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Espagne : la gestion désastreuse de la crise à Madrid

« Tu veux que je reste confiné chez moi quand je reviens d'avoir traversé tout Madrid en métro, avec une attestation de travail, nettoyé tes rues, m'être occupé de ton père malade, t'avoir servi à manger ou déposé sur ton paillasson le petit colis commandé à Amazon ». Les habitants des quartiers du Sud de Madrid, qui seront confinés dès demain, sont sortis massivement, au pied de leurs immeubles, ce dimanche midi. Mais qu'on ne s'y trompe pas, ils ne manifestent pas pour leur "liberté bafouée par le port du masque" (port du masque largement approuvé et suivi par les Espagnols), ni pour dénoncer le "grand complot" du coronavirus, auquel ils ne croiraient pas.

On est bien loin de tout cela !

Ce dont il est question ici, c’est de la gestion désastreuse de la crise, par le gouvernement régional de Madrid, notamment du budget d’urgence (reçu du fédéral, comme toutes les autres régions) et englouti presque exclusivement aux fins de relancer le secteur privé (grandes chaînes d’hôtels, grands entrepreneurs, éleveurs de taureaux de corrida – qui ont reçu 4,5 millions d’euros – et même l’église !).

En revanche... les services publics – en particulier la santé, déjà mal en point, comme chez nous mais en pire – ont été totalement délaissés, alors que cet argent était supposé les renforcer. Peu d’engagement de personnel soignant supplémentaire, à peine 500 enseignants de plus (+0,5%, alors que les autres régions en ont engagé en moyenne 5% de plus, pour pouvoir donner cours à de plus petits groupes par classes), aucun renforcement des transports en commun, bondés aux heures de pointe...
Autant dire que les quartiers populaires ne pouvaient qu’être touchés par une seconde vague, bien plus que d’autres villes/régions (5 fois plus que Barcelone, deuxième ville du pays, 10 fois plus que Valence, troisième ville).

Et avec ce confinement très sélectif (850.000 habitants sur quelques zones très densément peuplées et très ciblées) les voilà maintenant montrés du doigt, stigmatisés, victimes de la "double peine" et enfermés dans leurs (petits) appartements. Enfin, pas complètement, puisqu’il pourront sortir... avec une attestation pour aller travailler, empruntant des métros toujours aussi bondés, pour aller servir dans les bars des beaux quartiers, s’occuper des personnes âgées seules ou dans des résidences, nettoyer les chambres d’hôtel et des hôpitaux, balayer les rues, livrer des pizzas à domicile... Mais en rentrant chez eux, pas question d’aller à la plaine de jeux du coin avec leurs enfants.

Honteux. Humiliant !

Les critiques des habitants visent particulièrement la présidente de la Région, Isabel Diaz Ayuso, incarnation de cette gestion chaotique (ou délibérément foireuse pour mettre en difficulté le gouvernement fédéral, on est en droit de se poser la question), qui a multiplié les décisions contestables et les déclarations surréalistes et provocatrices, du type "Dans ces quartiers (du sud de Madrid), nous avons une immigration dont le style de vie favorise les contagions"...

Ou encore, "Je suis aux côtés de ceux qui souffrent, d’ailleurs à partir de maintenant, j’irai plus souvent à la messe et aux corridas (une obsession).

Au début du mois de mai, elle faisait la une d’un quotidien de droite, toute de noire vêtue et la larme à l’oeil, en Mater Dolorosa. Récemment, elle annonçait la construction d’un nouvel hôpital de campagne, le précédent (facturé à des prix hors sol et payé en argent public) ayant été démonté au mois de mai... ainsi que la possible fermeture de 20 centres médicaux de quartiers...

Et la semaine dernière, elle annonçait à quelques jours d’intervalle la mise en confinement des quartiers pauvres et une diminution de l’impôt régional pour les plus aisés.

« No es confinamiento, es segregación".

Les habitants dénoncent les mesures qui tiennent davantage de la ségrégation et de la stigmatisation que du confinement, et demandent un renforcement de la santé publique, plus de dépistages, davantage de moyens pour l’éducation, l’augmentation des fréquences de métros pour diminuer les risques de contagions...Et la démission d’Isabel Diaz Ayuso, surnommée "Isabel La Caótica", en référence à Isabel la Católica, et aux photos publiées au mois de mai.

Mise à jour, ce lundi 21/9 à 12h.

Déclarations d’avant la rencontre Ayuso-Sanchez :

Ayuso annonce qu’elle demandera à Sanchez l’aide de l’armée "pour contrôler les zones où s’appliquent les restrictions".

Quant à Almeida (le maire de Madrid), il déclare : Sanchez n’est pas le bon Samaritain qui vient pour nous aider, c’est son travail...

On le voyait venir :

Voilà des mois que Madrid sabote l’effort collectif contre le coronavirus, en privilégiant l’économie au détriment de la santé, des transports publics, de l’éducation.

Confiner quelques quartier populaires est une décision injuste qui arrive tard et les dirigeants de Madrid savent parfaitement qu’elle est vaine.

Appeler Sanchez à la rescousse n’a d’autre objectif que de lui faire endosser les décisions impopulaires qui s’en suivront et le mettront dans une situation délicate, vis-à-vis de son électorat... Difficile de conclure simplement à de l’incompétence : on a clairement affaire à une stratégie de la droite espagnole pour faire tomber le gouvernement de centre-gauche.

Il faut savoir qu’en 2008, lors de l’explosion de la bulle financière, c’était Zapatero (socialiste) qui était au pouvoir depuis quelques mois, tout comme aujourd’hui, le gouvernement de Sanchez, formé deux mois à peine avant le confinement, héritant, dans un cas comme dans l’autre, de tout le passif d’années de pouvoir (d’austérité et de corruption) de la droite.

Cristóbal Montoro, ancien ministre des Finances du gouvernement Aznar (droite pure, dure et post-franquiste) avait alors déclaré : « Laissez l’Espagne se noyer, nous nous chargerons de la relever ».

Nous revoilà au même point aujourd’hui.

En pleine pandémie.

Criminel !

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