RSS SyndicationTwitterFacebookFeedBurnerNetVibes
Rechercher

Energies renouvelables et droits humains : un divorce gênant pour les prétentions écologiques

Les rapports d’ONG se multiplient pour dénoncer les graves atteintes aux droits humains qui découlent de l’extraction, du transport et de l’exploitation des matériaux nécessaires à la fabrication des technologies utilisées dans les énergies renouvelables. Le silence public qui entoure ces pratiques est assourdissant : il traduit le malaise de personnels politiques et médiatiques à assumer certaines contradictions de l’écologie politique. Car les éoliennes, les panneaux solaires et les batteries de voiture électrique ont un très lourd coût environnemental et humain.

Les conséquences dévastatrices de l’exploitation minière sur des milieux déjà fragilisés

La conception des énergies renouvelables nécessite des minerais, beaucoup de minerais... Or les catastrophes liées à l’utilisation de ces minerais se sont multipliées ces dernières années selon un rapport récent de l’ONG Sherpa intitulé « Ne minons pas la transition écologique ». L’une des plus violentes et importantes fut la rupture d’un barrage du réservoir de rétention d’une mine de fer à Brumadinho au Brésil, en janvier 2019. Le bilan de ce drame humain fait froid dans le dos : 270 morts directs dans un océan de boue toxique et des déchets toxiques par millions de tonnes qui pourraient affecter des millions d’habitants.

Cette catastrophe fait écho à une autre rupture de barrage dans le même pays en 2015. Dans les deux cas, on peut observer un enchevêtrement entre entreprises minières locales, sociétés de prospective internationales, avec des pratiques de certification frauduleuses et une corruption endémique, sans même parler des déplacements forcés de population venant servir de main d’œuvre bon marché sans équipement de protection de base. Comme le démontrait le chercheur Alain Deneault dans son livre « Noir Canada » en 2008, derrière les profits des compagnies minières internationales se cachent encore une mentalité coloniale, via la déstabilisation politique et la corruption endémique, dans un dédain absolu des terres et des hommes. Une partie des minerais qui servent à la construction de nos éoliennes, utilisées par les pouvoirs publics et les entreprises pour leurs campagnes de communication, est donc extrait dans le sang de bien des populations.

Dans d’autres régions, c’est le retour du stress hydrique pour les populations, étant donné les quantités astronomiques d’eau douce nécessaire à l’extraction minière. Le sous-sol riche en lithium de la région de Centenario-Ratones en Argentine par exemple en a fait les frais : disponibilité et qualité moindre de l’eau potable mais aussi pollution des ruisseaux utilisés pour abreuver le bétail et irriguer les cultures. Rappelons que le lithium, comme le cuivre ou le manganèse, fait partie des matériaux essentiels à la construction des batteries de voitures électriques.

Coup de grisou sur les droits humains

Au-delà des désastres écologiques évidents des exemples précédents, plus d’un siècle après les descriptions effroyables des conditions de travail ouvrières dans les mines par Emile Zola dans Germinal, les droits humains restent particulièrement bafoués dans l’industrie des énergies renouvelables. Une étude récente de l’ONG Centre de Ressources sur les Entreprises et les Droits de l’Homme fait état de graves manquements à la dignité humaine par de nombreuses sociétés engagées dans cette industrie.

Le rapport offre un rappel cinglant des racines violentes d’un capitalisme souvent enrobé de verdissage (greenwashing) : saisies illégales de terres, conditions de travail calamiteuses, traitement infamant des populations locales, corruption et collusions politiques avec les élites locales. Mettant l’accent sur les énergies éolienne et solaire, le rapport dresse un classement des 16 entreprises cotées en Bourse les plus importantes dans le secteur, dont deux françaises. La conclusion est glaçante : « Les résultats suggèrent qu’aucune des entreprises (...) n’assume pleinement aujourd’hui (ses) responsabilités en matière de droits de l’Homme. »

L’ONG soulève que pas moins de 197 allégations de violations des droits de l’Homme ont été soulevées contre ces sociétés : meurtres, menaces, intimidations, spoliation des terres, conditions de travail dangereuses, salaires misérables, etc... Cette liste funeste amène à s’interroger sur l’impunité laissée aux entreprises des énergies renouvelables (aucune n’a accepté de répondre à ces allégations), là où d’autres secteurs (comme l’industrie pétrolière ou textile) sont depuis longtemps dans le collimateur des instances politiques nationales, internationales, des ONG et des associations. Sous prétexte d’énergie verte, le secteur des renouvelables devrait-il échapper aux règles internationales ?

