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Le PCF, les USA et Cuba.

[ Moins que jamais le PCF doit s’appuyer sur des dossiers baclés, sur l’ignorance, sur les stéréotypes véhiculés par les maîtres du monde, des armes, des circuits financiers et de propagande, céder au tropisme médiatique. Et de ce point de vue rien n’est plus intolérable que la manière dont ces dernières années le PCF et le journal l’humanité se sont conduit envers Cuba. Ils ont prétendu faire payer à ce petit peuple leur "aveuglement" sur l’URSS et se faire sur son dos une vertu "démocratique". ]

Réponse à Nicole Borvo

Par Maxime Vivas

Dans un communiqué, Nicole Borvo, sénatrice communiste se réjouit de la libération de « dissidents » cubains, fustige la duplicité de Cuba qui se sert du prétexte du blocus pour refuser « liberté, justice et débat démocratique. » Elle souhaite que tous les prisonniers soient rapidement libérés. Par distraction ou manque de place, elle n’exige pas des USA qu’ils cessent d’essayer d’organiser dans l’île une cinquième colonne stipendiée, néo-libérale et à leurs ordres.

Je lui ai fait un petit mot pour l’éclairer.

Madame Borvo,

(En d’autre temps et dans d’autres circonstances, j’aurai commencé ce billet par « camarade », mais là , vraiment, je ne peux pas).

Votre déclaration sur Cuba n’égratigne guère le belliqueux géant qui veut sa peau, et qui l’aura sans doute, quand l’opinion mondiale, convaincue par des propos semblables aux vôtres, sera prête à accepter l’invasion de l’île.

Le désir du PCF d’affirmer son amour de la démocratie est louable. Qu’il le fasse à chaque occasion en tabassant, en si mauvaise compagnie, un minuscule pays aussi menacé est indigne.

Votre ignorance de la réalité cubaine est insupportable.

Vous affirmez que des « dissidents », des « opposants » sont emprisonnés. Est-ce parce que vous le savez ou parce que vous l’avez lu quelque part ? Soutiendrez-vous qu’il suffit à Cuba d’avoir des divergences avec le gouvernement pour être emprisonné ? Nierez-vous que ceux-dont vous parlez étaient payés par le chargé d’affaire US à La Havane pour leur travail destiné à préparer la chute de Cuba dans l’escarcelle US ?

Vous invoquez (rapidement) le blocus-prétexte, mais avez-vous lu le plan de 450 pages rédigé cette année par l’Administration US et où sont déroulées, dans les moindres détails, les modalités de gestion de l’île néo-libéralisée sous protectorat US ? Si oui, qu’avez-vous dit publiquement ? Si non, de quoi parlez-vous ?

Les USA on inscrit Cuba dans leur liste des « pays ennemis, pays terroriste, pays cible. » Dans ces conditions, comment appelleriez-vous, si vous étiez cubaine, vos compatriotes qui les renseignent moyennant finance et qui s’organisent sous la généreuse égide du chargé d’Affaires US à la Havane ?

Quand le conditionnement mondial des esprits aura atteint le bon niveau pour une intervention de l’US Army, quand Cuba connaîtra le sort de l’Afghanistan et de l’Irak, viendrez-vous déplorer les massacres des civils, les destructions, les abus, les tortures, les exécutions sommaires, la famine, les épidémies et le sort des enfants ?

Vous invoquez les beaux mots de justice, liberté, démocratie. Dans quel pays « libéré » par les USA les avez-vous vus éclore autrement que dans les discours ? Au Koweït ? Non. Où ?

Combien de petits pays pauvres d’Amérique latine pourriez-vous citer dont sont absents l’injustice, l’oppression, la dictature qui découlent de la misère, de l’analphabétisme, de la malnutrition, du pillage des richesses par une oligarchie vassalisée par l’Oncle Sam ?

Quelle action avez-vous entreprise ou comptez-vous entreprendre pour que, non seulement les USA se plient aux votes de l’ONU sur le blocus, mais pour obtenir d’eux et de la communauté internationale la garantie que Cuba ne sera pas attaquée par la plus formidable puissance que la terre ait jamais connue ?

Réussissez ça et j’exigerai avec vous une décrispation de la vie politique cubaine. Et, même si le taux d’incarcération à Cuba est plus bas que celui des USA (je vous l’apprends, il me semble), je dirai alors avec vous qu’il est encore trop haut. Voyez, je n’idéalise pas.

Mais, dans l’hypothèse où vous continuerez à hurler avec les loups, comptez sur moi pour ne plus jamais mettre un bulletin communiste dans l’urne et pour encourager mon entourage à m’imiter.

Bien entendu, cette lettre n’est pas plus privée que votre déclaration qui l’a suscitée.

Maxime Vivas, écrivain, altermondialiste, coauteur (bénévole) du recueil : « 36 nouvelles noires pour l’Humanité » pour le centenaire du journal. 11 décembre 2004.

