Le compte comportait plus de 400 documents vidéos dont la confession filmée du terroriste Luis Posada Carriles, ex-agent de la CIA et protégé de l’administration US, qui exigeait « paiement pour services rendus », services qui incluent l’attentat en plein vol de l’avion de ligne de la Cubana de Aviacion en 1976 et une vague d’attentats dans des lieux touristiques à Cuba en 1997. Par ailleurs, Eric Shmidt, président et directeur exécutif de Google, a affirmé lors d’une conférence à l’Université de Princeton qu’« il est illégal pour nous (Google) d’avoir la moindre relation commerciale avec Cuba » mais que nous ferons néanmoins tout le possible pour que les citoyens cubains découvrent « que les gens qui dirigent le pays (Cuba) doivent être renversés ». Google limite ses services aux Cubains à différentes services, entre autres Google Earth, Google Code et Google Chrome ».

(Lorsque Google a censuré Cuba, nous n’avons rien dit, nous n’étions pas Cubains.)

C’est un exemple parmi d’autres de la « neutralité » telle qu’elle peut être « garantie » par une société contrôlée par des intérêts privés et exerçant un quasi-monopole. Une salle bondée de « responsables » a donc passivement écouté le représentant d’une entreprise privée qui exerce un quasi-monopole expliquer que la démocratie de l’internet était entre de bonnes mains : les siennes.

On savait déjà que les Etats-Unis avaient externalisé et privatisé une partie de leurs forces armées, serions-nous arrivés au point où l’UNESCO avalisera l’externalisation et la privatisation de la démocratie et la neutralité de l’Internet ? Et nous savons à quel point nous pouvons faire confiance à la parole publique des dirigeants des sociétés multinationales.

Journalistes en « idiots utiles » (*) des monopoles de l’information

Plusieurs confusions ont été entretenues tout au long des débats.

La première a avoir été savamment introduite, et entretenue, - et relevée au passage par un journaliste de RFI dans la salle - est celle qui consiste à confondre « liberté d’expression » et « liberté de la presse » ou, pire encore, à établir une sorte d’« équivalence logique » entre les deux.

La deuxième confusion - entretenue par les témoignages de journalistes à la tribune - est celle de présenter « la presse » comme un ensemble cohérent composé d’entités partageant les mêmes intérêts et les mêmes objectifs. Ce qui provoque quelques mises en abyme de perplexité... Par exemple, lorsqu’une journaliste mexicaine s’indigne contre le silence fait autour de ses camarades assassinés, contre qui exactement s’adresse son indignation ? Contre vous et moi ou contre les multinationales de la communication (« la presse ») qui se montrent toujours promptes à minimiser ce genre d’information lorsqu’elle concerne un pays « ami » ? Vous en avez entendu parler, vous, du massacre de 30 journalistes d’un seul coup aux Philippines ?

Un journaliste est un journaliste, disent-ils. Mais quel rapport y a-t-il entre un journaliste mexicain assassiné pour avoir voulu enquêter sur les cartels de la drogue et Judith Miller, ex-journaliste du New York Times qui a sciemment menti sur les armes de destruction massive en Irak, participant ainsi à l’assassinat de centaines de milliers d’Irakiens ? Quel rapport entre Robert Fisk qui sillonne le terrain au Moyen-orient, avec lequel on peut être d’accord ou pas, et un Patrick Poivre d’Arvoir surtout connu pour ses interviews bidons de Fidel Castro, son exportation de bébés Irakiens (vous aviez oublié cette affaire, n’est-ce pas ?), sa présentation à la télé d’un faux garde du corps de Saddam Hussein (« ils se ressemblent tous » avait été son explication pour son erreur...), avec le cul vissé pendant vingt ans devant un prompteur à Paris ?

Le raisonnement pervers, véhiculé par des organisations comme RSF, consiste à prendre pour exemple le sort réservé à de véritables journalistes pour mieux exiger une « liberté de presse » en général, y compris pour les médias de masse qui sont, qu’on le veuille ou non, les premiers responsables de la « non information » ambiante et généralisée. Ce ne sont pas les Judith Miller qui se font assassiner, ce ne sont pas les commentateurs de Fox News qui se font assassiner, ce ne sont pas les Alexandre Adler, BHL, Pujadas et PPDA qui se font censurer, harceler. Tout simplement parce que ces « journalistes »-là ne feront jamais rien pour s’exposer (en admettant qu’ils en aient la volonté et le courage, ce dont je doute, évidemment).