On peut penser que le caractère indispensable des énergies renouvelables dans la transition énergétique a justifié de fermer les yeux sur ces exactions scandaleuses. Il est peut-être temps pour une opinion publique occidentale de plus en plus férue d’environnement de porter l’attention des pouvoirs politiques et économiques sur ces activités, par la mise en place de mécanismes de contrôle plus draconiens ou de critères d’investissements adossés aux droits humains. Pour l’avenir de la planète, via l’équilibrage du mix énergétique, nous ne pouvons pas détourner les yeux sans risquer de contrevenir aux objectifs et aux valeurs initiales de l’écologie : la préservation de l’environnement et des populations pour la continuation de la vie.

»» https://www.drapeaurouge.fr/2020/12/18/energies-renouvelables-droits-h...
URL de cet article 36780
  

Même Thème
La raison ou le chaos
André Prone
Extrait de la préface d’André Tosel, Philosophe, Professeur émérite Avec La raison ou le chaos André Prone dresse un ultime tableau de sa vaste fresque théorique intitulée « Capitalisme et Révolution », consacrée à une critique des divers aspects du capitalisme mondialisé et à la proposition de ce qu’il nomme un écomunisme combinant l’apport du mouvement communiste d’inspiration marxienne et l’écologisme. Nourri d’une culture fondée sur une connaissance effective des sciences de la nature, attentif à la (...)
Agrandir | voir bibliographie

 

Lorsque l’on tente, comme ce fut le cas récemment en France, d’obliger une femme à quitter la Burqa plutôt que de créer les conditions où elle aurait le choix, ce n’est pas une question de libération mais de déshabillage. Cela devient un acte d’humiliation et d’impérialisme culturel. Ce n’est pas une question de Burqa. C’est une question de coercition. Contraindre une femme à quitter une Burqa est autant un acte de coercition que l’obliger à la porter. Considérer le genre sous cet angle, débarrassé de tout contexte social, politique ou économique, c’est le transformer en une question d’identité, une bataille d’accessoires et de costumes. C’est ce qui a permis au gouvernement des Etats-Unis de faire appel à des groupes féministes pour servir de caution morale à l’invasion de l’Afghanistan en 2001. Sous les Talibans, les femmes afghanes étaient (et sont) dans une situation très difficile. Mais larguer des "faucheuses de marguerites" (bombes particulièrement meurtrières) n’allait pas résoudre leurs problèmes.

Arundhati Roy - Capitalism : A Ghost Story (2014), p. 37

Reporters Sans Frontières, la liberté de la presse et mon hamster à moi.
Sur le site du magazine états-unien The Nation on trouve l’information suivante : Le 27 juillet 2004, lors de la convention du Parti Démocrate qui se tenait à Boston, les trois principales chaînes de télévision hertziennes des Etats-Unis - ABC, NBC et CBS - n’ont diffusé AUCUNE information sur le déroulement de la convention ce jour-là . Pas une image, pas un seul commentaire sur un événement politique majeur à quelques mois des élections présidentielles aux Etats-Unis. Pour la première fois de (...)
23 
Médias et Information : il est temps de tourner la page.
« La réalité est ce que nous prenons pour être vrai. Ce que nous prenons pour être vrai est ce que nous croyons. Ce que nous croyons est fondé sur nos perceptions. Ce que nous percevons dépend de ce que nous recherchons. Ce que nous recherchons dépend de ce que nous pensons. Ce que nous pensons dépend de ce que nous percevons. Ce que nous percevons détermine ce que nous croyons. Ce que nous croyons détermine ce que nous prenons pour être vrai. Ce que nous prenons pour être vrai est notre réalité. » (...)
55 
"Un système meurtrier est en train de se créer sous nos yeux" (Republik)
Une allégation de viol inventée et des preuves fabriquées en Suède, la pression du Royaume-Uni pour ne pas abandonner l’affaire, un juge partial, la détention dans une prison de sécurité maximale, la torture psychologique - et bientôt l’extradition vers les États-Unis, où il pourrait être condamné à 175 ans de prison pour avoir dénoncé des crimes de guerre. Pour la première fois, le rapporteur spécial des Nations unies sur la torture, Nils Melzer, parle en détail des conclusions explosives de son enquête sur (...)
11 
Vos dons sont vitaux pour soutenir notre combat contre cette attaque ainsi que les autres formes de censures, pour les projets de Wikileaks, l'équipe, les serveurs, et les infrastructures de protection. Nous sommes entièrement soutenus par le grand public.
CLIQUEZ ICI
© Copy Left Le Grand Soir - Diffusion autorisée et même encouragée. Merci de mentionner les sources.
L'opinion des auteurs que nous publions ne reflète pas nécessairement celle du Grand Soir

Contacts | Qui sommes-nous ? | Administrateurs : Viktor Dedaj | Maxime Vivas | Bernard Gensane
Le saviez-vous ? Le Grand Soir a vu le jour en 2002.