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Auteur : Rosa LLORENS

Joséphine, combien de divisions ? ou la mystification des biopics

Rosa LLORENS
A lire les critiques sur le Napoléon de Ridley Scott, il semble qu’on n’ait d’autre choix que d’aimer ce blockbuster ou d’apparaître comme un franchouillard admirateur de Napoléon. Les commentateurs français regrettent alors que le film ne mette pas assez en valeur le génie militaire de l’Empereur, et les aspects positifs de sa politique intérieure – ici intervient la tarte à la crème du Code Civil. On saisit bien là le rôle des médias : quand ils ne portent pas aux nues ou ne dénigrent pas carrément un film, ils posent en tout cas pour nous les limites de la réflexion. Bien sûr, il y a une autre position possible : dénigrer le film et haïr Bonaparte. Quel est l’atout de cet énième film sur Napoléon ? Le rôle attribué à Joséphine, qui serait l’explication de toute la vie publique et des entreprises guerrières de Bonaparte. D’abord, ce n’est pas une idée très originale : il suffit de consulter Wikipédia pour trouver une quinzaine de films centrés sur Joséphine, parmi eux Joséphine, l’atout irrésistible de (...) Lire la suite »

Astérix et la propagande sioniste

Rosa LLORENS
Un nouvel album d’Astérix, L’Iris blanc, vient de sortir, sans doute dans la même veine que les précédents, qui ont connu la même évolution que les studios Disney : de plus en plus de néo-féminisme (des héroïnes plus bagarreuses, plus hardies, plus fortes en tout que les mâles), et de problématiques contemporaines (véganisme) qui entrent en contradiction avec les personnages d’Astérix, au point que ceux-ci ne sont plus que des porte-manteaux à affubler des derniers oripeaux à la mode dans les salons bobos ou woke. Ce qui ne veut pas dire que les Astérix à l’ancienne étaient sans reproches. Dans L’Odyssée d’Astérix, Uderzo prend parti pour Israël, d’une façon outrée et avec une mauvaise foi que l’actualité rend encore plus insupportable. L’album, paru en 1981, était un hommage à Goscinny, mort en 1977, et est dédié « à René " , qui apparaît sous le nom de Saül Péhyé, commis du marchand Samson : Uderzo met ainsi en avant la judéité de Goscinny, d'origine juive polono-ukrainienne. Les irréductibles Gaulois s’y (...) Lire la suite »
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De quoi Barbenheimer est-il le nom ?

Rosa LLORENS

Nous venons de vivre un phénomène médiatique (et non cinématographique) énorme : tous les écrans saturés par deux films en apparence très différents, mais tous deux étasuniens, Barbie et Oppenheimer ; cela veut forcément dire quelque chose. Pourtant, on cherche encore les articles stimulants sur ce sujet. Pourquoi ? Et quel symbole peut-on lire sous ce blitzkrieg médiatique ?

Pour Barbie, la réponse à la première question paraît claire : on est simplement stupéfié, médusé ; par quel bout prendre un film aussi imbécile et une telle arnaque (deux heures de placement de produit) ? « Les cons, ça ose tout, c’est à ça qu’on les reconnaît » : hélas, on n’en est plus là. Il faut être futé, au contraire, pour comprendre qu’à partir d’un certain degré, la connerie réduit l’adversaire au silence : comment argumenter contre Barbie, si on ne veut pas répéter des évidences qui risqueraient d’apparaître comme de fastidieux poncifs ? Bien sûr, Oppenheimer est un autre cas de figure : là, on a affaire à un film sérieux (3 heures !), d’un réalisateur dont on vante l’intelligence, Christopher Nolan. Mais, là non plus, on ne trouve guère d’angle d’attaque pertinent, et les critiques se limitent le plus souvent à des aspects secondaires. Curieusement, même les critiques le plus à gauche prennent le film au sérieux au premier degré, celui des discussions entre scientifiques menés par un Cillian Murphy zombifié (on (...) Lire la suite »

Anatomie d’une chute (mais qui est en train de tomber ?)

