RSS SyndicationTwitterFacebookFeedBurnerNetVibes
Rechercher

Le bel avenir de Thucydide

Cousines et pourtant souvent considérées comme étant en concurrence frontale, l’actualité et l’histoire ont tout à gagner de s’enrichir mutuellement. C’est en tous cas la conviction de nombre de professionnels, qu’ils soient spécialistes, enseignants ou encore journalistes qui patiemment développent des passerelles entre ces deux domaines.

Grande passion de l’historienne et académicienne Jacqueline de Romilly, Thucydide a sans doute été tout à la fois le premier journaliste et le premier historien de notre civilisation.

Dans une première vie, descendant d’une famille noble d’Athènes, il est d’abord militaire. Sèchement battu à la tête de ses troupes, il est contraint à l’exil et occupe le reste de ses jours à analyser – on pourrait même écrire à « décortiquer », tant le souci du détail est omniprésent, presque obsessionnel – les causes, le déroulement et les conséquences du conflit qui opposa Athènes et Sparte entre 431 et 404 avant Jésus-Christ. Reclus pendant des années à Thrace, Thucydide inventa finalement ces deux métiers qui font encore rêver nombre d’enfants à l’aube du 21ème siècle : celui de journaliste et celui d’historien. Dans son œuvre, magistrale et unique, Histoire de la guerre du Péloponèse, il commence par décrire avec minutie les faits et les déroulements. Un reportage sur le vif, où l’humain est présent à chaque page. Dans un second temps, il se livre à l’analyse, s’interroge sur les causes et trace des perspectives, faisant œuvre au long cours.

Par un retournement de situation assez inattendu, jamais la posture de Thucydide n’aura été aussi actuelle et pertinente. Submergées par la vague Internet, les sciences humaines comme bon nombre d’autres disciplines doivent désormais refonder cet équilibre entre immédiateté et réflexion. L’actualité donne le sentiment de s’accélérer dans notre village planétaire. Nécessité se fait de trouver de la distance, des outils pour comprendre et à tous le moins donner du sens.

Porté par cette intuition, Patrick Sawicki, entouré d’un groupe de jeunes historiens, fonde dès 1997 l’association « Thucydide-conception » dont la profession de foi est : l’Histoire pour éclairer, comprendre, décrypter l’actualité. Epaulé par des grands noms des sciences humaines, comme le sociologue Alain Touraine ou les historiens Annette Wievorka ou Benjamin Stora, soutenu et conseillé par des professionnels des médias, comme Yvan Levaï ou Michel Taubmann, il lance aussitôt les « cafés-histoire », organisant au cœur du Faubourg Saint-Antoine à Paris des rencontres, forums et débats pour donner du sens à l’actualité, en clarifier les enjeux ; bref, transformer les mille et un faits du quotidien, anecdotiques ou graves, en matériau historique.

Ce souci de rendre compatible l’immédiat et les évènements de fond, cette volonté de clarification pour comprendre ce qui fera date et ce qui sera oublié agite aussi depuis une dizaine d’années les grands médias français qui tous ont leur « historien consultant attitré », en charge de décrypter et de proposer des grilles de compréhension au plus grand nombre, face à la multiplicité des actualités.

Une démarche que l’on retrouve également au sein de l’Education nationale, très tôt en alerte sur les conséquences de l’arrivée du flot continu d’informations via Internet, dans l’enseignement de l’Histoire. Qu’il s’agisse du CNDP (Centre national de Documentation Pédagogique) ou du portail « eduscol », les enseignants ont compris l’urgence qu’il y avait tout à la fois à tirer parti des nouvelles technologies, formidable et quasi inépuisable « centre de ressources », mais tout en prenant appui sur le patrimoine que représente l’écrit. « Contre toute attente, c’est même une demande de mes élèves, observe Marie-Laure qui enseigne l’histoire. Dès le collège, quand ils se passionnent pour un sujet d’histoire contemporaine, leur premier mouvement est de naviguer sur le Net. Puis vient la réflexion, la recherche plus poussée, le besoin de comprendre. Et là, le livre s’impose. En clair, passé le temps du tâtonnement et des premières recherches, mes élèves éteignent l’ordinateur et vont au CDI emprunter des livres . C’est dire s’ils ont alors besoin d’être guidés ».

C’est donc en termes de complémentarité, l’écrit à l’appui et comme enrichissement du net, que les éditeurs travaillent désormais. « Je suis convaincu, observait Arnaud Nourry Président d’Hachette Livre dans une intervention récente, que l’histoire du numérique dans l’édition ne sera pas celle d’une révolution, mais celle d’une transformation et d’une évolution lente et vertueuse dont nos auteurs seront les bénéficiaires. Tout simplement parce que dans un monde d’internautes assaillis de contenus de qualité souvent faible, nos auteurs, nos marques (…) permettent de donner du sens ».

