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La Libye, la gauche européenne et le retour de l’impérialisme humanitaire

Douze ans plus tard, c’est l’histoire du Kosovo qui se répète. Des centaines de milliers de morts irakiens, l"˜OTAN mise dans une position intenable en Afghanistan, et ils n’ont rien appris ! La guerre du Kosovo a été lancée pour stopper un génocide inexistant, la guerre afghane pour protéger les femmes (allez vérifier leur situation actuellement) et la guerre d’Irak pour protéger les Kurdes. Quand vont-ils comprendre qu’on a toujours affirmé que les guerres sont justifiées par des raisons humanitaires ? Même Hitler « protégeait les minorités » en Tchécoslovaquie et en Pologne.

Note : Une première version de ce texte est parue en anglais sur le site Counterpunch (http://www.counterpunch.org/bricmont03082011.html) et a été traduite en français. Cette version-ci développe et précise la version précédente.

Ils sont tous là  : les « Verts » avec José Bové, maintenant allié à Daniel Cohn- Bendit, qui a toujours soutenu les guerres de l’OTAN, et bien sûr Bernard-Henry Levy et Bernard Kouchner, appelant à une sorte « d’intervention humanitaire » en Libye, mais aussi, parfois, les partis de la gauche européenne (qui regroupe les partis communistes européens « modérés ») ; différents groupes « radicaux » reprochent à la gauche d’Amérique Latine, dont les positions sont bien plus sensées, d’agir comme idiots utiles du tyran libyen. Un article récent de la Ligue Communiste Révolutionnaire (belge), parlant de « faillite du chavisme », est un bon exemple de cette attitude. Alors que les trotskistes n’ont jamais connu la responsabilité du pouvoir, et n’ont jamais eu l’obligation de répondre au peuple qu’ils prétendent représenter, ils se lancent dans des critiques virulentes de Chavez, qui est régulièrement élu à la tête d’un grand pays (et les trotskistes n’adorent-ils pas la démocratie ?) sans chercher à comprendre pourquoi la gauche latino-américaine voit, avec raison, l’ingérence américaine comme « l’ennemi principal » et, sans doute parce qu’elle est mal informée, ne fait pas confiance aux trotskistes européens pour arrêter l’OTAN.

Douze ans plus tard, c’est l’histoire du Kosovo qui se répète. Des centaines de milliers de morts irakiens, l"OTAN mise dans une position intenable en Afghanistan, et ils n’ont rien appris ! La guerre du Kosovo a été lancée pour stopper un génocide inexistant, la guerre afghane pour protéger les femmes (allez vérifier leur situation actuellement) et la guerre d’Irak pour protéger les Kurdes. Quand vont-ils comprendre qu’on a toujours affirmé que les guerres sont justifiées par des raisons humanitaires ? Même Hitler « protégeait les minorités » en Tchécoslovaquie et en Pologne.

Et, comme lors du Kosovo, on s’oppose à l’intervention avec toutes les mauvaises raisons possibles et imaginables : par exemple, qu’une intervention va renforcer Kadhafi - mais on a aussi dit cela pour Milosevic et Saddam, et ce n’est pas exactement ce qui s’est passé. Ou qu’il faut « soutenir l’insurrection » mais s’opposer à l’intervention, alors qu’il est évident qu’un soutien purement verbal est sans effet. Ou encore que les insurgés ne nous demandent pas d’intervenir ; d’abord, cela semble ne plus être vrai et, s’ils perdent, ils nous demanderont surement d’intervenir. Mais devons-nous intervenir partout dans le monde si on nous le demande ? Le fait-on avec les Palestiniens ?

Par contre, le secrétaire d’état des Etats-Unis, Robert Gates, a déclaré qu’on « doit examiner la tête » de tout futur secrétaire d’état qui conseillerait au président américain d’envoyer des troupes en Asie ou en Afrique. L’amiral Mc Mullen a également conseillé la prudence. Le grand paradoxe de notre époque, c’est que le QG du mouvement de la paix se trouve au Pentagone et au Département d’Etat tandis que le parti pro-guerre est constitué d’une coalition de néo-conservateurs et d’interventionnistes de toutes sortes, comprenant la gauche de l’ingérence humanitaire de même que certains Verts ou des communistes repentis. La même combinaison se retrouve d’ailleurs dans le cas de l’Iran. Ce sont les militaires qui conseillent la prudence et les « humanitaires » qui lancent des cris de Taïoo au nom des droits de l’homme (ou de la femme).

