Le 10 avril dernier, à l’occasion du 25ème anniversaire du Good Friday Agreement en Irlande du Nord, le président des EU Joe Biden est arrivé à Belfast pour fêter cet accord du Vendredi saint. Un accord de paix signé le 10 avril 1998 entre la Grande-Bretagne, les Royalistes d’Irlande du Nord et Sinn Fein, le parti républicain irlandais. Trente ans de guerre prenaient fin. Fin d’une guerre contre l’occupation britannique de l’Irlande du Nord, qui a coûté la vie à 3 500 personnes.
Anything to say ? est un projet artistique de 2013 de l’artiste italien Davide Domino et du journaliste Charles Glass. Julian Assange, Chelsea Manning et Edward Snowden en bronze grandeur nature sont debout sur trois chaises. Les bras le long du corps, ils regardent un public imaginaire. À côté d’eux, une chaise vide, invitation ouverte au public à y monter. En janvier 2020, les sculptures étaient à Bruxelles, Place de la Monnaie, rebaptisée Place Julian Assange. Au nom du Comité Free Ali Aarrass, j’y ai lu un message de solidarité sous le thème : Julian Assange, Chelsea Manning, Edward Snowden, nous vous sommes tous redevables ! Ainsi je rejoignais les centaines de personnes à travers l’Europe qui se sont exprimées pour dénoncer l’affaire Assange, appelée par plusieurs parlementaires et journalistes comme une farce à la Dickens ou comme l’affaire Dreyfus de notre temps.
En avril 2015, Mme Hillary Clinton a prononcé un discours à l'Université de Columbia dans lequel elle a admis ce que l'on peut lire dans n'importe quelle statistique carcérale : environ un détenu sur quatre dans le monde se trouve dans les prisons des États-Unis (US).(1) Bien sûr, elle n'a pas eu de pensée pour Julian Assange, qui à ce moment était caché depuis trois ans à l'ambassade d'Equateur pour échapper à cette folie carcérale. Elle n'a pas non plus mentionné la peine absurde de 175 ans qu’encourt Assange encourt s'il est reconnu coupable aux États-Unis. Elle ne parlait pas de la peine de mort toujours appliquée, ni du côté le plus sombre du système pénitentiaire US : le régime des prisons de sécurité maximale (supermax) et des mesures administratives spéciales (SAM). Là encore, l'affaire Assange a levé un bout du voile : une juge anglaise a statué en janvier 2020 qu'il ne survivrait pas à une incarcération dans une prison supermax ou à l'imposition des SAM.
(première partie)
Co-signé par Laurent Moulin, Ana Navarro, Jean-Baptiste Godinot, Elisabeth Grimmer, Ernesto Moreno, Stéphanie Guilmain, Camille Seilles. C’est une affaire qui dure depuis six ans. Le 20 mai 2015, une quinzaine de manifestants, armés de… banderoles, entrent dans la Régie des bâtiments pour crier leur opposition à la construction de la maxi-prison à Haren (Bruxelles). Lors de l’action, dans un moment de colère, un manifestant donne un coup de poing sur la maquette de la future prison, exposée dans le hall d’entrée. Elle est cassée.
Dans son jugement du 4 janvier 2021, en 410 points, long de 132 pages, la juge Vanessa Baraitser a rejeté la demande étasunienne d’extradition de Julian Assange. Pour justifier son refus, elle s’est focalisée presqu’exclusivement sur les Mesures Administratives Spéciales (Special Administratives Measures, SAMs) qui pourraient être imposées à Julian Assange.
Imaginez-vous la scène, digne du dernier James Bond. Des voitures blindées en route vers le centre de Londres. À leur bord, des hommes cagoulés et armés jusqu’aux dents. Les voitures s’arrêtent brusquement, les hommes en descendent et pénètrent l’ambassade équatorienne. La porte de l’ambassade est par hasard ouverte et, par hasard aussi bien sûr, la police anglaise regarde dans l’autre direction. Les robocops se jettent sur Julian Assange, le trainent dans une voiture et foncent vers l’aéroport de Londres où un avion de la CIA les attend pour le transporter aux États-Unis. Au cas où ce plan échouerait, il y a aussi le plan B : il faudra l’abattre ou l’empoisonner.
Le 30 septembre 2021, après quatre ans de procédure, la Cour européenne des droits de l'homme a rendu sa décision dans l’affaire Ali Aarrass contre l’État belge (Reynders). Il s’agissait « de savoir si l’État belge avait l’obligation positive de lui accorder son assistance consulaire pour empêcher le risque de mauvais traitement durant son incarcération au Maroc ». Dans sa décision, la Cour a choisi le camp de Didier Reynders, ancien ministre des affaires étrangères belge, devenu entretemps le commissaire européen à la Justice « avec pour mission les Droits fondamentaux et la défense de l’État de droit ».
Nos pays ont érigé la victimisation en nouvelle culture occidentale. Après la conquête du monde pour le christianiser, puis pour lui apporter la civilisation et enfin la démocratie et les droits humains, par le massacre des populations et le vol de leurs richesses, voici venue l’heure de nous présenter comme victimes. Victimes du terrorisme barbare. Victimes des attentats horribles qui ont bouleversé et « changé la face du monde pour toujours », peut-on lire sur presque tous les médias, sans provoquer le moindre froncement de sourcils.