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En finir avec le capitalisme n’est aujourd’hui qu’une étape

Au travers des élucubrations précédentes [1], il n’est pas difficile de percevoir un mélange de rage et de frustration. Mais sur un plan rationnel émerge un ensemble de considérations parmi lequelles s’affirme que la nécessité de renversement du capitalisme se décline aujourd’hui différemment qu’elle pouvait s’imposer au dix-neuvième et vingtième siècle. Quand pour Marx il s’agissait à la fois de reconnaître l’histoire de l’humanité pour celle de la lutte des classes et de l’exploitation de l’homme par l’homme, ainsi que d’appeler au renversement d’un système fondé sur le vol, et quand pour Lénine la question essentielle relevait d’établir une société assurant avant tout la justice pour la classe ouvrière, nous sommes aujourd’hui confrontés à un monde où la domination impérialiste se nourrit des limites mêmes des capacités humaines et naturelles à assurer la perpétuation de la vie.

Le stress démographique et le stress environnemental ont pris de telles proportions en un siècle, que l’abolition du capitalisme soit devenue une nécessité sanitaire et non plus seulement sociale ou morale. Parce que la prospérité de l’impérialisme implique l’augmentation constante du pillage, de l’exploitation et des ravages environnementaux, sa remise en cause ne se résume plus à l’exigence de justice mais bien à celle d’une condition de survie spécifique. Il en dérive qu’il soit un tort de désigner seulement le profit comme tare de l’impérialisme. Si l’exploitation des êtres humains et des milieux naturels méritent de condamner celles et ceux qui en profitent au détriment de l’intérêt général, ce n’est en aucun cas en résumant au seul principe de capitalisation financière l’objet à abattre qu’il sera possible d’envisager l’avenir avec un quelconque optimisme.

Le problème pour nous habitants du vingt-et-unième siècle, serait d’abord de nous construire une représentation globale en terme d’alternative en commençant par admettre la réalité d’un certain nombre de contraintes. La première d’entre elles relève d’une considération à sa mesure des différentes fragilités du système capitaliste en lui-même, à savoir pour commencer son abstraction qui menace chaque jour la planète d’un effondrement boursier catastrophique. La deuxième relève de l’intime liaison des intérêts industriels à la disponibilité des ressources non-renouvelables. La troisième et non des moindres, tient à la structuration de l’aménagement des milieux de vie, intensément fragilisée par l’essor urbain de l’économie à flux tendu.

Cette dernière problématique d’absolue dépendance des conditions vivrières d’une majorité des habitants du globe est évidemment le point essentiel autour duquel devrait se nouer les transformations à venir. Reconnaissons donc qu’il procède d’une espèce d’inversion à revendiquer la fin du capitalisme pour autre chose que comme un moyen d’établir un ordre mondial aussi bien que local, qui soit à nouveau vivrier, à savoir soutenable pour une majorité, au-delà d’une semaine. Nous nous trouvons là confrontés à un défi humain dont même les plus cupides et les plus obtus des capitalistes eux-mêmes ne sauraient nier le caractère concret. Qu’on abolisse les prébendes, les profits, les potentats et tout ce que la féodalité du capitalisme représente n’aura pas en soi la capacité de transformation suffisante sinon pour consolider au moins pour mieux garantir la satisfaction des besoins de huit milliard d’êtres humains. En d’autres termes elle ne relève que d’une étape, indispensable certes, mais loin de constituer une recette miracle pour nous assurer un futur viable.

C’est sans doute pourquoi j’ai insisté à Toulouse pour poser la question des utopies dans Nuit Debout, et dont à part quelques slogans, il faille malheureusement relever qu’il ne fassent pas vraiment avancer les discussions, il n’ait pas été donné de lire de suites notables. C’est d’autant plus fâcheux que nombre de défis critiques et concrets se posent aujourd’hui dans des termes renvoyant plus à la dystopie. En effet, pouvons-nous nous mobiliser en excluant toutes perspectives de constructions envisageables dans le cas d’un effondrement endogène du capitalisme ? Pouvons-nous engager des dynamiques de transformation forte de nos sociétés en traitant seulement à la marge la question des tensions politiques à l’oeuvre dans le démélé militarisé du pillage des ressources de l’Afrique et du Moyen-Orient entre les trois blocs chinois, russe et de l’Otan ?