Evidemment, les Etats-Unis feront ou non la guerre pour des raisons qui sont indépendantes des opinions de la gauche pro-guerre. Contrairement à ce qui est souvent affirmé, le pétrole n’est sans doute pas le facteur principal affectant leur décision, car tout futur gouvernement libyen devra vendre du pétrole et la Libye n’en produit pas assez pour peser significativement sur les cours du pétrole. Bien sûr, le chaos en Libye mène à la spéculation qui elle-même affecte les prix, mais cela est un autre problème. Toute l’idée de « guerre pour le pétrole » souffre de simplisme. En Irak, par exemple, les compagnies chinoises peuvent investir tout autant que les autres, et la Chine achète du pétrole un peu partout dans le monde au prix du marché, sans dépenser un centime en interventions militaires. Si les Etats-Unis ont fait la guerre pour « contrôler le pétrole » et affaiblir la Chine, il s’y sont vraiment mal pris ! En plus, tout l’argent qu’ils dépensent pour leurs guerres est, en pratique, emprunté à la Chine, ce qui contribue encore plus à leur déclin. Drôle de façon de maintenir son hégémonie.

L’argument principal en faveur de la guerre, du point de vue des Etats-Unis, est que, si tout se passe vite et facilement, cela réhabilitera l’OTAN et l’ingérence humanitaire, dont l’image a été ternie par l’Irak et l’Afghanistan. Une nouvelle Grenade ou au plus, un nouveau Kosovo, est exactement ce qu’il faut. Un autre motif d’intervention c’est de mieux contrôler les rebelles en venant les « sauver » dans leur marche vers la victoire. Mais cela a peu de chance de réussir : Karzaï en Afghanistan, les nationalistes kosovars, les Shi’ites d’Irak et bien sûr, Israël, sont parfaitement contents de bénéficier de l’aide américaine quand ils en ont besoin mais, après cela, ils poursuivent leur propre agenda. Et une occupation militaire totale de la Libye après la « libération » est peu réaliste, ce qui, bien sûr, du point de vue des Etats-Unis rend l’intervention moins attrayante.

Mais si les choses tournent mal, ce sera probablement le début de la fin de l’Empire américain, d’où la prudence des gens qui le gèrent et qui ne se contentent pas d’écrire des articles dans Le Monde ou de pester contre les dictateurs devant des caméras.

Il est difficile pour des citoyens ordinaires de savoir exactement se qui se passe en Libye, car les médias occidentaux se sont complètement discrédités en Irak, en Afghanistan, au Liban et en Palestine, et les sources d’informations alternatives ne sont pas toujours crédibles non plus. Cela n’empêche pas bien sûr la gauche pro-guerre d’être absolument convaincue de la vérité des pires informations sur Kadhafi, comme elle l’était il y a douze ans à propos de Milosevic.

Le rôle négatif de la Cour Pénale Internationale est manifeste, comme l’a été celui du Tribunal Pénal International pour la Yougoslavie dans le cas du Kosovo. L’une des raisons pour laquelle il y a eu relativement peu de sang versé en Tunisie et en Egypte, c’est qu’il y avait une porte de sortie possible pour Ben Ali et Moubarak. Mais la « justice internationale » veut rendre impossible une telle sortie pour Kadhafi et probablement pour les gens proches de lui, les poussant ainsi à combattre jusqu’au bout.

Si « un autre monde est possible », comme la gauche européenne le proclame sans arrêt, alors un autre Occident devrait être possible aussi, et la gauche européenne devrait commencer à le construire. La rencontre récente de l’Alliance Bolivarienne pourrait servir d’exemple : la gauche d’Amérique Latine veut la paix et ils veulent empêcher l’intervention des Etats-Unis car ils savent qu’ils sont dans leur ligne de mire et que leur processus de transformation sociale exige d’abord et avant tout la paix et la souveraineté nationale. Donc, ils ont suggéré d’envoyer une délégation internationale conduite éventuellement par Jimmy Carter ou Lula (qu’on ne peut pas accuser d’être des marionnettes de Kadhafi) pour commencer un processus de négociation entre le gouvernement et les rebelles. L’Espagne s’est dite intéressée par cette idée, qui est bien sûr rejetée par Sarkozy. Cette proposition peut sembler utopique, mais si l’ONU mettait tout son poids derrière elle, ce ne serait peut-être pas le cas. Et ce serait une façon pour l’ONU de remplir sa mission, ce qui est actuellement rendue impossible par l’influence des Etats-Unis et de l’Occident. Cependant, il n’est pas impensable que maintenant, ou lors d’une prochaine crise, une coalition de nations non interventionnistes, par exemple, la Russie, la Chine ou l’Amérique Latine et peut être d’autres puissent oeuvrer ensemble pour construire des alternatives crédibles à l’interventionnisme occidental.

