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La Seine-Saint-Denis intéresse la finance américaine

Le libéral Institut Montaigne a commandé un rapport sur le département à une enquêtrice du Boston Consulting Group, avec le concours de la banque JP Morgan. Une insulte pour les acteurs locaux soupçonnés de ne pas bien gérer les deniers publics.

Après avoir demandé que les travailleurs paient les conséquences de la crise sanitaire en supprimant des congés payés et les 35 heures, voici que le très libéral Institut Montaigne ­commande un rapport sur le département de la Seine-Saint-Denis à une enquêtrice du Boston Consulting Group, avec le concours du géant de la finance nord-américaine, la banque JP Morgan. Celle-ci a de longue date fait de ce département l’objet d’une offensive, épaulée par l’ambassade des États-Unis. L’un et l’autre cherchent à y court-circuiter l’action de l’État et des collectivités locales, militant pour une politique ciblée sur les « minorités » appelées à se former aux États-Unis pour y apprendre les règles de la finance et du « community organizing » (organisation communautaire), au nom d’une « stratégie d’engagement vers les minorités ».

Un rapport qui insulte les élus et acteurs locaux

Ce rapport constitue une insulte pour les élus et acteurs locaux, notamment ceux de l’économie sociale et solidaire, soupçonnés de ne pas bien gérer les deniers publics, de laisser se développer la pauvreté. Les contrats de ville sont vilipendés et appelés à être remplacés par des financements de projets à la carte jusqu’à y faire flamber la spéculation immobilière contre le « ringard » logement social. Les plus modestes seront repoussés plus loin sans que ne recule la pauvreté. Les appels d’offres disparaîtraient et avec eux le tissu des PME au profit de « consortiums ». Et puis viendrait la généralisation des programmes « public-privé », antichambres d’une privatisation générale des services publics. À la veille du second tour des élections municipales, chacun doit être informé de ce qui se trame dans les laboratoires du capital et ne pas se priver de ses municipalités progressistes.

Depuis des années, les Nord-Américains dépensent de colossaux moyens pour former des militants chargés d’y déboulonner les élus de gauche, n’hésitant pas à les déguiser en « progressistes » pour faire tomber un maire communiste. Le département est en effet considéré à « fort potentiel » du fait de sa jeunesse et des équipements souvent issus du « communisme municipal ». Et la vingtaine de milliards d’euros qui vont y être investis prochainement font saliver du côté de l’Oncle Sam, jusqu’à tenter d’en faire une colonie de l’empire où le RSA serait ratiboisé afin de laisser place à de petits « jobs » sous-payés.

Cheval de Troie des géants nord-américains du numérique

Délibérément, l’alliance Institut Montaigne-JP Morgan évacue l’enjeu des « moyens déployés pour la Seine-Saint-Denis » pour, nous dit-on, « sortir de la bataille des chiffres ». L’insupportable différence de traitement que subissent les habitants de Seine-Saint-Denis en dotations publiques, en nombre d’enseignants, de services de santé ou de justice n’aura pas eu l’heur d’intéresser les rédacteurs. Pour tout avenir, la Seine-Saint-Denis serait vouée à devenir le « département test » d’un développement effréné des technologies numériques. Manière de tirer un trait sur le réseau de PME et le développement industriel. Enjeu éducatif ? Développement du « numérique éducatif », nous répond l’institut. Difficultés d’accès aux droits ? Développement de la « e-administration »... Et pour finir, il faudrait optimiser les politiques publiques par « une plus grande utilisation des données via les techniques de big data ou d’intelligence artificielle ». Si le développement des technologies numériques doit bien évidemment avoir toute sa place en Seine-Saint-Denis, on ne comprend pas pourquoi il serait l’apanage de ce département. Mais il est vrai qu’en matière de numérique, les donneurs d’ordre sont situés outre-Atlantique. La banque J P Morgan est le cheval de Troie des géants nord-américains du numérique et particulièrement de l’ogre Amazon.

Allons-nous laisser une banque étasunienne alliée au plus libéral des instituts dicter l’avenir de ce territoire pour y promouvoir un développement inégalitaire ? Les populations et leurs élus doivent être respectés. Et, le second tour des élections municipales doit servir aussi à les protéger des assauts de la finance nord-américaine.

(Patrick Le Hyaric est le directeur du journal L’Humanité )

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POUR APPROFONDIR :

La banque JP Morgan investit 30 millions de dollars en Seine-Saint-Denis - Le Parisien, 06/22/2018
http://www.leparisien.fr/seine-saint-denis-93/la-banque-jp-morgan-investit-30-m-en-seine-saint-denis-06-11-2018-7936677.php
Pourquoi les Etats-Unis arrosent la banlieue parisienne à coups de millions de dollars - Le Parisien, 30/12/2019
http://www.leparisien.fr/seine-saint-denis-93/pourquoi-les-etats-unis-arrosent-la-banlieue-parisienne-a-coups-de-millions-de-dollars-30-12-2019-8225955.php
« J’ai passé 5 mois à New York pour appliquer leurs pratiques sociales dans le 93 » - Le Parisien, 30/12/2019
http://www.leparisien.fr/seine-saint-denis-93/j-ai-passe-5-mois-a-new-york-pour-appliquer-leurs-pratiques-sociales-dans-le-93-30-12-2019-8225952.php
Les banlieues françaises, cibles de l’influence culturelle américaine - 16/09/2010
http://gestion-des-risques-interculturels.com/pays/europe/france/les-banlieues-francaises-cibles-de-linfluence-culturelle-americaine/
La stratégie américaine pour influencer les minorités en France - 04/12/2010
http://gestion-des-risques-interculturels.com/risques/la-strategie-americaine-pour-influencer-les-minorites-en-france/
Google à la conquête des villes - 03/11/2017
https://blog.mondediplo.net/2017-11-03-Google-a-la-conquete-des-villes
La « ville sûre » ou la gouvernance par les algorithmes - 06/2019
https://www.monde-diplomatique.fr/2019/06/TREGUER/59986

»» https://www.humanite.fr/quartiers-p...
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Georges Séguy. Résister, de Mauthausen à Mai 68.
Bernard GENSANE
Il n’a jamais été le chouchou des médias. Trop syndicaliste, trop communiste, trop intransigeant à leur goût. Et puis, on ne connaissait même pas l’adresse de son coiffeur ! Seulement, à sept ans, il participe à sa première grève pour obtenir la libération de son professeur qui a pris part aux manifestations antifascistes de Février 34. Huit ans plus tard, à l’âge de quinze ans, il rejoint les rangs de la Résistance comme agent de liaison. Lui et les siens organisent de nombreuses évasions (…)
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« Avant, il y avait la tomate. Puis, ils ont fabriqué la tomate de merde. Et au lieu d’appeler la tomate de merde “tomate de merde”, ils l’ont appelée “tomate”, tandis que la tomate, celle qui avait un goût de tomate et qui était cultivée en tant que telle, est devenue “tomate bio”. À partir de là, c’était foutu. »

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