Les Etats-Unis d’Europe (sous la forme d’un système fédéral) ne se feront pas, mais s’ils étaient créés ils seront à fortiori ultraréactionnaires.
Partout la pauvreté ne cesse de progresser, il suffit de lire le dernier rapport du Secours Catholique sur cette question de la misère grandissante au moment où l’Europe envisage de ne plus écouler la surproduction dans le circuit caritatif afin de maintenir les cours et de respecter le dogme de la concurrence libre et non faussée selon les critères libéraux.
Alors que la France n’a jamais eu un PNB (produit national brut qui englobe l’ensemble des richesses issues des entreprises françaises au niveau national et international) aussi important, de près de 2400 milliards soit une progression de 30 % en 10 ans, le PIB (produit intérieur brut qui concerne les richesses produites en France sur le territoire national), est en baisse constante, avec un chiffre record de moins 7.5% entre 2011 et 2012.
Un autre chiffre alarmant, la richesse moyenne est passée, pour chaque citoyen français ou séjournant sur le sol national avec un titre de séjour, de 36 000 euro à 34 000 euro entre 2010 et 2011, et passera à 32 000 euro en 2012. Mais cette moyenne est modifiée quand on enlève les demandeurs d’emplois et les jeunes, on arrive à une richesse moyenne de 100 000 euro pour 48% de la population. Pour information la richesse moyenne d’un habitant du Luxembourg dépasse les 255 000 euro.
Quand le nombre de pauvres en France, subsistant avec une somme de 450 euro (le smic polonais) à 900 euro (le smic espagnol), atteindra en 2013 la barre des 10 millions, celui des millionnaires en euro ne cessent de grimper, ils étaient 2.6 millions en 2011, et en termes de fortunes personnelles, la France se classe 4ème au niveau mondial… et cela n’est pas l’effet Loto vanté dans les spots publicitaires.
Il y a donc un véritable problème de partage des richesses, mais tout réside dans la réflexion sur le partage des richesses, sur ce qu’est la richesse, sur ce qu’est la propriété et ce qu’est le patrimoine.
En effet, la spéculation aidant, un ouvrier propriétaire d’une maison en proche-banlieue d’une grande ville voit la valeur de son patrimoine grimper mais pour autant il est souvent plus pauvre d’année en année, c’est aussi le problème rencontré dans des lieux hier désertés mais aujourd’hui devenus lieux de villégiature à la mode. Dans le même temps, le propriétaire rentier d’un ensemble immobilier à caractère spéculatif peut tout autant voir la valeur de son patrimoine s’effondrer par la venue d’une nuisance telle qu’un aéroport, une autoroute ou une usine de retraitement…
C’est bien la démonstration que dans nos vies quotidiennes, nous sommes confrontés à la valeur de l’argent qui n’est plus basé sur la force de travail, sa valeur réelle, mais sur une offre/demande liée au marché et à la spéculation qui n’ont plus de limite et qui ne sont pas encadrés.
Ainsi, on peut être riche d’un patrimoine et en même temps avoir une grande difficulté à finir le mois alors qu’on a un travail. Pour autant on peut être pauvre et fils de pauvres et ne pas avoir de travail, et vivre dans des conditions proches de la misère dans un lieu proche de l’insalubrité. On peut aussi être riche héritier et vivre de sa rente dans le luxe d’un hôtel particulier.
Tout le problème de cette dialectique est de délimiter la borne qui sépare le travailleur ayant un patrimoine qui a profité du boursicotage qui fait grimper les valeurs sur une base incontrôlable, le travailleur n’ayant rien… avec le riche héritier ou le riche entrepreneur qui ne vivent que par l’exploitation ou la spoliation des premiers. Dans cette société capitaliste, où il faudrait n’être que « gagnant » dans la culture du paraître, on est presque pris pour un « perdant » si on refuse de devenir propriétaire. Le pire est que tout cela est entré dans les moeurs alors que la solution de la propriété collective passe pour une solution démodée.
Aussi, qui dit collective, ne veut pas dire qu’on serait tous mélangés sous le même toit avec une cuisine, une salle de bain ou des toilettes communes, le temps des hippies bourgeois est dépassé. Cela veut dire que les logements appartiennent à l’Etat centralisateur qui contrôle, et qui les loue à leur véritable valeur ou les attribue selon les besoins et non pas selon un statut social prédéfini par le système de classes imposé par le capitalisme.
Mais si cela semble possible pour les logements, cela l’est tout autant pour le reste, allant de la production au commerce et aux échanges, en passant par les services, l’agriculture et l’élevage.
