Communiqué du CNRBE, 14 février 2011. " Alors que la Haute
autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité
(Halde) vient de donner raison à la Ligue des droits de l’homme
au sujet du caractère clairement discriminatoire d’un outil
informatique de l’Education nationale, le CNRBE dénonce la
légèreté de la solution proposée par la Haute autorité.
Rappel des faits... Depuis le 20 janvier 2011 et jusqu’au 20
mars 2011, tous les élèves de terminale qui souhaitent
poursuivre leurs études après le Bac doivent utiliser le
système "Admission Post Bac" (APB) pour s’inscrire dans une
formation de l’enseignement supérieur
(www.admission-postbac.fr).
Plusieurs associations (Ligue des droits de l’Homme, UNEF, FCPE
notamment) ont alors relevé l’impossibilité pour certains
élèves de classe de Terminale de s’inscrire dans une formation
en apprentissage via le site APB, en raison de leur
nationalité. Le 27 janvier 2011, la LDH dénonçait « une décision
clairement discriminatoire », justifiée par le ministère au
motif de lutter contre le travail des sans papier. Pour
chacune de ces personnes, la formule suivante apparaissait, en
effet, lors de la tentative d’inscription :
« seuls les candidats de nationalité française peuvent
s’inscrire dans une formation en apprentissage sur le site
APB ».
Le 7 février 2011, la HALDE donne raison à la LDH dans un avis
motivé (lire ici le document PDF) :
* Le Collège recommande d’ouvrir l’accès au site
Internet et aux préinscriptions aux formations en
apprentissage à tout élève qui en fait la demande,
quelle que soit sa nationalité et son lieu de
résidence.
* Il recommande également de donner une information
précise aux usagers du site, destinée à leur permettre
de prendre connaissance des titres de séjour dont ils
doivent être en possession pour conclure un contrat
d’apprentissage, afin que les intéressés soient alertés
sur les risques de refus auxquels ils s’exposent à
l’occasion des inscriptions définitives dans les
formations sollicitées.
Mercredi 9 février, le ministère annonce avoir modifié le site
inter net Admission Post-bac sur deux points, afin qu’il
« n’induise aucune dis cri mi na tion » à l’égard des étudiants
étran gers.
Le CNRBE ne peut se satisfaire d’une simple modification de ce
dispositif en vue de son "amélioration", mais demande sa
suppression complète, pour les raisons suivantes : - Sous
prétexte de "simplifier les démarches des élèves souhaitant
s’inscrire aux formations accessibles après l’obtention du
baccalauréat", l’Education Nationale met en place sans aucun
cadre législatif une nouvelle application numérique de
traitements de données personnelles qui provoque les
questionnements habituels. Questionnements qui, comme
d’habitude, restent aussi sans réponse :
* qu’en est-il du respect des droits des personnes (droit à
l’information, droit d’opposition, droit d’accès et droit
de rectification) ?
* où les données seront-elles stockées ? qui y aura accès ?
* quelles spécifications ont été communiquées à la Cnil ?
- APB est un dispositif automatique, avec tous les dangers que
cela comporte : par son caractère automatique, ce dispositif
écarte toute possibilité de transparence, de débat, de contrôle
et de contestation au niveau des enseignants du secondaire, des
conseillers d’orientation et des équipes des établissements
d’accueil qui étudient les dossiers.
- APB laisse les élèves livrés à eux-mêmes dans leurs démarches
d’orientation : avoir accès à la connaissance des différentes
possibilités d’orientation sur un site, pouvoir imprimer les
dossiers d’inscription est intéressant. Mais des conseils par
internet ou par téléphone sont loin d’être suffisants : les
jeunes ont besoin d’être conseillés par des personnes
compétentes et dans un vrai dialogue : c’est le rôle des
conseillers d’orientation... qui, dorénavant remplacés par le
dispositif APB, sont en passe d’être supprimés alors qu’ils
devraient être multipliés !
- APB est un dispositif socialement discriminatoire : comme le
constate la Halde dans sa délibération du 7 février 2011, "les
différences de traitement ne sont pas sans incidence sur la
scolarité des intéressés". Or tous les élèves de terminale
n’ont pas les mêmes facilités d’accès au système APB : de
nombreux élèves ne disposent ni du matériel informatique
adéquat ni d’une connexion internet, ne serait-ce que pour de
simples raisons financières. Les élèves socialement
défavorisées en seront donc nécessairement plus pénalisées que
les autres. Ce système induit ainsi nécessairement des
différences de traitement dans l’accès au service public, selon
l’origine sociale des élèves : est-ce là l’égalité des chances
prônée par l’éducation nationale ?
Enfin, la mise en oeuvre du site APB mériterait des explications
sur son cadre légal. Dans son avis, la Halde indique en effet
que « le simple fait que l’administration mette en oeuvre un
service de manière facultative, c’est-à -dire sans en être
contraint par une prescription légale, ne l’exonère pas de
l’obligation de rendre l’accès à ce service non
discriminatoire ».
Le CNRBE, 13/02/2011
voir la version en ligne avec les liens et les images
http://retraitbaseeleves.wordpress.com/2011/02/14/le-cnrbe-demande-larret-du-dispositif-admission-post-bac/
PS
– Lire aussi nos articles sur les liens entre le fichage des
élèves et les personnes en situation irrégulière :
– Soutien total du CNRBE pour les 4 militants de Tours (1/12/10)
– Le fichier Base élèves soupçonné dans l’arrestation d’une
personne sans papiers (4/02/10)
– La recherche de personnes par Base élèves (17/02/09)