« Demain, grâce à vous, la justice française ne sera plus une justice qui tue. Demain, grâce à vous, il n’y aura plus pour notre honte commune, des exécutions furtives, à l’aube, sous le dais noir, dans les prisons françaises. Demain, c’est l’abolition. »
Robert Badinter (Discours à l’Assemblée française 1981)
Belles paroles en vérité contre la peine de mort si elles étaient appliquées à tous les humains ! « L’affaire Sakineh » a défrayé la chronique pendant cet été et a tenu en haleine les biens-pensants occidentaux qui, comme un seul homme, avec une indignation rarement aussi sélective, se sont autoproclamés les défenseurs de la cause de Sakineh coupable en Iran à la fois du meurtre de son mari et de relations illégales. Le héraut « sans peur et sans reproche, défenseur de la veuve et de ses deux orphelins, est Bernard-Henry Lévy (BHL) a trompé tout le monde, en tout cas celles et ceux qui lui ont fait confiance en signant la pétition contre la sentence de la justice iranienne. La peine de mort par lapidation.
De manière concomitante, une autre affaire pratiquement similaire en tout point avec la même ancienneté est la condamnation à mort de Theresa Lewis déficiente mentale aux Etats-Unis. Aucun média européen n’en a parlé, aucun Bernard-Henry Lévy n’en a parlé, pas l’ombre d’une Elisabeth Badinter [si prompte à diaboliser l’Islam], d’un Alain Finkielkraut voire d’un Alexander Adler. Pire, à l’échelle officielle européenne ou même américaine, c’est le silence total concernant Theresa. Rien à voir avec la réaction d’Hillary Clinton qui dit « réagir en tant que femme » dans l’affaire de Sakineh. Aucune réaction de la part du gouvernement français, aussi bien du président que du ministre des Affaires étrangères qui, dans le cas Sakineh, proposait d’en débattre au Conseil de l’Union européenne.
Est-ce à dire que la cause de Sakineh est plus noble que celle de Teresa ? Pourtant, dans les deux cas, le verdict est le même ? Pourquoi avoir laissé Theresa être exécutée ? Imaginez Theresa et ses derniers instants. « Pour la première fois, écrit Constance Jame, depuis 1912, la Virginie a exécuté une femme. Teresa Lewis, qui a commandité en 2002 l’assassinat de son mari et de son beau-fils, a été tuée par injection létale. Le décès a été prononcé à 21h13 locales à la prison de Greensville. Les derniers mots de Lewis avaient été de demander pardon Des journalistes ayant assisté à l’injection mortelle ont indiqué que Lewis semblait « nerveuse » et « effrayée » en entrant dans la salle où s’est déroulée l’exécution. Si l’affaire a fait grand bruit aux Etats-Unis, c’est surtout, parce que Teresa Lewis souffrait de graves difficultés d’apprentissage qui faisaient d’elle une quasidéficiente mentale et jettent le doute sur sa responsabilité au moment des faits. » (1)
La technique BHL
A l’évidence, ce qui intéresse BHL,véritable Panurge et ses « moutons », c’est comment porter tort à l’Iran, préparer l’opinion, diaboliser l’Islam, en un mot, faire le lit d’une légitimation d’une intervention en Iran pour le plus grand bien d’Israël.Nous allons tenter de comprendre la mécanique diabolique des intellectuels sionistes. Thierry Meyssan décrit le « complot » ourdi par BHL. Ecoutons-le : « Récemment, l’essayiste Bernard-Henri Levy a alerté l’opinion publique sur le cas de Sakineh Mohammadi-Ashtiani. Il a lancé une pétition sur Internet pour faire pression sur les autorités iraniennes et leur demander de renoncer à cette barbarie. L’essayiste concentre ses attaques sur le mode d’exécution. Il écrit : « Pourquoi la lapidation ?? N’y a-t-il pas, en Iran, d’autres manières de donner la mort ? ? Parce que c’est la plus abominable de toutes. Parce que cet attentat contre le visage, ce pilonnage de pierres sur un visage innocent et nu, ce raffinement de cruauté qui va jusqu’à codifier la taille des cailloux pour s’assurer que la victime souffre longtemps, sont un concentré rare d’inhumanité et de barbarie. »
« Le président Sarkozy a confirmé les informations de M.Lévy lors de la conférence annuelle des ambassadeurs de France A l’issue de son discours, il a déclaré que la condamnée était désormais « sous la responsabilité de la France ». Rapidement, de nombreuses associations et personnalités se sont jointes à ce mouvement et plus de 140 000 signatures ont été réunies. Le Premier ministre François Fillon est venu sur le plateau du principal journal de la télévision publique pour manifester son émotion et sa solidarité avec Sakineh, « notre soeur à tous ». Tandis que l’ex-secrétaire d’Etat aux Droits de l’homme, Rama Yade, affirmait que la France faisait désormais de ce cas une « affaire personnelle ».