Contrairement à la gauche d’Amérique Latine, la gauche européenne a complètement perdu le sens de ce que veut dire faire de la politique. Elle n’essaie pas de proposer des solutions concrètes aux problèmes et est seulement capable d’adopter des positions morales, en particulier de dénoncer de façon grandiloquente les dictateurs et les violations des droits de l’homme. La gauche social-démocrate suit la droite avec au mieux quelques années de retard et n’a aucune idée indépendante. La gauche « radicale » réussit souvent à dénoncer à la fois les gouvernements occidentaux de toutes les manières possibles et à demander que ces mêmes gouvernements interviennent militairement partout dans le monde pour défendre la démocratie. Un des arguments les plus ridicules avancés par cette gauche est que Kadhafi a collaboré avec les Européens pour limiter l’immigration africaine et que, par conséquent, il faut le « dénoncer » (un des sports favoris de la gauche radicale étant de « dénoncer » tous ceux qui ne leur plaisent pas, manoeuvre purement verbale et dénuée d’effets positifs). Mais ce sont évidemment ces méchantes puissances européennes, ou américaines, qui vont intervenir en Libye, pas la gauche radicale qui n’a aucune force militaire à sa disposition. Et si, au lieu de dénoncer Kadhafi, ce qui ne mange pas de pain, cette gauche se fixait la tâche (un peu plus ardue il est vrai) de convaincre les opinions publiques européennes de la nécessité d’ouvrir leurs frontières à quelques millions d’Africains ?

La gauche radicale n’a aucun programme cohérent et ne saurait pas quoi faire même si un dieu les mettait au pouvoir. Au lieu de « soutenir » Chavez et la Révolution Vénézuélienne, une affirmation vide de sens que certains se se plaisent à répéter, ils devraient humblement se mettre à leur école et, avant tout, réapprendre ce que faire de la politique veut dire.

Jean Bricmont
11/03/2011

nouvelle version transmise par l’auteur - mise en ligne 12/03 à 16h30

Jean Bricmont enseigne la physique en Belgique et est membre du Tribunal de Bruxelles. Son livre "Humanitarian Imperialism" est publié par Monthly Review Press la version française « Impérialisme Humanitaire » l’est aux éditions Aden.

COMMENTAIRES  

12/03/2011 14:33 par Legrand Claudie

Je partage sa vision, sa sémantique, son intransigeance et surtout sa clairvoyance ; les évènements qui ont suivi sa rédaction donnent en grande partie raison à Bricmont. J’ai particulièrement apprécié, tout en regrettant que si peu de camarades l’aient dit, la conclusion :
"La gauche n’a pas de programme cohérent et ne saurait pas quoi faire même si Dieu les mettait au pouvoir. Au lieu de « soutenir » Chavez et la Révolution Vénézuélienne une affirmation vide de sens que certains se complaisent à répéter ils devraient humblement apprendre d’eux et d’abord et avant tout réapprendre ce que cela veut dire de faire de la politique."

12/03/2011 14:35 par kounet

exactement .Les socio-démocrates Européens sont des idiots utiles à l’Empire du mal Américain .
Quant au " gang ", comme les appelle Jean Bricmont, c’est aussi un gang d’idiots inutiles .
En aucun cas on ne doit faire la guerre à la Lybie .

12/03/2011 22:24 par Rémi

Certes les européens (gauche et droite confondues) et les américains doivent être gênés aux entournures de voir une autre puissance diplomatique (en l’occurrence axée autour de l’Amérique latine) essayer de prendre place sur l’échiquier mais il faut aussi reconnaître que Chavez a mis un certain temps (plusieurs jours et quelques centaines de morts) avant de prendre ses distances avec le triste personnage qu’est Kadhafi...
Comme on dit, "les ennemis de mes ennemis ne sont pas forcément mes amis" ou "les amis de mes amis ne sont pas obligatoirement mes amis", citations à moduler à l’infini. Car dans le monde dans lequel nous vivons, il n’y a pas de Blanc et de Noir, tout est Gris, plein de contradictions et ce, à tout niveau de la vie, du simple individu isolé jusqu’aux Etats les plus complexes.

