Le génocide est bien le rêve des pouvoirs modernes.
(Foucault, La Volonté de savoir [1]
On suggère le lien existant entre capitalisme, technoscience et manipulation mentale en s’attardant sur l’électrification des « chaînes de soins ». On insiste particulièrement sur le court-circuit immédiat qui eut lieu entre la découverte de l’activité électrique des systèmes musculaire et nerveux central et la volonté de les manipuler.
Trois étapes scandent l’argument : la définition du capitalisme, de son lien avec la technoscience, et l’exploration du rapport historique qui existe entre électroscience et santé mentale.
1. Le capitalisme biocidaire
Le capitalisme est notoirement difficile à définir. Historiquement, il est intrinsèquement lié au libéralisme dont les deux faces, politique et économique, sont inséparables. Pratiquement, il nomme simplement le système social qui attribue tous les avantages politiques aux détenteurs du capital et aucun (ou le moins possible) au prolétariat. Rien de plus facile pour le capitaliste, par exemple, que d’éluder l’impôt tandis que le travail est surtaxé et que la fraude n’atteint jamais les proportions astronomiques de l’évasion fiscale. Qui a jamais entendu dire que le coût du capital est trop élevé ? Le capitalisme nomme aussi la technique de reproduction de ces inégalités sociales. Théoriquement, on peut parler de système d’exploitation totale visant à maximiser le profit privé et la concentration du pouvoir. Dans les faits, tout est marchandise ou ressource (humains, faune, flore, …), partout (la marchandisation est totale : sphères publiques et privées, nationales et internationales, …) et en tous temps : la marchandisation est synchronique mais également diachronique ; des ressources qui ont mis des millions d’années à cristalliser peuvent être épuisées en deux siècles ; les générations futures n’ont à proprement parler aucuns droits.
En amont, on trouve donc un biocide : la nature n’est qu’un réservoir de ressources à exploiter et une vaste poubelle. De même, en aval, la nature est métamorphosée en marchandises et en techniques. Berlan résume cela très bien en remarquant que l’industrie biotechnologique cherche la stérilisation de toutes les formes de vie afin de substituer la production à la reproduction [2].
En conclusion, parler de capitalisme génocidaire demeure rhétoriquement porteur, mais il faut savoir que, volens nolens, c’est la destruction de toutes les formes de vie qui est programmée, pas uniquement celle de populations « de couleur », ainsi que, s’il échet, leur remplacement par des automates systémiques [3].
2. La poièse technoscientifique
En philosophie post-aristotélicienne, le couple « poïésis / praxis » est corvéable à merci. La poïésis désigne l’agir dont le but est extérieur à l’action (le menuisier façonnant une poignée de porte) tandis que dans la praxis, l’action est son propre but (le médecin se traitant lui-même). La première est essentiellement une technique, une puissance ; la seconde est activité pure. La technoscience est-elle de l’ordre de la production ou de l’action ? De fait, mais pas nécessairement de droit, la technoscience est asservie par le capitalisme et réduite à produire des connaissances comme des artefacts [4]. Cela veut dire que le principe scientifique directeur, énoncé par Bacon — la connaissance des causes naturelles afin de réaliser toutes les choses possibles [5] —, est doublement orienté par le capitalisme.
Premièrement, la technoscience est sommée de dégager des profits immédiats alors qu’historiquement la science visait la connaissance désintéressée voire la connaissance transfiguratrice : elle était praxique. Pour le montrer, on peut s’en remettre aux analyses serrées de Mumford, beaucoup plus suggestives que les allusions d’Ellul ou que l’enquête de Marx. Trois personnages sont instrumentalisés par le capitaliste : le moine (ou le pasteur), le mineur et le soldat. Lorsque viendra le règne de l’androïde, tous trois s’avèreront finalement jetables.
Deuxièmement, elle doit fournir les conditions de possibilité de la concentration du pouvoir et donc contribuer à la déstructuration sociale et à la décadence culturelle.