*** *** ***

A la veille du congrés, adresse aux militants :

Le PCF doir revoir sa politique internationale

Par Danielle Bleitrach

Nous sommes nombreux, encore au Parti Communiste ou l’ayant quittés, mais
demeurant proches de ce seul parti, qui suivons avec attention les prises de position de sa direction nationale et celles du journal l’humanité. Cette attention, parfois exaspérée, a un sens, celui du constat qu’il n’existe pas en France un autre parti, ni un autre quotidien national dans lesquels les communistes puissent se reconnaître. Il est clair de surcroît que nous sommes désormais dans une situation nouvelle dans laquelle un espace nouveau s’offre aux communistes, encore faut-il qu’ils changent, non pour s’adapter à un ordre mondial injuste, mais pour contribuer à une nouvelle élévation des consciences à partir des problèmes, des expériences
d’aujourd’hui.

Une nouvelle donne :

Depuis plus de vingt ans, le capitalisme et l’impérialisme ont imposé partout des politiques néo-libérales destructrices. L’effondrement de l’URSS et du socialisme européen a obscurci l’idée même d’alternative et les forces de gauche, même le PCF, ont été littéralement tétanisées, incapables de défendre une alternative, ce qui a permis cette offensive. Un ordre économique mondial insoutenable et insupportable s’installe à tout allure, non content d’engendrer la misère et le sous développement, de faire pression sur les salaires et les dépenses sociales, il est porteur de guerre et de destruction de l’environnement.

Nous sommes dans une nouvelle période historique, les résistances montent comme on le voit au Moyen orient et en Amérique latine, avec les résistances anti-impérialistes face au pillage des ressources et à la remise en cause des souverainetés nationales. Ce ne sont pas seulement les armes mais d’abord les idées, leur capacité à rendre compte de l’expérience vécue de la novicité de ce monde qui gagneront la bataille. Les communistes ont un rôle immense à jouer dans cet prise de conscience de la nécessité d’un nouvel ordre mondial. C’est le sort de l’humanité qui se joue partout.

En France, si les luttes sociales ne sont pas encore à la hauteur des coups portés, ce n’est pas faute de mécontentement mais parce que la perspective politique manque de clarté. Mais il est loin le temps pourtant proche où certains pouvaient crier "Vive la crise !" et proposer l’enrichissement individuel boursier ou autre, comme issue. Il reste l’idée que l’on ne peut pas faire autrement puisqu’aucune force politique ne présente une réelle alternative, tout au plus un aménagement avec un plus social illusoire. Il reste l’isolement, la division, l’impossibilité de percevoir l’ampleur du front que ce soit au niveau mondial, en Europe ou en France. La crise politique qui perdure repose sur ces deux fondamentaux : absence de perspective politique et isolement, division des victimes de cet impérialisme.

Dans le climat général d’insécurité face aux lendemains, l’impérialisme promeut "le choc des civilisations" et transforme les peuples et les individus agressés par le système qu’il impose au monde en agresseurs dangereux (le terrorisme plus ou moins manipulé par l’impérialisme devient le prétexte à guerres préventives néo-coloniales) ou irréalistes (les syndicats et les travailleurs qui revendiquent sont les ennemis d’une économie saine et prennent en otage les usagers, etc...). Un petit pays qui ne menace personne et est soumis à une impitoyable guerre économique et idéologique, aux attentats terroristes de la part de la première puissance du monde est diabolisé, je veux parler de Cuba. Deux poids deux mesures, suivant que vous serez puissant ou misérable on acceptera la peine de mort sur des bases raciales, frappant des handicapés mentaux, et on se déchaînera quand il s’agit pour Cuba d’empêcher des prises d’otage et des menaces d’invasion... Un puissant système de propagande formé par les patrons de presse et les annonceurs opère un contrôle de l’information en ce sens.

C’est dans un tel contexte, marqué à la fois par une agravation des périls que fait peser le capitalisme sur l’avenir de la planète et sur la montée de la conscience de ces périls, la recherche de solutions, que le PCF aurait un rôle essentiel à jouer pour lutter contre la propagande et favoriser la montée de la conscience de notre peuple, ce qui reste la meilleure arme face à la surpuissance militaire des maîtres du monde. Le PCF, comme le journal l’humanité, qui plus que jamais alors pourrait revendiquer son beau titre.

L’ arme essentielle est l’ idée juste :

La perspective politique n’est donc pas simplement la question des alliances entre tel ou tel parti, mais bien de voir que ces alliances n’ont de sens que si le parti communiste se donne comme objectif l’éveil des consciences. Si l’on ne doit pas négliger les batailles politiques immédiates, les unions nécessaires pour battre la droite, le rôle d’un parti communiste va bien au-delà . En particulier faire prendre conscience à notre peuple de cette nouvelle donne, partir de chaque point de résistance pour montrer l’ampleur du champ. C’est en ce sens que la politique internationale, le développement des solidarités participent de notre combat, les communistes français n’aident pas tel peuple ou tel peuple, la solidarité est une aide pour comprendre le monde et maîtriser nos propres luttes.

