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Venezuela : déstabilisation en chantier

Nous allons savoir bientôt ce que les médias du comité de rédaction international vont trouver comme grille de présentation du Venezuela. Des élections présidentielles viennent d’avoir lieu. A les lire, il n’y en aurait jamais eu et Hugo Chavez aurait été un dictateur qui verrouillait toute ouverture, non pas un président élu à plusieurs reprises dans des conditions aussi transparentes, sinon plus que celles qui sont en pratique dans les pays dits démocratiques.

Il y a donc eu un scrutin au Venezuela, ce que personne ne peut nier. Mais, encore une fois, même Chavez mort, c’est l’un de ses camarades, son dauphin, disent les préposés de la propagande, qui est choisi par les urnes. Ce n’est évidemment pas du goût des Etats-Unis et de la presse affidée de la ploutocratie mondiale. Libération, ce quotidien qui a depuis longtemps changé de main et de vocation, titre : « Le candidat écarté envisage des manifestations ». Savourons le mot « écarté », quand il s’agissait plutôt d’écrire « battu » ou « défait » ou « perdant ». « Ecarté » est plus suggestif et fait appel à la fantasmagorie élaborée et entretenue contre la montée en puissance du mouvement social antilibéral, symbolisé par le président défunt. Henrique Capriles, le candidat des affairistes et poulain des Etats-Unis, n’aurait pas perdu le vote, selon cette approche, mais aurait été victime d’une fraude ou d’une manoeuvre de la commission électorale qui serait, c’est suggéré, sous les ordres des « chavistes ».

Dans la réalité, ce serait plutôt à ces « chavistes » de s’interroger sur l’écart enregistré entre le score prédit par les sondages et celui du décompte des voix. Ce qui représente beaucoup, plus de 15% des suffrages. Qu’à cela ne tienne, ce n’est qu’avec une avance de près de 300.000 voix que Nicolas Maduro, le bolivarien, dame le pion à son adversaire. C’est très peu pour affirmer la dynamique en cours d’émancipation des Vénézuéliens des griffes du néolibéralisme. Mais assez pour empêcher des remises en cause dramatiques des avancées sociales réalisées ces dernières années.

La démocratie joue souvent avec les chiffres. C’est ce qui s’est produit. En pourcentage cela donne, selon le Conseil national électoral (CNE), 50,66% contre 49,07%. Le score attribue la présidence à Maduro, en toute légalité. Tibisay Lucena, responsable du CNE, avait expressément affirmé que le résultat est « irréversible » et demandé aux Vénézuéliens « de rentrer tranquillement dans leur foyer ».

En dépit de tout, son adversaire et les Etats-Unis (on peut s’interroger sur ce qui les autorise à se mêler de la chose) demandent un recomptage des suffrages. Les bolivariens sont d’accord. Ce qui a dû pas mal décevoir. Un refus de leur part, largement justifié par le modèle opératoire utilisé et la proclamation des résultats par l’instance légale, pouvait être une réponse tout à fait légitime à une attitude qui fleure la provocation et le déni de droit, la mise en place d’une atmosphère de coup d’Etat. Cela suffira-t-il à faire entendre raison aux partisans du candidat déçu et à Washington. Rien de moins sûr. Il semble bien qu’une entreprise de déstabilisation est mise en branle. Reste aux Vénézuéliens de la mettre en échec, tel qu’ils l’ont fait pour les précédentes.

Ahmed Halfaoui

http://www.lesdebats.com/

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COMMENTAIRES  

17/04/2013 12:18 par tchoo

Faut reconnaitre aux Etats Unis une certaine expérience dans le recomptage des voix, et une certaine habilité malsaine à les plier à leurs désirs

17/04/2013 16:20 par Bonjour

1 ) Les émissaires de l’UNASUR n’émettent aucun doute sur le système de vote électronique qui est le plus sûr d’Amérique latine.

2 ) Le Parlement de l’Amérique centrale, observateur des élections confirme que les "El Parlamento Centroamericano (Parlacen) calificó este martes como "legà­timas y transparentes" las elecciones presidenciales celebradas el pasado domingo en Venezuela, en las que resultó vencedor el candidato socialista, Nicolás Maduro, tras obtener el 50,75 por ciento de los votos escrutados".

3 ) L’OEA reconnaît le résultat officiel.

La normalisation semble en bonne voie, même s’il faut rester très vigilant car la situation reste tendue.

Nous pouvons remercier le Grand Soir pour son attention particulière et bénéfique.

17/04/2013 16:30 par Bonjour

Et le gouvernement espagnol manifeste son respect du résultat électoral au Venezuela dans une note du Ministre des Affaires étrangères.

17/04/2013 16:38 par legrandsoir

Nous pouvons remercier le Grand Soir pour son attention particulière et bénéfique.

Il est plus facile d’être attentif à un processus que d’être l’auteur du processus. Merci aux Bolivariens.

17/04/2013 17:03 par Lionel

Maduro semble fragile haranguant la foule face aux caméras sur Télésur, je souhaite que sa discrétion le place à la hauteur de la situation.
N’y a-t-il pas un risque du côté des armées ?
Chavez était un chef militaire en plus de son rôle de Président et respecté en tant que tel, en sera-t-il de même pour Maduro ?

17/04/2013 17:21 par Bonjour

Merci aux Bolivariens

@ LGS - C’est certain.

L’investiture officielle a lieu vendredi. Touchons du bois.

Dans toute cette affaire ce qui frappe le plus c’est la position de NOS médias, comme le rappelle bien Ahmed Halfaoui. Et Libé qui a toujours en ligne cet article "Bon débarras", "l’ami Chavez".

Sidérant.

18/04/2013 10:02 par alfare

@ LGS

"Il est plus facile d’être attentif à un processus que d’être l’auteur du processus. Merci aux Bolivariens"

SVP pas de modestie, réelle ou fausse,
dans ce "processus" comme dans d’autres, tout le monde participe, est partie prenante, est impliqué, de près ou de loin, et ceux et celles qui ont mis leur corps désarmé pour faire face au fascisme devant les centres de santé, ceux et celles qui sont morts, blessés où qui simplement étaient là , en première ligne, comptaient sur LGS et d’autres partout dans le monde, pour dénoncer, informer rétablir la vérité qui pour cette fois a triomphé. Etablir une grande chaine solidaire de pdts, gouvernements, pays et peuples qui unis ont fini par plier l’espagne, l’oea, prouver que les usa ne font pas toute la loi comme ils veulent.
Il n’y a pas de victoire définitive, de processus irréversible (même si certains ont pensé qu’en l’inscrivant dans leur constitution...), le travail est toujours à faire mais les points marqués ces jours-ci compteront pour l’avenir.

ferrat/aragon Epiloque
http://www.youtube.com/watch?v=Vv3qJA_L5Xg

18/04/2013 10:37 par legrandsoir

Non, pas de modestie là -dedans, mais un simple rappel des échelles :

Faire une révolution —>
Difficulté = 100 ;
Risques = 95 ;
Utilité = 110 ;

Publier un article sur la révolution —>
Difficulté = 0,001 ;
Risques = 0,05 ;
Utilité = indéterminée

21/04/2013 19:44 par balkhiss

Merci au Grand Soir, de nous informer avec des articles de grande qualité. Personnellement, je recommande LGS autour de mois et dispatche l’information autant que faire se peut, car je peux dire que c’est vraiment du sérieux

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