Qu’il s’agisse de trouver des clés de compréhension à une actualité déferlante accessible en temps réel ou de se donner le temps de développer et comprendre le patrimoine historique pour éclairer l’avenir, rien de pire ne saurait arriver que de créer des frontières étanches, infranchissables. Une vision étriquée, frileuse, pensée en termes de chasse gardée et pour tout dire étroitement protectionniste serait sans aucun doute préjudiciable tant aux historiens privés de sources vives qu’aux publics avides d’informations en continue. Aux Thucydide du 21ème siècle de (re)nouer ce lien, désormais.

Albin Ciriez

URL de cet article 22151
  

La raison ou le chaos
André Prone
Extrait de la préface d’André Tosel, Philosophe, Professeur émérite Avec La raison ou le chaos André Prone dresse un ultime tableau de sa vaste fresque théorique intitulée « Capitalisme et Révolution », consacrée à une critique des divers aspects du capitalisme mondialisé et à la proposition de ce qu’il nomme un écomunisme combinant l’apport du mouvement communiste d’inspiration marxienne et l’écologisme. Nourri d’une culture fondée sur une connaissance effective des sciences de la nature, attentif à la (...)
Agrandir | voir bibliographie

 

Le fait est que les slogans du type "soutenons nos soldats" n’ont aucun sens... Et c’est tout l’objectif d’une bonne propagande. Il vous faut créer un slogan auquel personne ne s’oppose, et tout le monde y adhérera. Personne ne sait ce qu’il veut dire parce qu’il ne veut rien dire. Son importance réside dans le fait qu’il détourne l’attention d’une question qu’il aurait fallu poser : soutenez-vous notre politique ? Mais ça c’est une question qu’on n’a pas le droit de poser.

Noam Chomsky

Médias et Information : il est temps de tourner la page.
« La réalité est ce que nous prenons pour être vrai. Ce que nous prenons pour être vrai est ce que nous croyons. Ce que nous croyons est fondé sur nos perceptions. Ce que nous percevons dépend de ce que nous recherchons. Ce que nous recherchons dépend de ce que nous pensons. Ce que nous pensons dépend de ce que nous percevons. Ce que nous percevons détermine ce que nous croyons. Ce que nous croyons détermine ce que nous prenons pour être vrai. Ce que nous prenons pour être vrai est notre réalité. » (...)
55 
Hier, j’ai surpris France Télécom semant des graines de suicide.
Didier Lombard, ex-PDG de FT, a été mis en examen pour harcèlement moral dans l’enquête sur la vague de suicides dans son entreprise. C’est le moment de republier sur le sujet un article du Grand Soir datant de 2009 et toujours d’actualité. Les suicides à France Télécom ne sont pas une mode qui déferle, mais une éclosion de graines empoisonnées, semées depuis des décennies. Dans les années 80/90, j’étais ergonome dans une grande direction de France Télécom délocalisée de Paris à Blagnac, près de Toulouse. (...)
69 
Analyse de la culture du mensonge et de la manipulation "à la Marie-Anne Boutoleau/Ornella Guyet" sur un site alter.
Question : Est-il possible de rédiger un article accusateur qui fait un buzz sur internet en fournissant des "sources" et des "documents" qui, une fois vérifiés, prouvent... le contraire de ce qui est affirmé ? Réponse : Oui, c’est possible. Question : Qui peut tomber dans un tel panneau ? Réponse : tout le monde - vous, par exemple. Question : Qui peut faire ça et comment font-ils ? Réponse : Marie-Anne Boutoleau, Article XI et CQFD, en comptant sur un phénomène connu : "l’inertie des (...)
93 
Vos dons sont vitaux pour soutenir notre combat contre cette attaque ainsi que les autres formes de censures, pour les projets de Wikileaks, l'équipe, les serveurs, et les infrastructures de protection. Nous sommes entièrement soutenus par le grand public.
CLIQUEZ ICI
© Copy Left Le Grand Soir - Diffusion autorisée et même encouragée. Merci de mentionner les sources.
L'opinion des auteurs que nous publions ne reflète pas nécessairement celle du Grand Soir

Contacts | Qui sommes-nous ? | Administrateurs : Viktor Dedaj | Maxime Vivas | Bernard Gensane
Le saviez-vous ? Le Grand Soir a vu le jour en 2002.