Che Guevara, icono inmortal, Ben Heine.
Septembre 2007.
C’ est l’heure des brasiers et on ne doit voir que la lumière.
José Martà [1]
Le Che gagne un nouveau combat
Lisez bien ce nom : Mario Terán. Demain personne ne s’en souviendra, comme cela lui est déjà arrivé il y a quatre décades, quand on l’a transformé en simple nouvelle. Mais maintenant, je vous demande pour un instant seulement, de bien enregistrer ce nom dans vos mémoires, pour que personne n’oublie et que tous nous jugions.
Le fils de ce monsieur s’est présenté au journal « le Devoir » de Santa Cruz, en Bolivie, pour demander la publication d’une note de remerciement aux médecins cubains qui avaient rendu la vue à son vieux père, après l’ avoir opéré de la cataracte, grâce à l’Operación Milagro, un vrai miracle. [2]
Le père de ce bolivien reconnaissant est Mario Terán. A nous qui sommes plus âgés, il se peut que ce nom nous dise quelque chose. Les jeunes n’en ont peut-être jamais entendu parler.
Mario Terán était le sous-officier qui a assassiné le Commandant Ernesto Che Guevara, le 9 octobre 1967, dans la petite école de la Higuera.
En recevant l’ordre de ses chefs, il a dû avoir recours à l’alcool pour se donner du courage et pouvoir l’exécuter. Lui-même a raconté ensuite à la presse qu’il tremblait comme une feuille devant cet homme qu’il vit à ce moment-là « grand, très grand, énorme ».
Le Che, blessé et désarmé, assis sur le sol de terre de cette humble petite école, le voyant hésitant et craintif, eut tout le courage qu’il manquait à son assassin pour ouvrir sa chemise vert olive râpée, découvrir sa poitrine et lui crier : « Ne tremble plus et tire ici, car tu vas tuer un homme... »
Le sous-officier Mario Terán, en accomplissant les ordres des généraux René Barrientos et Alfred Ovando, de la Maison Blanche et de la CIA, a tiré sans savoir que les blessures mortelles ouvraient des trous près de ce coeur pour que celui-ci continue de marquer l’heure des brasiers.
Che n’a pas fermé les yeux après sa mort, pour continuer à accuser son assassin.
Aujourd’hui, Mario Terán n’a pas eu à payer un seul centime pour son opération de la cataracte faite par des médecins cubains dans un hôpital offert par Cuba et inauguré par le président Evo Morales, à Santa Cruz.
Vieux maintenant, il pourra apprécier de nouveau les couleurs du ciel et de la forêt, jouir du sourire de ses petits-enfants et assister à des matchs de foot-ball. Mais il ne sera certainement jamais capable de voir la différence entre les idées qui l’ont amené à assassiner un homme de sang froid et celles de cet homme qui ordonnait aux médecins de sa guérilla de prendre soin de leurs compagnons d’armes aussi bien que des soldats ennemis blessés, comme ils le firent toujours en Bolivie, tout comme ils l’avaient fait auparavant dans les montagnes de la Sierra Maestra, sur ordres stricts du Commandant en Chef Fidel Castro.
Souvenez-vous bien de ce nom : Mario Terán, un homme élevé dans l’idée de tuer qui retrouve la vue grâce aux médecins partisans des idées de sa victime.
Quatre décades après que Mario Terán a tenté, avec son crime, de détruire un rêve et une idée, le Che gagne un nouveau combat. Et il poursuit sa campagne...
Hector Arturo
– Tiré du journal Granma
– Note et traduction : Gloria González Justo
– Transmis par Cuba Solidarity Project
Des médecins cubains ont rendu la vue à l’homme qui tua le "Che", par Philippe Zygel.
AFP, 3 octobre 2007.
La légende d’Ernesto "Che" Guevara n’est pas à une contradiction près : le soldat qui exécuta il y a 40 ans le guérillero légendaire dans le maquis bolivien vient de retrouver la vue grâce à des médecins cubains.
L’"opération miracle", ainsi que l’appellent les praticiens cubains sillonnant l’Amérique latine pour soigner gratuitement les pauvres de la cataracte, n’a jamais autant mérité son nom en Bolivie.
L’ex-sergent Mario Teran s’est fait discrètement opérer à Santa-Cruz (est), la seconde ville du pays, à quelque centaines de kilomètres du hameau de La Higuera, où le 9 octobre 1967 il acheva d’une rafale de mitraillette le "Che", prisonnier depuis la veille dans une petite salle d’école.
La nouvelle, rendue publique ce week-end par Granma, le journal officiel de La Havane, a eu l’effet d’une petite bombe dans le "centre ophtalmologique de Santa Cruz", tenu par les médecins cubains et récemment inauguré par le président bolivien Evo Morales, admirateur déclaré de Fidel Castro.
"On a été indigné quand on a appris la nouvelle à la radio. Le type ne s’est évidemment pas présenté ici en disant qu’il était l’assassin du Che", a affirmé lundi à l’AFP Margarita Andreu, la directrice de l’établissement, où quatre médecins soignent plus de 100 personnes chaque jour.
Les affiches à l’effigie du Che ou des photos du "guérillero héroïque" aux côtés du "Lider Maximo" fleurissent sur les murs de ce cube de béton blanc, où s’entassent des dizaines de patients à lunettes noires ou l’oeil dissimulé sous une compresse.
"C’est incroyable. Il y a des gens qui n’ont pas honte. Comment a-t-il osé entrer ici", glisse Miguel Orellano, un agriculteur de 35 ans, venu se faire opérer.
"Les gens qui passent ici ne donne pas toujours leur véritable identité, parfois ce sont des faux papiers, ce n’est pas notre problème", souligne la directrice, une femme robuste au regard soupçonneux.
Le registre de la clinique laisse d’ailleurs apparaître trois patients au nom de "Mario Teran" et les médecins ignorent même lequel est l’ancien soldat.
Toutefois, malgré sa colère, Margarita Andreu jure qu’elle aurait soigné le soldat bolivien même en sachant son identité. "C’est notre devoir, notre obligation. Et puis, le Che a déjà gagné une autre bataille", clame-t-elle.
L’article de Granma ne dit pas autre chose : "désormais à la retraite, (Teran) pourra apprécier à nouveau les couleurs du ciel et de la forêt, profiter du sourire de ses petits-enfants (...). Mais il ne sera sans doute jamais capable de faire la différence entre les idées qui l’ont conduit à assassiner un homme de sang froid et celles de cet homme".
Après l’opération, le fils de Mario Teran s’est de lui-même déplacé au journal local El Deber (Le Devoir) pour témoigner de sa reconnaissance envers les médecins cubains, dans un bref filet sans autre commentaire.
Après la mort du Che, l’ancien sergent a poursuivi sa carrière jusqu’au grade de sous-officier dans l’armée bolivienne, avant de s’évanouir dans la nature au moment de sa retraite. Il n’a jamais voulu s’exprimer publiquement.
Philippe Zygel
Bolivie La présence de 1700 médecins cubains dispensant des soins de santé suscite éloges et polémiques, par Martin Garat.
Cuba, l’île aux miracles, par Salim Lamrani.