« Ayant à son tour signé cette pétition, le leader du Parti antisioniste, Dieudonné M’bala M’bala, a été reçu par Ali Zadeh, vice-président du Conseil de la magistrature et porte-parole du ministère de la Justice. L’entretien aura été un modèle du genre. M.Zadeh se demandant si son interlocuteur, humoriste de profession, ne se moquait pas de lui en lui rapportant ses craintes. Tandis que M.M’bala M’bala se faisait répéter plusieurs fois les réponses à ses questions tant il avait du mal à croire avoir été manipulé à ce point. Succédant à la dictature du Shah Reza Pahlevi, la République islamique s’est avant toute chose préoccupée de mettre fin à l’arbitraire et d’instaurer un état de droit le plus rigoureux possible. (...) Le système judiciaire offre donc des garanties bien supérieures à celles des juridictions françaises, et les erreurs y sont beaucoup moins fréquentes. Cependant, les condamnations ont conservé une dureté particulière. Le pays applique notamment la peine de mort. Plutôt que de diminuer le quantum des peines, la République islamique a choisi d’en limiter l’application. Le pardon des victimes, ou de leurs familles, suffit à annuler l’exécution des peines. Du fait de cette disposition et de son usage massif, il n’existe pas de grâce présidentielle. La peine capitale est souvent prononcée, mais très rarement appliquée. Le système judiciaire pose un délai d’environ cinq ans entre le prononcé du jugement et son exécution dans l’espoir que la famille de la victime accordera son pardon et que le condamné sera ainsi gracié et immédiatement libéré ».
« Dans le cas Sakineh, toutes les informations diffusées par Bernard-Henry Lévy et confirmées par Nicolas Sarkozy sont fausses. Cette dame n’a pas été jugée pour adultère, mais pour meurtre. (...) La lapidation, qui était en vigueur sous le régime du Shah, et encore quelques années après son renversement, a été abolie par la Révolution islamique. Indigné par les assertions de Bernard-Henry Lévy et Nicolas Sarkozy, le vice-président du Conseil iranien de la magistrature a déclaré à Dieudonné M’bala M’bala qu’il mettait au défi ces personnalités sionistes de trouver un texte de loi iranien contemporain qui prévoit la lapidation. (...) En définitive, rien, absolument rien de la version Lévy-Sarkozy de l’histoire de Mme Sakineh Mohammadi-Ashtiani, n’est vrai. Peut-être Bernard-Henry Lévy a-t-il relayé de bonne foi des imputations fausses qui servaient sa croisade anti-iranienne. Le président Nicolas Sarkozy ne peut invoquer quant à lui la négligence. Le service diplomatique français, le plus prestigieux du monde, lui a certainement adressé tous les rapports utiles. C’est donc délibérément qu’il a menti à l’opinion publique française » (2)
On comprend sans peine que le président Ahmadinejad, outré par ces comportements ait dénoncé le « silence des médias » sur le cas de Teresa Lewis, comparant sa situation à celle de l’Iranienne Sakineh. « Selon une enquête, 3 millions sept cent mille pages ont été publiées sur Internet à propos de Sakineh Ashtiani dont le dossier est toujours en cours d’examen, et il y a une vaste campagne de presse contre l’Iran. Mais personne ne proteste contre l’exécution de Mme Lewis », a souligné M.Ahmadinejad ; s’agissant de la peine de mort, il faut savoir que même les Etats abolitionnistes n’ont jamais renoncé à la peine de sûreté extrême. Pour le droit commun, ce sont tout simplement des exécutions extrajudiciaires en prison (taux de suicide élevé, homicides et mauvais traitements entre détenus, ma ladies mal soignées...). Enfin, selon des chiffres d’Amnesty International, 1 224 personnes se sont vues ôter tout aussi la vie, aux Etats-Unis, depuis 1977.
