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Colombie : La mort de Raul Reyes met en évidence la dimension criminelle du gouvernement Uribe

photo : Raul Reyes et la sénatrice colombienne Piedad Córdoba

Voici un texte qui nous parvient de la revue latinoaméricaine Resumen et qui explique de fait pourquoi on peut considérer qu’en tuant le commandant Reyes, Uribe a volontairement détruit les possibilités d’échange. C’est un mauvais coup porté contre ceux qui tentent de libérer, entre autres, Ingrid Betancourt. Raúl Reyes est mort au milieu de la nuit d’une balle dans la tête, vêtu d’un tee-shirt à l’effigie du fondateur de la guérilla. Le porte-parole international des Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc, marxistes), qui échappait depuis des années aux attaques de l’armée, a succombé tôt samedi matin, après un bombardement et le débarquement en territoire équatorien de troupes héliportées. « C’est le plus gros coup jamais porté aux Farc », annonçait à Bogotá, quelques heures plus tard, le ministre de la Défense, Juan Manuel Santos.

Raúl Reyes, instituteur communiste, avait la réputation en Amérique latine d’un "pur" , il était l’un des sept membres de la direction des Farc, le « secrétariat ». Luis Edgardo Devia - de son vrai nom -, ex-conseiller municipal communiste, donnait souvent des interviews à propos de la quarantaine d’otages politiques et militaires de l’organisation,il a été probablement localisé en aidant à l’échange d’otage, c’est dire si l’accusation portée contre les FARC de ne pas vouloir négocier est injuste. Ce qui éclate dans cette affaire c’est la duplicité du gouvernement colombien qui se moque des otages et ne craint pas de violer le territoire d’un de ses voisins qui participe à la négociation en faveur des otages. Qui dit Uribe dit les Etats-Unis dont il n’est qu’une marionnette, la piste d’envol pour tous les mauvais coups dans la région. Ce soir on apprend d’ailleurs que le gouvernement Venézuélien et celui de l’Equateur ont rappelé leur ambassadeur de Bogota pour protester contre le viol des frontières de ce dernier pays, et la volonté manifeste d’Uribe de saboter toute possibilité de paix.

Il faut encore souligner que la médiatisation autour d’Ingrid bétancourt nous masque en France une des réalités des prises d’otage par les FARC : il ne s’agit pas d’enlèvements crapuleux de faibles femmes mais bien de prise en otage d’hommes et de femmes politiques, Ingrid Bétancourt appartient non seulement à la plus riche famille de Colombie avec ses paramilitaires, mais était candidate à la présidence. Le gouvernement colombien et ses paramilitaires détient dans ses terribles prisons beaucoup de militants des FARC que ceux-ci veulent échanger.

Coup dur mais non mise à genoux des FARC. La règle veut en effet que le dirigeant localisé, menacé, soit aussitôt remplacé tant la discipline est forte dans cette guérilla qui tient depuis près de 50 ans dans la jungle colombienne et dans des conditions d’une extrême dureté. Reyes a payé de sa vie l’échange des otages.

Samedi 1 er mars 2008

COLOMBIA

Par Carlos Aznárez
Directeur de Resumen Latinoamericano

On peut tout craindre de l’attitude du gouvernement Colombien. Juste au moment des négociations en vue de l’échange de prisonniers qui semblait bien engagé, les faucons guerriers de Uribe ont lancé une nouvelle offensive militaire assassine contre les combattants des FARC.

Tout en témoigne : quiconque connaît le territoire colombien peut imaginer ce que signifie de bouger les prisonniers, de les déplacer vivants et en bonne santé jusqu’au point fixé par la méditation internationale et la Croix Rouge, dans un terrain hyper militarisé, là où l’armée, la force aérienne et les paramilitaires associés aux deux premiers sont constamment en patrouille en cherchant à casser l’épine dorsale de la guerrilla.

Néanmoins, les FARC se sont exposés à ce que leurs campements soient localisés, que le renseignement par satellite puisse capter leurs communications, que les milliers de soldats de l’armée colombienne rentrent en contact avec leurs combattants qui transportaient les otages, pour finalement réussir en deux occasions faire un geste plus qu’important et accomplir la promesse faite au commandant vénézuélien Hugo Chávez, de remettre un groupe de prisonniers.

Dans la première occasion, à la fin de 2007, en même temps que se mobilisait un groupe de guerrilleros pour apporter la preuve de la vie des otages, l’armée d’Uribe a lancé une opération militaire qui s’est terminée par l’assassinat d’un capitaine de la guerrilla, et maintenant peu d’heures après que quatre parlementaires aux mains de la guerilla aient été libérés, la mécanique belliciste de Uribe a bombardé - avec l’appui du renseignement par satellite nord-américain - le campement guerillero situé sur le Putumayo, y compris en violant la souveraineté territoriale équatorienne.