Huxley, qui était pourtant un incorrigible technophile et qui comprenait l’aventure technoscientifique comme génératrice de progrès, a cherché à démontrer que c’est largement grâce à la technoscience que la manipulation des esprits a pu remplacer la coercition des corps [6]. Mais la dimension proprement concentrationnaire du totalitarisme en gestation depuis les années quatre-vingt a été mieux pressentie par Nineteen Eighty-Four (1949), qui est aux désordres du XXe siècle ce que le Leviathan (1651) fut à ceux du XVIIe [7]. Du reste, un des grands mérites d’Orwell est d’avoir établi clairement que l’impulsion fondamentale du système capitaliste est le keynésianisme militaire, pas la spéculation financière.
3. Electroscience et santé mentale
Toi tu me fais de l’électricité
Tu fais monter ma tension
Pour pas tomber dans la lubricité
Faudra que je fasse attention
Tous les soirs tu m’allumes
Le matin tu m’éteins
Mais même si tu dois tout faire sauter
Fais-moi de l’électricité
Joe Dassin, « Fais-moi de l’électricité », 1974
Que se passe-t-il lorsque le capitalisme biocidaire oriente les travaux de la technoscience ? Le futur immédiat verra la mise en œuvre de technosciences plus ou moins intrusives rendant la normalisation sociale possible à une échelle jusqu’ici impensable. On nous dit que ces recherches se font pour le plus grand bien de l’humanité, dans le but de soulager la veuve et l’orphelin. Mais dès lors que l’on accepte que la technoscience soit pilotée par le capital, il ne saurait être sérieusement question d’une telle politique de recherche…
Pour le montrer, concentrons-nous sur les dernières électrotechnologies — puces, interfaces et implants —, sans nier pour autant que les « progrès » pharmacologiques ou psychochirurgicaux soient moins préoccupants.
3.0. Bref historique
De la même manière que la découverte de l’activité électrique des muscles (Francesco Redi, 1666) a suscité — aussi rapidement que les progrès technologiques le permettaient — des expériences d’électromyostimulation animale (Luigi Galvani, 1771), la découverte de l’activité électrique du cerveau (Hans Berger, 1924) a rapidement donné lieu à des expériences d’électrostimulation intracrânienne (Walter Rudolf Hess, c. 1928).
Entre-temps, Pieter van Musschenbroek avait inventé la bouteille de Leyde (1745) et fait lui-même l’expérience psychophysiologique du choc électrique (1746). Alessandro Volta créera la pile électrique en 1800 ; dès 1759 se développent différentes formes d’électrothérapies plus ou moins scientifiques, sous l’impulsion notamment de John Wesley et de Benjamin Franklin [8] Galvani découvre l’excitabilité électrique des nerfs en 1780. Giovanni Aldini mène en 1803 les expériences qui inspirèrent le récit Frankenstein ou le Prométhée moderne de Mary Shelley (1818) [9]. Ces expériences sont cruciales car Aldini cherchait à avancer la thèse que ses électromyostimulations étaient en fait des électroneurostimulations. En 1870, John Hughlings Jackson avait pressenti que les fonctions psychologiques nécessitent un ancrage cortical univoque pour s’exercer. Quelques mois plus tard, Fritsch et Hitzig relancèrent la querelle des localisations cérébrales en démontrant que l’excitation électrique du cortex frontal produit des mouvements musculaires [10].
Épinglons, en contrepoint, (i) le grand renfermement (1656) qui, selon les hagiographes, se termine en 1795 lorsque Pinel est nommé médecin-chef de la Salpêtrière ; (ii) l’émergence de la théorie des localisations fonctionnelles avec la phrénologie de Franz Joseph Gall (1798) et les découvertes de Broca (1861) et de Wernicke (1873) ; (iii) l’électroconvulsivothérapie de Ladislas J. Meduna (1934) et Ugo Cerletti (1937) [11] ; (iv) les recherches d’Ewen Cameron (1901–1967), le citoyen US-américain qui sera directeur du Allan Memorial Institute (McGill University, Montréal) entre 1943 et 1964. En association étroite avec le britannique William Walters Sargant (1907–1988), qui était alors directeur du Department of Psychological Medicine de l’hôpital St Thomas’ Hospital (Londres), il développa une méthode pavlovienne pour effacer l’esprit de ses patientes [12].
