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Mali, révolte touareg : et si l’on parlait vrai ?

Chien Guevara

DÉCLARATION D’INDÉPENDANCE DE L’AZAWAD (Vendredi, 06 Avril 2012 02:24)

NOUS, PEUPLE DE L’AZAWAD,

Par la voix du Mouvement National de Libération de L’Azawad après concertation avec :

Le Comité Exécutif, Le Conseil Révolutionnaire, Le Conseil Consultatif, L’Etat-Major de l’Armée de Libération, Les bureaux régionaux

Rappelant les principes du droit international et les principaux instruments juridiques internationaux régissant le droit des Peuples à disposer d’eux-mêmes, notamment, la charte des Nations Unies en ses articles 1 et 55, les dispositions pertinentes de la déclaration internationale des droits des peuples autochtones ;

Considérant, la volonté explicitement exprimée dans la lettre datée du 30 mai 1958 adressée au président français par les notables, guides spirituels de toutes les composantes de l’AZAWAD ;

Considérant qu’en 1960, à l’occasion de l’octroi de l’Indépendance aux peuples Ouest-Africains, la France a rattaché sans son consentement l’AZAWAD à l’Etat malien qu’elle vient de créer ;

Rappelant les massacres, les exactions et humiliations, spoliations et génocides de 1963, 1990, 2006, 2010 et 2012, qui ont visé exclusivement le peuple de l’AZAWAD jusqu’au 1er avril 2012 ;

Rappelant, le comportement inhumain du Mali qui a utilisé les différentes sécheresses (1967, 1973, 1984, 2010….) pour faire disparaître notre peuple par anéantissement alors même qu’il a sollicité et obtenu une aide humanitaire généreuse ;

Considérant l’accumulation de plus de 50 ans de mal gouvernance, de corruption et de collusion militaro politico financière, mettant en danger l’existence du peuple de l’AZAWAD et en péril la stabilité sous-régionale et la paix internationale ;

Considérant, la libération complète du territoire de l’AZAWAD ;

Proclamons irrévocablement, L’ETAT INDEPENDANT de l’AZAWAD à compter de ce jour Vendredi 06 Avril 2012.

DECLARONS :

La reconnaissance des frontières en vigueur avec les états limitrophes et leur inviolabilité ;

L’adhésion totale à la charte des Nations Unies ;

L’engagement ferme du MNLA à créer les conditions de paix durable, à initier les fondements institutionnels de l’Etat basés sur une Constitution démocratique de l’Azawad indépendant.

Le Comité Exécutif du MNLA invite l’ensemble de la Communauté Internationale dans un élan de justice et de paix à reconnaitre sans délais l’Etat de l’AZAWAD Indépendant.

Le Comité Exécutif du MNLA jusqu’à la mise en place de l’Autorité du Territoire de l’AZAWAD continuera à assurer la gestion de l’ensemble du territoire.

GAO - 06/04/2012

SECRETAIRE GENERAL-MNLA

BILLAL AG ACHERIF

http://www.mnlamov.net/component/content/article/169-declaration-dindependance-de-lazawad.html

Tiens, tiens, ça bouge conséquemment au Mali, on dirait ...

1. Réactions internationales et médiatiques

Le matin même du 6 avril, le journal Le Point titre : Mali : Les rebelles touaregs décrètent l’indépendance du nord Mali livré au chaos . On peut y lire « La proclamation d’indépendance faite par un porte-parole en France du MNLA, Mossa Ag Attaher, "officialise" la division du Mali : une partie sud contrôlée par des militaires putschistes isolés et impuissants, une partie nord en proie à l’anarchie. » et « Les voisins du Mali membres de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) qui ont imposé un embargo diplomatique et économique total au Mali quelques jours après le coup d’Etat, ont toujours clamé leur attachement à l’intégrité territoriale de ce pays. »

Le même jour, Le Monde titre : La communauté internationale rejette l’indépendance du nord du Mali, dont extraits « La Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) a menacé, vendredi 6 avril, de recourir à la force pour préserver "l’intégrité territoriale" du Mali après la déclaration d’indépendance du territoire de l’Azawad, dans le nord, qu’elle rejette totalement, comme l’Union africaine, les Etats-Unis et la France. Dans un communiqué, la commission de la Cédéao "rappelle à tous les groupes armés du nord du Mali que le Mali est ’un et indivisible’ et qu’elle usera de tous les moyens, y compris le recours à la force, pour assurer l’intégrité territoriale" du pays » … « La junte militaire qui a renversé le président Amadou Toumani Touré a appelé les populations du nord du pays à "résister" aux "groupes rebelles et autres assaillants extrémistes" qui contrôlent désormais leurs régions, parlant de séquestration de ces populations. La communauté arabe du Nord malien a pour sa part annoncé la prochaine création d’un nouveau mouvement politico-militaire multiethnique pour contrer "la déstabilisation des régions du Nord", en proie à l’anarchie, et assurer la sécurité des populations quelle que soit leur origine. »

Le lendemain, Le Point titre : Mali : les militaires abandonnent le pouvoir, l’anarchie dans le Nord demeure. « Deux semaines après leur coup d’Etat à Bamako, les militaires maliens, sous pression des pays voisins, se sont engagés à rendre le pouvoir aux civils dont la première des priorités sera de tenter de pacifier le Nord du Mali tombé aux mains de rebelles touareg et islamistes. Vendredi soir, le capitaine Amadou Haya Sanogo, chef de la junte qui avait renversé le 22 mars le président Amadou Toumani Touré, accusé "d’incompétence" dans sa gestion de la situation dans le Nord, est apparu à la télévision nationale pour annoncer le prochain transfert du pouvoir aux civils. Ce transfert, qui prévoit la désignation d’un président de la République et d’un Premier ministre de transition jusqu’à la tenue d’élections (présidentielle et législatives) est contenu dans un "accord-cadre" conclu avec les représentants de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao).Après avoir imposé le 2 avril un embargo diplomatique, économique et financier "total" à la junte, la Cédéao, qui a dépêché à Bamako des négociateurs conduits par le ministre burkinabè des Affaires étrangères Djibrill Bassolé, a décidé la levée "immédiate" de ses sanctions, juste après l’accord. Les auteurs du coup d’Etat se voient offrir de leur côté l’amnistie. Le document de cinq pages précise que le président Touré doit pouvoir être protégé et libre de choisir sa résidence. »

Le 7 avril toujours, Le Parisien annonce que le futur président par intérim est arrivé à Bamako

