Le gouvernement français (avec l’appui logistique britannique - dont les avions les préservent de tomber en panne) a lancé une aventure militaire dans l’ancienne colonie française du Mali. Comme pour toutes les interventions occidentales de la dernière décennie, cela déstabilisera la région et conduira à un accroissement du conflit plutôt que sa diminution. Elle doit être combattue dans les termes les plus forts !
Le Mali a fait l’objet "d’une aide occidentale’ depuis les 20 dernières années et a implosé en grande partie à la suite de celle-ci. L’intervention française vient en soutien à un gouvernement militaire gangrené par la corruption et tout aussi brutal dans ses tortures et assassinats que ceux qui sont bombardés. Les rebelles bombardés ont reçu leur entraînement au combat et des armes en Libye par les mêmes forces occidentales qui cherchent maintenant à les écraser.
Le gouvernement britannique se comporte honteusement en offrant un soutien dans cette aventure périlleuse. Il n’y a eu aucun débat public ou vote parlementaire sur la participation britannique. Au lieu de cela, l’armée britannique est entraînée dans un conflit ethnique qui remonte à la pagaille épouvantable faite en Libye en 2011.
« Pendant toute une décennie, les Américains et d’autres dirigeants occidentaux ont claironné l’importance du Mali comme étant un phare de la démocratie en Afrique et un rempart dans la sécurité régionale. Pourtant, sa croissance économique s’est réduite à presque rien, et son gouvernement civil s’est effondré - à la complète surprise de l’Occident. »
Heather Hurlburt
Le lien vers la Libye
Le soulèvement dans le nord du Mali est la suite en cascade de la guerre contre la Libye en 2011. Même s’il existait des griefs de longue date conduisant à la résistance au gouvernement malien des Touaregs, des populations arabisées et des Maurs, dans le nord du Mali depuis [NdT : au moins] les années 1980, deux aspects de la guerre contre la Libye ont fait pencher la balance délicate au Mali. Le premier est que l’aventure libyenne a détruit le commerce dans la région ce qui a affaibli l’économie du Mali. Le deuxième est que des combattants expérimentés en provenance de Libye et d’Algérie ont déménagé vers le nord du Mali avec des armes lourdes et l’expérience du combat. Certains étaient des unités de l’armée de Kadhafi qui ont fui la torture et la mort (Les soldats noirs étant pendus par les milices "libres" libyennes) tandis que d’autres étaient des combattants liés à al-Qaïda qui avaient fait partie de la rébellion avec l’appui occidental en Libye.
En 2012, ces groupes se sont réunis et ont décidé de lancer un soulèvement commun contre le gouvernement qui a été largement couronné de succès. L’armée malienne, dans un sentiment de colère et d’humiliation, a pris le pouvoir dans le pays après ce revers, mais a été incapable d’arrêter l’offensive des rebelles. Les États-Unis, qui ont été eux-mêmes impliqués au Mali depuis les années 1990, ont été contraints de mettre fin à leur programme de formation de l’armée malienne de sorte qu’il a été laissé à l’ancienne puissance coloniale la charge d’aider le gouvernement malien. La France s’est saisie de la zone que l’on nommait le Soudan français au 19ème siècle et, à chaud, dans la foulée de l’intervention libyenne, cherche à renforcer ses propres intérêts dans la région. Il y a une composante interethnique à la lutte au Mali qui remonte aux divisions et tactiques de la domination [coloniale] françaises et a conduit à des explosions de violence en 1996, 2006 et 2008.
Développement arrêté
En 1991, le Mali a obtenu son premier gouvernement civil, après trois décennies de régimes militaires. Il a été considéré comme l’un des succès de la démocratie en Afrique. Le gouvernement américain a prodigué un statut spécial au pays, offrant de former des soldats de la paix et de l’admettre à la Millenium Challenge Compact qui lie l’aide aux performances. Tout n’allait pas au mieux, cependant. Un commentateur admet que "le gouvernement civil du Mali était aux prises avec la corruption, la désertification, l’appauvrissement et l’incapacité à attirer des investissements."