3.1. Puces « RFID » (1971–)
Le décor étant planté, voyons comment il a récemment été modernisé. Les puces ou « radio-marqueurs » RFID (acronyme de « Radio-frequency identification ») sont commercialisées depuis 1971 sous deux fois deux formes : passive ou active, avec mémoire morte ou vive [13].
Les puces passives, c’est-à-dire non alimentées par une source d’énergie, sont activées par le champ électromagnétique externe généré par un lecteur qui doit être positionné à moins de 10 mètres de la puce (les technologies plus récentes permettent une distance de 200 mètres). Les puces actives, c’est-à-dire assistées par une micro-batterie, émettent spontanément et permettent une lecture plus distante. Certaines puces sont à mémoire morte, d’autres sont réinscriptibles après implantation sous-cutanée.
Pour se donner une idée des applications pratiques, il est possible d’examiner simplement, d’une part, les nanopuces passives à mémoire morte qui sont facilement disséminables, par exemple pour étiqueter les biens de consommation ; et, d’autre part, les micropuces actives à mémoire vive qui sont développées pour l’identification animale et humaine. Les premières peuvent à la limite être utilisées sous la forme d’une poudre qui sature l’environnement à surveiller. Les secondes demandent une intervention chirurgicale bénigne et seront bientôt géolocalisables par le réseau mobilophonique.
L’acteur marquant dans ce champ de recherche est
Kevin Warwick (University of Reading, Grande-Bretagne). Il a lancé en 1998 le projet « Cyborg 1.0 » en s’implantant un transmetteur RFID sous-cutané. Sa devise est « Je veux devenir un cyborg [14] ». Bionique ou pas, l’homme court toujours.
3.2. Interfaces neuronaux (2002–)
De fait, en 2002 Warwick poursuit sa schizo-quête transhumaniste en créant le projet « Cyborg 2.0 ». A cette occasion, il se fait implanter un interface neuronal (soit une grille de cent électrodes) dans le nerf médian de son bras gauche afin, entre autres, de contrôler un bras robotisé.
Vernor Vinge et Ray Kurzweil prétendent que nous nous approchons rapidement d’un point de basculement — « the singularity » — qui verra les machines « intelligentes » dépasser les capacités intellectuelles humaines. Ils avancent la date de 2045, sans toutefois pouvoir anticiper la profondeur de la révolution qui s’ensuivra. Ils espèrent vivement que le « cerveau dans une cuve » (« brain in a vat ») deviendra une réalité, c’est-à-dire que l’immortalité nous sera octroyée par l’informatique. L’histoire ne dit pas l’âge mental des intéressés.
3.3. Implants neuronaux (1952–)
On trouvera en appendice l’article « Biocontrol » qui exploite les propos visionnaires de l’ingénieur Schafer (1956), mais pas ceux de Chaffee et Light (1934), dont ils sont probablement issus [15]. Ces spéculations firent l’objet d’une courte analyse dès 1957 par Vance Packard [16]. Philip K. Dick n’est donc vraisemblablement pas le premier à envisager la possibilité d’un cerveau piloté par ordinateur (Ubik, 1969). Déjà à l’époque, tout est clair, à la fois pour les technophiles et les technophobes. Les premiers se réjouissent de la déshumanisation rampante (la machine est l’avenir de l’homme) ; les seconds appellent à la mobilisation citoyenne [17]. Du reste, il est piquant de remarquer que le «
socket mounted under the scalp » de Schafer anticipe clairement le curieusement célèbre The Matrix (1999).
La tendance historique ne s’est jamais infléchie : Delgado commence ses expériences sur le stimoceiver en 1952. Elles culmineront en 1963 avec sa célèbre démonstration tauromachique. Le premier implant cochléaire date de 1957 (André Djourno et Charles Eyriès), le neurostimulateur (« spinal cord stimulator ») de 1967 et la première électrostimulation du cortex visuel de 1968. En 1999, Yang Dan et son équipe décodent les signaux venant d’électrodes implantées dans le thalamus d’un chat afin de reconstituer ce que voit l’animal. En 2011, Alim-Louis Benabid inaugure le laboratoire Clinatec au CEA-Minatec de Grenoble.