Certes, le temps d’un colloque, le temps d’une conférence, le temps de signer un appel, ils associeront leurs noms à certaines causes de défense de la « liberté de la presse ». Mais le reste du temps, que font-ils ? Où étaient-ils lorsque l’information était en péril ? Où étaient-ils lorsque les cadavres de 30 journalistes étaient jetés dans un fossé aux Philippines ? RSF dira toujours que « non, pas vrai, on parle de l’Arabie Saoudite aussi ». Oui, c’est vrai. Sur leur site. Jamais de campagne, jamais d’affiches en ville, très rarement mentionnée au détour d’une interview.

Lorsque le journaliste montre l’état de l’information du doigt, l’imbécile regarde l’Internet.

Les mensonges, diffamations et incitations à la haine diffusés sur Internet ont été largement dénoncés. Étrange posture pour un colloque sur la liberté d’expression (ou colloque sur la liberté de la presse ?). Étrange, non par la préoccupation qui est légitime, mais par la vision véhiculée. Car enfin, est-ce l’internet qui est responsable des pseudos armes de destruction massive en Irak ? Est-ce l’Internet qui fait silence sur l’étrange troisième tour du 11/9 ? Est-ce l’Internet qui a caché les prisons clandestines US à travers le monde ? (N’en déplaise au journal Libération qui a fait semblant de les découvrir avec six mois de retard sur... l’Internet, notamment grâce au site du journaliste américain Richard Parry, http://www.consortiumnews.com/)

Que dire des appels au meurtre proférés à l’encontre Julian Assange par des responsables politiques US ou un éditorialiste (donc journaliste) du Washington Times, Jeffrey T Kuhner ? Comment qualifier les propos antisémites inventés en 2006 par Jean-Hébert Armengaud de Libération et attribués à Chavez ? Diffamation couverte par le responsable du service international du journal à l’époque et actuel patron du site Rue89.com, Pierre Haski ? Que deviennent les appels à la haine prononcés régulièrement par les Républicains US et autres Tea-partistes déchaînés ?

Qu’est-ce que l’Internet à voir là dedans alors que les exemples de mensonges, de diffamations et de haines nous viennent de très haut et des réseaux supposément « respectables » de la presse ?

Indépendance et neutralité de la presse : par rapport à qui et quoi ?

Plusieurs intervenants ont insisté pour « garantir l’indépendance des médias ». Mais le simple fait de ne pas définir ce qu’est un « média indépendant » montre à quel point le débat est faussé ou totalement incompris par ceux-là mêmes qui prétendent en être les spécialistes. S’agit-il d’une indépendance vis-à -vis de l’état ou d’une indépendance vis-à -vis d’intérêts financiers privés ? S’agit-il d’une indépendance vis-à -vis de la loi, des institutions, des pouvoirs politiques, de leur idéologie, du public ? De qui exactement sont-ils censés être indépendants ? Et surtout, quand le sont-ils réellement ? Ne pas tenter d’y répondre, c’est avaliser la situation présente de l’information qu’on pourrait résumer par un seul mot : « catastrophique ».

RSF se désole : « la neutralité des journalistes n’est plus respectée ». Ceci est probablement dû au fait que cette neutralité mythique n’existe pas et n’a probablement jamais existé. Les journalistes « embarqués » avec les troupes US sont-ils neutres ? Seraient-ils « neutres » s’ils avaient été embarqués avec des unités ennemies ? Si les journalistes sont « neutres », pourquoi n’avons-nous jamais entendu ou lu un représentant de la résistance irakienne (avec qui la France n’est pas en guerre, à ce que je sache) ?

J-F Julliard a cru bon de plaisanter au sujet des Talibans, en précisant qu’il fallait savoir agir en fonction des circonstances et que, dans le cas des Talibans, on comprend bien qu’on ne peut pas leur envoyer un télégramme de protestation. Rires dans la salle. Il n’y a pourtant pas si longtemps où les journalistes « neutres » interviewaient les Talibans, lorsque l’armée soviétique était la force occupante. Il n’y a pas si longtemps que l’administration US était en pleine négociation avec les Talibans pour la construction d’un oléoduc. Mais c’était avant le 11 septembre 2001 et avant que ces journalistes-là ne changent la nature de leur « neutralité ».

