RSS SyndicationTwitterFacebookFeedBurnerNetVibes
Rechercher

Un (D)Jeune

Je m’appelle Kevin et je suis né en 1990.

J’ai mal débuté dans la vie, car j’ai eu faim : c’était « la mode » de l’allaitement maternel à la demande. Remarquez j’ai quand même échappé à la mort subite du nourrisson ! Pourtant, c’était encore « la mode » de coucher les bébés sur le ventre du matin au soir, à la maison et dans les crèches. Contents ou pas. Mais maintenant, je l’ai vu dans la salle d’attente de mon médecin, on dit qu’il ne faut surtout pas le faire !!!

A l’école, j’ai appris qu’il ne fallait surtout pas bien travailler sous peine d’être traité « d’intello » par les autres. Aussi ai-je mis tout mon talent, qui est assez grand, je dois dire, à demeurer parfaitement nul en tout. Ce qui fait que j’étais très bien vu par les enfants de ma classe. Ceux dont les parents étaient à gauche aussi, car « l’éducation reproduit les valeurs bourgeoises », avaient-ils appris.

Si les instituteurs, puis les professeurs, trouvaient que je ne travaillais pas assez, je leur envoyais mon père. Il savait leur parler de programmes et de classes surchargées, de sacs d’école qui déforment le dos, etc... Mais, ensuite et surtout, du fait qu’ils ne savaient pas s’adapter et que c’était eux les coupables de mes mauvaises notes. Ils me mettaient alors des notes à peu près correctes.

Mes parents étaient persuadés d’avoir fabriqué un petit génie qui réussissait passablement tout en ne consacrant que très peu de temps à l’école. Un surdoué, quoi.

Je n’avais alors plus d’ennuis ni avec les enseignants, ni avec mes parents.

Ceux-ci m’offraient tout ce qui était « à la mode » et qu’ils n’avaient pas eu. Si ce n’était pas acheté assez vite, il suffisait que je leur dise que les autres se moquaient de moi parce que « tout le monde » avait cette console de jeux dans la classe. Et hop !

Au moment de l’adolescence, comme c’était « la mode » de la « crise d’adolescence » et qu’une « crise », c’est comme l’urticaire, ça passe tout seul, ils supportèrent sans broncher que je les insulte, que je me drogue, que je mente, que je ne dise pas où je vais ni quand je rentre, que je n’aille pas à l’école, en se disant que c’était pour mon bien, que « ça passerait ». Le directeur de mon « établissement scolaire », pour qui c’était aussi la mode de la « crise d’adolescence », était mécontent mais très indulgent. Lui aussi pensait que « ça passerait ».

Au tout début de la première maternelle, je chantais bien, et juste. J’ai vite appris que seules les filles chantent, et que chanter n’est pas digne d’un garçon. Par ailleurs mes oreilles ont été détruites progressivement par la « mode » de la « musique » au delà de 100DB, que ce soit dans un casque ou en public. Mes velléités pour faire de la musique se sont donc arrêtées très tôt. Je n’écoutais plus que de la musique « pour jeunes » et de plus en plus fort, au fur et à mesure que mon audition devenait plus faible. Je ne produisais bien sûr plus rien du tout.

J’ai déjà dit que je plaçais tout mon talent à être nul en tout de façon à être respecté dans ma classe. J’étais donc, aussi, nul en français, je lisais à peine. Point n’en était besoin d’ailleurs, puisque tous les organismes auxquels j’aurais affaire plus tard étaient désignés par une suite de lettres écrites en majuscules, qui n’avaient aucun sens, et qui changeaient tout le temps.

Par ailleurs, tout ce qui était « à la mode » était en anglais. J’étais nul aussi en anglais scolaire, évidemment, mais j’avais appris les « marques à la mode », qui n’avaient rien à voir avec le cours d’anglais, et leur prononciation. Et c’était bien suffisant pour me garantir le succès auprès des filles et l’envie auprès des garçons.

Inutile de dire que mes échanges par la parole se bornaient à l’essentiel : « Je t’aime » à la fille que je convoitais et « Enculé » aux garçons avec lesquels j’avais des différents. Je n’ai connu que plus tard le sens de cette injure que j’avais apprise dès le cours préparatoire. Cette injure, en effet, était et est encore employée très couramment pour tenter d’intimider son rival.

Je me droguais « à mort » et de plus en plus car ceux qui m’avaient fait goûter aux différentes substances, soi disant illicites mais moins chères que le tabac, m’avaient assuré qu’on écoutait mieux la musique avec et qu’on n’avait plus besoin de dormir, qu’on n’était jamais fatigué, qu’on se sentait toujours le plus fort, le meilleur, et était toujours de bonne humeur. Vous pensez, moi qui, malgré tout, avais quelques déconvenues sentimentales que j’avais quand même quelque mal à dissimuler, moi qui avais encore des émotions, vous pensez comme je me suis jeté dessus !

