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Complotisme et Anti-Complotisme

En voir partout ou en voir nulle part, tels sont les deux écueils symétriques. Il est vrai qu’entre la vision du monde des dominants qui nie le rapport de domination de classes, et celle de ceux qui sacralisent les médias, le complotisme trouve sa place aisément. Il prend un essor d’autant plus important que les classes dirigées manifestent un scepticisme de plus en plus prononcé par rapport aux événements antérieurs : « le charnier » de Timisoara, les couveuses koweïtiennes, les « armes de destruction massive » de Saddam Hussein, la « mission accomplie » de Bush en Irak.

Du conspirationnisme on trouve beaucoup de descriptions ironiques (notamment avec ses plus notoires délires), mais pas d’analyse politique ! Dans le diplo, Frédéric Lordon en propose une intéressante qui ne cherche pas à discréditer les auteurs mais plutôt à comprendre le phénomène. Car au lieu de voir en lui un délire de la plèbe arriérée, on pourrait y voir l’effet, assez prévisible, d’une population qui ne désarme pas de comprendre ce qu’il lui arrive, mais s’en voit systématiquement refuser les moyens. Le conspirationnisme n’est donc pas la psychopathologie de quelques égarés, il est le symptôme nécessaire de la dépossession politique constatée et de la confiscation du débat public. Aussi, poursuit Lordon, est-il de la dernière ineptie de reprocher au peuple ses errements de pensée, quand on a si méthodiquement organisé la privation de toute toute représentation médiatique et démocratique.

Pour développer une pensée non complotiste des complots, il est indispensable de reconnaître qu’il y a parfois des menées concertées et dissimulées (appelé complots), et de refuser de faire du complot le schéma explicatif unique de tous les faits sociaux.

Pour pallier à cette tendance du complot, l’analyse marxiste est un bon remède. En effet le déterminisme qui poussent à maximiser les taux de profits, à étouffer la concurrence, ou à travailler l’opinion publique est une tendance lourde qui trouve sa place dans la grand histoire du capitalisme. Ces analyses permettent ne plus voir dans chacune des informations, une superposition d’événements ayant peu de lien les uns avec les autres, mais au contraire la volonté d’une classe sociale qui ne cherche qu’à conserver son pouvoir exorbitant. Le discernement n’est cependant pas rendu facile car au sein de cette classe dirigeante, il existe des forces antagonistes qui se tiraillent entre elles et qui masquent la seule lutte qui compte : la lutte des classes. Avec les analyses marxistes, on se retrouve donc loin des complotistes qui voient dans tous les événements contemporains la main de mini groupe clandestin comme étant l’unique chef d’orchestre souterrain qui tire toutes les ficelles.

A ceux qui affectent tout azimut l’étiquette infamante de « conspirationnistes », on peut leur rétorquer que le complotisme a son symétrique : L’anti complotisme. Et ceci n’est pas innocent, il a pour fonction de diaboliser du champ médiatique tous ceux qui émettent des doutes sur la version officielle Cette mise à l’index ne fait que conforter la dépossession et donc alimenter le complotisme. La puissance de l’anti-complotisme est plus néfaste qu’on pourrait le croire. Il a pour but de créer le consensus toutes classes confondues qui mène à l’apathie populaire ou à l’acceptation du fatalisme. Le meilleur exemple a été bien évidement les attentats de Charlie hebdo, où l’on a mis sous le boisseau des problèmes importants inhérents à ce drame.

Vila

 http://les-tribulations-de-l-ecocolo-ecoconome.over-blog.com/2015/09/complotisme-et-anti-complotisme.html
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COMMENTAIRES  

30/09/2015 14:01 par Le fou d'ubu

Avec ou sans lutte des classes, article qui ne nous explique pas grand chose sur la " chose à étudier ". Nous revoilà donc inclus de mauvais gré dans un manichéisme démobilisateur. Soit l’on est pour ce qui est contre ou contre ce qui est pour. Cette pensée binaire est dévastatrice pour l’esprit mais continue d’être utilisée à toute les sauces, comme si l’esprit critique ne pouvait faire de distinction au delà de deux propositions. Sachant qu’entre noir et blanc existe plusieurs nuances de gris. De gris. Non de "petits gris" ... Exaspérant comme de coutumes ...
A quand de vrais débats événement par événement. Est-ce trop demander à l’intelligence humaine ...

30/09/2015 19:02 par macno

Tiens, v’là un marronnier, mais ni suisse ni rose !
https://fr.wikipedia.org/wiki/Marronnier_%28journalisme%29
C’est pour mettre du carburant dans la machine à débat ?
Pourtant il n’y a pas de creux dans l’actualité...

02/10/2015 19:56 par M.T.

Pour ma part, et contrairement aux deux intervenants avant-moi, je trouve l’article pertinent et utile.
Le fait est qu’on en vient à ne plus oser se poser certaines questions qui pourtant inconsciemment nous tiraillent, par peur de passer pour marginaux.
"Complotisme" est la réponse trop facile utilisée afin d’enfermer dans le même panier les personnes psychiatriquement en décalage profond avec la réalité et les dissidents de la pensée académique. Une façon de taire le débat.
Dans le même genre il y a aussi le terme "anti-américanisme" qui fut (moins actuellement en France me semble-t-il) la formule magique afin de discréditer toute personne choquée par la politique coloniale, meurtrière, mensongère, impérialiste des oligarchies étatsunienes.
Pour en revenir au "complotisme" : le sujet par excellence qui fait passer pour grande malade toute personne qui l’aborde de façon analytique est celui du 11 septembre 2001. Les médias ont été encore une fois très forts sur ce coup, il y a multitudes de questions sans réponses officielles honnêtes et pourtant les esprits incrédules et demandeurs de vérité passent pour des fous.
A noter aussi que nos élites dirigeantes, qui utilisent l’arme "complotisme" pour faire taire les questionnements gênants parmi la population, savent pourtant nous présenter des complots (vrais ou faux) lorsqu’elles nous parlent des nos ennemis officiels (Iran, Russie, Cuba, Venezuela, etc etc etc...)

02/10/2015 23:50 par macno

@ MT, je crois que vous n’avez pas bien lu l’article ni mon commentaire.
À partir du moment où on utilise les termes de « complotisme » ou de « conspirationnisme » et où on veut faire une quelconque analyse d’ensemble on ne peut que se situer dans un amalgame automatiquement dérisoire puisqu’on tombe alors dans le piège des généralités, et ce même avec les meilleures intentions du Monde, et c’est un peu le cas de cet article.
Je ne sais pas ce que signifie ces deux termes, je les refuse tout net, point.
Je n’ai donc pas porté de jugement sur le fond de cet article car c’est repartir sur de sempiternels débats qui ne peuvent pas aboutir...
L’article qui va suivre met à mal si l’on peut dire, les "complotistes" du Nouvel Ordre Mondial (!), mais ce n’est pas mieux, car c’est pour développer avec moult références (souvent hélas en anglais) ce qu’est l’État Profond Américain : « Oubliez le Nouvel Ordre Mondial. Voici qui dirige vraiment le monde » :
http://lesakerfrancophone.net/oubliez-le-nouvel-ordre-mondial-voici-qui-dirige-vraiment-le-monde/
C’est du très lourd qui démarre avec l’avertissement au Monde de Eisenhower. C’est donc du "complotisme" très sérieux...

05/10/2015 22:16 par Aris-Caen

On dirait du Marie-Anne Boutoleau/Ornella Guyet 1er période ?

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