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Le Monde Diplomatique, janvier 2024

Julien Brygo envisage une élection étasunienne de tous les dangers : Dans la liste des primaires précédant l’élection présidentielle américaine de 2024, la Caroline du Sud attirera tous les regards en février prochain. Côté démocrate, la victoire du président Joseph Biden paraît acquise ; côté républicain, le scrutin dans cet État conservateur devrait sceller le sort des concurrents de M. Donald Trump. Seul problème : une majorité des Américains ne veut ni de l’un ni de l’autre…

Pour Benoit Bréville, au regard du droit international, la situation est limpide : la Russie occupe illégalement son voisin ukrainien, tout comme Israël occupe illégalement son voisin palestinien, ce que les Nations unies ont maintes fois condamné. Tous deux devraient inspirer la même réprobation aux Occidentaux, qui défendent l’idée d’un « ordre fondé sur des règles » (ruled-based order). Il n’en est rien. Dans un cas, les États-Unis et l’Union européenne se tiennent aux côtés du pays agressé ; dans l’autre, du pays agresseur.

Dès les premiers jours de la guerre, le Vieux Continent a ainsi ouvert grand ses portes à des millions d’exilés ukrainiens, dans un élan d’hospitalité à faire pâlir les réfugiés d’Irak, de Syrie ou d’Afghanistan. Les Ukrainiens « nous ressemblent, a justifié un éditorialiste britannique. (…) Ils regardent Netflix, ont des comptes Instagram, votent lors d’élections libres et lisent des journaux non censurés ». Nul ne propose d’accueillir les centaines de milliers d’habitants qui voudraient fuir Gaza. Au bout de quarante-quatre jours de bombardements israéliens, le président français Emmanuel Macron a tout juste consenti à recevoir cinquante enfants palestiniens blessés, « si cela [était] utile et nécessaire ».

Washington et Bruxelles ont riposté à l’invasion russe en prenant des sanctions draconiennes contre Moscou (embargo sur le pétrole, restrictions commerciales et bancaires, gel des avoirs des oligarques, interdiction à Russia Today d’émettre en Europe…). Des appels au boycott ont visé sportifs, musiciens, cinéastes, écrivains. Des expositions ont été annulées, des concerts déprogrammés. Rien de tel pour Israël. Fondé en 2005, le mouvement Boycott, désinvestissement, sanctions (BDS) plaide, en vain, pour l’adoption de mesures de rétorsion contre Tel-Aviv.

La Russie est-elle impérialiste, demandent Jules Serguei Fediunin et Hélène Richard ? Les milliards de dollars d’aide n’auront pas suffi ; la contre-offensive ukrainienne a échoué. Espérant maintenir les flux financiers en provenance des capitales occidentales, Kiev présente son agresseur comme une puissance coloniale qui menacerait l’Europe entière. Revenir sur l’histoire de l’empire russe et la place singulière qu’y occupe l’Ukraine invite à questionner cette idée.

Alain Supiot propose un droit international de la grève : En France, c’est un principe constitutionnel : « Le droit de grève s’exerce dans le cadre des lois qui le réglementent. » Mais son bon exercice requiert la vigilance des syndicats, parfois du juge. L’Organisation internationale du travail (OIT) le défend, elle, à une plus vaste échelle. Malgré les contradictions qui la traversent. Parce que la grève reste indispensable à l’émancipation des travailleurs.

Luis Alberto Reygada nous emmène dans un train nommé Maya : En dépit de sa popularité, le président mexicain Andrés Manuel López Obrador ne sera pas candidat à sa succession lors de la présidentielle de juin 2024 : la Constitution le lui interdit. Marqué par le retour du Mexique sur la scène politique internationale, son mandat le sera également par un gigantesque, et contesté, programme d’infrastructure ferroviaire dans le sud du pays.