Finalement, je suis passé en jugement pour avoir dealé. Et il m’a été dit que je pouvais échapper à la prison si je montrais mon amour pour ma patrie en m’engageant pour la défendre, à l’armée ou dans une compagnie privée employée par l’état.

Compte tenu de ma scolarité déficitaire, de mon audition en baisse, de mes échanges verbaux très limités et, surtout, de la garantie qui m’avait été donnée de trouver sur place de quoi satisfaire mes « besoins », et même plus, cela me parut une solution tout à fait honorable. (Je n’ai pas eu l’habitude de prendre le temps de réfléchir - je cogne si je suis le plus fort et je me sauve si je suis le plus faible - car ce mot et son usage étaient très dévalorisés par « la mode »)

Par ailleurs, qui sait, la seule compétence que j’avais était dans les jeux vidéo guerriers étant donné le nombre d’heures que j’ai passées à exercer mon habileté à percevoir et atteindre rapidement des cibles avec eux. Peut-être pourrais-je par la suite monnayer cet art ? Et être employé dans le pilotage d’un drone, puisqu’ils se multiplient ?

Aujourd’hui, je suis mort.

J’ai retrouvé dans l’au-delà , outre mes parents qui s’étaient aperçu qu’on leur avait outrageusement menti concernant ce qui leur tenait le plus à coeur, leurs enfants, et étaient morts de chagrin, les mots qu’il faut pour dire succinctement ma vie.

C’est fort heureux que j’aie retrouvé les mots sans lesquels je ne pourrais vous livrer ce message, somme toute, d’espoir : la destruction de tout ce qui est humain a des limites.

URL de cet article 15643
  

« Arabesque américaine » : Printemps Arabe ou révolutions colorées fomentées par les USA ?
Ahmed BENSAADA
Souvent évoqué, parfois décrié, mais rarement analysé, le rôle des États Unis dans les révoltes de la rue arabe fait enfin l’objet d’un travail sérieux, rigoureux et fort bien documenté. Arabesque américaine* est l’ouvrage d’Ahmed Bensâada, un chercheur algérien établi à Montréal. Dès les premières lignes, l’auteur annonce la couleur « une chose est évidente : le mode opératoire de ces révoltes a toutes les caractéristiques des révolutions colorées qui ont secoué les pays de l’Est dans les années 2000. Comme il (...)
Agrandir | voir bibliographie

 

Celui qui ne connaît pas l’histoire est condamné à la revivre.

Karl Marx

Le fascisme reviendra sous couvert d’antifascisme - ou de Charlie Hebdo, ça dépend.
Le 8 août 2012, nous avons eu la surprise de découvrir dans Charlie Hebdo, sous la signature d’un de ses journalistes réguliers traitant de l’international, un article signalé en « une » sous le titre « Cette extrême droite qui soutient Damas », dans lequel (page 11) Le Grand Soir et deux de ses administrateurs sont qualifiés de « bruns » et « rouges bruns ». Pour qui connaît l’histoire des sinistres SA hitlériennes (« les chemises brunes »), c’est une accusation de nazisme et d’antisémitisme qui est ainsi (...)
124 
Hier, j’ai surpris France Télécom semant des graines de suicide.
Didier Lombard, ex-PDG de FT, a été mis en examen pour harcèlement moral dans l’enquête sur la vague de suicides dans son entreprise. C’est le moment de republier sur le sujet un article du Grand Soir datant de 2009 et toujours d’actualité. Les suicides à France Télécom ne sont pas une mode qui déferle, mais une éclosion de graines empoisonnées, semées depuis des décennies. Dans les années 80/90, j’étais ergonome dans une grande direction de France Télécom délocalisée de Paris à Blagnac, près de Toulouse. (...)
69 
Lorsque les psychopathes prennent le contrôle de la société
NdT - Quelques extraits (en vrac) traitant des psychopathes et de leur emprise sur les sociétés modernes où ils s’épanouissent à merveille jusqu’au point de devenir une minorité dirigeante. Des passages paraîtront étrangement familiers et feront probablement penser à des situations et/ou des personnages existants ou ayant existé. Tu me dis "psychopathe" et soudain je pense à pas mal d’hommes et de femmes politiques. (attention : ce texte comporte une traduction non professionnelle d’un jargon (...)
46 
Vos dons sont vitaux pour soutenir notre combat contre cette attaque ainsi que les autres formes de censures, pour les projets de Wikileaks, l'équipe, les serveurs, et les infrastructures de protection. Nous sommes entièrement soutenus par le grand public.
CLIQUEZ ICI
© Copy Left Le Grand Soir - Diffusion autorisée et même encouragée. Merci de mentionner les sources.
L'opinion des auteurs que nous publions ne reflète pas nécessairement celle du Grand Soir

Contacts | Qui sommes-nous ? | Administrateurs : Viktor Dedaj | Maxime Vivas | Bernard Gensane
Le saviez-vous ? Le Grand Soir a vu le jour en 2002.