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La Colombie d’Uribe déstabilise la Nouvelle Amérique Latine

Quelques semaines après que l’Equateur et le Venezuela ont appelé le gouvernement Colombien à considérer la nécessité d’une paix et de négociations avec les Forces Armées Révolutionnaires de Colombie-Armée du Peuple (FARC-AP), l’administration du Président à lvaro Uribe Vélez a lancé un vaste assaut aérien et terrestre contre le mouvement insurrectionnel - non dans les limites des frontières Colombiennes, mais sur le territoire souverain du sol Equatorien. Le 1er mars 2008, l’Etat Colombien, sous la direction d’Uribe, du Vice Président Francisco Santos Calderón, et de son cousin le ministre de la défense Juan Manuel Santos, a mené une action militaire illégale à l’intérieur de l’Equateur, qui aboutit à la mort de Raúl Reyes, Julian Conrado, et quinze autres combattants des FARC-AP. De tels actes démontrent clairement que le Gouvernement Colombien, soutenu par les Etats-unis, nie ouvertement les codes internationaux de bonne conduite, de droit et de justice sociale.

L’action du 1er mars a été déclenchée quelques jours avant une importante manifestation internationale prévue pour le 6 mars. Cette date avait été annoncée par le Mouvement des Victimes des Crimes d’Etat (MOVICE), la Confédération Internationale des Syndicats (ITUC), et un grand nombre d’organisations pour la justice, comme journée internationale de protestation contre les tortures, les meurtres et les disparitions dus à l’Etat Colombien, à ses alliés paramilitaires des Forces d’Autodéfense Unies de Colombie (AUC) et au mouvement des Aigles Noirs récemment recomposé. Il y a peu de temps, le conseiller politique supérieur du Président Uribe, José Obdulio Gaviria, a déclaré que la manifestation et ses participants devaient être criminalisés. De plus, des paramilitaires du département de Nariño-not dans le sud-ouest, à proximité du lieu où les incursions en Equateur ont été illégalement perpétrées, ont menacé d’attaquer toute organisation ou personne participant à ces manifestations de protestation.

Il semble que l’administration Uribe-Santos veuillent utiliser le massacre du commandant Raúl Reyes et de ses compagnons pour dissuader, en Colombie et à l’extérieur, les activistes et les personnes ayant une conscience sociale de participer aux évènements du 6 mars. Nombre des moyens de communication du pays, contrôlés par, ou liés à l’Etat, comme El Tiempo qui a des attaches de longue date avec la famille Santos, ont exhibé des images des corps mutilés et criblés de balles de Raúl Reyes. Une telle propagande sert clairement d’outil psychologique pour intimider ceux qui se préparent à manifester contre les atrocités perpétrées par l’Etat ces sept dernières années.

Au cours des deux derniers mois, des chercheurs, des universitaires et des juristes ont appelé à reconnaître les FARC-AP en tant que force légitime se battant contre l’Etat corrompu de Colombie. En janvier 2008, le Ministre des Affaires Etrangères d’Equateur, Maria Isabel Salvador, argumenta que les FARC-AP ne devaient pas être considérées comme une organisation terroriste. Le président Vénézuélien Hugo Chávez a aussi déclaré que les FARC-AP n’étaient pas une force terroriste, mais une véritable armée qui occupe le sol de Colombie et partage une vision Bolivarienne pour une nouvelle Amérique Latine. Le député Mexicain Ricardo Cantu Garza a également encouragé la reconnaissance des FARC-AP comme force belligérante, légitimement engagée contre un système corrompu socialement, et politiquement inégal. Le renomé procureur américain Paul Wolf explique :

« Comme le prouvent leur campagne militaire permanente, leur domination sur une grande partie du territoire colombien, la conduite des hostilités par des troupes organisées maintenues sous discipline militaire selon les lois et coutumes de la guerre, les FARC-AP constituent une armée en état de guerre pour la libération nationale au moins au même titre que d’autres parties engagées dans le conflit. Les règles de droit international pour les belligérants doivent donc être appliquées aux FARC-AP … dans ce cadre, il n’y a pas de règles qui interdisent une révolution, et si une révolution est victorieuse, il n’y a rien dans le droit international qui interdise l’acceptation de cette issue, même si elle a été atteinte par la force ».

De Copenhague à Caracas, de nombreuses personnalités gouvernementales ont dénoncé l’appellation de terroriste utilisée pour désigner les FARC-AP. Pour décrire plus justement les positions domestiques et géopolitiques des FARC-AP, des membres progressistes des administrations du Mexique, Equateur et Venezuela ont préféré le statut de belligérants, ou de forces irrégulières. Dérangée par ces témoignages et par les efforts constants des FARC-AP en faveur d’un échange humanitaire de prisonniers et de négociations de paix avec l’Etat dans une zone démilitarisée du sud-ouest de Colombie, l’administration Uribe-Santos a favorisé une violence systématique écartant ainsi la fin de la guerre civile en Colombie.