La croissance économique de 5,6% en 2005 s’est effondré à 1,1% en 2011, après le commencé de la guerre en Libye et une grave sécheresse s’est développée. La privatisation systématique des terres, à la demande du Fonds Monétaire International n’a pas réussi à relancer l’économie et le Programme des Nations Unies pour le Développement a classé le Mali comme étant inférieur à l’Afghanistan, au Pakistan et au Yémen dans son indice de développement humain. Il s’agit d’une société qui souffre aux mains des programmes d’ajustement structurel et de l’ingérence américaine.
L’or noir
Le pétrole entraine toujours le monde occidental. Les réserves de pétrole et de gaz en Libye ont été un facteur clé dans la décision d’attaquer de la France en tête tandis que la Chine et l’Italie (qui avaient tous deux des contrats avec le gouvernement Kadhafi) ont été de plus en plus mis à l’écart dans leurs préoccupations.
Il existerait de grandes réserves situées dans cinq bassins sédimentaires du Mali et des pays voisins, y compris l’Algérie. Le plus grand est le bassin de Taoudeni, qui selon Esso "se serait brûlé spontanément" en 1983. Plus récemment, la prospection de pétrole a découvert deux couches dans le bassin, dont l’une est décrite comme étant ’similaire à celles d’Oman’. La Corporate Council on Africa Conférence en 2006 a conclu que le Mali a un fort potentiel pour la production de pétrole dans un avenir proche et le gouvernement américain reflète ce point de vue lorsqu’il a inscrit le pays dans l’Operation Flintock en 2005, qui fait partie de sa "lutte contre le terrorisme".
Il faut aussi noter que le Mali possèderait les troisièmes plus grands gisements d’uranium dans le monde, principalement dans le Nord, où la rébellion Touareg est à son plus fort. Cela a alimenté les craintes occidentales d’une capacité des rebelles de construire une arme nucléaire utilisant de l’uranium (Elle a été surnommé la "bombe islamique").
Le puzzle impérial
Le gouvernement chinois a investi massivement dans des projets d’infrastructure dans une grande partie de l’Afrique alors que les Etats-Unis ont été aux prises avec les coûts de sa permanente "guerre contre le terrorisme" et la crise économique. Cet investissement a soulevé des craintes chez les Etats-Unis et ses alliés occidentaux au sujet de l’influence croissante que la Chine a sur le continent africain. Les projets sont aussi en grande partie en dehors de la sphère du FMI et de la Banque mondiale, menaçant la domination que ces institutions ont dans l’ingénierie sur des lignes du libre marché de la société qui augmente la pauvreté.
Alors que les Etats-Unis et ses alliés occidentaux ont considérablement réduit leur puissance économique par rapport aux Chinois, ils maintiennent une importante puissance militaire et les Français ont décidé de l’utiliser pour soutenir le gouvernement militaire et l’influence occidentale.
Il y a aussi un effort pour engager la résistance islamiste algérienne qui contrôle une grande partie du sud de l’Algérie. Avec la Libye dans les mains de l’Occident, la victoire au Mali commencerait à encercler l’Algérie.
Les problèmes rencontrés par l’intervention française sont de deux ordres. Les Français se méfient de l’engagement de troupes au sol, car les chiffres nécessaires étendraient trop loin les ressources françaises et ainsi ils veulent que les troupes africaines de maintien de la paix arrivent au Mali. Le deuxième problème est que les soldats de la paix africains ne sont pas prêts et il y a peu d’enthousiasme à s’en prendre à la résistance malienne. Les rebelles au Mali se sont endurcis à la bataille des deux côtés de la guerre en Libye et ont des armes lourdes à leur disposition laissant supposer que les soldats de la paix africains ne feraient probablement pas mieux que les troupes gouvernementales du Mali dans les derniers mois.
"Les missions glissantes", où l’intervention militaire se poursuit sans fin parce que le nombre de problèmes rencontrés se multiplie tout simplement, est un réel danger pour les gouvernements français et britannique qui s’impliquent dans cette aventure. C’est aussi un exemple d’attaque d’un autre pays musulman. (environ 90% de la population)
The Respect Party (*)
Le 16 Janvier 2013.
Note :
(*) The Respect Party est un parti politique écossais dont George Galloway est membre & représentant élu - militant diversement apprécié pour ses prises de positions radicales en matière de politique étrangère en particulier.
Source : Stop this war on Mali