Au mois de septembre 2006, un article discret du New York Times nous apprenait que dix journalistes aux Etats-Unis recevaient des centaines de milliers de dollars (chacun) pour écrire des articles contre Cuba. Pas un journaliste... ni deux... mais dix. La question qui m’avait brûlé les lèvres à l’époque - et les brûle encore - était celle-ci « et pour dix journalistes découverts, combien courent encore ? » A entendre le silence assourdissant qui a suivi cette non-révélation, on serait tenté de répondre : « beaucoup ».

Liberté de la presse ou organisation de son pluralisme ?

Ainsi donc, RSF se désole du monopole de l’information exercée par le gouvernement Cubain. Mais un monopole signifie que les cubains n’auraient pas d’autres sources d’information que l’information dite « officielle ». Un monopole signifieraient qu’il n’existe pas une vingtaine de radios qui émettent depuis Miami (en espagnol pour certains) et qu’elles seraient brouillées. Pour J-F Julliard, une situation de « pluralisme » sur l’île serait probablement qu’une vingtaine de radios émettent depuis les Etats-Unis et qu’y soient distribués des journaux propriétés d’intérêts financiers privés (probablement américains). J-F Julliard ne comprend pas, ou ne veux pas comprendre, que le « monopole du gouvernement » sur la presse écrite à Cuba est justement ce qui garantit un pluralisme des sources d’information disponibles sur l’île...

Et soit dit en passant : la presse cubaine n’a peut-être pas toutes les qualités, mais elle n’a jamais défendu d’autres invasions que celles de ses médecins, pour tous et partout dans le monde.

Lorsque la sacralisation de « la presse » - présentée comme un tout - ouvre la voie à son instrumentalisation. Décoder les opérations de propagande

RSF se désole aussi que, selon l’organisation, 18 journalistes sont encore en prison à Cuba.

RSF aborde enfin le cas du journaliste Sami Al-Haj, enfermé à la base américaine de Guantanamo, et écrit ceci : "arrêté sous de fallacieux prétextes de collusions avec Al-Qaïda en décembre 2001 par les forces pakistanaises, l’homme a été livré aux militaires américains qui l’ont transféré, en juin 2002, sur leur base de Guantanamo." Mais le plus beau suit : "Faute de savoir si Sami Al-Haj avait été arrêté en raison de sa qualité de journaliste (...) RSF a attendu avant de mener d’autres actions en faveur de ce journaliste."

Oui, il aura fallu donc cinq ans (et pas mal d’articles critiques publiés sur Internet, n’est-ce pas ?) à RSF pour décider si un journaliste détenu par les Etats-unis a été ou non arrêté « en raison de sa qualité de journaliste ». Il n’aura fallu en revanche qu’environ 15mn et 18 secondes à RSF pour décider que les personnes arrêtées à Cuba étaient effectivement des journalistes, et rien que des journalistes. (4)

Voici une devinette destinée aux lecteurs. Le nombre de correspondants étrangers basés à la Havane s’élèverait à prés de 200. Le Département d’Etat des Etats-Unis, connu pour son honnêteté et son objectivité (n’est-ce pas ?) annonce l’arrestation de « journalistes » à Cuba, et RSF relaie aussi sec. La question à 1000 euros est celle-ci : quel intérêt auraient eu les autorités cubaines à faire arrêter une dizaine de « journalistes » cubains - que personne ne lisait ou ne connaissait - alors même qu’environ 200 correspondants étrangers sont présents et ne font état d’aucun empêchement particulier pour exercer leur métier ? Serait-ce que ces « journalistes » cubains étaient indispensables pour « faire connaître la réalité sur le terrain » ? A quoi servent alors les correspondants étrangers ? On en déduirait qu’ils sont incapables de faire correctement leur travail. S’il sont incompétents, pourquoi alors croire à leurs informations, y compris lorsqu’ils nous annoncent l’arrestation de « journalistes » cubains ?

