RSS SyndicationTwitterFacebook
Rechercher

Liban - Beyrouth, gouvernement en état de siège.





Il manifesto, dimanche 3 décembre 2006.


Un grand campement, avec des milliers de manifestants de l’opposition libanaise, occupe depuis 48 heures l’immense Place des Martyrs, en plein centre de Beyrouth, et celle, contiguë, de Riad el Solh, qui se trouve sous la colline dominée par le grand palais ottoman du « Sérail », siège du gouvernement pro étasunien de Fouad Siniora. Les manifestants bloquent désormais tous les accès au palais sauf un, gardé à vue par des centaines de soldats et des dizaines de blindés. Les militants chiites du Hezbollah, les chrétiens maronites du Mouvement patriotique libre du général Aoun, (avec quelques Frères portant la croix d’une main et le coran de l’autre), des représentants chiites de Saïda, des jeunes progressistes et communistes, ont passé la nuit, en un melting pot interconfessionnel inédit, dans des dizaines de grandes tentes qui ont été dressés vendredi soir à la tombée de la nuit ; mais l’affluence aux piquets nocturnes a été si massive - 5.000 personnes au moins- qu’une grande partie d’entre eux a passé cette nuit sur des matelas de camping. Sans renoncer quand même à une bonne pipe du narguilé ramené de la maison avec le thermos de thé.

Une organisation parfaite chapeautée par une coordination mise en place il y a plus de trois mois entre les forces principales de la manifestation (Hezbollah et Mouvement de Aoun), a fourni une logistique impeccable sur la « place des martyrs », immense espace entre la ville et le port où se dresse le mausolée de Rafiq Hariri -l’ancien premier ministre tué dans un attentat en février 2005- en y amenant tentes, camions-citernes, toilettes chimiques, repas chauds, et en assurant un service d’ordre inflexible, chargé à la fois d’effacer tout slogan ou drapeau de parti ou confessionnel ; d’éviter des attentats en perquisitionnant un à un tous les participants. Et en tenant en bride les manifestants les plus jeunes et les plus exaspérés - qui par milliers ont perdu leur maison pendant la guerre du mois d’août, et sont désormais au chômage - afin qu’ils ne tombent pas dans les provocations des nouvelles Forces de sécurité interne (Isf) : forces fidèles au premier ministre Fouad Siniora, entraînées et armées de pied en cap par le FBI et les conseillers étasuniens. Ces mêmes forces qui ont ouvert le feu, en octobre dernier, sur quelques centaines de squatters et tué deux jeunes garçons. Face à une présence chiite forte dans les rangs de l’armée libanaise et d’officiers chrétiens maronites « patriotes » fidèles au président Lahoud ou, parmi les officiers supérieurs, à leur ancien commandant le général Aoun, les pays occidentaux, Usa et France en particulier, ont investi massivement depuis un an cette nouvelle force de sécurité « sunnite » de plus de 24.000 hommes dotés d’armes ultra sophistiquées. Avec le risque, augmenté ultérieurement par le réarmement de toutes les milices du pays, à commencer par celles de l’extrême-droite phalangiste de Geagea qui est depuis toujours sponsorisée par les services secrets israéliens, de précipiter ainsi le pays dans une spirale de type irakien. Cet élément confirme bien comment la désagrégation confessionnelle hier de l’Irak, aujourd’hui du Liban et demain de la Syrie, n’est pas du tout « un accident » mais le véritable objectif de la politique étasunienne au Moyen-Orient. Les nouvelles Forces de sécurité interne, avec leurs uniformes bleu et leurs véhicules flambant neuf fournis par les pays sunnites du Golfe, ont aussi dans leurs rangs un noyau central de commandos, appelé « les Panthères », de 350 hommes environ, et disposent de leurs propres services secrets créés avec un premier financement étasunien de 30 millions de dollars.

Le front d’opposition, de son côté, a annoncé hier sa détermination à continuer à faire le siège du palais du gouvernement jusqu’à ce que le premier ministre « Siniora Ali Baba » (en référence au sac du pays qu’il a accompli en qualité de bras droit de l’ex-premier ministre Hariri) n’aura pas démissionné.

L’opposition réclame un exécutif d’unité nationale dans lequel la communauté chiite, le mouvement du général Aoun et l’opposition aient un tiers des sièges, de manière à se garantir de tout coup de main possible de la part de Siniora, et surtout contre un nouveau mandat colonial sur le pays de la part des USA et de la France. Fouad Siniora, cependant, fort du soutien reçu par les USA, par la France, la Grande-Bretagne, l’Allemagne, et l’Italie - mais aussi de l’Arabie Saoudite- ne montre aucune disposition à démissionner. Mais en ne misant ainsi que sur un premier ministre sunnite discrédité, les pays occidentaux sont en train de s’aliéner un gouvernement minoritaire contre lequel se soudent les deux autres communautés sous représentées au niveau institutionnel -la communauté chrétienne et, surtout, les chiites- ainsi qu’avec tous les secteurs sunnites « nationaux », opposés à une braderie de leur pays à un nouvel axe franco étasunien. Donc, une fois de plus, ils misent sur le chaos. Selon des rumeurs non confirmées l’opposition aurait laissé du temps à Siniora, jusqu’à ce soir (dimanche 3 décembre, NDT), avant d’étendre la mobilisation en vue d’une campagne de « désobéissance civile » qui bloquerait tout le pays. Très dure réponse de la part du sous-secrétaire d’état étasunien, Nicolas Burns, selon lequel, en cas de crise de gouvernement, la Conférence des pays donateurs programmée en janvier, serait annulée.

Stefano Chiarini


 Source : il manifesto www.ilmanifetso.it

 Traduit de l’italien par Marie-Ange Patrizio



La Syrie, un bouc émissaire commode pour la mort de Gémayel, par Jonathan Cook.


La saga des Gemayel : la Phalange, par Stefano Chiarini.

« Gouvernement inconstitutionnel », l’opposition dans la rue vendredi à Beyrouth. Siniora fait appel aux USA, par Stefano Chiarini.


Liban : les forces spéciales de Samir Geagea sont de retour, par Nidal.




URL de cet article 4418
   
Maurice Tournier. Les mots de mai 68.
Bernard GENSANE
« Les révolutionnaires de Mai ont pris la parole comme on a pris la Bastille en 1789 » (Michel de Certeau). A la base, la génération de mai 68 est peut-être la première génération qui, en masse, a pris conscience du pouvoir des mots, a senti que les mots n’étaient jamais neutres, qu’ils n’avaient pas forcément le même sens selon l’endroit géographique, social ou métaphorique où ils étaient prononcés, que nommer c’était tenir le monde dans sa main. Une chanson d’amour des Beatles, en fin de (…)
Agrandir | voir bibliographie

 

Nous devons employer la force parce que nous sommes l’Amérique. Nous sommes la nation indispensable.

Madeleine Allbright
Secrétaire d’Etat des Etats-Unis

© Copy Left Le Grand Soir - Diffusion autorisée et même encouragée. Merci de mentionner les sources.
L'opinion des auteurs que nous publions ne reflète pas nécessairement celle du Grand Soir

Contacts | Qui sommes-nous ? | Administrateurs : Viktor Dedaj | Maxime Vivas | Bernard Gensane
Le saviez-vous ? Le Grand Soir a vu le jour en 2002.