« La junte militaire, qui avait pris le pouvoir le 22 mars au Mali s’est engagée vendredi soir à remettre le pouvoir aux civils dans le cadre d’un accord-cadre avec la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao), en échange notamment d’une amnistie générale des auteurs du putsch... Le président de l’Assemblée nationale est arrivé Bamako pour assurer l’intérim. Dioncounda Traoré, qui doit assurer l’intérim d’ici aux élections, est arrivé samedi soir à Bamako, en provenance du Burkina Faso. Le président de l’Assemblée nationale s’entretiendra « prioritairement »avec le chef de la diplomatie burkinabè, Djibrill Bassolé et le chef de la junte, le capitaine Amadou Sanogo avant d’entamer de « larges consultations avec l’ensemble de la classe politique et la société civile » et de nommer un Premier ministre que Ouagadougou souhaite « consensuel ». Aucune date n’a encore été arrêtée pour l’investiture de Traoré comme président de transition mais mais « ça doit se faire dans les plus brefs délais », selon son entourage. Le chef de l’Etat burkinabè Blaise Compaoré l’a assuré du soutien indéfectible de la Cédéao, selon l’AFP. Dioncounda Traoré a brièvement rencontré à l’aéroport des membres de la junte, dont le porte-parole des putschistes, le lieutenant Amadou Konaré.

La Cédéa a levé l’embargo, l’UA devrait lever des sanctions. Sitôt l’accord-cadre signé, la Cédéao a levé l’embargo diplomatique, économique et financier « total » qu’elle avait mis en place le 2 avril pour affaiblir la junte, alors que la pénurie d’essence se faisait sentir. »

« « La France reprendra sa coopération bilatérale civile et militaire ». Le ministre français des Affaires étrangères Alain Juppé a « salué » un accord qui « permet le retour à l’ordre constitutionnel » et « crée les conditions pour avancer vers la recherche d’une solution politique concernant le Nord ». Dès l’installation des autorités civiles, « la France reprendra sa coopération bilatérale civile et militaire » interrompue après le putsch, a-t-il ajouté. Paris réitère son appel à la rébellion touareg du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) « à renoncer à sa déclaration unilatérale d’indépendance », proclamée vendredi dans la partie nord du Mali, et « à inscrire son action dans le cadre d’un dialogue politique respectueux de l’ordre constitutionnel malien et de l’unité du pays ». »

Le 12 avril dans Le Monde, on peut lire que « Le chef des députés maliens Dioncounda Traoré a été investi jeudi 12 avril président intérimaire du Mali, après le retrait des putschistes du 22 mars en vertu d’un accord avec la Communauté des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao), et la démission du président déchu, Amadou Toumani Touré.M. Traoré a prêté serment lors d’une cérémonie au Centre international de conférence de Bamako, à laquelle participait notamment le chef de l’ex-junte, le capitaine Amadou Sanogo, des représentants des institutions, des partis politiques et de la société civile, ainsi que des membres de la médiation ouest-africaine. "Je jure devant Dieu et le peuple malien de préserver le régime républicain", de "respecter et faire respecter la Constitution" et "l’intégrité du territoire du Mali", a lancé le nouveau chef de l’Etat, sur une estrade aux couleurs vert-jaune-rouge du drapeau malien.Dioncounda Traoré a par ailleurs rendu hommage à "l’engagement ô combien patriotique" de la junte qui a pris le pouvoir à Bamako le 22 mars, avant de se retirer en vertu d’un accord avec la Cédéao. »

Et plus loin « La première urgence des autorités de transition sera de résoudre la crise dans le nord du pays, occupé par des rebelles touaregs et des groupes islamistes armés. Dioncounda Traoré les a d’ailleurs immédiatement menacé d’une "guerre totale et implacable" s’ils refusent de "rentrer dans les rangs"."J’ai conscience d’être président d’un pays en guerre", a lancé M. Traoré, qui a appelé "avec insistance et avec fermeté" les groupes armés du Nord à "arrêter les exactions, les pillages, les viols, à quitter les cités qu’ils ont occupées". "Nous préférons la paix, mais si la guerre est la seule issue nous la ferons avec notre armée. Nous serons tous derrière elle", a-t-il encore affirmé.Des ministres des affaires étrangères et de la défense de la Cédéao se réunissent jeudi à Abidjan pour réfléchir à l’envoi d’une éventuelle force militaire régionale pour contrer rebelles et islamistes au Nord. La région est entre les mains des rebelles touaregs du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) »

2. Brève synthèse et piqure de rappel

Qu’apprend-on donc en lisant la presse ?

- Que le 22 mars, une junte militaire a fait un coup d’état et a pris le pouvoir au Mali.
- Que quelques jours plus tard, les touaregs se sont rebellés et ont pris le pouvoir sur le nord du pays, en revendiquant l’indépendance de l’Azawad.
- Que cette revendication a été rejetée unanimement au niveau mondial.
- Que le lendemain même, la junte militaire a rendu le pouvoir aux civils.
- Que le président par interim a été investi, amnistiant au passage la junte militaire, et déclarant ouvertement la guerre aux touaregs de l’Azawad.

Drôle de planète où on amnistie les putsch et on condamne les revendications !
A moins que les touaregs soient de dangereux envahisseurs dans la plus totale illégitimité …

Définitions (sources wikipedia)

Les Touareg (au singulier un Targui) ou, sous sa forme francisée, les Touaregs (au singulier un Touareg) ou encore Kel Tamasheq sont un peuple de Berbères nomades vivant dans le Sahara central, l’Algérie, la Libye et sur les bordures du Sahel, Niger, Mali, et Burkina Faso. Leur langue est le tamajaq ou tamasheq ou encore tamahaq selon les régions. Ils utilisent un alphabet appelé tifinagh (prononcer tifinar). Ce sont les descendants des premiers habitants de l’Afrique du Nord.

Les Touareg sont souvent appelés par les occidentaux, les « hommes bleus », d’après la couleur de leur chèche. Teinte avec de l’indigo, elle décolore sur la peau avec le temps.

Ces populations sont confrontées à des formes d’assimilation culturelle et linguistique, à une marginalisation économique et politique …

Les Berbères (en berbère Imazighen, et au singulier Amazigh) sont un ensemble d’ethnies autochtones d’Afrique du Nord. Ils occupaient, à une certaine époque, un large territoire qui allait de l’Ouest de la vallée du Nil jusqu’à l’Atlantique et l’ensemble du Sahara et y fondèrent de puissants royaumes, formés de tribus confédérées.

Étymologie du mot berbère : A l’origine, le terme barbare " emprunté en 1308 au latin barbarus, lui-même issu du grec ancien Î²Î¬Ï Ï Î±Ï Î¿Ï‚ bárbaros (« étranger ») " était un mot utilisé par les anciens Grecs pour désigner d’autres peuples n’appartenant pas à leur civilisation, dont ils ne parvenaient pas à comprendre la langue. Bárbaros n’a à l’origine, aucune nuance péjorative, il signifie simplement « non grec » ou plus largement toute personne dont les Grecs ne comprennent pas la langue, quelqu’un qui s’exprime par onomatopées : « bar-bar ».

