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Prends l’oseille et tire-toi.

La nouvelle arme anti-patrons : le magnéto de Mickaël !

Mickaël Prince, délégué CGT de Stef-TFE, ne s’est pas laissé acheter par son patron. Il a tout refusé : le chèque de 40000 €, la promotion comme cadre... et il a enregistré toute la conversation ! Depuis, son entreprise fait de son mieux pour le virer. En soutien à Mickaël, rendez-vous le 13 mars à 12h30 devant le tribunal d’Amiens.

« Allô ? Monsieur Prince ?

 Oui ?

 C’est Monsieur Morvan, le directeur de la région Normandie-Ile de France.
On veut vous voir, pour parler de votre parcours professionnel dans le groupe.

 Pas de problème. On se rencontre à la plate-forme de Chaulnes quand vous voulez.

 Non, on préfèrerait un endroit plus discret. »

C’est donc au Novotel de Longueau, près d’Amiens, que Mickaël Prince, délégué CGT de Stef-TFE - « le leader du transport frigorifique en Europe » - se rend le 14 février 2006 pour rencontrer sa direction. Qui lui offre un chèque de 40 000 €, en échange de son mandat syndical. « Toi, t’as répondu, "40 000 €, c’est pas assez" ? on le taquine.

 Nan, j’ai dit non. Quand même, on n’est pas des objets. On peut pas vous acheter comme ça, du jour au lendemain. Et en rentrant à TFE Chaulnes, j’ai rempli une fiche de frais pour le déplacement, et dessus, j’ai mis "achat du délégué syndical". C’était un message, pour dire que je n’étais pas à vendre. » Pour que le message soit encore plus clair, il dépose plainte à la gendarmerie. Et ses supérieurs, à leur tour, déposent plainte. Pour « dénonciation calomnieuse ». Le détail, le hic, le petit souci qu’ils n’avaient pas prévu, c’est que Mickaël n’était pas venu seul, à l’hôtel. Qu’il avait sur lui un petit magnéto. Qu’il n’avait pas oublié de changer les piles. Que l’officier de police judiciaire a retranscrit toute la conversation. Et que le président du Tribunal correctionnel, finalement, a tout repris dans son jugement…

Son directeur, dans le texte :

« Je vous propose pour partir de l’entreprise 40 000 €. J’ai eu à traiter il y a trois ans, j’avais traité avec un délégué et puis ça s’est traité avec d’autres, c’est moitié un secret chez TFE, je pense que vous le savez… » Face au refus, le supérieur lance un plan B : « Si vous voulez rester dans le groupe, moi je vais réfléchir à la question mais à ce moment-là , il faudrait qu’on fasse l’affaire entre vous et moi, que vous abandonniez tous vos mandats. Vous en faites la démarche… Vous abandonnez tous vos mandats, et je vous donne un avenir dans l’entreprise, si c’est l’informatique, c’est l’informatique. » Nouvelle rebuffade, et voilà le plan C : « Je ne laisserai pas faire les choses. J’ai fait partir un délégué syndical sans un centime, parce qu’au bout de trois ans, il avait perdu tout son pouvoir. On peut, de la même façon qu’un syndicat ou un syndicaliste peut déstabiliser la direction, la direction peut aussi déstabiliser, vous comprenez ? » Oui, Mickaël Prince avait bien compris : la guerre était ouverte.

« Mais pourquoi ils sont prêts à raquer pour te faire partir ?

 Parce qu’aujourd’hui, à Chaulnes, on a plus de 50 % de syndiqués CGT. Ils ne peuvent plus nous coller des mises à pied à leur guise. On a obtenu le taux horaire le plus haut du groupe. Les conditions de travail, niveau sécurité pour le personnel, c’est parmi les meilleures. Les transporteurs travaillent sur quatre jours. On s’est aperçus qu’on nous avait grugés des RC, des "repos compensateurs", et on a regagné cinq jours par personne. En plus, les gars de Chaulnes se déplacent à Cergy-Pontoise pour aider les copains, on se déplace à Rennes, et ça, ça ne leur plaît pas. Ils craignent un effet boule de neige. C’est moins cher d’acheter le délégué syndical. »

Ou de le poursuivre. A nouveau.

Cette fois, c’est pour « contrefaçon » que Mickaël Prince grimpe, le 13 mars, les marches du palais de justice d’Amiens. Pour « atteinte au droit d’auteur » : parce qu’il a repris, détourné, posté sur YouTube, une chanson de sa multinationale - qui vantait les joies de l’alcool… « Il faut me faire craquer. Tous les motifs sont bons. A l’entretien pour le licenciement, on m’a expliqué qu’on en était là parce que Chaulnes, dans le groupe, est devenu "le village des irréductibles Gaulois". A Paris, dans le bureau du directeur, y a une carte de France, Chaulnes est marqué en rouge. » Marqué au fer rouge, lui, il en ferait presque une fierté. « Les sociétés se servent des tribunaux pour nous poursuivre. Mais les juges d’instruction, franchement, ils ont pas de travail plus urgent ? »


La nouvelle arme anti-patrons : le magnéto de... par fakirpresse

François Ruffin, Grégoire Souchay

http://www.fakirpresse.info/La-nouvelle-arme-anti-patrons-le.html

Le journal Fakir est un journal papier, en vente dans tous les bons kiosques près de chez vous. Il ne peut réaliser des reportages que parce qu’il est acheté ou parce qu’on y estabonné !