Sakineh, une nouvelle Jila Izadi ?
L’affaire Sakineh qui est une « manipulation à grande échelle » par BHL qui sait bien où il va, rappelle l’affaire Jila Izadi, une jeune iranienne de 13 ans condamnée à mort par lapidation. Une campagne médiatique lancée en grande pompe et qui avait fait grand bruit à l’époque suite à la pétition rédigée par Mme Badinter, et Fadela Amara publiée par le journal ELLE (édition du 25 octobre 2004) : « Jila Izadi, une enfant de 13 ans, vient d’être condamnée à la peine de mort par lapidation. Son crime : elle aurait eu des relations avec son frère âgé de 15 ans. Cette ignominie se passe à Marivan, une ville du Kurdistan iranien. (...) Nous savons aujourd’hui que seule une très forte mobilisation, internationale peut réussir parfois à stopper une exécution capitale. C’est pourquoi nous supplions les défenseurs des droits des enfants, les militants de l’abolition de la peine de mort et tous les démocrates horrifiés par ces crimes d’écrire cette seule phrase, par lettre ou courriel signé de son nom : « Non à la lapidation de Jila Izadi, une enfant de 13 ans. » De la rapidité et de l’ampleur de nos protestations dépend sa survie. » Parmi les signataires de cette pétition, figuraient les noms de BHL (l’auteur de la nouvelle pétition version 2010), Ségolène Royal, Frédéric Mitterand, Alain Finkielkraut ; les mêmes qui sont aujourd’hui mentionnés dans la pétition 2010 pour sauver « Sakineh » ».
« Or, quelques semaines plus tard, le Quai d’Orsay nous apprenait qu’il n’y avait pas de fillette de 13 ans condamnée à la lapidation en Iran. Dans ses points de presse relayés sur le site officiel...diplomatie.gouv.fr, le porte-parole du ministère français des Affaires étrangères démentait les informations sur la condamnation à la lapidation de Jila Izadi, petite iranienne de 13 ans. « Nous avons immédiatement vérifié à travers notre ambassade et en liaison avec la Présidence de l’Union européenne, qui a demandé des informations aux autorités iraniennes à ce sujet. Il est apparu que l’information était inexacte. Cette condamnation à la lapidation, n’a jamais été prononcée ».Tous ceux qui ont relayé cette information avaient donc menti... (3)
Suite à ces déclarations, au communiqué de l’ambassade de France en Iran, l’affaire disparaît subitement du paysage médiatique... Plus rien ! Qu’est-t-elle devenue ? A- t-elle été lapidée ? Il faudra attendre un petit communiqué publié en janvier 2005 sur Internet (plus sur ELLE par contre) pour savoir que Jila Izadi a été sauvée de la barbarie de l’Islam. Aucun média n’a fait circuler le démenti du Quay d’Orsay et de l’ambassadeur d’Iran en France... Aujourd’hui, Sakineh risque-t-elle véritablement la lapidation comme l’affirme BHL dans sa pétition « signée en grande pompe par ses fidèles » ? (4)
On savait, début juillet, par les autorités iraniennes que Sakineh ne sera pas lapidée, BHL était parfaitement au courant. Cela ne l’a pas empêché de continuer à mentir avec même l’aide d’Avaaz International qui s’est mobilisé pour cette « noble cause ». Le témoignage suivant,véritable cri du coeur, résume avec des mots simples, le marchandage macabre de BHL. Ecoutons-le : « Aidez-moi, je cherche à contacter de toute urgence Bernard-Henri Levy. L’heure est grave, la vie d’une femme en dépend. Non pas Sakineh une autre femme... Je viens d’apprendre avec douleur, que dis-je, consternation qu’une femme Teresa Lewis allait être exécutée aujourd’hui aux États-Unis dans l’État de Virginie. Je suis