Étymologie du mot amazigh : L’équivalent en berbère est Imazighen (Imaziγen), pluriel de amazigh, dont l’étymologie n’est pas connue avec certitude. Selon une version fréquente, il aurait le sens d’« Homme libre ».

L’Azawad, également orthographié Azaouad ou Azaouâd est un territoire presque entièrement désertique situé dans le nord du Mali. L’Azawad est une zone de transition entre l’espace saharien et l’espace sahélien.

Ce territoire est l’objet d’une aspiration à l’autonomie depuis 1958, il est alors sous administration française. Après l’indépendance du Mali en 1960 cette aspiration a pris la forme de « rébellions touarègues ». Début 2012, une nouvelle insurrection est déclenchée par le Mouvement national pour la libération de l’Azawad (MNLA) qui réclame l’indépendance de la zone couvrant intégralement les trois régions du nord du Mali (celles de Kidal, de Tombouctou et de Gao)

Étymologie : Azawad est un mot d’origine tamasheq qui signifie littéralement « le territoire de transhumance » ou « la terre de transhumance ». L’appellation touarègue correspond à peu près à la notion française de « pâturage ».

C’est le berceau des Touaregs : A Essouk, dans l’Adrar des Ifoghas, se trouve un important site de gravures rupestres, daté de 6000 av. J.-C. Devenue une cité caravanière du commerce transsaharien, elle prospère entre le IXe et XIIe siècles, à cette période les migrations de Berbères ont constitué le fond de son peuplement : groupes Lemta et Houara (les paléo-berbères) suivis par d’autres, comme les « pasteurs hamites », les Kel Tadamakat, et ceux venus plus tard de Oualata ou du Maroc. Dans ce creuset d’Essouk s’est cristallisée et s’est développée la culture touareg avant d’essaimer à l’intérieur du Mali et dans les contrées voisines du Niger et de l’Algérie. Dans cette zone se trouvent de nombreuses gravures anciennes en tifinagh.

Le mouvement national pour la libération del’Azawad ou MNLA est une organisation politique et militaire touarègue active au Nord-Mali. Ses objectifs sont l’autodétermination et l’indépendance du territoire de l’Azawad. La zone revendiquée couvre intégralement la région de Tombouctou, la région de Kidal et la région de Gao.

Le Mouvement national de l’Azawad (MNA), créé en novembre 2010 et qui se définit comme « une organisation politique de l’Azawad qui défend et valorise la politique pacifique pour atteindre les objectifs légitimes pour recouvrer tous les droits historiques spoliés du peuple de l’Azawad », et le Mouvement touareg du Nord-Mali (MTNM), mouvement responsable de rébellions de 2006 à 2009 fusionnent le 16 octobre 2011 pour créer le MNLA.

Je vous laisse juger de la légitimité de tout ça ...

3. L’information instantanée et le prix du mensonge

Le 6 avril, TV5 Monde reçoit sur son plateau Moussa AG ASSARID, le porte parole du mouvement Touareg en France.

L’"excellent" journaliste oriente tellement "bien" son interview qu’il en devient presque ridiculisé par la sincérité des réponses du porte parole du MNLA. Très enrichissant reportage !

Nous venons de relater l’actualité depuis une dizaine de jours, telle qu’on nous la vend, maintenant, nous allons dénoncer ses mensonges et sa désinformation.

Par exemple, 4 mensonges révélés, sans le vouloir, au grand jour, par ce reportage :

- on reproche aux touaregs de "profiter du chaos" qui vient de s’installer au Mali. Ce qui est faux, car le soi-disant chaos, c’est eux-mêmes qui l’ont provoqué car ils ont commencé à se rebeller dés janvier, et le coup d’état de la junte militaire est justement dû au fait que l’armée malienne trouvait le gouvernement malien trop mou, trop peu efficace face à la "menace" touareg (et/ou islamiste).
- on dit que dans les villes conquises, les rebelles veulent imposer la charia. Quand on sait que chez les touaregs, les femmes sont découvertes, et ce sont les hommes qui sont voilés, on a vraiment du mal à y croire.
- on dit que les touaregs sont alliés avec aqmi. C’est faux, car les touaregs et les islamistes sont, et ont toujours été, en profond désaccord.
- on dit qu’il existe un risque important pour que l’invasion du nord du pays s’étende plus au sud. C’est faux, car les touaregs ne revendiquent que le nord du Mali, où ils espèrent enfin vivre libres dans leur rêvé Azawad.

4. L’orientation du jugement des "spectateurs"

Le rôle du journalisme d’investigation

Comme souvent et sur bien des domaines, ce dont, la société médiatique à le plus besoin, c’est de la critique du bref , du court terme, qu’elle utilise à outrance, et de la mise en place d’une pédagogie pour faire goûter et aimer le temps de la réflexion. C’est à dire, qu’il faut que le son remonte, il faut démontrer de l’imprudence à trop résumer, de façon à ce qu’ils comprennent (les rédactions clonées), que leur simplisme et leur facilité d’accès à l’immédiateté sont devenus insoutenables, dangereux et porteurs de fausses bonnes idées, et à tout point de vue.

Terroristes, islamistes, trafiquants, preneurs d’otages, voleurs, violeurs de fillette, égorgeurs, usurpateurs minoritaires, indépendantistes illégitimes, aventuriers sans programme politique, activistes obscurantistes et quasi-médiévaux et, pour couronner le tout, destructeurs potentiels de manuscrits trésors de l’humanité…

Le bon vieux scénario colonial de terreur barbare et de diabolisation des rebelles touaregs au Mali s’étale à la une, alors que la création de la République de l’Azawad vient d’être déclarée le 6 avril 2012 par le MNLA (Mouvement National de Libération de l’Azawad). L’aspiration à l’indépendance d’une population malmenée depuis cinquante ans par un Etat dont le caractère « démocratique » relève de la langue de bois est malvenue dans la zone saharo-sahélienne.

La diabolisation des touaregs dans l’information actuelle

Une dépêche AFP du 6 avril décrit : "Des centaines de jeunes, pour la plupart natifs du nord du Mali, ont dénoncé aujourd’hui à Bamako des "ignominies" commises dans leurs régions d’origine par des rebelles touareg et islamistes armés, réclamant des armes pour les aller combattre.