Aussi si nous pouvons vivre sans le capitalisme, le capitalisme ne peut pas vivre sans nous, pourtant c’est lui qui domine, simplement parce qu’il offre plus « de liberté individuelle » en apparence, c’est-à -dire la liberté de posséder pour soi, de créer pour soi, de produire pour soi, afin de gagner de l’argent pour soi et de vivre pour soi... sans trop être ennuyé par les règles, les valeurs et les principes de la possession collective qui vont à l’encontre de la propriété privée et individuelle qu’elle soit immobilière, de production ou commerciale.
C’est pour ces raisons que le capitalisme s’est formé en classes et en sous classes : grande, moyenne et petite bourgeoise / ouvrière, prolétarienne, moyenne… et aussi « lumpen » (c’est-à -dire ceux qui n’ont perdu la conscience d’appartenir à une classe sociale) qui se renforce en cas de crise pour se sauver soi-même sans s’occuper des autres quitte à éliminer les autres (les forces fascistes y sont puisées)
Et c’est principalement en cela que sera dangereux pour les peuples, le fédéralisme des Etats-Unis d’Europe s’ils étaient créés, et c’est aussi en cela qu’il est dangereux de propager l’illusion d’une Europe sociale où « les droits transnationaux et fondamentaux » seraient élevés à tous sur la base du meilleur.
L’intérêt des capitalistes, à la fois concurrents et unis, est de créer une zone de libre échange et de productions la plus profitable en termes de coûts, la tendance n’est donc pas à un glissement des droits fondamentaux vers le haut mais à un tassement vers le bas.
L’autre intérêt affiché, c’est la sacro-sainte propriété privée des moyens de productions et d’échanges sur la base d’une concurrence libre et non faussée. Ce qui sous-entend que l’Europe est vouée à devenir une zone de production à bas coût, c’est-à -dire une zone où droits sociaux, acquis et conquis doivent disparaître pour ne plus être des obstacles à la compétitivité qui permet de concurrencer les autres zones à bas coût. Aussi, tout est entrepris d’une manière idéologique pour mettre le travailleur d’un pays à bas coût, comme le concurrent principal.
Ceci est entrepris au niveau du monde, avec par exemple la concurrence du travailleur chinois, mais aussi au niveau de la zone euro avec le travailleur roumain. Mais l’idéologie dominante fait aussi que le travailleur salarié voit le chômeur comme un rival, et le chômeur voit l’immigré comme un rival, et le laisser pour compte d’un pays pauvre du sud voit le pays riche du nord comme un eldorado.
Nous sommes bien dans la création encore inachevée d’un nouvel impérialisme, celui de l’Europe, destiné à sauver les intérêts des capitalistes de la zone euro, c’est donc une création réactionnaire qui ne peut qu’être combattue qu’en défendant au corps à corps les droits et les acquis nationaux gagnés de hautes luttes par les travailleurs et leur avant-garde ouvrière.
Prôner la « révolution » européenne en propageant l’idée et l’illusion d’une possible Europe sociale, est du même acabit que prôner la révolution mondiale… elle est impossible tant les différences, les cultures, les langues, les traditions et les religions sont différentes, et tant la puissance capitaliste est là , unie autour d’une table à Bruxelles et bien en place dans les pays.
Quand les syndicats et des partis politiques veulent faire passer le message de la possibilité d’un salaire minimum européen basé sur le plus haut taux, ou d’un code du travail et des conventions collectives européennes basées sur les meilleures…, ont-ils conscience de ce qu’ils avancent et du boulevard qu’ils ouvrent aux ultranationalistes qui sont les appendices des ultralibéraux ?
C’est la pire des méthodes pour détruire les acquis gagnés et les droits arrachés par les peuples en lutte dans chaque pays : c’est la négation des luttes ouvrières qui ont élevées le niveau social et qui ont servies d’exemples et d’expériences à d’autres peuples… c’est aussi créer le sentiment d’impuissance des progressistes dans chaque pays, et donc donner de la voix aux fascistes xénophobes et chauvins.
Aussi, tant que les fondamentaux seront annihilés par de tels discours émis par de mauvais magiciens, et par les comportements individualistes qui consistent à se replier sur soi pour se défendre soi, pour défendre ses propres intérêts, la propriété privée et la pensée féodale de patrimoine en tant que liberté individuelle ; c’est-à -dire donner du gage à la négation de la luttes des classes et de l’intérêt collectif à modifier le système là où c’est possible concrètement, ce que l’idéologie capitaliste réussit à distiller et à combattre, nous nous dirigerons dans la gueule du loup qui n’aura plus qu’à nous croquer pour nous rejeter en crottes.
Mais pouvons-nous convaincre si nous-mêmes nous ne sommes pas convaincus ?
Les Cahiers communistes du « Comité de Base » : comibase@gmail.com
n°18/ 9-11-2012
Cellule ouvrière du bassin minier ouest du Pas-de-Calais.