Il y a 114 ans, une lettre ouverte au ministre de l’intérieur.
"A toi, Constans !
Fourbe, hypocrite, lâche et menteur, tu as, maître Constans, toutes les
qualités requises pour commettre le formidable assassinat que tu
médites.
Tu veux, as-tu dit, museler la Révolution.
Tu as dit ta volonté.
Tu ne veux pas de manifestation.
Et pourtant, tu l’auras, mon maître ! Tu es perché bien haut, sur
l’empyrée de ton pouvoir suprême.
N’oublie pas qu’il y a des aigles qui planent très haut et que la
balle d’un vulgaire chasseur descend en quelques secondes.
Or, tu n’es même pas un aigle : vautour, tout au plus, rapace de second
ordre.
Que diable espères-tu donc ?
Penses-tu que ta bedaine, toute ceinturonnée qu’elle soit, ait la
dureté du fer ?
Crois-tu que ta caboche, pour matoise qu’elle puisse être, soit à
jamais fixée sur tes épaules de mastodonte ?
Allons donc : tu veux rire, bravo.
Je viens de t’appeler "bravo". Je demande pardon aux "bravi" de
l’insulte que je leur fais. Car ils étaient braves. Et toi, plus
assassin que les bravi, tu sues en même temps la plus puante des
lâchetés.
Ne vas pas croire, tartufe, que nous te faisons l’honneur de te haïr.
Figure-toi simplement que tu es enseveli sous un Himalaya de mépris.
J’emploie le mot mépris, à défaut d’autre plus sale.
Car avec toi, il faut constamment remuer des saletés, c’est cela seul
que tu comprends.
Tu veux donc nous assassiner ?
Eh bien, je vais te donner l’occasion de prouver que j’ai menti en
t’appelant lâche.
Si le culte de ta vieille carcasse de peau ne t’absorbe pas tout
entier, si l’immonde peur qui blêmit ta face te laisse une minute de
répit, trouve-toi, le 1er mai, à 2 heures, place de la Concorde.
Michel Zévaco "
(L’Egalité, mardi 1er avril 1890)
Zévaco, par ailleurs un merveilleux auteur de cape et d’épée ("le
Capitan", "les Pardaillan", "Triboulet", etc.), a été, pour cet article
de journal, condamné à 4 mois de prison ferme qu’il effectua à Pélago
(officiellement : maison d’arrêt de Sainte-Pélagie, sise à Paris).
Je dis que, 114 ans plus tard, c’est un HONNEUR d’être, comme il l’a
été, jeté sur la paille humide pour avoir insulté l’actuel ministre de
l’Intérieur : un S.D.F. à Paris le 3 février (Cf La Lettre versatile n°
67), un jeune à Strasbourg avant-hier.
Au fait, j’ai copié-collé l’intégralité de ladite 67e Lettre versatile
sur le site web dudit ministère, après avoir cliqué sur l’icône
"Contactez-nous". Je n’ai, à cette heure, toujours pas de réponse.
Comme dirait Francis Mizio : ce sont des poseurs !
Je demande à être mis en examen pour "outrage à personne dépositaire de
l’autorité publique" et à être condamné à 10 ans d’inégibilité pour
cela !
Persiste et signe, et bien le bisou chez vous
Jimmy Gladiator