Lors d’un rassemblement organisé à Faladjè, dans la périphérie de Bamako, par plusieurs associations, un membre d’Action Jeune pour sauver le Nord-Mali (AJSN) a lu une déclaration décriant les "agressions physiques des populations civiles", viols de femmes, y compris "sur la place publique". L’AJSN a dénoncé aussi des pillages, saccages d’infrastructures sociales, autant de "violations flagrantes des droits humains fondamentaux" commises à Kidal, Gao (nord-est) et Tombouctou (nord-ouest) depuis leur prise par les groupes les 30, 31 mars et 1er avril.

"Ces ignominies constituent la démonstration flagrante de la prise en otage des populations de ces trois régions par des barbares sans foi ni loi", qui les ont plongées "dans une situation de désespoir total caractérisé par une absence de vivres, de médicaments, de soins sanitaires", selon l’AJSM.

Elle a réclamé "de la communauté internationale le droit à une assistance médicale, alimentaire et sécuritaire urgente pour les populations" du Nord, et le déploiement de forces ouest-africaines et de l’ONU "pour la sécurité des personnes et des biens" mais aussi "des équipes humanitaires".

Les hommes armés "sont là à violer nos mamans, nos soeurs, ils prennent les biens des gens. Nous réclamons les armes, nous sommes prêts à aller volontairement au Nord et récupérer notre territoire", a déclaré Abdoul Malick Sangaré, leader d’une des associations ayant organisé le rassemblement."

Déjà le 17 mars, dans Le Figaro, on pouvait lire : "Le président malien, Amadou Toumani Touré alias "ATT", accuse les rebelles touaregs du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) de « crimes de guerres » à Aguelhok (nord-est) et s’étonne du « silence des organisations internationales sur ces atrocités ».

Photos à l’appui, le chef de l’Etat a décrit le massacre de dizaines de soldats maliens, qui n’avaient « plus de munitions », lors de la prise de cette ville du nord-est par le MNLA le 24 janvier, dans un entretien au journal Le Figaro de jeudi. « Lorsque le MNLA a quitté les lieux, nous avons découvert une tragédie. 70 de nos jeunes étaient alignés sur le sol. Les Noirs avaient les poignets ligotés dans le dos. Ils ont été abattus par des balles tirées à bout portant dans la tête. Ceux qui avaient la peau blanche, les Arabes et les Touareg, ont été égorgés et souvent éventrés », a-t-il raconté. « C’est un crime de guerre. Je suis étonné par le silence des organisations internationales sur ces atrocités. Que dit la Cour pénale internationale ? Rien », a-t-il déploré. "

Détourner des réels problèmes

Pour autant, la famine qui guette dans cette région est un facteur vecteur d’aggravation pour les populations qui ne semble plus intéresser les rédactions journalistiques de la métropole, plus rompues à diaboliser les protagonistes et peuples locaux que de se poser les bonnes questions. Pourtant ces mêmes rédactions, et il y a peu de temps, nous signalaient sur plusieurs manchettes, que la FAO réclamait 70 millions de dollars pour parvenir à endiguer les risques de pénuries alimentaires dans toute ces régions du Sahara." ... "

Un coup d’état et une rébellion, qui chasse ainsi le principal sujet de ces tueries et ennemi d’une paix garantie : la pauvreté et la mauvaise distribution des richesses, exécuté ici sur une des populations les plus pauvres de la planète.

Occulter les enjeux géostratégiques

Mais l’enjeu essentiel de la question saharo-sahélienne ne se joue pas à l’échelle locale. Il concerne l’économie mondiale et le redécoupage des zones d’influence entre les puissances internationales avec l’entrée en scène de nouveaux acteurs (américains, chinois, canadiens, etc) qui bousculent l’ancien paysage colonial. L’accès convoité aux richesses minières (pétrole, gaz, uranium, or, phosphates...) dont regorgent le Niger, la Libye, l’Algérie, et le Mali d’après des prospections plus récentes, est au centre de la bataille invisible qui se déroule dans le désert.
Les communautés locales n’ont jusqu’ici jamais comptées en tant que telles, mais seulement comme leviers de pression qu’ont systématiquement cherché à manipuler les Etats en concurrence. C’est ainsi que les revendications politiques touarègues ont longtemps été contenues dans les limites strictes d’une autonomie régionale, d’ailleurs jamais appliquée par les Etats ; et c’est pourquoi l’autre manette d’action que représentent les islamistes est devenu une réalité saharienne. Par contre, la question des liens étroits qu’entretient la création des groupes islamistes au Sahara avec, au premier rang, l’Etat algérien, n’est pratiquement jamais évoquée. De même qu’un silence de plomb règne sur les interventions constantes des services secrets français, algériens et libyens pour contrôler à leur profit la rébellion touarègue, la divisant en groupes rivaux destinés à se neutraliser les uns les autres.

De son côté, la Pan-Sahel Initiative (programme d’assistance militaire américaine au Mali, Niger, Tchad et Mauritanie), élaborée dès 2002, devient opérationnelle en 2003 avec l’envoi de troupes américaines sur le sol africain. Cette coopération militaire s’étend en 2005 à tous les pays adjacents (Tunisie, Algérie, Maroc, Sénégal, Nigéria) et devient l’Initiative du Contre-terrorisme trans-saharien. Le Rapport sur le terrorisme dans le monde publié en avril 2007 par le département d’État américain, produit une carte explicite qui désigne comme « Terrorist Area » pratiquement toute la zone saharo-sahélienne, et en particulier celle où évoluent les Touaregs et leurs anciens partenaires économiques et politiques. Les routes caravanières et les axes de circulation habituels des familles sont inclus dans ce périmètre terroriste.

Une minorité d’articles valorisants pour les touaregs

Je n’en ai trouvé qu’un seul dans la presse "classique" : Le Parisien 9 avril 2012

"Elle aurait pu tomber aux mains des islamistes d’Aqmi (Al Quaïda au Maghreb islamique), mais avec l’aide des Touaregs, elle est parvenue au terme d’un incroyable périple à quitter le nord du Mali et à rentrer saine et sauve en France. La seule Française présente à Gao, ville du nord du Mali, raconte au journal Le Figaro paru lundi comment elle a échappé le 5 avril aux islamistes qui ont enlevé des diplomates algériens et s’est enfuie à travers le désert, sans doute avec l’aide de touareg.

« Ils sont arrivés dans des 4X4 beiges, brandissant leurs Kalachnikov, habillés en tenue militaire. Ils ont tiré en l’air. L’assaut a duré au moins deux heures. Dès que je les ai vus, j’ai su que c’était des islamistes », raconte cette humanitaire qui travaillerait pour une agence de l’ONU et a souhaité garder l’anonymat. « J’ai reconnu leur drapeau (le drapeau noir des salafistes), qu’ils ont hissé après avoir brûlé le drapeau algérien », assure-t-elle.