persuadée que notre BHL et sa cohorte d’intellectuels bien-pensants, élites de notre nation n’ont pas été informés de ce drame qui va mettre à mort une femme dont la déficience mentale est avérée. (...) Alors, moi je veux comprendre tout comme M.Mahmoud Ahmadinejad, pourquoi existe-t-il une différence de traitement médiatique. (...) La mort serait-elle plus douce chez nos amis américains, plus juste et méritée ? La barbarie ne saurait-elle concerner que l’Iran ou tout pays islamique ? Je veux que l’on m’explique pourquoi une vie n’est pas égale à une autre vie ? Pourquoi Sakineh déchaîne tant de passion, tant de déferlement médiatique, tant de révolte auprès du gouvernement iranien et que l’on fait silence radio pour Teresa Lewis ? Pourrait-on imaginer que BHL ne monte au créneau uniquement quand il s’agit de taper sur l’Iran, grand ennemi d’Israël ? Pourrait-on imaginer que la vie d’êtres humains ne soit qu’un outil pour gérer sa carrière ? A toi Teresa, toute criminelle que tu puisses être, (tout comme Sakineh qui a été accusée de complicité de meurtre), je te dédie ce billet. Ta déficience mentale n’a pas été jugée par BHL digne d’intérêt. Ta vie pour BHL ne vaut rien, l’imposture de ce pseudo-philosophe dévoilée (se rappeler ses nombreux mensonges, entre autres ses soi-disant rencontres avec Massoud). Tu n’es pas Sakineh, tu n’es pas Roman Polanski ni le soldat Shalit. BHL choisit ses causes et nous donne même des leçons. » (5)
Pourquoi BHL ne s’est pas investi avec le mêle zèle de bénédictin pour se montrer dans les médias de ses potes, pour faire signer une pétition à ses frères de combat ? Peut-être que parce qu’il ne faut pas faire de peine aux Etats-Unis ? Car, contrairement à Sakineh qui est un bon prétexte pour salir sur l’Islam et les Palestiniens, critiquer l’Amérique cela reviendrait à critiquer le plus solide ami d’Israël. Où sont les professionnels... de l’indignation sélective ? Le sort de Teresa Lewis ne cadre, à l’évidence, pas avec la « stratégie sioniste ». L’affaire Sakineh nous rappelle aussi les techniques de manipulation de l’information occidentale ; deux exemples célèbres : l’affaire des bébés éventrés par les soldats de Saddam dans les maternités du Koweït. Une soi-disant infirmière du Koweït avait servi de témoin aux USA. Il s’est avéré par la suite qu’il s’agissait d’un mensonge destiné à justifier la première guerre du Golfe ; et que la prétendue infirmière n’avait jamais mis les pieds dans une maternité ; elle était tout simplement la fille de l’ambassadeur du Koweït aux USA. Le deuxième exemple est celui de la soldate noire soit disant « délivrée » par les GIs selon un scénario à « la chute du Faucon noir ». En fait, elle était blessée par des tirs amis et recueillie par un chirurgien irakien qui a sauvé la vie de cette soldate en remuant ciel et terre pour lui trouver du sang « O » mettant à contribution un parent à lui qui avait le même groupe. On pourrait aussi citer l’un des prétextes pour envahir l’Afghanistan, en 2001- aller délivrer les femmes afghanes de l’emprise des Talibans : un CD diffusé par les GI’S : « Afghane enlève ta burqa ».
Comment combattre en définitive, l’infamie de ces idéologues du mal qui gangrène le dialogue islamo-chrétien ? C’est tout le défi des hommes de bonne volonté. C’est toute l’indignation ay quotidien pour traquer et blâmer les mauvaises fois des imposteurs qui continuent à manipuler les foules en toute impunité.
Pr Chems Eddine CHITOUR
Ecole Polytechnique Alger enp-edu.dz