Répondant à ces critiques, d’autres articles, suivis de nombreux commentaires, on mis en avant le caractère inévitable d’une telle manœuvre, quitte à trahir ses discours de campagne (c’est tellement courant qu’il est difficile de s’en formaliser) et ses alliés d’un moment pour faire, enfin, l’indispensable virage à gauche que tout le monde attend. Ainsi, un nouveau gouvernement démocratiquement élu pourra faire les choix qui lui conviennent, pour le bien de son peuple, dans ses relations financières, économiques et politiques avec le reste de la communauté mondiale.
Seulement voilà. Cette « communauté » mondiale est tout sauf une communauté. On ne peut trouver plus grande distorsion sémantique que d’appeler « communauté » ce véritable chaudron de l’enfer, cette foire d’empoigne où l’emporte le plus fort, le plus retord, aux coups les plus bas, dans un système en banqueroute, où le pourcentage de l’économie « réelle » se réduit comme une peau de chagrin, embarqué dans une fuite en avant délirante qui broie tout sur son passage, du pauvre travailleur qui n’a rien demandé à personne, à part vivre dignement, à la petite nation qui aimerait bien décider toute seule de son avenir, justement – sans parler de la planète elle-même.
Cette petite nation pense en avoir le droit, puisque son gouvernement est arrivé au pouvoir démocratiquement par les urnes...
Alors, sitôt ce nouveau gouvernement – démocratiquement arrivé au pouvoir par les urnes– inscrit sur les tablettes de la « communauté » internationale (puisqu’il faut bien montrer quelques apparences), la foire d’empoigne recommence. Et les coups bas, foireux, retords, mensongers (voyez le dictionnaire des synonymes) recommencent leur travail de destruction, avec un ennemi de plus, cet aimable petit pays qui aimerait bien décider lui-même de son avenir et de la marche à suivre de ses finances et de son économie...
Il y a quelques jours est paru sur ce site un texte dont une phrase m’a particulièrement frappé (1). Ce texte n’apportait pas de grandes réflexions, mais un état des lieux des élections qui avaient eu lieu en Amérique Latine en 2014, avec la victoire de forces progressistes dans la majorité des cas.
Voici cette phrase :
« Les peuples de la région ont conquis des gouvernements progressistes, mais s’ils ont pris le pouvoir, remporté des élections, il n’ont pas fait de révolution ; ils ont défait le néolibéralisme dans les urnes, mais il reste hégémonique dans la société ».
Comment peut-on défaire le néolibéralisme dans les urnes, et que celui-ci reste hégémonique dans la société ? Parce que s’ils ont pris le pouvoir ; remporté des élections, il n’ont pas fait de révolution.
(Notons que l’auteur de cet article parle du Venezuela, de la Bolivie, de l’Équateur...)
Cela me fait penser à un commentaire de Maxime Vivas, administrateur du Grand soir, en réponse à un autre commentaire critique sur Syriza (2), où il écrivait : « Le premier devoir d’un révolutionnaire, c’est d’arriver au pouvoir. Le second, c’est de révolutionner ».
C’est formidable. Sauf que ça n’est JAMAIS arrivé.
PS : l’auteur de ce petit billet est plutôt pessimiste sur la capacité des dirigeants de fait de la « communauté » internationale à accepter à long terme des gouvernances autonomes (si le long terme a encore valeur dans le monde tel que nous le connaissons en ce début de 2015). Il soutient inconditionnellement, toutefois, toutes les tentatives en ce sens, quelques soient les grands écarts auxquels cela peut mener (comme dans le cas du Brésil actuellement, ou question mariage de la carpe et du lapin... Il semblerait que ce ne soient pas des couleuvres qu’avalent ces temps-ci les électeurs de la présidente au pouvoir, mais de véritables boas constrictors...).
Grisou
(1) http://www.legrandsoir.info/avancees-et-perils-en-amerique-latine-blog-do-miro.html
(2)http://www.legrandsoir.info/syriza-une-breche-dans-l-europe-neoliberale.html#reactions
LGS : Voir aussi : http://www.legrandsoir.info/a-ceux-qui-crient-au-loup-brun-contre-le-gouvernement-de-tsipras.html