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France/Afrique

François Hollande déjà en Françafrique !

Les présidentielles terminées, on en connaît l’issue : Monsieur Hollande a été élu. On connaissait son programme pour la France et l’Europe, beaucoup moins concernant l’Afrique. Comme Nicolas Sarkozy et François Mitterrand, Valéry Giscard d’Estaing et Jacques Chirac avant lui, en campagne, François Hollande a multiplié les déclarations d’intention. Annoncés, serait-on tenté de dire, comme d’habitude, le « changement dans les comportements » et bien sûr… « La fin de la françafrique ». Alors, dont acte ? Pas si simple…car, si les mots coûtent peu, les faits eux, parlent et ils sont têtus.

Comment vous croire…

Ainsi, alors que, dès 2011, sans doute en prévision de votre probable élection, Ségolène Royal se pavanait déjà aux côtés de Blaise Compaoré, comment vous croire aujourd’hui Monsieur Hollande ?

Ainsi, alors qu’au moment même où vous prononciez ces mots de « fin de la Françafrique » , trois mois juste avant votre élection à la présidence, vous dépêchiez, coup sur coup, Laurent Fabius chez Ali Bongo et Jean-louis Bianco chez Alassane Ouattara, comment vous croire aujourd’hui, Monsieur Hollande ? (1)
Ainsi, lorsque numéro Un du Parti Socialiste et député à l’Assemblée Nationale, vous avez soutenu, vous, les députés socialistes et votre parti, la vilaine guerre de Sarkozy « l’ami américain » contre la Libye, comment vous croire aujourd’hui, Monsieur Hollande ?

Ainsi, alors que ni vous ni le parti dont vous étiez alors le chef, n’avaient émis la moindre objection à l’intervention armée contre la Côte d’Ivoire, et que pire encore, changeant de cheval en route, vous êtes passé du camp Gbagbo à celui de Ouattara (2), comment vous croire aujourd’hui, Monsieur Hollande ?

Ainsi encore, s’agissant d’un passé qui vous est si proche vous ne revendiquez aucun droit d’inventaire sur les agissements des « Mitterrand Père et fils » en Afrique. Un fils promu par son père(3) chef de la Françafrique d’une funeste période qui vit alors la France se couvrir de honte au Rwanda et laisser assassiner Thomas Sankara, président du Burkina Faso par Blaise Compaoré, l’homme des basses oeuvres, désormais « ami » de…Ségolène Royal ! Comment vous croire Monsieur Hollande ?

Comment vous croire enfin, Monsieur Hollande quand vous n’évoquez même pas d’une phrase, même pas d’un mot, ni l’inadmissible présence militaire française sur le continent, ni le maintien du domaine réservé pour l’Afrique à vous seul, ni enfin, sur le maintien de la sinistre cellule Afrique (4)
Un passé tellement présent !

« La Françafrique est morte…elle est obsolète…C’était bon avant…elle appartient au passé…les chinois ont pris la place des français…etc… ». Affirmations gratuites et néanmoins très « mode » (5). Récurrentes, véhiculées par toutes les officines et entreprises françaises présentes en Afrique, tous les diplomates locaux et les grands médias, elles cherchent à vendre, à la fois aux africains et aux anti-impérialistes, une image différente de la France.

De bonne guerre au fond, sauf que…la Françafrique ne se résume pas à une image. Elle est une réalité politique, institutionnalisée de longue date, faite de corruption d’élites marionnettes, de spoliations et de pillages organisés, planifiés, légiférés, subie par les peuples d’Afrique, depuis des décennies !

Et puis enfin, soyons sérieux, qui, du port de Cotonou à celui de Yaoundé, de celui de Lomé à celui d’Abidjan, autant de structures, parmi d’autres, dont il s’est rendu propriétaire, pourra changer « l’image » de Bolloré en Afrique ? Pour être clair, le monopole du fret maritime sur toute la façade atlantique ajouté à celui du transport vers tout l’Interland (6), c’est très exactement cela la Françafrique ! C’est même 100% la Françafrique en plein essor !