12/03/2011 22:50 par Legrand C.

James Clapper, Directeur National de l’Intelligence nord-américaine, vient d’affirmer devant le Comité des Services Armés du Sénat : "les attaques aériennes de l’armée fidèle à Kadhafi ont abîmé "˜principalement’ des édifices et des infrastructures, plus que causé des pertes dans la population" .

12/03/2011 23:16 par Ras la casquette

"les ennemis de mes ennemis ne sont pas forcément mes amis"

S’il y en a encore un qui prononce cette phrase, je hurle et je mets la gauche européenne dans le même sac que le FN - à savoir celui des brutes épaisses.

Bon sang de bon sang, ca fait 10 ans que Chavez agit, qu’il a tout subi et tout survécu, et au lieu de tenter de comprendre le pourquoi et comment, vous en êtes tous à "regretter" sa position au lieu de vous demander - ce qui devrait être votre première réaction - ce que vous n’avez pas compris.

Marre des donneurs de leçons. Sérieusement. Si vous avez tellement envie d’en découdre, allez vous enrôler dans les armées de l’OTAN et envoyez-nous des cartes postales au fur et à mesure de la "libération" de la Libye et de l’instauration de la démocratie.

12/03/2011 23:23 par Legrand C.

A Rémi : La fixation sur Chavez n’est qu’un commode moyen de tourner le dos à la quasi disparition de la gauche en France et il faut avoir une idée bien primaire des latino-américains et des dirigeants de l’ALBA, et une ignorance crasse de leur histoire, de leur contexte et de leur vision du monde, pour croire qu’ils déterminent leurs amis parce qu’ils sont les ennemis de nos ennemis. L’Amérique Latine vient de donner une existence juridique à l’UNASUR, continue à aider Haïti, avance dans les droits humains à tout niveau pendant que les bobos de science po regardent le vingt heures. L’ALBA maintient son offre régionale de paix.

13/03/2011 01:24 par Rémi

Ce qu’il y a de bien, c’est qu’à aucun moment, je ne prend position contre une intervention militaire ni pour une telle solution (loin de moi cette idée). Mais c’est cette seconde option qui est sous-entendue, notamment par Ras la casquette et Legrand C. Alors qu’on pourrait aussi bien sous-entendre les arguments avancés par Legrand C. avec le début de mon intervention ("Certes les européens (gauche et droite confondues) et les américains doivent être gênés aux entournures de voir une autre puissance diplomatique (en l’occurrence axée autour de l’Amérique latine) essayer de prendre place sur l’échiquier ...").
Peut-être ne fallait-il pas que je m’en prenne à Saint Chavez...

Sinon, en ce qui concerne le néant idéologique d’une bonne partie de la "gôche" européenne, qui ne fait que courir à l’échalote derrière la droite (ultra-)libérale elle même en compétition avec l’extrême droite, cela ne date pas d’hier ni de la révolte du peuple lybien, sans pour autant trouver ce vide sidéral légitime.

13/03/2011 01:34 par mediacideur

Legrand Claudie, vous écrivez :

J’ai particulièrement apprécié, tout en regrettant que si peu de camarades l’aient dit, la conclusion : " La gauche n’a pas de programme cohérent et ne saurait pas quoi faire même si Dieu les mettait au pouvoir. Au lieu de « soutenir » Chavez et la Révolution Vénézuélienne une affirmation vide de sens que certains se complaisent à répéter ils devraient humblement apprendre d’eux et d’abord et avant tout réapprendre ce que cela veut dire de faire de la politique

. "

Or, dans votre citation vous avez gommé " radicale " ("La gauche radicale n’a pas de programme cohérent"). Pourquoi ???

13/03/2011 01:48 par legrandsoir

@ mediacideur

La citation est correcte. Mais Bricmont nous a soumis une nouvelle version de son article (comme précisé). Le commentaire fait référence à l’ancienne version.

