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Tout c’qu’ est dégueulasse porte un joli nom ; la loi plein emploi n’échappe pas à cet adage.

Loi « plein emploi » (France travail) Une loi qui, si elle est intégralement appliquée, aura des conséquences humaines bien plus cruelles que celles issues de la réforme des retraites.

En effet cette loi dont le nom pourrait être porteur d’avenir commence en réalité par casser les chiffres du chômage car désormais seront inclus dans ceux-ci tous les inscrits à France-Travail. Il y aura désormais les chômeurs inscrits, ainsi que, ce qui est nouveau, tous les allocataires du RSA, tous les jeunes de 16 à 25 ans en contrat avec les missions locales et tous les "travailleurs handicapés" exerçant dans des structures spécialisées (article L.5411-1 du Code du travail).

Le nombre d’inscrits à France-Travail n’aura donc plus aucun rapport avec ce qui est appelé actuellement « les chiffres du chômage » et ceci aura pour conséquence de rendre toutes comparaisons impossibles, ce qui profitera, à n’en pas douter, au gouvernement en place.

Ensuite les parcours des inscrits à France-Travail seront modifiés. Selon les cas les inscrits à France-Travail seront orientés vers un organisme référent qui pourra être soit France-Travail, soit les conseils départementaux ou des organismes délégataires de ces deniers, soit les missions locales, soit des organismes spécialisés dans l’insertion professionnelle des personnes handicapées, soit d’autres organismes référents, publics ou privés (article L. 5411‑5‑1 du Code du travail). Des organismes privés seront désormais autorisés à faire l’accompagnement des demandeurs d’emploi qu’assumait auparavant Pôle-Emploi.

Puis cet organisme sera chargé de réaliser un diagnostic global de la situation du demandeur d’emploi et devra élaborer conjointement avec le salarié sans emploi un contrat d’engagement. On peut légitimement se poser la question de la validité d’un tel contrat en regard du droit des contrats car si le demandeur d’emploi refuse de signer ce contrat, il est alors sanctionné par la suspension intégrale ou partielle du revenu de remplacement ou de l’allocation (article L.5412-1 du Code du travail).

Ce contrat d’engagement devra comporter les engagements d’accompagnement de l’organisme référent, qui se limitent à la désignation d’un référent unique pour le demandeur d’emploi et à un descriptif des prétendues mesures d’accompagnement à mettre en œuvre. Ce contrat devra également comporter les engagements du demandeur d’emploi parmi lesquels sa participation à un plan d’action ainsi que la définition de l’offre raisonnable d’emploi que celui-ci est tenu d’accepter.

Ce plan d’action devra comporter les objectifs d’insertion sociale et professionnelle et le niveau d’intensité de l’accompagnement requis auquel correspond une durée hebdomadaire d’activité du demandeur d’emploi d’au moins quinze heures (article L.5411-6 du Code du travail).

C’est donc un minimum de 15 heures d’activités et non 15 heures d’activités que devront effectuer tous les inscrits sur les listes de France-Travail. Cette mesure s’applique à tous les inscrits sur les listes de France-Travail et non uniquement aux allocataires du RSA contrairement à ce qui est souvent dit ou écrit.

Rien n’est précisé quant à ce qui est entendu par « activité ». Il serait possible qu’il s’agisse de prétendues formations autour du chômeur et de l’emploi ; une véritable manne pour certaines entreprises de formations sans réelle formation pour les chômeurs. De même il pourrait s’agir de stages de découverte/immersion en entreprise à foison au grand profit des entreprises, sans que cela permette de créer des emplois pour les chômeurs et même bien au contraire.

Une chose est certaine, c’est qu’il sera impossible de pourvoir un tel volume d’activités. Ceci est matériellement inapplicable. D’ailleurs même le législateur à la solde des capitalistes en bande organisée en a une parfaite conscience, puisque dans le même article il instaure la possibilité d’un plan d’action avec une durée d’activité minorée sans pouvoir être nulle, en fonction de la situation individuelle ; il propose même des plans d’actions sans durée d’activité, à la demande des personnes rencontrant des difficultés particulières.

Au final, ces plans d’action et les quinze heures minimum d’activité seront un formidable outil pour faire pression sur les demandeurs d’emploi afin qu’ils acceptent n’importe quoi.

Alors que pour être pertinent l’accompagnement des demandeurs d’emploi doit être fait avec et non contre la volonté des chômeurs et il ne doit jamais être un prétexte ni pour le contrôle, ni pour la contrainte, ni pour la sanction des demandeurs d’emplois !

Après cette partie de franche démagogie qu’est ce contrat d’engagement, la loi fait pleuvoir les sanctions (article L.5412-1 du Code du travail) ainsi que les contrôles à l’encontre des demandeurs d’emploi . Quasiment toutes viennent sanctionner des manquements du demandeur d’emploi vis-à-vis du contrat d’engagement et du plan d’action contenu dans celui-ci, alors que le plus souvent le demandeur d’emploi est dans une situation particulièrement inégale et défavorable lors de l’élaboration de ce contrat face à l’organisme référent ainsi que son agent (ou son salarié puisque désormais il pourra s’agir d’organismes privés) plus ou moins zélé et soumis à la pression du chiffre organisée par les directions.

Avant de conclure et sans évoquer le pilotage institutionnel qui recèle des perles, il semble intéressant de signaler quelques autres points remarquables dans cette loi. Ainsi nous trouvons notamment que le conjoint de la personne qui demande le RSA est d’office inscrit sur les listes des demandeurs d’emploi (Art. L. 5411‑1) ; que les données personnelles des demandeurs d’emploi sont transmises un peu partout sans demander l’accord de ces derniers (Art. L. 5411‑5‑1 ; L. 262-42 ; L.161-17-1-2 ; Article L5132-3 ; L. 263-4-1 ; Art. L. 5311-8. ; L. 6323-8) ; que des critères locaux peuvent préciser, donc modifier, les règles d’orientation des bénéficiaires du RSA (Art. L. 5411‑5‑1) ; que des organismes privés peuvent être chargés de repérer (de chasser) des personnes les plus éloignées de l’emploi (Art. L. 5316-1.) ; que c’est dans le contrat d’engagement que sont précisés (les mots ont un sens et le mot « précisé » n’est pas le mot « rappelé ») les voies et délais de recours suite aux sanctions éventuellement prononcées (Art. L. 5411-6) ; que le délai de carence entre les contrats de missions est supprimé pour les entreprises d’intérim spécialisées (L’article L. 5132-6).

Finalement, même appliquée partiellement, cette loi sera un formidable outil de pression sur les demandeurs d’emploi sans pour autant se donner de réels moyens pour résoudre les difficultés des chômeurs. Le chômage est le fait des entreprises et non celui des demandeurs d’emploi. Face à cette pression irraisonnée il est certain qu’un nombre important de demandeurs d’emploi vont se voir privés des très maigres revenus qui les maintiennent tant bien que mal dans la société. Que vont-ils devenir ?

Appliquée intégralement cette loi va créer des millions de personnes sans revenus ni solutions pour survivre. Il est à craindre l’éclosion d’émeutes de la faim par des personnes qui n’auront vraiment plus rien à perdre et pour qui les peines de prison seront une solution pour manger à leur faim et ne plus avoir froid. De quoi faire regretter à notre président les gentils Gilets Jaunes.

Liens

https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/textes/l16t0181_texte-adopte-provisoire.pdf

https://www2.assemblee-nationale.fr/scrutins/detail/(legislature)/16/(num)/2717

URL de cet article 39255
   
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