RSF classe au même niveau Cuba, où environ 200 correspondants étrangers travaillent en toute liberté, et l’Arabie Saoudite, où les correspondants étrangers sont par définition persona non grata. RSF comprend si peu - ou feint ne pas comprendre - le problématique de « la liberté de la presse » qu’elle veut absolument placer Cuba en page d’accueil (on se souviendra aussi du titre mémorable d’un de ses rapports : « Cuba, avant-dernier du classement ». Il est très rare que l’on titre sur l’avant-dernier...) en prétextant une censure de l’Internet, censure que j’ai récemment voulu vérifier sur place et que je n’ai pas constatée.

Les exemples sont beaucoup trop nombreux pour être relevés ici.

Le départ « brutal et précipité » au mois d’octobre 2008 de l’ancien secrétaire général de RSF, Robert Ménard (partisan de la peine de mort et apologiste de la torture comme outil d’investigation), avait soulevé quelques maigres espoirs. Mais l’opération n’aurait été au final qu’une tentative de sauver les meubles en faisant sauter un fusible devenu plus gênant qu’utile.

Par ailleurs, si les finances de RSF sont transparentes (un progrès donc depuis l’époque où Ménard niait farouchement certains financements pour ensuite les reconnaître deux ans plus tard), et si RSF jouit du poste d’ « observateur » à l’UNESCO, pourquoi l’UNESCO ne nommerait-elle pas des commissaires aux comptes de RSF pour ensuite les communiquer aux membres de l’UNESCO et permettre ainsi à chacun de vérifier l’indépendance réelle ou non de cette organisation ? Car malgré l’assurance affichée de J-F Julliard, nous savons que RSF a parfois du mal à tout dire sans y être « invitée ». Allant même jusqu’à tenter de manipuler son propre site internet en publiant des données avec de fausses dates de publication, comme Maxime Vivas l’a démontré dans le livre « La Face cachée de Reporters Sans Frontières ». (3)

La liberté de la presse s’arrête exactement là où commence mon droit à une véritable information

RSF cultive un amalgame inacceptable : celle d’une « liberté de la presse » qui constituerait un garant de la démocratie. Comme si « la liberté de la distribution » servait aussi bien l’épicier du coin que l’hypermarché local. Comme si la « liberté de l’industrie alimentaire » servait aussi bien le modeste agriculteur bio que le géant de l’agroalimentaire.

Et où commence et où s’arrête cette fameuse liberté de la presse ? La liberté de la presse inclut-elle les appels au coup d’état, comme au Venezuela ? La liberté de la presse inclut-elle le silence ? La liberté de la presse inclut-elle la censure et l’auto-censure ? La liberté de la presse inclut-elle la monopolisation des médias par une minorité ? La liberté de la presse inclut-elle le foutage de gueule quotidien qu’on nous impose au journal de 20 H sur les chaînes nationales payées avec l’argent des contribuables ? En réalité, la « liberté de la presse » n’est qu’un moyen poli pour parler de la liberté des propriétaires des moyens de communication.

Nous vivons un monde étrange où sont confondues la liberté de la presse et la liberté d’expression. Les deux sont-elles liées ? Absolument pas. Lorsque la presse « en toute liberté » décide de ce qui est raisonnable ou pas, lorsque la presse « en toute liberté » ne donne la parole qu’à certains et toujours les mêmes, cette liberté de la presse n’est ni le moteur ni la garante de ma liberté d’expression, mais son fossoyeur.

Nous vivons un monde étrange où sont confondus aussi la liberté de la presse et le droit à l’information. Les deux sont-ils liés ? Absolument pas. Lorsque la presse « en toute liberté » décide de parler de la neige en hiver en France et pas du coup d’Etat au Honduras, lorsque la presse « en toute liberté » décide de faire silence, ou « oeuvre de non information », là non plus, la presse n’est aucunement la garante de « mon droit à l’information », mais son obstacle principal.