13/03/2011 08:27 par Du rotary au col mao

Impérialisme humanitaire, de Jean Bricmont (nouvelle édition de 2009 avec une préface de Chomsky).

13/03/2011 15:34 par Fred

Bonjour Jean,

1° Tes raccourcis, volontaires ou non, ne sont franchement pas très rigoureux. Le "ils sont tous là " mélangent des gens et des organisations qui n’ont pas grand chose en commun. Un peu de nuances serait le bienvenue. Tu semble davantage régler tes comptes dans cet article.
Ce qui me choque le plus, c’est le fait que tu fasses référence à une critique de la LCR belge sur la prise de position d’un Chavez ou d’un Ortega sur Kadhafi dans le même paragraphe où tu énumères les gens qui soutiennent / soutiendraient une intervention de l’OTAN. Je crois pouvoir dire que la LCR et aucun groupe communiste ou trotskiste ici en Belgique ne soutient une telle intervention.
Les positions de Chavez, Fidel, Ortega, etc. depuis le début des événements en Libye sont plutôt favorables à Kadhafi. La couverture des événements par leur presse gouvernementale en témoigne. D’où leur proposition de commission internationale. Depuis la position s’est affinée (voir le communiqué de l’ALBA : http://www.medelu.org/spip.php?article758 ou l’évolution de la couverture de Telesur http://voixdusud.blogspot.com/) mais n’est-il pas dommage que cette gauche latino que tu sembles magnifier ne se soit pas prononcée plus ouvertement en faveur des révoltes arabes ? Durant les révoltes en Tunisie, puis en Egypte, Chavez est resté assez discret et a consulté Kadhafi sur ce qui se passait. Rappelons que ce dernier s’opposait à ces mouvements populaires. N’est-ce pas une erreur politique pour le Vénézuélien - qui se proclame socialiste -, qui a acquis une grande popularité dans les masses arabes (suite à ses prises de position contre les agressions israéliennes au Liban ou à Gaza) de ne pas soutenir ouvertement des processus en cours ? Est-ce que travailler avec certains pays ou dirigeants, signer des accords, faire des alliances pour changer le rapport de forces international implique une solidarité politique à toute épreuve, même quand la révolte populaire gronde ? Que dire de ces mouvements de travailleurs iraniens dont j’ai eu vent qui appuient Chavez mais qui «  n’apprécient pas » vraiment quand celui-ci apporte un appui politique à la caste au pouvoir qui les réprime violemment !

2° En outre, tu empêches le débat. Parce que les trotskistes n’ont jamais gouverné, ils n’auraient pas le droit de critiquer une prise de position d’un chef d’état élu démocratiquement ? On ne peut plus débattre alors … Je pourrais te dire : "Si tu ne parles pas espagnol et que tu ne connais pas le Venezuela, tu n’a pas le droit d’avoir une opinion !". Ridicule, non ? Je pourrais aussi dire : "Puisque tu es physicien, pourquoi te mêles-tu de politique ?" Qu’as-tu construit de mieux que cette gauche radicale à qui tu donnes des leçons ? Moi-même, je n’ai pas une haute opinion de cette gauche, sociale-démocrate ou radicale, mais ton argumentation empêche tout débat. Si, comme tu le dis, "un des sports favoris de la gauche radicale [est] de dénoncer tous ceux qui ne leur plaisent pas, manoeuvre purement verbale et dénuée d’effets positifs", je n’ai pas l’impression que tu fais mieux puisque ton hobby est de l’attaquer tout en restant à l’écart. Où sont les effets positifs ? Je n’en vois pas !

3° Le plus triste dans la grande soupe de la gauche, c’est que certains croient véritablement que Kadhafi est, résumons, «  anti-impérialiste », socialiste, etc. Va sur les sites et forums chavistes et tu t’en rendras compte. C’est pourquoi certaines gauches, des ONG et d ’autres essaient simplement de montrer qui est ce type : un maillon du contrôle des migrations européen, un bon élève du FMI (http://www.medelu.org/spip.php?article761), un type qui a pêté un cable (semble-t-il par ses discours) etc. Si on dénonce le système migratoire européen, dénonçons aussi quand le contrôle aux frontières est sous-traité à d’autres pays.