Ce 5 avril, un bâtiment du consulat d’Algérie à Gao est pris d’assaut par des islamistes armés, qui capturent le consul et six autre diplomates. L’enlèvement a été revendiqué par le Mouvement pour l’unicité du jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao), un groupe dissident d’Al-Qaïda au Maghreb (Aqmi) déjà impliqué dans le rapt en octobre 2011 de trois humanitaires européens dans l’ouest de l’Algérie.
La Française explique qu’elle est parvenue à sortir de la résidence du consul d’Algérie assiégée pour gagner une maison proche et organiser sa fuite vers l’Algérie, « peut-être » avec l’aide des touareg qui la connaissent bien. Elle est installée à Gao depuis 1995.

Elle parvient à quitter la ville et prend la route vers la frontière algérienne. « Il faut normalement un jour et une nuit pour parcourir cette distance, mais nous l’avons traversée en une nuit, via les pistes de la contrebande. Avec une heure de pause et une halte pour faire le plein de carburant. Seul le MNLA peut faire ça », assure-t-elle. La semaine dernière, les rebelles touaregs avaient organisé l’évacuation de deux Britanniques et d’un Français de Tombouctou, leur permettant d’échapper à Aqmi. "

5. Quel avenir pour les touaregs ?

Les Touaregs, sont le peuple qui n’a jamais eu droit ni a son territoire, ni a avoir le droit de nomadisme, leur mode de vie étant celui-ci principalement sur tous les pays du Sahel ... Leur zone d’influence s’étalant au plus loin, de l’Egypte, à la Mauritanie ; ce depuis des millénaires.. Une particularité ! C’est pourquoi, ce territoire de l’Azawad, est un compromis à minima pour ce peuple et se limitant a cette partie nord du Mali, du reste qui comporte des frontières, qui n’ont guère de pertinence non plus.. Doit on s’étonner dès lors de cette revendication, pour les uns contestables et justes pour les demandeurs ?

Dans le tableau caricatural présenté à l’opinion publique, l’innommable demeure la revendication politique des Touaregs, systématiquement tuée par les experts assermentés. Le motif du jihad islamiste vient à point nommé pour étouffer tout élément d’intelligibilité de la situation et légitimer la répression à venir du mouvement et peut-être, comme par le passé, les dérives génocidaires. Qui se souvient des milices paramilitaires maliennes qui, juste après les accords de paix signés entre la rébellion et le gouvernement malien en 1991, ont été lancées contre les civils touaregs et maures à « peau rouge », torturés, tués, décimés ou contraints à l’exil, dans un silence international fracassant et sous le gouvernement même d’ATT, président du Mali démocratique, aujourd’hui détrôné par une junte militaire non démocratique ?

Le canevas jihadiste n’a rien de nouveau, il a été régulièrement brandi et activé, d’abord au sujet de la guerre anticoloniale menée par les Touaregs jusqu’à l’écrasement complet de leur résistance en 1919, puis à chaque soubresaut contre les régimes autoritaires des Etats postcoloniaux, mis en place en fonction des intérêts de l’ancien empire colonial. L’amalgame entre insurgés touaregs, islamistes et terroristes, sans compter les autres registres diffamatoires, est un raccourci commode pour éradiquer, sous couvert de lutte anti-terroriste, toute contestation politique de la part des Touaregs, toute déclaration ou action qui pourrait contrarier les intérêts des grands acteurs politiques et économiques de la scène saharienne.

Les opposants sont d’ailleurs immédiatement pris en main par les services spéciaux des Etats à l’aide des dispositifs habituels : intimidation, diffamation ou corruption. L’un des petits cadeaux classiques et anodins que les services français ont toujours offert spontanément à leurs « amis touaregs » est un téléphone portable, satellitaire si nécessaire, directement branché sur les centres d’écoute.

Sous la pression des nouveaux contextes politiques nationaux et internationaux, les mouvements insurrectionnels touaregs ont, de leur côté, fortement modifié leurs revendications et leurs axes de mobilisation, dans la forme comme dans le contenu. Ils sont passés d’un projet d’indépendance politique de tout le « territoire des Touaregs et de ses marges » (Kawsen) au début du XXe siècle, lors de l’insurrection générale contre l’occupation coloniale, à des revendications plus restreintes : en 1963, les Touaregs de l’Adagh se soulèvent contre le découpage frontalier (entre le Mali et l’Algérie) qui les privent d’une partie de leur territoire et les séparent des Touaregs de l’Ahaggar ; la répression par l’armée malienne contre les civils sera féroce, laissant des cicatrices indélébiles jusqu’à aujourd’hui et cette terreur instaurée contre la population sans défense fournira le modèle privilégié utilisé pour réprimer chaque nouvelle insurrection touarègue dans les Etats de la zone saharo-sahélienne.

Le Rapport sur le terrorisme dans le monde publié en avril 2007 par le département d’État américain, produit une carte explicite qui désigne comme « Terrorist Area » pratiquement toute la zone saharo-sahélienne, et en particulier celle où évoluent les Touaregs.

Ce rapport manie sans cesse la dichotomie simpliste et bien connue entre un monde civilisé et régulé par l’autorité étatique dont l’Occident aurait le monopole et l’espace sans foi ni loi des « tribus », aboutissant à des injonctions d’intervention au nom de la sécurité du monde. Le glissement entre supposition et réalité est opéré en 2008 par la presse américaine qui abandonne les « peut-être » du Rapport du Département d’Etat américain. La traque de « Al-Qaeda in the Islamic Maghreb (AQIM) » par les forces armées américaines au Sahel devient une évidence indiscutable, de la même façon que s’instaure insidieusement l’idée que le groupe islamiste serait aidé par des : « tribus nomades connues sous le nom de Touareg, un groupe ethnique berbère qui est en lutte avec le gouvernement du Mali » et d’autre part que sa trésorerie serait assurée par le trafic de drogue (Daniel Williams,in Bloomberg.com, 23 avril 2008).

Le compactage commode opéré entre "islamistes / terroristes /Touaregs /nomades / trafiquants’ dessine ainsi une « zone de non droit » livrée aux « tribus », et donc à l’anarchie, au désordre, à la délinquance. On retrouve ici la sémantique et le schéma appliqués entre autres à l’Afghanistan par les autorités américaines, avec le succès que l’on connaît.

Les informations alarmistes qui circulent sur les islamistes qui auraient chassé le MNLA et seraient sur le point d’imposer la sharia jusqu’à Bamako font partie du schéma de terreur, manipulé par les Etats en vue d’obtenir le soutien de l’opinion publique internationale pour justifier une intervention militaire musclée destinée à éradiquer le « Danger » qui en fait, pour leurs intérêts, serait au nord plus indépendantiste qu’islamiste.