Guattari et Deleuze ont fait remarquer — très tardivement donc, soit après Philip K. Dick qu’ils ne citent malheureusement pas [18] — la ressemblance troublante qui existe entre personnalité « androïde » et personnalité « schizoïde ». A la lumière des quelques indications reprises ci-dessus, il faut conclure que l’avenir du techno-capitalisme sera schizophrénique. L’idée est séduisante mais elle n’est que partiellement applicable au sens où la tendance actuelle fondamentale est autistique : d’une part, les grands capitalistes (0,1 pc de la population du premier monde) naissent et vivent plus que jamais coupé du monde populaire ; d’autre part, ceux qu’Orwell nomme les prolos sont invités eux aussi à exister dans l’isolement, à vivre dans la vicariance technologique et à ne communiquer que par les médias. Parler de schizophrénie est donc un aimable euphémisme [19].
Conclusion : les nouvelles modalités du bio-pouvoir
L’hypothèse foucaldienne du bio-pouvoir (La Volonté de savoir, 1976) a été initialement formulée dans un tout autre contexte, mais on ne peut que s’interroger sur les synergies possibles avec les tendances en recherche neuropsychologique esquissées supra.
Foucault fait remarquer qu’un des privilèges historiques du pouvoir souverain fut la capacité, pour assurer la défense de ses intérêts, de faire mourir ou de laisser vivre ses sujets ; or, depuis l’âge classique, c’est le contrôle régulateur, sous la forme de la gestion, de l’administration, des conditions de vie, qui l’a remplacé [20]. Foucault nomme le premier « thanato-pouvoir » et le second « bio-pouvoir » ; il analyse le passage du premier, qui reste externe à la vie, au second, qui investit la vie « de part en part [21] », à l’aide de deux mécanismes principaux : l’assujettissement des corps (« l’anatomo-politique du corps humain ») et le contrôle des populations (« la bio-politique de la population »). On retrouve les caractéristiques cardinales des dissociétés modernes : le conformisme et l’atomisme.
L’anatomo-politique du corps s’est développée la première, soit dès le XVIIe siècle. Elle consiste à comprendre le corps comme machine et donc à promouvoir « son dressage, la majoration de ses aptitudes, l’extorsion de ses forces, la croissance parallèle de son utilité et de sa docilité, son intégration à des systèmes de contrôle efficaces et économiques, […]. [22] » Pavlov et le behaviourisme sont le produit tardif de cette dérive politique du cartésianisme.
La bio-politique de la population s’est développée vers le milieu du XVIIIe siècle. Elle est centrée sur « le corps-espèce, sur le corps traversé par la mécanique du vivant et servant de support aux processus biologiques : la prolifération, les naissances et la mortalité, le niveau de santé, la durée de vie, la longévité avec toutes les conditions qui peuvent les faire varier ; leur prise en charge s’opère par toute une série d’interventions et de contrôles régulateurs […]. [23] » On reconnaît ici la dérive qui s’est précisée dans les sciences biologiques après la seconde guerre mondiale : la notion même d’organisme est devenue obsolète ; seuls existent des gènes et des populations. La génétique n’est que de l’eugénisme repeint en rose.