Rosa LLORENS

Les films présentés, et surtout primés, à Cannes, font souvent d’emblée l’objet d’éloges dithyrambiques : on crée le buzz pour influencer la réception du film ; puis, une fois sortis en salles, une fois que tout le monde peut juger sur pièces, ils suscitent des critiques nettement plus mesurées. Anatomie d’une chute pourrait connaître la même gradation.

Les films présentés, et surtout primés, à Cannes, font souvent d’emblée l’objet d’éloges dithyrambiques : on crée le buzz pour influencer la réception du film ; puis, une fois sortis en salles, une fois que tout le monde peut juger sur pièces, ils suscitent des critiques nettement plus mesurées. Anatomie d’une chute pourrait connaître la même gradation. Question buzz, Justine Triet a fait fort, en raccrochant son film à une diatribe anti-gouvernementale, à propos de la réforme des retraites, et des menaces pesant sur « l’exception culturelle française » : les réactions ont été, comme on pouvait s’y attendre, pavloviennes, la droite dénigrant Triet, la gauche encensant, d’un seul mouvement, son courage politique et son talent. Mais son discours de remise de Palme d’or est-il crédible ? D’abord, il est curieux de voir mettre sur le même plan les subventions accordées aux cinéastes français, et la question vitale des retraites (« Cinéastes, prolétaires, même combat » ?). Puis, quand Ken Loach fait un discours (...) Lire la suite »

Vers un avenir radieux : la contribution de Nanni Moretti à l’effort de guerre de l’OTAN

Rosa LLORENS
Pathétique et écœurant : Vers un avenir radieux est un film de propagande aussi déplorable sur le plan artistique que politique et même intellectuel. On sentait, dans les critiques positives des médias mainstream des réserves ( « ce n’est sans doute pas le meilleur film de Nanni Moretti »), mais on n’était pas préparé à une telle nullité et un parti pris aussi cynique. Le héros, Giovanni (« Nanni » est un diminutif de ce prénom), tourne un film et sa femme Chiara en produit un autre. On passe donc sans cesse de la « réalité » présente au passé (1956) de la fiction interne, avec bien sûr des interférences entre les deux (par exemple les deux couples) : ce procédé de cinéma dans le cinéma est on ne peut plus usé et fastidieux. Moretti essaie de mettre en place çà et là des gags, qui tombent à plat, il multiplie les références à ses films précédents, comme la scène de la piscine (sans grand rapport avec l’action) qui rappelle Palombella rossa, de 1989, un de ses meilleurs films (mais qu’il faudrait revoir à froid, (...) Lire la suite »
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Jeanne du Barry : amours et falbalas

Rosa LLORENS

Curieux objet, que Jeanne du Barry – en tant qu’objet critique encore plus qu’objet cinématographique.

Alors que le Festival de Cannes sélectionne de plus en plus de films de femmes, comme le réclame la galaxie féministe, on s’attendrait à ce que le film projeté en ouverture ne suscite que des réactions enthousiastes. Or, au rebours, il essuie des tirs groupés justement du côté féministe. On serait tenté de s’en réjouir, cela montrerait qu’il ne suffit plus d’être une réalisatrice femme pour être considérée comme un génie et palmée. Las ! Cela montre plutôt le rétrécissement de la vie culturelle cannoise, puisque la polémique sur le film est purement féministe. En effet, les arguments des critiques sont bien souvent extra-cinématographiques et, sous prétexte de féminisme, se réduisent en fait à du commérage people sur les deux protagonistes du film. Maïwenn a giflé quelqu’un qui disait du mal de quelqu’un qui a été accusé de violences sexuelles dans le cadre de l’opération Balancetonporc : la voilà donc ostracisée par les féministes. Johnny Depp, lui, a été accusé par son ex-femme de violences sexuelles : après des (...) Lire la suite »