La liberté de la presse est la meilleure garante de la démocratie, disent-ils. Nous vivons un monde étrange où sont confondues liberté de la presse et démocratie. Les deux sont-ils liés ? Absolument pas. Lorsque la presse « en toute liberté » participe aux coups d’état, comme au Venezuela, au Chili, aux Etats-Unis en général, lorsque la presse « en toute liberté » décide qu’il faut voter « oui » au référendum sur la Constitution européenne, cette liberté de la presse n’est absolument pas la garante de la démocratie, mais son principal ennemi. Le problème est le suivant : que se passe-t-il lorsque la censure - ou la non-information - est le fruit de la presse elle-même ? C’est d’autant plus vrai que le contraire de « liberté » n’est pas « censure » (comme certains voudraient nous le faire croire), mais « contrôle ». Contrôle qui par ailleurs existe déjà : celui exercé par les actionnaires des sociétés de presse. C’est pourtant simple : le contrôle de facto de l’information par une minorité n’a rien à voir avec la démocratie.

Alors je vous propose l’idée suivante : « La possibilité de s’informer est la meilleure garante de la démocratie. » Cette idée induit beaucoup de choses. Par exemple, qu’une véritable démocratie ne saurait exister sérieusement sans une démocratisation de la presse. La liberté de la presse ne garantit aucunement la démocratie. La presse ne fait au mieux que refléter l’état de la démocratie. Il arrive même que la presse soit le principal prédateur de la démocratie.

Défendre la liberté de la presse, c’est défendre une industrie. Défendre le droit à l’information, c’est défendre une idée. Idée mise à mal justement par l’industrie de l’information elle-même. Alors ne nous trompons pas de combat, comme certains nous y invitent...

Si s’informer est un droit pour tout citoyen, alors informer est un « devoir » pour la presse, pas une « liberté ». Ce n’est donc pas la liberté de la presse qui garantit la démocratie, mais la (véritable) démocratie qui garantit la liberté (réelle) de la presse.

Ne leur en déplaise, la « liberté de la presse » a bien des limites. La liberté de la presse s’arrête exactement là où commence mon droit à une véritable information.

Lorsque le journalisme s’éveillera, RSF tremblera.

L’impression générale et désagréable laissée par cette journée est que l’Unesco, une des dernières organisations internationales « indépendantes », a fait l’objet d’une OPA par des éléments dont l’intégrité et la neutralité sont absolument en cause.

Toute au long de la journée de ce colloque, différents représentants d’organisations de journalistes ont dressé un état des lieux effrayant des atteintes aux vies de nombreux journalistes. Derrière chaque intervention, la question lancinante : « Pourquoi on n’en parle pas ? ». Les mots clés de cette question sont « pourquoi » et « on ».

Ma réponse au « pourquoi » sera d’une cruauté involontaire et d’un cynisme revendiqué : « Parce qu’ils ont oublié de se faire assassiner à Cuba, par exemple ». Quant à savoir qui est le « on » de la question, je n’aurais qu’un conseil à donner : adressez-vous aux soutiens et parrains de RSF.

Il n’avait jamais été aussi évident à quel point RSF réussit à pervertir les termes mêmes du débat, jusqu’à transformer des journalistes authentiques et sincères en « idiots utiles » des multinationales de la non-information, de la désinformation et de la propagande privées.

Un système d’information fermé, à sens unique, tournant en vase clos et vassalisé

On remarquera, et ce depuis des années, que parmi les « prédateurs de la liberté de la presse » dénoncés sur le site de RSF, ne figurent pas un seul Dassault, pas un seul Murdoch, pas un seul Berlusconi...

La mainmise sur l’information globale par les pays développés est telle, et leur information si superficielle et biaisée (dans les cas exceptionnels où elle existe) que toute tentative de tirer des analyses sérieuses et fiables des événements mondiaux est vouée à l’échec. Sans un travail ardu de recherche indépendante, sans une multiplication de ses propres expériences, l’étendue du désastre est difficile à évaluer. Même les esprits les plus « contestataires » se laisseront tôt ou tard berner par une machine si bien rodée qu’elle finit par se faire oublier.

(…)

Une telle duperie permanente sur la marche du monde ne saurait perdurer sans un système d’information fermé, à sens unique, tournant en vase clos et vassalisé. La première tâche de ce système d’information sera de se garantir un minimum de crédibilité au risque d’être identifié par la population comme ce qu’il devenu, ou a toujours été, à savoir un simple outil de propagande.