Derrière la poudrière saharienne et ses imbroglios inouïs dont nous n’avons évoqué qu’un très petit aspect, se profile l’échec cuisant des Etats postcoloniaux dits indépendants et de leurs élites, modelés spécialement pour préserver les intérêts pharaoniques des puissances internationales anciennes et montantes, au détriment complet de leurs peuples, souffrants, réprimés, brisés, manipulés, interdits de voix, d’espoir, de futur et dont le désir de vie se transforme peu à peu en désir de mort, pour des soulèvements à venir de plus en plus désespérés.

Chien Guevara

Article réalisé avec l’amicale collaboration de Skapad (un grand merci à toi, camarade !)

Sources :

* http://www.leparisien.fr/
* http://www.kabyle.com/fr
* http://www.lepoint.fr/
* http://fr.wikipedia.org/
* http://www.lemonde.fr/
* http://www.leral.net/
* http://www.lefigaro.fr/

Article d’origine : http://forget.e-monsite.com/pages/actualites/mali-revolte-touareg-et-si-l-on-parlait-vrai.html

COMMENTAIRES  

17/04/2012 12:10 par Thomas Ortalet

Monsieur Chien Guevara,

Je n’ai aucun parti pris dans cette affaire. En tant qu’occitaniste et donc plutôt favorable aux mouvements régionalistes, j’entends très bien les revendications d’autonomie ou d’indépendance. Cependant, je pense que certains points sont aujourd’hui occultés par les partisans de la cause touarègue. Qu’ils revendiquent Kidal ou Aguelhok est tout à fait légitime. Mais les villes de Gao ou Tombouctou ne sont historiquement pas des villes touarègues et ne sont aujourd’hui peuplées que minoritairement par ceux-ci. D’ailleurs, le MNLA est-il un mouvement touaregue ou fédère-t-il touaregs, arabes, songhais et peuls ? Ce sont là des questions qui me semblent d’une importance majeure et qui sont trop souvent éludées. Je pense au contraire que des revendications relatives à l’islam peuvent fédérer les populations de ces villes alors qu’une revendication uniquement touarègue ne pourra pas unir les populations de Tombouctou ou Gao.

17/04/2012 14:38 par Ismael

Monsieur Chien Guevara,
Dans une Afrique qu’on essayé d’unifier aujourd’hui, une nouvelle balkanisation du continent ne peut être toléré. Aucun pays Africain n’a d’avenir seul en tant qu’état, chaque africain doit comprendre cette vérité. Pour une fois je suis d’accord avec la communauté internationale sur l’unité du Mali et donc favorable à une intervention de la Cedeao ou l’union africaine pour restaurer la souveraineté du Mali.

17/04/2012 18:45 par patrig k

Dans un autre coin de ce Sahara et non loin de là , ou comment les accords secrets militaires, ont larvés les intérets des peuples du Sahel, Peuls, Touaregs et les autres .. Car au nom du gigantisme et centralisme à la française et qui semble etre à la faveur du précédent post, il faut tout meme bien l’admettre que ce schéma institutionnel d’organisation des pays Africains , n’a semble t il pas fait preuve de pertinence...

Ou alors, c’est qu’il n’y a pas de conflit !

extrait de :

http://www.agoravox.fr/tb_receive.php3?id_article=27610

en intégrale pj

par Théophile Kouamouo

Le pacte colonial au coeur de la crise franco-nigérienne

Nicolas Sarkozy avait affirmé au cours de sa campagne électorale que la France n’avait pas économiquement besoin de l’Afrique. La question nigérienne met pourtant en lumière les énormes intérêts stratégiques de Paris dans son pré carré.

Tout remonte au 24 avril 1961, un an après les indépendances de nombreux pays francophones d’Afrique subsaharienne. A Paris, quatre hommes signent un accord de défense. Il s’agit de Michel Debré (qui représente la République française), de Félix Houphouët-Boigny (président de la Côte-d’Ivoire), de Hubert Maga (président du Bénin, alors appelé Dahomey) et de Hamani Diori (président de la République du Niger). En annexe de cet accord, quelques phrases d’une importance capitale.

« Afin de garantir leurs intérêts mutuels en matière de Défense, les parties contractantes décident de coopérer dans le domaine des matériaux de Défense dans les conditions définies ci-après :

Article 1 : Les matières premières et produits classés stratégiques comprennent :
- Première catégorie : les hydrocarbures liquides ou gazeux ;
- Deuxième catégorie : l’uranium, le thorium, le lithium, le béryllium, leurs minerais et composés.
Cette liste pourra être modifiée d’un commun accord, compte tenu des circonstances.

Article 2 : La République française informe régulièrement la République de Côte-d’Ivoire, la République du Dahomey et la République du Niger de la politique qu’elle est appelée à suivre en ce qui concerne les matières premières et produits stratégiques, compte tenu des besoins généraux de la Défense, de l’évolution des ressources et la situation du marché mondial.

Article 3 : La République de Côte-d’Ivoire, la République du Dahomey et la République du Niger informent la République française de la politique qu’elles sont appelées à suivre en ce qui concerne les matières premières et produits stratégiques et des mesures qu’elles se proposent de prendre pour l’exécution de cette politique.

Article 4 : La République française est tenue informée des programmes et projets concernant l’exportation hors du territoire de la République de Côte-d’Ivoire, de la République du Dahomey et de la République du Niger des matières premières et des produits stratégiques de deuxième catégorie énumérés à l’article premier.
En ce qui concerne ces mêmes matières et produits, la République de Côte-d’Ivoire, la République du Dahomey et de la République du Niger, pour les besoins de la Défense, réservent par priorité leur vente à la République française après satisfaction des besoins de leur consommation intérieure, et s’approvisionnent par priorité auprès d’elle. »

Selon ce texte, avant de décider de quoi que ce soit dès qu’il s’agit d’exploitation du pétrole, du gaz, de l’uranium et d’autres matières premières stratégiques, ces trois pays africains doivent informer l’ancien colonisateur, à qui ils réservent par priorité les ressources de leur sous-sol.

