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La marche, entre "slow life" et "Blitzkrieg".

La rhétorique de Macron relève d’un logiciel très clair : celui de l’aristocratie néo-libérale et de son programme de reconquête. Ainsi, l’image du "premier de cordée" (et des derniers de cordée) vient d’un sport qui oppose par nature le haut et le bas, l’élite et les manants. Ce n’est pas un hasard si le film de montagne s’est développé dans l’Allemagne de la montée du nazisme : la grande réalisatrice du régime nazi (grande, oui, car ses idées n’annulent pas son talent), Leni Riefenstahl, s’est d’abord fait connaître comme actrice de films d’alpinisme (La Montagne sacrée d’Arnold Fanck en 1926) avant d’en réaliser un elle-même, puis de passer à l’exaltation des "valeurs olympiques" dans Les Dieux du stade (Olympia en allemand), sur les Jeux de Berlin de 1936.

Le nom-slogan de La République en marche s’intègre-t-il dans cette rhétorique élitiste et conquérante ? La marche est une notion polysémique : a priori sympathique, connotée par la flânerie et la placidité, elle est aussi associée à l’énergie guerrière ("Marchons, marchons, qu’un sang impur...") : il y a une marche empathique et une marche prédatrice.

La vogue de la marche a été lancée dans les années 1770 par Rousseau : dans sa jeunesse mouvementée, il a traversé les Alpes à pied (le tourisme de montagne lui doit beaucoup !) ; d’abord choix économique, la marche à pied est devenue pour lui un style de vie et même une philosophie. C’est ce qui apparaît bien dans ce célèbre passage de la Cinquième Promenade du Rêveur solitaire, où il se décrit, assis sur les rives du lac de Bienne (dans le canton de Neuchâtel) :

"Le flux et le reflux de cette eau, son bruit continu, mais renflé par intervalles, frappant sans relâche mon oreille et mes yeux, suppléaient aux mouvement internes que la rêverie éteignait en moi, et suffisaient pour me faire sentir avec plaisir mon existence, sans prendre la peine de penser

". Au contact immédiat de la nature et de ses rythmes, Rousseau se retrouve lui-même et connaît des moments de sérénité parfaite et d’extase.

Si les Romantiques français (à l’exception de Nerval) sont restés plutôt sédentaires, les Romantiques allemands, eux, ont suivi Rousseau sur cette voie : Schubert a écrit un véritable hymne à la marche dans le lied “ Wander ”, (difficile à traduire d’un mot en français, car il réunit plusieurs notions : marche, voyage, errance) :

"Marcher, marcher, mon plaisir,
ô marcher".

Comme dans les tableaux de Caspar David Friedrich mettant en scène des promeneurs dans la nature, le thème du Wander a un arrière-plan religieux : la vie humaine est un voyage, dont le terme est la mort ; la marche est à la fois liberté, épreuve, accomplissement de soi, et acceptation de ce destin final.

Peut-on, dans tout cela, reconnaître La France en marche ? Voyons si l’autre type de marche nous en rapproche davantage.

Si on pense à une marche guerrière, on peut penser à la Marche sur Rome fasciste de 1922 et à la séquence d’Amarcord qui nous montre des hiérarques fascistes entrer triomphalement dans une ville au pas gymnastique. Pour la génération futuriste, et pour les fascistes, la valeur suprême est le mouvement, le dynamisme, la vitesse : il faut toujours être en mouvement, et bouger le plus vite possible. Sur le plan politique, cela donne l’anti-parlementarisme et le culte du Chef, car les discussions d’assemblée et les procédures de vote ralentissent l’action, tandis qu’une décision prise au sommet débouche sur l’action immédiate, dans le style Blitzkrieg.

On peut placer cette marche guerrière sous l’invocation de diverses divinités, à la fois marcheuses et destructrices.

C’est d’abord, pour nous Latins, Mars Gradivus, le Dieu en marche, que Georges Dumézil a rapproché des trois pas victorieux du dieu guerrier hindou, Indra. Mais c’est surtout dans la mythologie germanique qu’on trouve des dieux voyageurs. Ainsi, Odin/Wotan apparaît chez Wagner comme le Wanderer, et cet aspect du dieu est lié à son caractère infernal : Odin parcourt sans cesse la Terre à la tête d’une armée de guerriers morts ; en français, on connaît ce mythe sous le nom de la Mesnie Hellequin, dont l’origine serait le germanique Erlkönig, le Roi des Aulnes, divinité des régions marécageuses qui enlève les enfants pour les tuer (souvenir de rituels païens de sacrifices humains). ; dans le lied du même nom de Goethe/Schubert, le Roi des Aulnes tente de séduire l’enfant par son éloquence doucereuse ("Mes filles conduisent une ronde nocturne, / Elles te berceront , danseront et chanteront pour toi"), avant d’user de violence. Toutes ces légendes pourraient se résumer par un vers célèbre de la Lénore de Gottfried August Bürger : "les morts vont vite".

La marche peut donc mener aussi bien à une communion avec la nature et une recherche de sagesse, qu’à la violence et à des symboles de mort. Dans quelle direction nous conduit La République en Marche ?

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