Il est pour moi de préoccupation constante depuis des lustres que ces questions internationales revêtent un caractère principalement déterminant du présent comme du futur et qui conduise à s’affliger de les voir complètement absentes du démélé politique au quotidien. Ne parlons même pas des programmes électoraux auxquels nous ayons droit à chaque élection présidentielle et dont elles soient constamment absentes. Habitant un pays faisant profession de foi de "dissuasion nucléaire" il est pour le moins fâcheux d’assister dans la durée à l’occultation ou à la minimisation de cette question en réalité fondamentale. Mélenchon, qui a bonne presse actuellement, remet-il en cause cette prétendue "dissuasion" ? pas le moins du monde. Il se contente de préférer les missiles sol-sol pour menacer la planète. Beau progressisme en vérité.

Si il est fréquent de me lire critiquer ces "progressistes" c’est comme pour ce cas là, que je ne les considère pas pour tels. Ils m’énervent plus que les droites par leur prétention à l’humanisme qui n’est sur le fond qu’un masque. Car sur le fond il n’y a pas d’autre posture pacifiste que celle éxigeant d’un désarmement nucléaire unilatéral. Toute autre position relève du blanc-seing aux intérêts impérialistes prêts à sacrifier la planète dans la défense de leur intérêt. Rien qu’adhérer à un tel principe est immonde. Personne ne me convaincra qu’il s’agisse là d’une question secondaire. La question atomique dans son ensemble est révélatrice du sens profond dans lequel travaille toute notre société. Et il ne s’agit en rien d’un symbole mais de l’expression la plus crue du mépris contemporain à l’égard du vivant. La bêtise contemporaine c’est imaginer un humanisme qui s’accomoderait des contaminations et destructions dont il s’agisse.

Humanisme mon cul ! dirait Zazie. Si c’est pour entretenir l’illusion que n’ayons pas déjà un héritage atomique qui va sévèrement handicaper la survie de tout ce que la planète compte de vivant, comme en témoigne déjà le peu de considération de la prétendue "communauté internationale" à l’égard de ce qui se passe actuellement dans l’Océan Pacifique, on peut toujours fanfaroner en causant "developpement durable" ou "écologie politique" ou même "justice sociale". Les radionucléides eux s’en foutent, qui pour des milliers d’années se répendent en altérant l’ADN de tout ce qui vit.

Donc voilà. Je veux bien me mobiliser contre le 49.3 mais j’ai malheureusement pas mal de préoccupations allant au-delà et dont j’aie tout aussi malheureusement l’impression qu’elles relèvent d’un démélé du futur beaucoup plus important. Il n’est pas question bien sûr de relativiser la porté ni l’intérêt à s’attacher aux termes de la démocratie ou à ceux de la justice sociale, mais d’insister dans la nécessité de définir avec hiérarchie et précision les enjeux que nous considérerions fondamentaux. Le futur, à condition d’en vouloir un, c’est qui doit nous permettre de survivre sans guerre atomique, sans risquer des famines et contaminations monstrueuses du fait d’une urbanisation dont personne encore n’assume que la remise en cause s’impose pour qui souhaiterait que notre espèce et les autres survivent à ce siècle.

Et là-dessus je ne vois pas très bien en quoi reprendre les "idéaux" du Parti de Gauche ou de Mélenchon pourrait susciter un quelconque enthousiasme. Car ce qu’ils ne font qu’avancer c’est un ensemble d’exigences purement locales et qui en rien ne prenne en compte les menaces les plus importantes auxquelles nous soyons confrontés.

»» https://warinthewest.wordpress.com/2016/05/12/en-finir-avec-le-capital...

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