Plusieurs facteurs sont nécessaires. Le premier est d’assurer une certaine diversité des titres de presse, qui sera aussitôt confondue comme l’expression d’un pluralisme. Le deuxième est d’entretenir le mythe d’une presse libre qui serait indépendante des intérêts économiques et politiques de ses propriétaires. La troisième enfin est de parer à toute critique en instaurant des idées énoncées comme des vérités divines. C’est ainsi que, par un joli renversement, Reporters Sans Frontières assène son leitmotiv préféré : la liberté de la presse est le meilleur garant de la démocratie. Du néolibéralisme appliqué à l’information et qui évite de se demander si, a contrario, une démocratisation de la presse ne serait pas le meilleur garant de sa liberté... Alors même que le plus médiatisé défenseur d’une « certaine » liberté de la presse, Robert Ménard, patron de Reporters Sans Frontières, l’avoue lui-même sans ambages : « nous avons décidé de dénoncer les atteintes à la liberté de la presse en Bosnie ou au Gabon et les ambiguïtés des médias algériens ou tunisiens... mais de ne pas nous occuper des dérives françaises ». (4) Mais c’était en 2001, et il n’est pas dit que de tels aveux soient répétés aujourd’hui.

Toujours prompte à critiquer les atteintes à la liberté de la presse pour peu qu’elles aient eu lieu ailleurs que chez ses bailleurs de fonds, cette organisation représente un pièce maîtresse dans un modèle de communication presque parfait : RSF s’annonce comme une organisation de défense de la liberté de la presse « partout dans le monde » tout en admettant ne pas critiquer ses bailleurs de fonds. En retour, ceux-ci - les gouvernements occidentaux et les groupes de presse - mettent RSF en avant en lui offrant un espace médiatique sans précédent pour une ONG de ce type. RSF gagne ainsi une renommée et une crédibilité. C’est ainsi que la scène de la défense de la liberté de la presse se trouve monopolisée par une organisation qui a déjà clairement annoncé sa non-objectivité en la matière. Pour faire un parallèle, imaginons un organisme de défense des consommateurs qui serait financé par les multinationales de l’agroalimentaire. Ou un syndicat de travailleurs financé par le patronat. Quant aux « prédateurs de la liberté de la presse » dénoncés sur le site de RSF, on ne trouve aucune nom de magnat de la presse occidentale.

Le lecteur aura remarqué à quel point RSF est devenue l’interlocutrice incontournable et quasi-institutionnelle sur toutes les questions qui touchent à la liberté de la presse.... surtout dans le tiers-monde. Son rôle est tel que cette organisation est désormais subventionnée par la National Endowment for Democracy, une organisation façade de la CIA. (5) et les néo-conservateurs les plus agressifs de l’administration Bush lui trouvent une certaine utilité et la citent en exemple... (6) Au moment où le droit international est foulé aux pieds, où la torture est devenue une pratique institutionnalisée par ceux-là mêmes qui se proclament « bons », son omniprésence dans les médias par des campagnes corporatistes est tel que l’on peut désormais se poser légitimement la question suivante « quel rôle joue exactement RSF et où sont donc passées les autres ONG ? ». (6)

RSF, expulsée de l’UNESCO en 2008 (7), débarrassée de la présence encombrante de Robert Ménard, revient donc plus innocente que jamais et avec les compliments de la délégation d’un pays qui a récemment fait preuve de son savoir-faire en matière de défense de la liberté... La référence de l’ambassadeur suédois à Freedom House et le déroulement général des débats ne laisse planer que peu de doutes sur les objectifs réels de l’opération « journée sur la liberté d’expression » qui n’aurait été au final qu’une opération à la gloire de « la presse » - une et indivisible - même celle qui ronge de l’intérieur notre droit à l’information et qui au fond méprise l’information... et nous avec.

Viktor Dedaj
« il y a des cancers dont je suis vacciné depuis longtemps »

(*) idiots utiles : à la suite de remarques de jeunes (probablement) lecteurs, l’expression « idiot utile » (attribuée à Lénine) en politique désigne ceux qui défendent les fabricants de la corde qui servira à les pendre.

(1) Un traitement miracle contre le cancer du poumon ? https://www.legrandsoir.info/Un-traitement-miracle-contre-le-cancer-du...

