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Les bocheviks, les droits des femmes et l’instruction

COMPRENDRE OCTOBRE, 100 ans après la révolution de 1917

Nous vous proposons de lire ici des extraits du livre de Jean-Christophe Sellin : « COMPRENDRE OCTOBRE, 100 ans après la révolution de 1917 ». Ils traitent de la condition féminine et de l’instruction, deux domaines dans lesquels les bolcheviks se sont montrés extraordinairement novateurs, voire audacieux.
LGS.

Conséquence directe de la barbarie de la première guerre mondiale, la révolution d’Octobre est une réponse pour en finir avec le conflit et ne plus revivre une crise aussi dévastatrice.
Surtout, Octobre va rendre crédible le fait révolutionnaire pour changer le monde.

Son onde de choc va aussi influencer pour les décennies à suivre, la géopolitique mondiale, les forces politiques progressistes ou réactionnaires d’ailleurs.

Il s’agira donc de comprendre sans concession les événements de l’année 1917 jusqu’à la bureaucratisation du pays au milieu des années 1920.

Ce livre est donc un petit manuel, une boîte à outils avec des points théoriques et historiques, des fenêtres thématiques et des pistes de réflexion pour y voir plus clair à la lumière des questions de notre temps. Pour la révolution citoyenne.

7. Les premiers acquis d’Octobre

On peut critiquer le bolchevisme, ses méthodes, ou condamner tel ou tel acte. C’est une affaire de point de vue, d’opinion ou de sentiment. Sur deux points objectifs, il parait impossible de ne pas unanimement saluer les efforts du jeune gouvernement soviétique : c’est sur les droits des femmes et sur l’instruction publique.

Les droits des femmes

« Les femmes russes sont passées brusquement de l’esclavage à l’égalité absolue en matière sociale légale, civique et de traitement », ainsi Berty Albrecht, célèbre féministe franco-britannique constatait avec admiration l’une des avancées les plus universelles de la révolution russe.

Même s’il faut certainement relativiser la notion d’égalité absolue dans la réalité, du fait même de la persistance culturelle du patriarcat et des rapports de production anciens, il est clair que les femmes obtiennent immédiatement le droit de vote, le droit à l’instruction (87% sont analphabètes en 1917),

l’égalité salariale à travail égal, puis le droit à l’avortement en 1920 (que Staline fera supprimer en 1936). Le mariage civil est le seul reconnu, réduisant ainsi les pressions religieuses sur les femmes. Le divorce est facilité. Une allocation « maternité » est mise en place avec un congé de huit semaines avant et huit semaines après l’accouchement. La différence entre enfants, « légitimes » ou non, est supprimée en 1921.

Si les femmes ont ouvert la voie de la Révolution avec la première manifestation de masse le 8 mars 1917 (23 février), on doit beaucoup de ces avancées au volontarisme d’ Alexandra Kollontaï, dont nous déjà relevé qu’elle a été la première femme du monde moderne membre d’un gouvernement. « Commissaire du peuple aux affaires sociales » elle fait aussi adopter d’importantes mesures pour lutter contre la prostitution, l’aide aux mères isolées et aux milliers d’enfants abandonnés.

Le développement de l’instruction, de la culture et des sciences

La révolution russe qui ressemble par tant de côtés à notre révolution française, a repris la célèbre devise de Danton : « Après le pain, l’éducation est le premier besoin du peuple ».

En effet, en trois ans entre 1918 et 1920, la révolution d’Octobre a doublé le nombre d’écoles primaires par rapport aux nombres d’écoles existant après trente ans de tsarisme (38 387 écoles pour parvenir à 79 115 dans cette période).

Ce développement phénoménal dans l’enseignement primaire a été accompli en parallèle dans le secondaire, en combinant les enseignements généraux et polytechniques, mais aussi dans le supérieur. En 1916, le budget de l’instruction publique se montait à 195 millions de roubles. Il sera porté à 940 millions à partir de la révolution de Février. Les bolcheviks l’augmenteront à près de trois milliards de roubles en 1918 puis à dix milliards en 1919. À cela il faut ajouter une entreprise gigantesque de « liquidation de l’ignorance ».

Des milliers de centres ont été ouverts à partir du triple principe « obligation, gratuité, laïcité » Par décret, « tous les habitants de 8 à 50 ans, qui ne savent ni lire ni écrire, sont tenus d’apprendre à lire et à écrire, soit en russe, soit dans leur langue maternelle ».

Pour ce faire, le commissariat à l’instruction publique est dirigé par Lounatcharsky. Il est notamment épaulé par Kroupskaia et Lilina, femmes de Lénine et de Zinoviev ; elles sont les pilotes de cette magnifique entreprise publique pour sortir la Russie du néant.

Des milliers de centres « pour la liquidation de l’ignorance » ont été ouverts. À la fin 1920, Lounatcharsky a estimé que plus de trois millions d’illettrés ont pu apprendre les premiers éléments de leur langue.

