À son habituelle rhétorique, régulièrement étalée dans "La Libre", Mr Destexhe ajoute que la Belgique serait "un pays plus ouvert aux étrangers que tous ses voisins", y décrit le racisme, qu’il prétend définir, et l’homophobie comme "marginaux" et se lamente du sort du "pauvre Belge", victime de "professionnels de l’indignation". Il brandit ensuite la présence de Mr Di Rupo au gouvernement et de Mme Dahrmouch à RTL pour seule preuve de ses propos. Qu’une femme ait été Premier Ministre du Pakistan, qu’une autre dirige le Bangladesh, qu’un noir préside l’Afrique du Sud ou qu’un métis soit à la tête des États-Unis démontre-t-il la disparition du sexisme ou du racisme dans ces pays ?
Mr Destexhe est parlementaire libéral. Je me dois de lui rappeler qu’il bafoue à nouveau la constitution qu’il a juré de protéger en opposant "le pauvre Belge" aux Belges d’origine étrangère, musulmans ou homosexuels. Lui rappeler également que les "individus (sic) de seconde, troisième voire quatrième génération" n’ont nullement à "s’intégrer". Qu’il lui revient "d’intégrer" un fait : ces "individus" sont Belges et ont les mêmes droits et les mêmes devoirs que tout citoyen. Ni plus, ni moins.
Mr Destexhe se prétend le chantre de la lutte contre le "communautarisme". Rien n’est plus faux puisqu’il ne cesse de catégoriser l’autre en fonction de ses appartenances culturelles, ethniques, religieuses et, fait nouveau, de son orientation sexuelle. Mr Destexhe se réserve en réalité le droit de stigmatiser diverses communautés tout en leur interdisant de se définir comme telles, leur déniant ainsi le droit de lui répondre.
Les constats de Mr Destexhe sont étonnants. Que l’on parte du particulier ou du général, on ne peux malheureusement qu’aboutir à la conclusion inverse quant à la réalité belge.
Du particulier, les archives de presse témoignent d’une "blague" indubitablement raciste visant "les Norvégiens", d’une famille turque massacrée à Schaerbeek, d’un intérim "blanc bleu belge", d’une tuerie raciste à Anvers, d’indignes interventions policières, d’une agression homophobe au Fontainas, d’un météorologue tempétueux, de patrons déclarant publiquement refuser d’embaucher "des arabes ou des noirs", d’un ministre expatriant Molenbeek, d’un éditorialiste de "La Libre" mêlant mariage pour tous et islam comme causes de nos maux,… Et comment oublier les tortures ayant précédé le décès de ce jeune Liégeois ayant eut le tort de cumuler les trois tares fondamentales aux yeux de Mr Destexhe ?
Du général, tant les derniers rapports du Conseil de l’Europe que les études menées conjointement par l’Université Libre de Bruxelles et l’Université Catholique de Louvain concluent en la croissance des discriminations, principalement ethniques, en particulier en matière d’accès à l’emploi, et en l’insuffisance des réponses apportées. Mr Delruelle était ainsi fier d’annoncer sur le plateau de Mise au point que le Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme n’avait déposé que deux plaintes en justice sur les deux dernières années… à l’encontre de membres de Sharia For Belgium. Nulle réaction de l’assistance ne suivit cette déclaration désespérante d’incompétence, à l’exception heureuse d’une remarque ironique et cinglante de Maître Doutrelepont.
Nonobstant ces faits, Mr Destexhe dénonce l’antiracisme qui "exclu, sali et tue socialement" et voue tant le centre que la droite aux gémonies pour leur lâcheté face à une gauche moralisatrice. De ces vitupérations ressort une évidence : Mr Destexhe n’a sa place ni à gauche, ni au centre, ni à droite.
Peu importe la définition donnée au racisme, à la xénophobie, à l’islamophobie ou à l’homophobie. Injures, violences, discriminations au logement, à l’embauche, au travail, face à la justice ou l’administration... ces réalités ne peuvent être gommées par une modification de vocabulaire. Tel est le quotidien sans cesse plus oppressant en cette période de crise d’une importante partie de la population d’origine étrangère, de confession musulmane ou homosexuelle. De Belges que Mr Destexhe a juré de servir et non de stigmatiser. De membres d’une société qu’il a juré de rendre meilleure et qu’il travaille pourtant sans relâche à diviser. C’est ce qui importe et doit lui être rappelé par son chef de parti. Il est plus que temps.
Un "individu de seconde génération".
Shanan Khairi