A lire sur le sujet :
http://www.medelu.org/spip.php?article757
http://venezuelanalysis.com/analysis/6044
http://www.lecourrier.ch/index.php?name=NewsPaper&file=article&sid=448392

Bonne journée,

13/03/2011 18:50 par zozo

En quoi est-ce ridicule de dire que Khadafi a collaboré avec les Européens pour limiter l’immigration africaine ?

A-t-on le droit d’être contre une intervention de l’occident et en même temps d’émettre quelques doutes sur la stratégie de Chavez mais trouver la propagande à son encontre abjecte... sans pour autant être mis dans le même panier que ces crétins de BHL et de Cohn Bendit ?

A-t-on le droit de dire que certains choisissent bien leurs ennemis mais moins bien leurs camarades ?

Est-ce que la propagande téléguidée qui a lieu au Kosovo (avec traducteurs de l’UCK, intervention de de W. Walker pour faire croire au massacre de Racak et précipiter une intervention de l’OTAN) est semblable aux centaines de vidéos postées sur internet par les ’’insurgés’’ ?

Bref entre le tout et le rien n’y a-t-il pas une marge importante ?

13/03/2011 19:58 par legrandsoir

@ Fred

Bricmont répondra peut-être lui-même, mais en attendant...

ils n’auraient pas le droit de critiquer une prise de position d’un chef d’état élu démocratiquement ?

Pourquoi pas ? Mais leur première réaction - modestie oblige - devrait être "qu’est-ce que je n’ai pas compris ?" et pas le contraire. Un certain intellectualoïde qui écrit beaucoup sur le Venezuela a même parlé de déclarations "obscènes".

Je pourrais aussi dire : "Puisque tu es physicien, pourquoi te mêles-tu de politique ?"

Faux parallèle. Le problème n’est pas de parler de son métier, mais de ce que l’on connait. Bricmont connait la politique. Qu’est-ce que l’on connait de la Libye, de ce qui s’y passe réellement ? Rien. Peut-on faire confiance aux grands médias ? Non. Alors pourquoi analyser la situation à travers leur prisme ? Chavez (et d’autres) auraient tort. En vertu de quoi ? Des déclarations de BHL ? Des "reportages" de TF1 ? De l’idée que chacun tente de se faire ?

Qu’as-tu construit de mieux que cette gauche radicale à qui tu donnes des leçons ?

Encore un faux parallèle. Bricmont n’est pas un parti, mais un individu. Et j’ai l’impression qu’il donne moins des leçons que critiquer - à raison - un "mode de fonctionnement" chez certains qui est proche du pavlovisme (dans "soulèvement populaire", y’a le mot "populaire" alors forcément... Chavez ne serait donc pas "populaire" ?) et qui se traduit généralement par une adhésion (toute rhétorique au final) à une position de "ni-ni" (ni impérialisme ni Kadhafi) qui se conclut en général par une écrasante, sanglante et irréversible victoire d’un des "ni". Devinez lequel ?

Le plus triste dans la grande soupe de la gauche, c’est que certains croient véritablement que Kadhafi est, résumons, « anti-impérialiste », socialiste, etc. Va sur les sites et forums chavistes et tu t’en rendras compte.

Le plus triste c’est qu’il y a 15 jours personne ne savait s’il fallait écrire "Lybie" ou "Libye" et qu’aujourd’hui la gauche européenne en sait assez pour critiquer la gauche latino (en vertu de quoi ?) et les "chavistes".

Ici au Grand Soir en tous cas, nous ne donnons pas de leçons à la gauche latino-américaine, nous en prenons. Question de respect.

13/03/2011 23:15 par Michel Rolland

Les Chavez, Morales, et leurs partis, pour ne mentionner que ceux-là , ont réussi à se faire élire malgré la presse écrite, parlée et télévisuelle du capital, malgré les mensonges, malgré l’argent, la tricherie, malgré les menaces, le chantage dont la population de ces pays se fait abreuver, sans autre contrepoids que l’action des partis bolivariens. Une fois élus, ces partis appliquent le socialisme et l’anti-impérialisme, sans compromis.

Le point de mire, l’inspiration, l’exemple à suivre, en l’adaptant au contexte, aux particularités de chacun, est, il me semble, pour tout l’Occident, la gauche bolivarienne.

Michel Rolland

16/03/2011 07:33 par toto

Contentons-nous donc de regarder les Libyens se faire massacrer et continuons d’abord des points de vue caricaturaux. Ca donne bonne conscience.

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