Pour Paul Boyer et Rémi Carton, Lusaka, plaque tournante des migrations africaines estau cœur de la route migratoire vers l’Afrique du Sud, deuxième axe le plus fréquenté du continent après celui vers l’Europe. Les exilés prennent tous les risques pour échapper aux conflits ou à la misère. Sous les pressions européenne et internationale, Lusaka tente à la fois de lutter contre les trafics et d’organiser les flux réguliers.

Philippe Baqué pense que les Touaregs doivent s’unir ou disparaître : Depuis le début des années 1990, les Touaregs — peuple berbère réparti entre cinq États — entrent régulièrement en rébellion dans le nord du Mali pour réclamer l’indépendance de ce territoire qu’ils appellent Azawad. Les accords non respectés ou les guerres, aggravées par la présence de groupes djihadistes, se succèdent ainsi que les interventions de puissances extérieures rivales.

Alice Hérait analyse la guerre du récit national à Taïwan : Livraisons d’armes de Washington contre opérations navales de Pékin, provocations du Congrès américain contre discours martiaux du président Xi Jinping, l’approche des élections générales du 13 janvier à Taïwan a exacerbé les tensions entre les États-Unis et la Chine. Sur place, la rivalité géopolitique se grime parfois derrière d’autres débats : ceux qui divisent la société autour de son « identité profonde ».

Pour Olivier Neas, la Nouvelle-Zélande négocie un virage à droite : Des milliers de manifestants ont défilé début décembre dans les rues d’Auckland ou de Wellington pour défendre les droits des Maoris : leur remise en cause figure au programme du nouveau gouvernement, sans doute le plus conservateur de l’histoire néo-zélandaise, après que les travaillistes ont déçu les espoirs de progrès social nés de leur élection en 2017.

Selon Philippe Leymarie, La guerre en Ukraine est un grand accélérateur de l’armement mondial : De 1932 à 1934, les grandes puissances ont organisé à Genève une conférence mondiale pour le désarmement afin de prévenir une déflagration générale. On connaît la suite, tragique. Un siècle plus tard l’industrie de défense ne s’est jamais aussi bien portée. Dopée par l’agression russe contre Kiev comme par les tensions géopolitique.

Malgo Nieziomek entrevoit une lueur d’espoir pour le droit à l’avortement en Pologne : Après huit années de pouvoir conservateur, M. Donald Tusk a pris la tête du gouvernement polonais. Cet ancien président du Conseil européen annonce une nouvelle idylle avec Bruxelles et davantage de libertés. Parmi elles, celle d’avorter. Arrachée au camp libéral par les mobilisations féministes, cette promesse continue à faire débat au sein de la nouvelle coalition.

Pour Tristan de Bourbon-Parme, Le Brexit n’est pas une si mauvaise affaire : Le 15 novembre, la Cour suprême britannique a censuré le projet gouvernemental de transférer les demandeurs d’asile au Rwanda. À contempler le crépuscule des conservateurs, difficile d’imaginer qu’ils auraient « repris le contrôle », comme le promettaient les partisans de la sortie de l’Union européenne. À en croire quelques sondages, prévaudrait même le « Bregret », le regret du Brexit ; mais peut-on conclure à son échec ?

Leila Seurat observe que Le Hamas revendique désormais le leadership du mouvement palestinien. Au fil des ans, le mouvement islamiste a connu deux mutations majeures. Il s’est renforcé sur le plan militaire et sa direction établie à Gaza a pris l’ascendant sur ses dirigeants installés à l’étranger. En lançant son attaque sanglante du 7 octobre, l’organisation entend faire figure d’unique défenseur de son peuple et compte jouer un rôle politique central après la fin des combats.

Dans le même temps, Charles Enderlin analyse l’erreur stratégique d’Israël : Le 7 octobre, Israël a subi un traumatisme majeur avec l’attaque du Hamas contre la population civile et des sites militaires. L’une des causes de cet événement tragique est le refus de ses dirigeants de favoriser une réponse politique à la question palestinienne. La guerre menée actuellement à Gaza au prétexte d’annihiler le Hamas est porteuse de futurs drames.