Contribuer si peu que ce soit à relayer le système de propagande sur ce qui se passe dans le monde c’est obscurcir un peu plus la perspective politique et contribuer à l’enfermement de chacun dans la division, la peur et un monde invivable. Nous le voyons bien en France où ce qui se passe au Moyen orient, en Afrique, trouve un écho dans notre propre population française, va dans le sens de cette tentative de division communautariste dans laquelle non seulement se perdent les valeurs de la République, mais où l’affrontement de classe peut être dévoyé en hostilités "raciales", en haines sociales selon le modèle étasunien que certains tentent d’importer chez nous.

On ne peut pas à propos des événements de Côte d’ivoire se contenter, soit de reprendre la position du gouvernement français comme l’a fait recemment Daniel Cirera, le responsable du PCF aux questions internationales, soit par un simple balancier se contenter d’analyser la politique de Laurent Gabgo en terme de lutte contre le colonialisme. Le monde est devenu complexe et partout il faut l’analyser dans sa complexité, tout en affirmant en priorité quelques principes : privilégier la solution de paix, d’indépendance nationale, de respect des reglements et institutions internationales si imparfaites soient les dites institutions. Toujours éclairer les politiques impérialistes, tant sur le plan économique que politique. Empêcher le choc des civilisations auquel certins voudraient nous contraindre pour poursuivre leur pillage destructeur. Toujours étroitement lier paix, respect des souverainetés nationales, justice sociale aux questions de démocratie (pour et par le peuple). Développer une vision tolérante des cultures, des religions et non entretenir une mentalité d’assiégé, la diversité et l’unité de cette diversité suppose non le formatage, mais la connaissance respectueuse et patiente de cette diversité pour aller vers une mondialisation anti-imperialiste.

Moins que jamais le PCF doit s’appuyer sur des dossiers baclés, sur l’ignorance, sur les stéréotypes véhiculés par les maîtres du monde, des armes, des circuits financiers et de propagande, céder au tropisme médiatique. Et de ce point de vue rien n’est plus intolérable que la manière dont ces dernières années le PCF et le journal l’humanité se sont conduit envers Cuba. Ils ont prétendu faire payer à ce petit peuple leur "aveuglement" sur l’URSS et se faire sur son dos une vertu "démocratique". La récente intervention de Nicole Borvo, après l’élargissement de Rivero, témoigne à la fois d’une méconnaissance du dossier et d’un manque de courage politique encore plus préjudiciable aux communistes français qu’aux communistes cubains. Cuba continuera à résister, à développer autour de lui, de son combat, d’intenses solidarité, mais le PCF y perd un peu plus de son identité, de son rôle nécessaire d’éveil des consciences sur la nature de l’impérialisme.

Personne n’attend grand chose de cette direction qui manque de courage et est trés faible dans ses analyses, dans sa capacité à comprendre les enjeux, mais c’est celle que les communistes se sont donnée, il appartient au moins à ces derniers de renforcer leur vigilance, sur ce qui est dit en leur nom. Le temps de l’infaillibilité des directions, nous dit-on, est dépassé, avec le centralisme démocratique, en fait il existe toujours sur le modèle bourgeois de la censure et de la méconnaissance, sans parler de l’exode massif des militants en désaccord...

Donc quand il y a vision erronée, desinformation, les communistes doivent contribuer à corriger les prises de positions, parfois à l’emporte-pièce, de la direction.

Le journal l’humanité doit alors se faire l’écho de ce débat et non pratiquer la censure à l’instar du reste de la presse. Il faut rompre avec la manière de contrôle de "l’appareil" qui passe par la fuite massive des militants en désaccord et la désinformation
systématique. Car là encore la nouveauté de la période doit être assumée dans ses aspects positifs, l’existence désormais de sections entières, voire de fédération, qui ne se résignent pas à une telle situation et créent le débat, sans parler d’un grand nombre de communistes qui attendent la véritable transformation démocratique de ce parti. Les
communistes, c’est-à -dire les anciens qui sont partis, mais tous ceux qui ne se reconnaissent pas encore comme tels, mais ont conscience des enjeux et des périls de notre temps et ont besoin de débats et d’actions collectives dans une force politique.

C’est à cette aune de la critique acceptée que l’on mesurera "la démocratie" du PCF, plus qu’à des proclamations sentencieuses sur le dos d’un petit pays qui accomplit une geste héroïque comparable à celle du Viet-nam hier....

Danielle Bleitrach

URL de cet article 1946
  

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