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J’ai testé pour vous...

Bien fraîche, c’est un repas pour l’âme. Immensément riche en goût avec une mousse suave qui porte aux nues, la St-Ambroise noire à l’avoine est sûrement l’une des meilleures noires au monde.

Brasseur : McAuslan, Montréal, Québec

Ayant versé dans le culinariat, avec un article intitulé La hamburger chaud, je vais ce soir me livrer à la critique du boirariat, la bière noire - au parfum londonnien - La St-Ambroise noire.

***

C’est après avoir visionné le film The Guard, que je me suis soudainement souvenu de la saveur autoritaire des bières noires, dont La Champlain, disparue de nos tablettes québécoises, à mon grand regret.

RECHERCHE

J’ai passé une vingtaine de minutes dans un supermarché huppé pour en dénicher une. Lunettes baissées sur le nez, regard perdu, j’ai lu à foison des étiquettes pochées, rappelant des vers de Verlaine ou de d’Apollinaire, Sous le pont Mirabeau , absolu de simplicité.

Brassée avec 40 pour cent de malt foncé et torréfié, la bière noire à l’avoine possède une saveur relevée où percent des notes de café espresso et de chocolat. L’avoine contribue à lui donner du corps et une longue mousse à saveur de moka.

1- Première gorgée :

Pas aisé de saisir toutes les nuances de cette bière aux accents british. D’abord surpris par sa franchise et son attaque de palais. On se serait crus en Libye… Elle a du corps… A n’en pas douter. Cet assemblage complexe n’est pas sans rappeler certaines phrases de Proust qui n’en finissait plus d’en faire une par page, avec le passé simple, cette forme de verbe si compliquée, étalée en spirale, voire en pièges grammaticaux pour agripper la réalité :

Et je comprenais combien elle l’eût désiré en voyant combien il lui était impossible d’y réussir. Au moment où elle se voulait si différente de son père, ce qu’elle me rappelait, c’était les façons de penser, de dire, du vieux professeur de piano. Bien plus que sa photographie, ce qu’elle profanait, ce qu’elle faisait servir à ses plaisirs mais qui restait entre eux et elle et l’empêchait de les goûter directement, c’était la ressemblance de son visage, les yeux bleus de sa mère à lui qu’il lui avait transmis comme un bijou de famille, ces gestes d’amabilité qui interposaient entre le vice de Mlle Vinteuil et elle une phraséologie, une mentalité qui n’était pas faite pour lui et l’empêchait de le connaître, comme quelque chose de très différent des nombreux devoirs de politesse auxquels elle se consacrait d’habitude. Ce n’est pas le mal qui lui donnait l’idée du plaisir, qui lui semblait agréable ; c’est le plaisir qui lui semblait malin.

Du côté de chez Swann ( Du moins, je crois…)

2- Deuxième gorgée

C’est la surprise totale : l’amertume dissimulée, s’étant dérobée à la première gorgée, est soudainement apparue. Je rassade de nouveau afin de me rassurer. L’amer est bien là … Discret, après que toutes les goûts finaux, alignés, eussent passés.

3- Troisième gorgée

En fait, je ne sais plus combien de lampées j’ai siphonné. J’ouvre la télévision et je commence à trouver intéressant le canal ARTE. Je reviens à Proust, pensant que dans ses années, écrivant son oeuvre, il aurait pu avoir un blogue et nous livrer toutes les tonalités de son âme fébricitante. Ah ! Dire qu’à chaque jour, nous aurions pu nous lever le matin et nous gorger de son oeuvre comme une noire bière, un combustible matinal qui, nouée au café, aurait pu nous dessiller sur nos sociétés décadentes, décortiquant, désossant toutes les entrailles des canailles acoquinées. J’imagine Proust décrivant l’entourage de Sakozy : Le temps d’une montre.

... une sorte de beauté naît de la multiplicité des ennuis qui nous assaillent, entrecroisés comme des leitmotive wagnériens ...

4- Quatrième gorgée

Peut-être la dixième. Cette sacrée bière noire commence à faire effet. Je commence à avoir une fixitude (sic) sur l’oeuvre de Prouste : Du côté de chez Swamp . Swamp est un marais… Voici un extrait :

Le docteur Alec Holland, chercheur sur les capacités bio-restauratrice, se retrouve isolé avec sa femme afin de poursuivre ses recherches au milieu d’un marais de Louisiane. Ses découvertes attirent la convoitise d’une entreprise peu scrupuleuse, et lui et sa femme deviennent les victimes d’une bombe placée dans le laboratoire. Alec Holland gisant dans le marais où s’est déversé le résultat de ses recherches se trouve transformé en "la Créature du marais", Swamp Thing, du moins c’est ce que croit Swamp Thing lui-même.