Alors qui, comme pour Bolloré, pourra transformer les Bouygues, les Pinault et Cie en gentils « acteurs du co-développement » ? (7) Qui, concernant uranium et pétrole, changera la nature prédatrice de Total et d’Areva ? Qui pour faire cesser l’exploitation franco-française du manganèse, du cobalt, du coltan, de l’or, des diamants, du bois, du cacao, du coton, de l’huile, de l’arachide, de la banane ?

Quelle rupture ?

A défaut d’un virage à 180° entraînant la suppression de toute présence militaire sur le continent, l’abandon du principe d’ingérence armée, la fin du pillage des richesses locales, supposant de ne plus utiliser les fameuses « Aides Publiques au Développement » (8) au soutien de régimes corrompus « amis de la France », de ne plus imposer la priorité absolue pour les entreprises françaises… A moins de rompre avec la politique néo-coloniale, largement consensuelle droite-gauche, que Monsieur hollande vient de prendre en responsabilité, il y a, on le voit, bien peu de raisons d’être un tant soit peu optimiste.

En réalité, concernant l’Afrique et la trop fameuse « réalpolitik » si chère à la gauche française lorsqu’elle est aux affaires, il n’y a, dans l’imaginaire socialiste, que bien peu d’évolution et, au fond, très peu d’écart entre aujourd’hui et l’époque où Georges Sarre, en 1998, conseiller d’Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères, affirmait sans honte : « De même que les Etats-Unis ont leur arrière-cour en Amérique Latine, la France a besoin d’avoir son arrière-cour en Afrique. »

Le 29 mai 2012

François CHARLES
Directeur de "Force Humanitaire" Montpellier
Professeur associé à ENEA Dakar
Professeur associé à BK université Afrique de l’Ouest (Cotonou)
Site : www.forcehumanitaire.fr

1/ Trois « présidents » frappés d’illégitimité : Ali Bongo, fils de papa Omar, a été « élu » dans la contestation générale, Blaise Compaoré arrive à la tête du Burkina dans le sang du meurtre de Thomas Sankara, Alassane Ouattara a été porté au pouvoir par la seule armée française.

2/ Traditionnellement du côté de Gbagbo, la diplomatie française a brusquement changé son fusil d’épaule, non seulement en soutenant Ouattara, l’homme du FMI, mais en intervenant militairement pour l’installer au pouvoir.

3/ Tellement chef de cette françafrique et tellement imbu de sa personne et tellement fils de papa que les africains l’avaient surnommé « Papamadi »

4/ La « cellule Afrique » (prérogative, décisions unilatérales, secret…) mise en place par Foccart pour le compte de Charles De Gaulle a perduré jusqu’à aujourd’hui où même un changement de nom ne changera rien à l’affaire.

5/ Cette idée simpliste voulant que, la Chine passant devant la France sur le terrain, disparaîtrait la Françafrique, a même accouché d’un ouvrage intitulé…« la Chinafrique » !

6/ Sont dits « pays de l’interland » ceux qui n’ont pas d’accès direct à un port de l’Atlantique

7/ Co-développement est le mot utilisé par Pascal Canfin, tout nouveau ministre français délégué au Développement

8/ Les « APD » regroupent une myriade particulièrement opaque d’institutions, allant du soutien aux régimes « amis », de « l’aide » en subventions à l’exploitation des richesses et matières premières, aux « aides liées » (contrepartie octroyée pour faire « travailler » les entreprises françaises) en passant par les rétro-commissions (aide aux partis politiques), l’aide à la francophonie, le soutien au « rayonnement de la France »… L’association Survie estime que, sur des APD d’un montant de 40 millIards/an, seulement 2% arrivent auprès de ceux auxquels elles étaient soit-disant destinées.

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