Pour les nationalités opprimées par le tsarisme, la République des soviets a constitué des commissions de traducteurs pour créer des alphabets nationaux pour les nationalités qui étaient privées d’écriture. En 1917, seulement deux écoles formaient les institutrices et instituteurs non russes.

En 1920, elles étaient déjà trente-sept et en 1922, plus de 4 000 établissements scolaires de tous ordres pour les différents peuples non russes sont constitués dans la jeune URSS.

Au chantier de l’instruction s’ajoute le développement et la promotion des arts, des sciences et de la culture.

Les oeuvres de Tolstoï, Tourgueniev, Gogol, Pouchkine sont rééditées sans censure. Il en va de même pour Walter Scott, Mérimée, Zola, Romain Rolland, Anatole France et les grands écrivains marxistes.

Ces auteurs sont massivement édités et imprimés (entre 25 000 et 100 000 exemplaires chacun). Le comité de culture prolétarienne – Proletkult – permet à des centaines de milliers d’ouvriers, d’employés, de techniciens, de s’adonner au théâtre, au chant choral, à la musique d’orchestre, aux arts plastiques, à la littérature, aux conférences philosophiques. En accord avec les syndicats qui fixent les temps de travail et de loisirs, les travailleurs peuvent, après avoir réalisé leur tâche, se consacrer gratuitement aux arts.

Les musées, quant à eux, ont été considérablement développés par volonté politique et nécessité matérielle. Par volonté, car l’objectif était de partager l’accès aux oeuvres avec le plus grand nombre et par nécessité aussi parce que les hôtels bourgeois et les palais de la noblesse regorgeaient d’oeuvres qui avaient été confisquées et qu’il fallait socialiser.

Les arts connaîtront un essor sans précédent dans les domaines de la création. La jeune Russie soviétique sera un phare de la nouvelle avant-garde avec notamment Chagall, Kandinsky, Malevitch, Rozanova, Tatline, Udaltsova pour les arts plastiques, Vertov et Eisenstein pour le cinéma, Roslavets et Thérémine, qui a été l’inventeur du premier instrument électronique de l’histoire de la musique, Akhmatova et Maïakovski pour la poésie.

Les sciences se développent considérablement avec de nombreux instituts nouveaux en physiquechimie, sur les métaux précieux, les matériaux de construction, le radium, l’analyse spectrale et la structure des atomes comme en témoigne le rapport de la mission française de Victor Henri en 1920 pour l’ Académie des sciences. Rapport malheureusement enterré en France pour des raisons politiciennes comme le souligne André Morizet (délégué du PCF en Russie) dans son livre de 1922 après son retour.

La valorisation des travaux de recherche et les sciences en général ont, bien sûr, l’intérêt, pour le pouvoir, de pouvoir articuler instruction générale et acquisitions polytechniques et scientifiques. Avec en toile de fond l’idée que l’émancipation passe par l’éducation et la démarche matérialiste et scientifique.

L’ouverture scientifique et intellectuelle se traduit aussi par l’intérêt pour de nouvelles approches comme la psychanalyse, vigoureusement défendue par Trotsky qui y voit un élargissement du champ de réflexion et de la compréhension (alors que Lénine était révulsé par les approches freudiennes sur la sexualité !).

Jean-Christophe SELLIN

« COMPRENDRE OCTOBRE, 100 ans après la révolution de 1917 » coûte 10 euros .

Jean-Christophe Sellin est professeur des écoles. Passionné de musique classique, il s’est investi à la faire découvrir aux écoliers dans les quartiers avec l’association Classisco dont il est le président fondateur et qui a organisé des centaines de concerts pour près de 100 000 élèves. Conseiller régional de la région Occitanie, il est aujourd’hui impliqué dans le mouvement de la France Insoumise. Il a été conseiller municipal de Toulouse.

Le livre s’enrichit d’une brillante préface signée Alexis Corbière. Ce dernier est le député bien connu de Seine-Saint-Denis après avoir été professeur d’Histoire. Il est aussi le coauteur d’un livre remarquable sur Robespierre : « Robespierre, reviens !  » aux Editions Bruno Leprince, 2012, 128 p. 5 €.

Pour Alexis Corbière « aucune nostalgie ne saurait être entraînante. C’est tout l’inverse. Bien sûr, la révolution russe s’est inspirée des révolutions précédentes. En mars 1917, on chantait la Marseillaise dans les rues de Petrograd et l’on manifestait au slogan de « Liberté, Égalité, Fraternité ». Mais n’oublions pas la leçon de Marx qui, dans Le 18 Brumaire de Louis Bonaparte nous prévenait déjà : « La révolution sociale du XIXe siècle ne peut pas tirer sa poésie du passé, mais seulement de l’avenir. Elle ne peut pas commencer avec elle-même avant d’avoir liquidé complètement toute superstition à l’égard du passé ».

Notons au passage, pour le regretter, que (page 9) le préfacier tombe inopinément dans le cloaque de l’écriture inclusive (« des millions d’hommes et de femmes, encore englué.e.s depuis 1914… ») qu’il avait fort heureusement évité avant et dont il va s’extirper aussitôt pour passer au large dans le reste de sa pertinente préface.

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