Ces deux mécanismes se recoupent en des lieux devenus emblématiques du paradigme foucaldien : « les prisons ressemblent aux usines, aux écoles et aux casernes, aux hôpitaux, qui ressemblent tous à la prison [24]. » L’entrée de la vie dans le champ des techniques politiques s’est opéré par la discipline, la massification et la démographie, éléments indispensables au développement du capitalisme en tant qu’il se prétend l’expression achevée de l’idéal démocratique [25]. La nécessité et les modalités de la guerre en sont paradoxalement redessinées : « Les guerres ne se font plus au nom du souverain qu’il faut défendre ; elles se font au nom de l’existence de tous ; on dresse des populations entières à s’entre-tuer réciproquement au nom de la nécessité pour elles de vivre. Les massacres sont devenus vitaux. […] Si le génocide est bien le rêve des pouvoirs modernes, ce n’est pas par un retour aujourd’hui du vieux droit de tuer ; c’est parce que le pouvoir se situe et s’exerce au niveau de la vie, de l’espèce, de la race et des phénomènes massifs de population [26]. »
D’entrée de jeu la science a été définie comme étant pilotée par la finance. Attendu qu’il n’est pas impossible de concevoir une nouvelle direction, on peut, pour la forme, préserver la neutralité axiologique putative de la science. Mais le faisceau de preuves établissant la réalité nécrotechnologique est accablant. De plus, la plupart, si pas toutes, des facettes de la psychochirurgie qui ont été envisagées ici, ont été développées avec des fonds dont on a pu historiquement tracer la provenance jusqu’à la CIA. Ici aussi, on pourrait imaginer un nouveau pilote mais rien, dans les faits que l’on met à jour, ne permet malheureusement de franchir ce pas [27].
De ce point de vue, les neurosciences annoncent l’obsolescence programmée de la caserne, de l’école, de la prison et de l’usine. Seul l’hôpital demeurera nécessaire. Qui a dit que le néolibéralisme en général et les oligarques en particulier ne se souciaient guère des questions de santé publique ?
Michel Weber
www.chromatika.org
Appendice : « Biocontrol », Times, Oct. 15, 1956
A familiar horror of science fiction is the slave whose thoughts and actions are governed by an electronic gadget grafted into his brain. There might be some truth in this fiction, says Electrical Engineer Curtiss R. Schafer, who designs and develops electronic instruments for the Norden-Ketay Corp. of New York City. Electronics, he believes, could save a lot of work for the indoctrinators and thought-controllers of the future.
At last week’s National Electronics Conference at Chicago, Schafer discussed recent improvements in scientific knowledge and control of the brain. After all, he pointed out, the brain is a digital computer whose functioning can be profoundly affected by electrical influences. The electroencephalograph (brainwave detector) shows electrical signals that ebb and flow in the brain. Perhaps these signals can be simulated, controlling the brain’s sensations and thoughts.
Injected Signals
’The logical extension of electroencephalographic research,’ said Schafer, ’may result in the formation of another hybrid science, biocontrol. The biophysicist has measured and recorded the electrical activity of the central nervous system, and shown that neural [nerve] currents control many of our mental and muscular activities. The electronic-control scientist has taught us that minute electrical signals, properly amplified, may be used for the control of airplanes, guided missiles and machine tools.
’It is quite logical to believe that these two sciences will merge. Biocontrol may be denned as the control of physical movements, mental processes, emotional reactions and apparent sensory perceptions […] by means of bioelectrical signals which are transmitted and injected into the central nervous system of the subject.
’Elementary forms of biocontrol have already been demonstrated […]. Direct current of the required waveform and intensity passed through [a man’s] head […] changes his sense of balance, and he leans to one side […]. Other experimenters have shown that rats and dogs may be made to feel hungry just after eating, or afraid when they had nothing to fear, simply by injecting the appropriate neural currents into the central nervous system of the animal.’
Cheapest Machine
’The ultimate achievement of biocontrol,’ says Engineer Schafer, ’may be the control of man himself […]. Enslavement could be imposed upon the vanquished as a condition of peace, or through the threat of hydrogen bombing. Biocontrol could make this enslavement complete and final, for the controlled subjects would never be permitted to think as individuals. A few months after birth, a surgeon would equip each child with a
socket mounted under the scalp and electrodes reaching selected areas of brain tissue. A year or two later, a miniature radio receiver and antenna would be plugged into the socket. From that time on, the child’s sensory perceptions and muscular activity could be either modified or completely controlled by bioelectric signals radiated from state-controlled transmitters. The regular treatment for schizophrenia uses the same surgical techniques […]. The electrodes cause no discomfort, no damage to brain tissue and no interference with the functioning of the brain except when energized.
’The once-human being, thus controlled, would be the cheapest of machines to create and operate. The cost of building even a simple robot, like the Westinghouse mechanical man, is probably ten times that of bearing and raising a child to the age of 16.’