Thomas Jusquiame pense que nos villes sont verrouillées au nom de la sécurité : Jeux olympiques, sommets internationaux, visites du pape : les métropoles se battent pour accueillir de grands événements. Soucieuses d’éviter incidents, attentats et désordres, les autorités peaufinent la gestion sécuritaire des rassemblements, une discipline héritée du siècle dernier. Il s’agit désormais de restreindre les libertés publiques et d’aménager l’espace pour mettre les foules en flux.

Antoine Pecqueur se penche Les bonnes œuvres de Michel-Édouard Leclerc : Lessives, conserves et culture… La diversité des rayonnages des supermarchés Leclerc illustrerait l’engagement du groupe pour démocratiser ce qui rend la vie plus belle. Mais les « espaces culturels » de l’enseigne, et plus largement sa politique culturelle, constituent-ils des conquêtes du monde de l’esprit sur l’univers de la marchandise, ou sa légitimation par le soutien au « supplément d’âme » ?

Pierre Souchon estime que les bals tragiques deviennent une tradition française : Les coups de couteaux dans les bals n’ont pas commencé à Crépol. En Ardèche, département voisin, des protagonistes de bagarres aiguisées se souviennent. Et en tirent de surprenantes réflexions politiques…

Ulysse Baratin défend L’honneur des poètes : Il arrive que des œuvres traversent le temps. « Romiosini », écrit il y a près de soixante ans par Yannis Ritsos, résonne toujours : chant de lutte et de méditation sur la Grèce, que Mikis Theodorakis mettra en musique, le poème porte l’histoire d’un peuple plus intimement défini par ses combats que par le Parthénon.

Julie Reux ne s’étonne pas de la ruée vers le rosé : C’est l’histoire d’une orgie de belles affaires sous le soleil méditerranéen. En Provence, 2022 a été l’année record pour les transactions de domaines vinicoles. Sous le regard médusé des vignerons du coin qui n’avaient jamais osé en rêver, des personnalités se pressent autour des bastides et de leurs vignes : le couple Sarkozy-Bruni, le gratin de Hollywood (Brad Pitt, George Clooney, George Lucas), des gestionnaires de fonds privés aux noms inconnus du grand public, et une myriade de petits patrons, plus ou moins retraités, avides de patrimoine défiscalisable, le soleil et le rosé en prime. Car, comme le résume l’heureuse propriétaire d’un château au pied de la montagne Sainte-Victoire : « Si Bernard Arnault, qui est un visionnaire, choisit d’investir ici, c’est que ça doit valoir le coup.

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Bernard GENSANE
Il s’agit là d’un ouvrage aussi important que passionnant. Les conclusions politiques laissent parfois un peu à désirer, mais la démarche sociologique est de premier plan. Et puis, disposer d’un point de vue d’outre-Rhin, en la matière, permet de réfléchir à partir d’autres référents, d’autres hiérarchies aussi. Ce livre répond brillamment à la question cruciale : pourquoi fait-on la guerre aujourd’hui, et qui la fait ? L’auteur articule, de manière puissante et subtile, les questions (…)
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Le système bancaire moderne fabrique de l’argent à partir de rien. Ce processus est peut-être le tour de dextérité le plus étonnant qui fut jamais inventé. La banque fut conçue dans l’iniquité et est née dans le pêché. Les banquiers possèdent la Terre. Prenez la leur, mais laissez-leur le pouvoir de créer l’argent et, en un tour de mains, ils créeront assez d’argent pour la racheter. ôtez-leur ce pouvoir, et toutes les grandes fortunes comme la mienne disparaîtront et ce serait bénéfique car nous aurions alors un monde meilleur et plus heureux. Mais, si vous voulez continuer à être les esclaves des banques et à payer le prix de votre propre esclavage laissez donc les banquiers continuer à créer l’argent et à contrôler les crédits.

Sir Josiah Stamp,
Directeur de la Banque d’Angleterre 1928-1941,
2ème fortune d’Angleterre.

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