Mais la créature finira par apprendre de la bouche du savant fou Jason Woodrue, alias Floronic Man/L’homme floronique, qu’il n’est pas réellement Alec Holland, mais une créature végétale qui possède ses souvenirs. Swamp Thing est en fait un esprit élémentaire qui finira par découvrir toute l’étendue de ses pouvoirs (cette conception du personnage est l’apport d’Alan Moore).

Amoureux de Abigail Arcane, il finira par trouver le bonheur à ses côtés après une vie difficile.

Ce personnage est très lié à Anton Arcane, le plus souvent simplement appelé Arcane (l’oncle d’Abigail, qui a reconstruit son propre frère Gregori Arcane, le père d’Abigail, devenu ainsi le grotesque Patchwork Man, et qui n’a cessé de tourmenter sa nièce, notamment depuis que celle-ci a commencé à entretenir une relation romantique avec Swamp Thing) qui est son pire ennemi, Etrigan le démon ainsi que John Constantine (qui a d’ailleurs fait son apparition dans cette série, sous la plume d’Alan Moore : il aide Swamp Thing à prendre conscience de sa véritable nature et donc de ses pouvoirs, et plus tard, il l’aidera à se réconcilier avec l’archétype humain qui est sa conscience, celle d’Alec holland). Swamp

5- Cinquième bouteille

Cette bierre est vraiment fantastic : j’en perd mon las teint. L’histoire du marais éckonomique dans lequel nous sommes tousse (dans le coude) plongéss est abacradabrante. Si on place un e, on se retrouve avec Sarko et Hollande, on peut percevoir la vrairité enfiin dévoilée de notre immonde…

Décourager, afin de me remonté, je suis allé dans le frigo pour tester le secret casher de la biaire noire.

Pour faire breffe, je dirais que la bière nouare apporte bien de la lumière sur l’éta mâtiné de tous les zéluz de la planète.

On est mâtiné au mondialisme. C’est ce que j’ai lut dans la biaire noire. Preuve à l’appui…

A. − [Le suj. désigne un chien bâtard ou de race commune] Couvrir une chienne de race. (Dict. xixeet xxes.).

B. − Au fig. Compromettre la pureté de quelque chose en y apportant des éléments extérieurs. Synon. abâtardir.Pourtant chez ce blond de grande taille, le type anglo-saxon mâtine fortement l’hérédité napoléonienne (Barrès,Déracinés,1897, p.177).L’autre mâtinait son discours d’une foule de locutions espagnoles, de barbarismes et d’allusions inintelligibles à des événements obscurs (Miomandre,Écrit sur eau,1908, p.113).

− Emploi pronom. à sens passif. Barrès se résigne à ce que notre race se mâtine d’anglo-saxon (Mauriac,Du côté Proust,1947, p.151).

Re-breffe :

Y a pu de fransès, Y apu de québécois, rien que des zamériquains qui nous culbutent de leurre culture acultivée.

Je dirais, pour essèyer d’être profon, qu’un violon avec une corde, sa ne fait pas de beaux concerts.

Il est tar, je m’en vès au lie…

Gaëtan Pelletier

1 mai 2012

La Vidure

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COMMENTAIRES  

02/05/2012 00:16 par Safiya

Cher Gaëtan,

J’ai adoré et ris aux larmes pendant tout le début jusqu’à la quatrième gorgée, peut-être la dixième... puis à la cinquième bouteille, j’ai décroché mais n’empêche, j’aime votre esprit, j’aime la finesse de son sel.

Vous avez l’art de traiter de choses graves avec ce ptit queque chose qui, tout en ne les galvaudant pas, suscite le rire inextinguible.

A bientôt, vous lire !

02/05/2012 01:59 par Gaëtan Pelletier

Bonjour Safiya,
 :-)
Faut dire que la politique qui tricote nos vies est passablement amochée. En plus, je salue tous les intellectuels qui saisissent ici et là des morceaux de "réalité". La toile mondial du monde géopolitique est vraiment complexe.
Et la vie est si courte...
Vaut mieux en rire. Ces gens-là sont soûls de pouvoir et finissent par ne plus voir la réalité du "plancher des vaches". Nous, les citoyens...
Bref, le pouvoir, c’est comme la bière : quand on en a trop, on ne sait plus trop ce qu’on dit.
Peut-être que la finesse de Proust aurait pu nous raconter l’Histoire. Au moins, on aurait eu bien des détails.
Merci ! ET bonne journée !

02/05/2012 03:12 par Michail

Moi je peux vous dire que tout est prêt pour des excès historiques (Version slave très hard..[*].) pour dimanche soir 20 heures... J’ose espérer que ce sera pour fêter dignement un heureux départ !!!!

[*] Du genre de la dernière que je m’étais prise avec un camarade polonais il y a quelques années, il m’avait bien fallu trois semaines pour m’en remettre...

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