Il y a eu deux formes d’action totalement éloquentes. D’un côté, le fascisme d’Uribe, en sabotant toute possibilité de négociation politique et humanitaire, en méprisant la configuration mise en place à ce moment-là , allant jusqu’à nier la médiation de Hugo Chávez, et finissant par lancer tout l’appareil paramilitaire contre les campements des guérilleros au moment même où tout le monde le priait de ne pas bouger ses troupes.

D’un autre côté, la cohérence, l’esprit de compromis, le patriotisme et le sérieux du secrétariat des FARC qui, tout en sachant la présence des forces armées menaçantes, a autorisé l’opération réussie de remise des otages et a voulu en appeler à l’attention du monde sur la nécessité de créer une zone libre de toute présence militaire dans la zone de Florida y Pradera, pour mener à bien un échange qui, entre autres, devrait aboutir à la libération de nombreux guerilleros qui sont aujourd’hui dans les prisons colombiennes.

Enfin, il est nécessaire de rendre un hommage aux révolutionnaires tombés au combat dans le Putumayo. Il est indispensable de le faire parce que dans les circonstances actuelles il n’y a pas d’espace pour les spéculations timorées. Raúl Reyes, Julián Conrado et les combattants des FARC assassinés par les bombes uribistes font partie d’une importante troupe de combattants et combattantes des FARC qui depuis 50 ans luttent par tous les moyens pour renverser la situation criminelle que l’oligarchie et l’establissement colombien ont développé dans une société qui les vomit.

Reyes, au départ, a eu une trajectoire syndicale et son entrée dans la guerrilla est intervenue après ce parcours. Il n’a abouti à cet engagement radical que parce qu’il a pratiqué un militantisme étroitement lié aux aspirations populaires. Il fut un des grands appuis de l’insurrection. Pendant trois décades de travail clandestin dans les montagnes de la Colombie, son image a atteint une dimension internationale, avec d’autres dirigeants. Il fut le représentant des FARC au plan international qui prit contact avec divers gouvernements et organisations populaires. Reyes joua un rôle important comme porte-voix international de la guerrilla et aussi dans les conversations de la zone démilitarisée de El Caguán et, en dernier lieu, il était une des figures clés dans les négociations pour l’échange humanitaire.

Dans leurs fanfaronnades, Uribe et ses faucons s’imaginent faussement que l’assassinat de Raul Reyes aboutira à la déroute des FARC. Rien n’est plus éloignée de cette présomption. Une organisation de guérilla qui a résisté quasiment durant la moitié d’un siècle ne base pas sa puissance sur un seul homme ou un petit noyau de dirigeants. Elle assure sa force en défendant une cause juste - dans ce cas, la prise du pouvoir et la construction d’une Nouvelle Colombie - mais son chemin jusqu’à la victoire comporte logiquement des coups tragiques et douloureux comme celui d’aujourd’hui.

Ainsi le rappelait le combattant Julián Conrado qui, en plus d’être un homme rompu à la lutte de guerrilleros, s’est porté au front culturel de son organisation et a intégré le groupe musical "Los Compañeros" , dont danses et chants populaires revendicatifs sont connus mondialement.

La Colombie nécessite en ce moment plus que jamais la solidarité internationale avec sa lutte contre le fascisme uribiste et l’échafaudage militaire pro-impérialiste construite tout au long de ces dernières années. De telle sorte, que le prochain 6 mars, il est nécessaire de remplir les rues dans tous les pays de la planète, pour freiner l’avance du para-militarisme, marquer au fer rouge le bellicisme du gouvernement colombien et enfin, dans chacun de nos coeurs rebelles, rendre hommage à ceux qui luttent pacifiquement ou avec les armes à la main -comme le commandant Raúl Reyes, Julián Conrado et tous les combattants tombés au combat sur le Putumayo- pour la libération nationale et sociale de Colombie et de toute l’Amérique latine. En paraphrasant l’inoubliable troubadour vénézuélien Ali Primera nous disons : « Ceux qui meurent pour la Patrie ne peuvent être appelés des morts »

traduction de Danielle Bleitrach


LIRE AUSSI :