L’Etabli : un intellectuel chez les ouvriers

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L’Etabli raconte l’expérience de Robert, professeur d’Université et militant maoïste, qui se fait embaucher, en 1969, chez Citroën pour organiser des actions de lutte ; le film adapte le livre du même titre de Robert Linhart, qui date de 1978. C’est un film réussi, dans un genre malaisé : les ouvriers au cinéma sont souvent peu vraisemblables, et la rencontre entre ouvriers (ou paysans) et intellectuel est souvent décrite avec arrogance à l’égard des premiers (Le Christ s’est arrêté à Eboli, pourtant d’un grand cinéaste, Francesco Rosi, en fait foi). L’Etabli échappe à ces deux dangers et produit un récit de grève convaincant et émouvant. L’actualité du film est évidente dans le contexte de lutte actuel ; mais que peut-on penser aujourd’hui du mouvement des « établis » ? L’usine Citroën, cadre de l’action, a été reconstituée à Clermont-Ferrand, dans des locaux désaffectés de Michelin. Robert découvre les difficultés du travail sur une chaîne de montage, et a d’abord du mal à s’y habituer (maladroit, il commence par (...) Lire la suite »

About Kim Sohee : comment dit-on karoshi en coréen ?

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July Jung a à son actif deux films qui se ressemblent beaucoup : dans A girl at my door (2014) comme dans About Kim Sohee, une policière (jouée par la même actrice, Bae Doona) prend sous sa protection une jeune fille persécutée. C’est donc un cinéma très féminin, mais qui ne fait pas de propagande féministe : le sujet de About Kim, c’est les conditions de travail dans notre « société de services ». La mort de l’héroïne, Sohee, n’est pas un féminicide, mais un « sociocide », c’est-à-dire un meurtre social, causé par le système socio-économique, et le film fait un parallèle très net entre le sort de Sohee en centre d’appel et celui de son ami qui empile des colis pour un équivalent d’Amazon, et qui, lui aussi, semble sur le point de craquer. L’itinéraire qui conduit Sohee au suicide par karoshi est décrit avec une netteté exemplaire : elle est ravie d’avoir décroché un stage et commence son nouveau travail pleine de bonne volonté. Mais on est tout de suite saisi par le caractère inhumain du lieu de travail : on parle (...) Lire la suite »

Nos soleils (Alcarràs) : une famille paysanne face à la mondialisation

Rosa LLORENS
En général, je ne vais pas voir les films de femmes, œuvres le plus souvent mièvres et médiocres, dont on fait la promotion en guise d’arme de guerre soft contre les pays qui sont censés ne pas donner la même place que nous aux femmes, et qui se trouvent être ceux qui résistent à l’impérialisme étasunien et ses horreurs. Ras le bol des films vus par des yeux de petites filles, avec leurs femmes qui veulent s’émanciper, leur " sororitude ", leurs récriminations contre les hommes qui ne font pas la vaisselle, et j’en passe. Mais j’aurais eu bien tort de ne pas aller voir Alcarràs (le titre français, Nos soleils, ne rend absolument pas justice au contenu du film). En effet, Carla Simón réunit le meilleur des qualités féminines et des qualités viriles (je sais que j’aurais dû mettre plein de guillemets, mais j’en ai assez de la camisole de force du politiquement correct) : Alcarràs est une chronique pleine de tendresse, mais enracinée dans un contexte socio-économique qui lui donne une valeur universelle. Le (...) Lire la suite »
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Le piège de Huda : la guerre des sexes à Bethléem

Rosa LLORENS
Hany abu Assad a été un cinéaste prometteur : Paradise now (2005) était un débat haletant sur le terrorisme, seule issue laissée aux Palestiniens après la dissolution de l’armée palestinienne. Omar (2013) montrait les efforts d’un jeune Palestinien pour sortir du piège où l’avaient enserré les services secrets israéliens. Dans Huda, c’est une femme qui est prise au piège, mais ici, les cartes sont redistribuées, et l’ennemi n’est plus Israel, mais ces « connards » d’hommes, israéliens et palestiniens, « unis dans leur misogynie » (The New York Times, cité par Courrier international). L’accueil fait au film par les critiques occidentaux est unanimement positif, et même enthousiaste - de quoi susciter, a priori, la méfiance. Et, en effet, le point de vue choisi pour présenter le film est étonnamment uniforme et le Courrier International en offre une bonne synthèse : « des habitantes de Bethléem victimes autant de l’occupation israélienne que du patriarcat [sous-entendu : palestinien] » ; et on félicite le (...) Lire la suite »
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