Depuis plusieurs années, pour soutenir l’Etat Colombien, différents aspects des activités politiques et culturelles des FARC, à caractère réellement social, ont été occultées ou marginalisées par la presse privée ou les gouvernements. Cependant, après des années de recherches sur les FARC-AP et la Colombie, le journaliste indépendant Garry Leech soutient qu’ « alors qu’il n’y a aucun doute sur le caractère terroriste d’organisation comme al-Qaeda, tout montre que les FARC-AP ne sont que des acteurs armés du long et tragique conflit domestique de Colombie ».

De fait, les FARC-AP sont un des acteurs stratégiques de la société Colombienne dont les actions visent la transformation sociale du pays. A la lumière de ces réalités, comment cette rébellion pourrait-elle représenter une menace terroriste pour d’autres Nations ? Coletta A. Youngers, du Bureau de Washington pour l’Amérique Latine (WOLA), répond à cette question :

« Le gouvernement américain envisage maintenant l’Amérique Latine exclusivement à travers le prisme du contre-terrorisme alors que la région ne présente aucune menace pour la sécurité intérieure des Etats-Unis … quelle que soit l’activité qui s’y développe elle semble insignifiante, et peu de preuves ont été avancées pour étayer de telles affirmations ».

Sans banaliser leur tactique révolutionnaire Youngers soutient cependant clairement que les FARC-AP ne peuvent être incluses dans le concept et la rhétorique du terrorisme global. Elle argumente que l’insurrection n’est pas une menace politique directe contre l’administration des Etats-Unis, du Canada, de l’Union Européenne ou de tout autre Nation ou Etat étranger puisque les activités des FARC-AP « sont dirigées vers l’intérieur et non vers l’extérieur » et qu’ « appliquer le concept de terrorisme à ces mouvements revient donc à leur ôter leurs projets politiques ».

Classer les FARC comme organisation terroriste étrangère altère singulièrement la dynamique du processus de paix et favorise un Etat meurtrier. Stipuler que les FARC-AP sont terroristes rend impossibles des négociations de paix entre les FARC-AP et un quelconque gouvernement qui souscrit à cette classification. Selon James Petras et Henry Veltmeyer, classer les FARC-AP et leurs sympathisants comme terroristes « les met sur la liste des cibles devant être attaquées par la machine militaire US » et « donc soumises à la guerre totale ».

La terminologie du terrorisme est parfaite pour l’idéologie impérialiste et l’expansionnisme. C’est, disent Petras et Veltmeyer, une référence sans limites précises qui « permet un maximum d’interventions, dans toutes les régions et contre toute opposition » et « que n’importe quel groupe s’opposant activement au militarisme, à l’impérialisme (aussi appelé "mondialisation’) ou à des régimes locaux autoritaires puisse être dénoncé comme terroriste », légitimant ainsi une invasion ou une attaque.

Les condamnations de l’intérieur et de l’extérieur de l’Etat Colombien sont tombées dans l’oreille d’un sourd ; celle de l’administration Uribe-Santos. Pendant des années ont eu lieu des violations croissantes des droits civils et humains, la constante interdiction du syndicalisme, des assassinats d’activistes du Centre Gauche et de politiciens, et une réalité politique où 75 gouverneurs, maires et députés - y compris le Vice Président Francisco Santos Calderón, son cousin le Ministre de la Défense Juan Manuel Santos, Santiago le frère du Président Uribe, et leur cousin le Sénateur Mario Uribe - ont été accusés ou convaincus de liens directs avec les paramilitaires. Et maintenant, l’Etat Colombien a cru bon de s’ingérer dans les affaires des Nations qui s’écartent de leur modèle idéologique de centralisation politique et économique.

L’administration Uribe a non seulement critiqué ses voisins, mais après l’action entreprise le 1er mars, il est clair que l’Etat Colombien, avec le soutien total des Etats-Unis, imposera ses projets et valeurs idéologiques par la force, sans souci des droits et des privilèges des lois et procédures électorales conventionnelles. Alors que les Etats voisins de l’Equateur et du Venezuela se battent pour la paix et essayent d’aider le peuple Colombien dans sa recherche d’une solution à la guerre civile, l’administration Uribe-Santos a contourné les réalités juridiques et politiques pour imposer ses propres objectifs.

Des analystes attentionnés de la situation Colombienne continuent de débattre pour savoir si l’Etat Colombien est préfasciste ou fasciste. Il est très certainement ni humain, ni démocratique. L’Etat Colombien actuel doit être transformé au plus vite. Ceux qui se battent pour la paix doivent condamner l’action de ce régime. Par solidarité, nous devons protester contre la politique générale de l’Etat Colombien et élever la voix pour soutenir une nouvelle Colombie qui défende la paix et la justice sociale.

James J. Brittain (Professeur Assistant) et Jim Sacouman (Professeur) sont des sociologues Canadiens de l’Université d’Acadie en Nouvelle-Ecosse. Au cours de la dernière décennie, ils ont étudié la guerre civile et les politiques économiques Colombiennes.

4 mars 2008,

par James J. Brittain et R. James Sacouman

http://www.venezuelanalysis.com/analysis/3233

Traduction par Laurent pour Le Grand Soir

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