Politique du pire à Bogotá
Le Monde Diplomatique

Porte-parole des Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC) et ministre des affaires étrangères de cette organisation d’opposition armée, le commandant Raúl Reyes est mort, le 1er mars, en territoire équatorien (à moins de deux kilomètres de la frontière). Contrairement à ce qu’a affirmé dans un premier temps le président colombien Alvaro Uribe à son homologue équatorien Rafael Correa, il n’y a eu aucun affrontement entre le groupe de guérilleros qui accompagnait Reyes et l’armée colombienne. Ils ont été victimes, pendant leur sommeil, d’une « bombe intelligente » de technologie américaine larguée par un avion ayant violé de dix kilomètres " revenant sur son objectif par le sud " le territoire équatorien. Pénétrant également dans le pays voisin, un commando héliporté a parachevé le travail " le président Correa évoque un « massacre » ", emportant le seul corps de Raúl Reyes, comme un trophée. (...)

suite : http://www.monde-diplomatique.fr/carnet/2008-03-03-Colombie


BOGOTA (AFP) " L’élimination par l’armée colombienne du numéro deux des Farc (guérilla marxiste) Raul Reyes rendra encore plus difficile une libération par le groupe rebelle des otages qu’il détient notamment de la franco-colombienne Ingrid Betancourt qui se trouve dans un état de santé alarmant.

Le directeur du journal communiste "Voz" et ancien médiateur pour un échange avec les Farc, M. Carlos Lozano, redoute dimanche que cette opération militaire ne renforce "encore les positions bellicistes du gouvernement conservateur d’Alvaro Uribe qui s’oppose à des négociations et à un échange humanitaire" .

"Cette mort va tout compliquer. Le gouvernement d’Alvaro Uribe a commis un acte de guerre en tuant Reyes, alors qu’un accord humanitaire pour libérer les otages est exactement le contraire, un acte de paix" , estime dans une déclaration à la presse le gouverneur de Narino, Antonio Navaro Wolf.

Quatre jours après les libérations unilatérales de quatre anciens députés par les rebelles des Farc, l’armée colombienne a lancé une vaste opération militaire dans le sud du pays et a tué en territoire équatorien Raul Reyes, l’un des 7 membres du secrétariat des Farc (organe dirigeant) et porte-parole de la guérilla.

"L’on peut penser que la mort de Reyes éloigne les possibilités d’une solution politique du conflit" , estime l’ancien président Ernesto Samper (1994-1998).

M. Jaime Caicedo, le secrétaire du parti communiste a estimé dimanche que la mort de Reyes et l’attitude triomphaliste d’Alvaro Uribe "relancent la campagne de libération par la force des otages entre les mains des rebelles" .

L’ancien parlementaire Orlando Beltrán, otage pendant six ans et libéré mercredi avec trois autres congressistes, a estimé que les familles de la majorité des "otages dits politiques" , encore détenus par les Farc, soit une majorité de militaires et de policiers, craignent que leur parent ne soit exécutés en représailles après la mort de Reyes.

Les médias colombiens ont largement diffusé dimanche les photos sanglantes du cadavre du dirigeant de la guérilla, tué d’une balle dans l’oeil et d’une autre dans le ventre, se réjouissant ouvertement de sa mort.

Sur le plan régional les réactions sont très hostiles.

Furieux, le président vénézuélien Hugo Chavez, qui a été l’artisan de six libérations unilatérales d’otages, a dénoncé cet "acte de guerre et d’irrespect violant la souveraineté de l’Equateur" et a fermé son ambassade à Bogota après avoir copieusement insulté Alvaro Uribe.

Furieux également, le président de l’Equateur Rafael Correa a retiré son ambassadeur en Colombie et accusé Alvaro Uribe de lui avoir menti pour avoir présenté cette opération militaire comme une action de représailles à chaud alors qu’il s’agissait d’une élimination froidement organisée.

Les deux pays voisins ont massé des troupes sur leur frontière commune avec la Colombie.

En France, Lorenzo Delloye, fils de la Franco-Colombienne Ingrid Betancourt otage de la guérilla depuis 6 ans, s’est, comme les autres membres de sa famille, déclaré "très inquiet" après la mort de Raul Reyes.

"On espère que les Farc ne vont pas attaquer les otages. Il faut qu’ils sachent que ce n’est pas du tout dans leur intérêt" , a-t-il dit.

De même, le président français Nicolas Sarkozy a appelé samedi à "faire prévaloir les considérations humanitaires" et à "conforter la dynamique positive" en vue de la libération des otages.

Seul signe positif, dimanche la revue Résistance, l’un des médias des rebelles, a appelé sur sa page internet à ne pas abandonner "les efforts pour parvenir à un échange humanitaire" .

Les Farc détiennent dans la jungle 39 otages dits "politiques" , dont l’ex-candidate à la présidence de la république Ingrid Betancourt et trois Américains, qu’ils veulent échanger contre 500 guérilleros emprisonnés.

Copyright © 2008 AFP. Tous droits réservés.

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