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COMMENTAIRES  

10/03/2012 01:27 par babelouest

C’est clair, merci patron ! merci patron !

(je voudrais être le 6 mai au soir, à voir la tête de certains)

10/03/2012 15:29 par Anonyme

Mickaël Prince bravo !

Là où j’habite, les gens comme vous sont qualifiés de dinosaures. Des syndicats pour obtenir le quorum (fixé à 10 ou 5 %) à leurs assemblées en sont réduits à faire tirer des prix de présence. Vous pouvez facilement imaginer quel genre d’individu accepte de faire partie de la représentation syndicale. Il reste encore des gens qui oeuvrent par principe, pour travailler à défendre leurs camarades, mais ils sont rares et peu appuyés. Ils sont considérés par la masse des zombies que sont devenus les syndiqués, comme des radicaux, des extrémistes. Les « modérés » plus nombreux, signent des « ententes locales » avec le patron. Ceux-là , les « lucides », les « réalistes », les « raisonnables », les « pragmatiques », vous pouvez me croire... les patrons sont très heureux de les voir en poste... et ils font tout pour les encourager à y rester.

Michel Rolland (dit Anonyme malgré lui…)

10/03/2012 17:45 par act

Excellent, voici l’arroseur arrosé, voilà que les syndicats retournement les armes du patronat !

Récemment c’était encore eux qui espionnaient, enregistraient et filmaient les syndicats :
http://www.rtbf.be/info/regions/detail_espionnage-social-chez-arcelormittal?id=7603353

Dans la même logique un peu d’organisation permettra de mieux retourner une autre arme du patronat* :
http://www.rtbf.be/info/regions/detail_la-direction-de-meister-envoie-une-milice-pour-recuperer-son-materiel?id=7635283
http://www.ptb.be/nieuws/artikel/meister-sprimont-les-travailleurs-repoussent-la-milice-privee.html

Vive le syndicalisme !
(et l’anarcho-syndicalisme !)

(*les médias français ont-ils couvert l’intervention récente d’une milice privée allemande contre des grévistes Belges ? cf liens)

10/03/2012 17:52 par act

En complément à mon commentaire précédent :

Meister : : La grève assimilée au terrorisme par le patronat

L’utilisation d’une milice armée à Meister-Sprimont a fait couler beaucoup d’encre. Le patronat wallon a répliqué en qualifiant certaines actions syndicales de terroristes. Par ailleurs, les explications des ministres de l’Intérieur et de la Justice ont mis en lumière les graves erreurs de la police qui a laissé s’échapper les barbouzes sans relever leur identité.
http://www.ptb.be/nieuws/artikel/meister-la-greve-assimilee-au-terrorisme-par-le-patronat.html?utm_source=ptb2012-03-10&utm_medium=email&utm_content=html&utm_campaign=portalnewsletter

10/03/2012 19:00 par HIVET Pascal

bien et courage !!! comme quoi tout et tous ne s’achéte pas et qu’il y a encore des hommmes et des femmes qui ont de la dignitées bravo encore ... pasqual .Conducteur Poids Lourd . UL de tourcoing

11/03/2012 12:31 par Guillaume

Très intéressant de voir comment un patron peut aller loin pour virer du personnel discrètement et se débarasser. 40.000 Euros peut paraitre une somme énorme, mais quand on y reflechit combien ça leur couterait de le laisser partir au Prud’homme ?

 

’Bien jouer aux jeux de poker d’un casino en ligne peut vous permettre de gagner beaucoup d’argent si vous prenez le temps de les apprendre.’
13/03/2012 01:11 par Anonyme

Intéressant aussi de voir comment des objets de consommation courante offerts à notre convoitise pour le plus grand confort des multinationales peuvent servir aussi à résister vaillamment !

Les téléphones portables qui prennent des photos, font des vidéos, enregistrent, et sont miniaturisés, en sont !

Ils nous fliquent ? Fliquons-les !

13/03/2012 10:05 par E.W.

Mais que fait le MEDEF !?

A quand les détecteurs de métaux pour accéder aux CE et des fouilles au corps avant les réunions CHSCT ?

13/03/2012 18:14 par à‚neries

C’est bien connu : pour faire marcher l’âne rétif il faut une carotte et un bâton. Pour obtenir tous les comportements que l’on souhaite aussi.

L’âne rétif Mickaël a refusé la carotte, les 40000 Euros. Bon. Le bâton, maintenant : le procès.

(Si ça ne suffit toujours pas, il peut, selon John Perkins, y avoir les « chacals », forme particulièrement violente et assassine du bâton..)

Chaque âne peut être plus ou moins vulnérable à la carotte ou au bâton : ça dépend s’il meurt de faim ou s’il est très fragile.

Il est à souhaiter que ceux qui ont accepté la carotte par peur que le bâton ne leur brise les reins… mais l’ont mise avec dégoût au congélateur, l’en ressortent et en fassent profiter les autres ânes qui n’ont rien à manger. De manière à ce qu’il puissent continuer à refuser d’avancer. D’aller là où son maître veut le mener.

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