Ce contrat d’exclusivité relative a souvent été considéré comme la contrepartie du soutien militaire français aux régimes politiques installés après l’indépendance. Pourtant, l’accord de défense ne donne aucune obligation explicite à la France en cas d’agression intérieure ou extérieure des Etats africains co-contractants. Ainsi, l’Ivoirien Félix Houphouët-Boigny a bénéficié, durant son long règne, de la protection des troupes françaises tandis que le Nigérien Hamani Diori a été renversé par un putsch en 1974. A la base, une famine dans le pays qui attise les mécontentements, et une « crise de l’uranium ». Face aux besoins de son pays, Hamani Diori demande une contrepartie plus élevée à la France... qui se braque. « En 1969, la France propose d’enlever l’uranium uniquement à prix fixe, au titre d’une aide au développement. Une compensation d’un milliard de F CFA (20 millions de FF) est attribuée au Niger. Le président Hamani Diori se rendant compte tardivement de la duperie, demande une association entre les deux (2) pays. Le CEA et la COGEMA sont en désaccord. La Société des mines de l’Aïr (SOMAIR) est constituée. Le CEA dit avoir sous-estimé les investissements et demande une participation de 5 000 actions au Niger qui refuse. Le Niger se rapproche de la France pour trouver un équivalent en pétrole pour fixer un prix plus juste : une (1) tonne d’uranium correspondrait à dix (10) mille tonnes de pétrole. Une demande de valorisation de l’indemnisation est refusée. La France fomente un coup d’Etat en 1974 qui renverse le président », raconte Serge Guero dans le Bulletin du réseau des organisations pour la transparence et l’analyse budgétaire (ROTAB) du Niger. Un récit qui rejoint celui fait par l’Américain Samuel Decalo dans un ouvrage de stratégie publié en mars 1978 et intitulé Coups and Army Rule in Africa : Studies in Military Style.

Ce « péché originel » de la relation franco-nigérienne renforce forcément les suspicions. Quand la démocratisation arrive en 1990, le Niger, pays le plus pauvre de la planète, ne renégocie pas ses accords avec l’industrie nucléaire française. Mais la société civile est de plus en plus offensive. En 2001, elle accuse la Cogema de négliger les préoccupations écologiques et de nuire à la santé des mineurs et à l’environnement. Des accusations dont la pertinence a été confirmée par des enquêtes de la Commission française de recherche et d’information Iindépendantes sur la radioactivité et d’associations de la société civile en France.

Mondialisation oblige, le Niger vient de libéraliser le marché de l’uranium. Le pays s’est ouvert à des firmes chinoises, au groupe australien Rio Tinto et à certains intérêts sud-africains. Le gouvernement nigérien s’est rapidement plaint de l’attitude peu coopérative d’Areva, qui refuserait de lui remettre la carte minière du pays. Areva, qui gère ses mines et ses usines sur place à travers deux filiales, la Somaïr - où le groupe français est majoritaire à plus de 63 % -, et la Cominak - où il détient 34 % du capital, et cohabite avec l’Etat nigérien et des intérêts japonais et espagnols - estime de son côté avoir montré son sérieux, en promettant des investissements de plus de 700 milliards de F CFA (plus d’un milliard d’euros). Les couteaux s’aiguisent, dans un contexte où les cours de l’uranium ont été multipliés par dix depuis 2003 et où le Niger fournit à Areva la moitié de sa production d’uranium.

17/04/2012 20:19 par Anonyme

Merci pour ce très intéressant article. C’est ce type d’article, chargé d’informations tues par les autres médias, dégagé de tout manichéisme partisan et nous donnant à percevoir la complexité des situations auxquelles sont confrontés les peuples du monde en lutte pour leur survie ou pour une vie meilleure, qui nous a fait apprécier LGS jusqu’ici.

(A bon entendeur...)

18/04/2012 00:07 par Chien Guevara

@ Monsieur Ismael

Vu vos propos, je pense qu’il vous faudrait revoir la définition du mot "souveraineté" ! ... car si la Cedeao et l’Union Africaine (pour ne reprendre que les organismes que vous citez ... alors que d’autres sont plus sournoisement planqués derrière) décident du sort du Mali, la souveraineté, elle est où ?
Et , lorsque vous parlez de "balkanisation" de l’Afrique, permettez-moi de vous proposer d’aller relire la réelle histoire de la guerre des balkans ... je ne suis pas sur que l’afrique "ex-bananière" soit comparable à ce que vous sous-entendez.

18/04/2012 09:56 par Lucky Luke

Venezuela :

Le ministre adjoint Reinaldo Bolà­var met en garde contre les intentions de diviser l’Afrique.

Caracas le 5 avril - « Derrière le coup d’état au Mali, il pourrait y avoir l’idée de diviser l’Afrique en divers états. L’idée serait de créer des états-tampons qui, en général, ont beaucoup de ressources naturelles » a prévenu le ministre adjoint des relations étrangères pour l’Afrique, Reinaldo Bolà­var .

(…) « En Afrique, il y a eu des coups d’état depuis 2007. Beaucoup sont condamnés et finalement beaucoup sont acceptés. Il font un coup d’état, convoquent à des élections et se font élire, parce qu’ils sont acceptés par la communauté internationale. » a souligné Bolivar lors d’un entrevue réalisée dans l’émission Contre-coup] de la chaîne Venezolana de Televisión.

http://www.aporrea.org/internacionales/n202368.html

18/04/2012 15:24 par Carlos Locos

On va parler vrai maintenant.
Voici une carte qui montre que les Touaregs et leur territoire.
Avec l’Azawad, ils empiètent sur des territoires où vivent les Songhais, les Peuls Massinas, les Dogons et les Boros, des populations non-touaregs.
Des problèmes en perspectives. En allant au sud du fleuve Niger, ils empiètent sur des territoires qui ne leur appartiennent pas. Il referont un Mali bis mais ils domineront les populations noires au sud du fleuve, comme en Mauritanie.

Voir la carte linguistique du Mali

18/04/2012 23:58 par Anonyme

NPA : non à l’intervention militaire

L’intervention militaire qui se prépare

La Cedeao a affirmé sa volonté d’intervenir militairement. Cette organisation régionale, si elle est africaine, ne doit pas faire illusion sur son indépendance. La plupart des dirigeants comme l’Ivoirien Alassane Ouattara ou le Burkinabé Blaise Compaoré sont des obligés de la France, tout comme le Nigérian Goodluck Jonathan vis-à -vis des États-Unis.

D’ailleurs lors de la réunion des chefs d’état-major de la Cedeao qui s’est tenue le 29 mars à Abidjan, des conseillers militaires français et états-uniens étaient présents

Au même moment, la France, par l’intermédiaire de son ministre des Affaires étrangères Alain Juppé, assurait le service diplomatique en faisant voter au Conseil de sécurité de l’ONU une déclaration permettant cette intervention.
Sur RFI, Juppé assurait du soutien de la France en mettant à disposition sa logistique pour les 3"‰000 soldats prévus par la Cedeao. Une fois de plus, les problèmes politiques vont se régler par la voie des armes avec les conséquences désastreuses pour les populations civiles qui sont déjà en prise avec une crise alimentaire..

