Aux présidentielles, le Front a « cartonné », grâce notamment à l’énergie des communistes, à l’amorce d’une dynamique populaire, à sa diversité, et au charisme du candidat, J.L. Mélenchon.
Passées les élections, le Front a été globalement remisé au magasin des « machins » politiques, comme s’il avait peur de son ombre, comme s’il représentait un danger pour les partis de la gauche de rupture.
A ceux qui proposaient de ne pas laisser « retomber le soufflet », d’accueillir les forces nouvelles, jeunes, mises en mouvement, de créer « en bas », partout, des assemblées ou comités de front (à débattre : de gauche, du peuple, de Front populaire ?), informels mais ouverts, vivants, pluriels, dynamiques, horizontaux, sans concurrencer la nécessaire existence de partis, à ceux-là il était fait la sourde oreille. Etait-il si difficile pourtant de mener à la fois une stratégie disons « double », une activité simultanée de parti et de front ? L’une nourrit l’autre, a besoin de l’autre.
A ceux qui pensaient que cette « gauche par le bas » n’était en rien contradictoire avec le besoin d’appareils (dépoussiérés), de structures d’organisation, de directions, le plus collectives possibles, on proposait de s’investir dans des « coopératives » (OPNI : objets politiques non identifiés), des ateliers thématiques regroupant une poignée de spécialistes, mais une poignée seulement, en haut...Bref, des pis aller, freinant la dynamique tout en prétendant l’accélérer (embardées), pour ne pas ouvrir toutes grandes les portes et les fenêtres, au cas où l’on « perdrait la main », où le peuple bousculerait le scénario...Les expériences latino-américaines me paraissent riches d’enseignements à ce sujet. Qui plus est : elles nomment et politisent l’alternative, l’utopie concrète : socialisme, éco-socialisme, socialisme du 21ième siècle, Révolution citoyenne ...Elles décriminalisent la sémantique.
Cette stratégie « par le bas », mariant le mouvement social et « le politique », me semble la mieux adaptée pour gérer les problèmes de l’unité, du rassemblement, notre relation de communistes à la gauche « de gauche » (pléonasme), aux organisations sociales, au tissu associatif, aux syndicats, à tout l’éventail de ceux qui cherchent une alternative anticapitaliste, éco-socialiste, d’émancipation humaine, de partage, de justice sociale, de pouvoir populaire... A trop s’enfermer dans une stratégie « de sommet », on finit par rester « socialo-dépendant », y compris sans le vouloir, à être assimilé au « vieux monde », au « système », voire à « la caste ».
Regagner en crédibilité, en lisibilité, suppose de larguer les amarres, de renouveler les pratiques, les stratégies, le langage, de s’ouvrir à de nouvelles problématiques sociétales, environnementales, de ne plus pratiquer le grand écart, le pilotage à vue... Putain, de l’utopie, du rêve, de l’enthousiasme, de la mémoire, de la solidarité...Donner envie. Parler de révolution...Du souffle ! Pas des petits calculs de boutique, le nez collé sur les « échéances électorales », petit bras... Le risque est grand pour le PCF, plus indispensable que jamais, de stagner à un étiage bas, voire de disparaître. Sommes nous sur la remontée ou à la fin d’une propulsion historique ? Pas de question tabou. Pas de vieux réflexes de mise à l’écart des sensibilités qui interpellent. Reconstruire le temps des camarades...Et que l’on se rassure, j’en serai jusqu’au bout du chemin.
Et comme il faut une fin :
la nécessaire unité, tant recherchée, sur des contenus de classe, me paraît devoir reposer sur un « bloc social », à la base, le plus large possible, et même structuré. Oui, structuré, de manière souple, avant, pendant et après les élections. Un bloc social, pas un cartel d’appareils.
Jean Ortiz.
Universitaire communiste