(2) Freedom House a eu pour patron James Woosley, ancien directeur de la CIA (1993/1995). Diana Villiers l’épouse de Negroponte, l’homme qui supervise l’ensemble des services secrets états-uniens, est membre du Conseil d’administration de Freedom House.

(4) Reporters Sans Frontières et Cuba : L’art de se tirer une balle dans le pied. https://www.legrandsoir.info/reporters-sans-frontieres-et-cuba-l-art-d...

(5) D’une autre source discrète, le Center for a Free Cuba (CFC), RSF reçoit des dollars depuis 2002. Qu’est-ce que le Center for a Free Cuba ? Une des organisations subventionnées par la NED et par l’USAID pour renverser le gouvernement cubain. Les « Comptes 2004 » de RSF sont publiés sur son site. Ils portent la date du 31 décembre 2004, ce qui indique à quel moment les comptes ont été arrêtés et non pas, comme il faudrait le croire, quand ils ont été rendus publics. Ces comptes font apparaître pour la première fois le Center for a Free Cuba. Apparemment, il s’agit d’un aveu spontané qui semble être antérieur à un article de Thierry Meyssan du réseau Voltaire qui révélait, le 26 avril 2005, que RSF était ainsi financée depuis 2002. Or, un doute m’est venu. J’ai voulu vérifier si la date accolée aux comptes 2004 correspondait peu ou prou à la date à laquelle ils avaient réellement été publiés. Pour ce faire, j’ai demandé conseil à un informaticien, lequel a étudié de près le lien qui renvoie à la page incriminée :
http://www.rsf.org/article.php3?id_article=14275

Le chiffre final indique que cette page est la 14275ème publiée par RSF. Si l’on remonte en arrière, on tombe sur un lien exploitable : http://www.rsf.org/article.php3?id_article=14273 qui ouvre une page datée du 1er juillet 2005. Cette date est sincère puisque l’article afférent fait référence à des événements survenus quelques jours avant. Donc les chiffres 2004 ont été mis en ligne au plus tôt le 1er juillet 2005, soit deux mois après que le réseau Voltaire eut découvert le pot aux roses.

Bref, Diana Barahona révélant les subventions de la NED, le réseau Voltaire celles du Center for a Free Cuba, il était devenu impossible de tout nier en bloc. Dans un article paru le 6 juillet 2005, RSF affirme : « Les seules subventions que nous percevons en provenance des Etats-Unis sont celles des fondations Center for a Free Cuba et National Endowment for Democracy (NED). La première nous a accordé, en 2004, une subvention de 50 000 dollars, ce qui représente 1,3 % du budget total de Reporters sans frontières. La NED nous a aidé, pour la première fois en 2005, en nous versant une subvention de 39 900 dollars. » (29) On remarquera que RSF avoue la subvention 2004 du CFC, mais ne souffle mot de celles des années précédentes. Sa réponse sous-entend donc qu’il n’y en a pas eu.

A ce stade, des questions se posent. De deux choses l’une : ou bien l’information du réseau Voltaire est partiellement fausse et le Center for a Free Cuba n’a pas donné un dollar en 2002 et en 2003, ou bien, si les versements ont débuté en 2002, l’ONG ment encore par omission. (…) - extrait de La face cachée de reporters sans frontières, par Maxime Vivas, éd. Aden 2007 https://www.legrandsoir.info/la-face-cachee-de-reporters-sans-frontier...

Lire aussi Ne dites pas à ma mère que j’ai lu "La face cachée de Reporters Sans Frontières", elle croit que je suis journaliste dans un média libre. https://www.legrandsoir.info/ne-dites-pas-a-ma-mere-que-j-ai-lu-la-fac...

(6) « ETATS-UNIS : TOUTE UNE QUESTION D’IMAGES » - introduction au livre Les Etats-Unis De Mal Empire, ces leçons de résistance qui nous viennent du Sud, par Danielle Bleitrach, Maxime Vivas, Viktor Dedaj, éd. Aden 2005 ) https://www.legrandsoir.info/les-etats-unis-de-mal-empire-ces-lecons-d...

(7) Pourquoi l’UNESCO ne peut pas s’associer à Reporters sans frontières, https://www.legrandsoir.info/pourquoi-l-unesco-ne-peut-pas-s-associer-...

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