La situation du Mali est avant tout la conséquence des diktats imposés par les organismes du capitalisme international, FMI et Banque mondiale qui, dans les années 1990, ont imposé un ajustement structurel dont les nombreuses coupes claires dans les dépenses publiques ont abouti à un affaiblissement considérable de l’État, des privatisations à outrance des principales entreprises qui ont détruit le tissu économique et social du pays. L’intervention militaire de la Cedeao sera une occasion inespérée pour les États-Unis et la France de se positionner plus fortement dans la région. Déjà des troupes opérationnelles françaises sont basées au Burkina et des conseillers militaires sont présents en Mauritanie.

Paul Martial

Tout l’article : http://www.npa2009.org/content/mali-non-%C3%A0-l%E2%80%99intervention-militaire

19/04/2012 01:35 par Chien Guevara

Réponse à Carlos Locos,

Merci de me recadrer : j’avais en effet oublié de parler,dans le chapitre 3, du mensonge 5, que l’on pourrait traduire ainsi :
- on reproche aux touaregs de conquérir le nord Mali, alors qu’ils ne représentent qu’une minorité des peuples autochtones locaux. C’est faux, car c’est le MNLA qui revendique l’indépendance de l’Azawad, et pas les touaregs. Dans la vidéo de cet article, le porte parole du MNLA est clair sur cette question : Toutes les ethnies opprimées de "la zone" Azawad sont soutenues par le MNLA.

Le nord-Mali a toujours été négligé par le sud, diplomatique et plus riche, quelle que soit l’ethnie ou tribu, tous les peuples du nord ont été lésés, voire dénigrés. Les Songhais, les Peuls Massinas, les Dogons et les Boros, dont vous parlez, sont-ils "heureux", se sentent-ils libres, considérés ? C’est plus celà qu’il faut voir, plutôt que des frontières virtuelles. Le MNLA dénonce un refus de considération du Nord-Mali, par le Sud.
Le gouvernement Malien étant manipulé par les occidentaux, je ne suis pas sur que les ethnies minoritaires que vous annoncez comme "victimes" du MNLA, soient mieux loties sous la coupe d’un état à la botte des USA et de son ex patron français !

19/04/2012 10:16 par Anonyme

Moi non plus ! D’autant plus que les Touaregs constituaient la garde de Kadhafi dont l’assassinat a tant fait rigoler sur les télé "˜occidentales’. De même que la destruction de la Libye, le racisme et la torture, surtout à l’égard des êtres humains dont la peau est faite pour accepter le soleil. africain. It is very fun, isn’t it, darling ?

Mais, à vrai dire, « on » ne me demande pas mon avis, pas plus qu’à tous les Français… On ne nous demande que de soutenir la « communauté internationale », afin de donner bonne conscience et appui à une intervention armée qui sera dite « humanitaire » ou je ne sais quoi de BON - et de condescendant, mais faut pas le dire. Au lieu de dire que c’est pour défendre l’industrie sale du nucléaire, qui fait la « grandeur » de la France. Car ça, il ne faut pas le dire non plus - surtout en période électorale.

Alors, disons-le très fort, tant qu’on peut encore : LE NUCLEAIRE, CIVIL ET MILITAIRE, EST UNE DES PRINCIPALES RICHESSES DE LA FRANCE

20/04/2012 01:06 par Thomas Ortalet

Si Moussa AG ASSARID nous dit que le MNLA est un mouvement qui regroupe tous les peuples du nord, et bien que les composantes autres que les touaregs se manifestent alors... Cherchez un quelconque porte parole ou chef militaire du MNLA qui ne soit pas touareg... Je ne crois pas à cela même si je ne demande qu’à être démenti. Je ne connais pas bien les populations nord maliennes, mais les quelques personnes que je connais et qui se trouvent être songhai et peuls ne supportent pas le MNLA.
Par contre, je crois qu’il ne faut pas toujours chercher à appliquer des schémas tout faits à chaque conflit : bien sûr que la France et les États Unis cherchent, dans leur logique impérialiste, à tirer les ficelles de tout cela, bien sûr qu’une intervention de la CEDEAO servira les intérêts français et américains, bien sûr que l’on cherche à faire peur à l’opinion occidentale avec "les dangereux islamistes"... C’est pour cela qu’une intervention extérieure quelle qu’elle soit n’est pas souhaitable.
Pour autant, doit-on nécessairement succomber au mythe du rebelle touareg épris de liberté et idéaliser la cause touaregue ? Doit-on continuer à dire qu’AQMI et les groupes qui se réclament du salafisme ou du wahabisme n’existent pas sous prétexte que les puissances impérialistes s’en accommodent très bien lorsque cela les arrangent (comme ce fut le cas très récemment en Libye ou actuellement en Syrie) ?
Je crois sincèrement qu’il faut réellement envisager le problème dans toute sa complexité, chose qui n’est pas simple et qui nécessite de ne pas adopter une position manichéenne.

21/04/2012 23:47 par Chien Guevara

Tiens, je viens de lire ça, dans la presse :

Un cerveau de la NASA à la tête du gouvernement malien

Bon, c’est juste pour info ...

22/04/2012 20:48 par N.

Tour d’abord, bonjour.

Ensuite, je ne sais si je dois louer la tentative de rétablir une certaine vérité quand à ce sujet dont nos médias nous font l’actualité (ici en Françe ...) ou bien me désoler du fait que la principale source, visiblement utilisée pour cet article, ne soit pas citée.
D’autant plus lorsque des paragraphes entiers en sont tout simplement copiés/collés ...

L’article original se trouve ici :
Business, profits souterrains et stratégie de la terreur La recolonisation du Sahara ( Par Hélène Claudot-Hawad ; Directeur de Recherche - CNRS)

22/04/2012 22:53 par Chien Guevara

Bonsoir,

Désolé moi aussi, d’avoir abondé dans votre sens, en ne citant que la source où j’avais puisé mes "copié/collé", qui est celle-ci : http://www.kabyle.com/fr/articles/la-recolonisation-du-sahara-19521-07042012.html. Ce n’est pas de ma faute si eux ne vous citaient pas ... Je suis moi-même souvent copié/collé sans être cité ; et ça ne me dérange pas, dans la mesure où le message passe.

Ceci dit, mon article est une analyse de synthèse qui ne se résume pas à votre source, loin s’en faut ; j’espère que vous l’avez relevé ... Sans celà , je ne me serais jamais permis de publier en mon nom.

Merci pour la source réelle (d’ailleurs, je viens de voir que celle de kabyle.com n’est plus en ligne...)

Cordialement

Votre défenseur "pirate"

24/04/2012 21:44 par Ismael

Monsieur Chien Guevara,
Je sais que vous êtes quelqu’un d’intelligent et je vais citer un homme politique Africain qui disait : "Les intellectuels africains doivent se sacrifier pour la libération de leur peuple et non le trahir". Je vous invite à lire cet article et peut être après nous aurons une vraie conversation : http://www.cameroonvoice.com/news/news.rcv?id=6649

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