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Divorce belge : 200 jours de crise(s)

Nous avons tous constaté ces dernières semaines, derniers mois, que dans toute l’Europe la volonté populaire de s’opposer aux mesures d’austérité dictée par certains pays et certaines institutions telles que le FMI , Fond Monétaire International, instance chargée, on se demande d’ailleurs par qui, de mettre en place, sous prétexte de prêts aux pays en difficulté, des mesures de remboursement synonymes de contrôle, de domination, de perte de la souveraineté, de dérégulation du Marché du Travail, de déréglementation du Système bancaire, de partialité en faveur des pays développés, de politiques d’ajustement structurel asphyxiant l’Etat et le secteur social, de privatisation des entreprises, de libéralisation du commerce, etc... Autant dire que le FMI, comme la BM (Banque Mondiale), ont accru la pauvreté des pays pauvres, et enrichi les pays riches, notamment en accordant des prêts difficiles à rembourser et à des taux profitant plus aux banques qu’aux peuples. On en a vu l’expression en France, en Espagne, Grande-Bretagne, Irlande, Grèce,…, dans des manifestations populaires massives où plusieurs millions d’européens affirmaient leur volonté de s’opposer aux dictats des technocrates néolibéraux. En Belgique par contre les réactions sont, pour l’instant restées assez limitées. Le battage médiatique et politique autour de l’actualité nationaliste et communautaire n’y est certainement pas étranger.

Notre presse écrite, radiophonique et télévisée se complait, malgré les plus de 8 mois sans gouvernement digne de ce nom, à ressasser le feuilleton monotone et sans fin, des revendications communautaires de nos politiciens. Qu’ils soient néerlandophones ou francophones. Les politiciens flamands prétendant que la Wallonie est devenue une charge pour la Flandre et que donc, la partie des impôts flamands utilisée pour soutenir les difficultés financières de celle-ci, serait mieux employée pour garantir la prospérité d’une Flandre indépendante. Tandis que les politiciens wallons estiment qu’ils sont trahis par leurs collègues flamands qui ont bénéficiés des décennies durant de la solidarité wallonne du temps où celle-ci était la partie la plus prospère du pays ; échaudés les politiciens wallons se disent donc que si la Flandre veut quitter la Belgique, qu’elle n’a qu’à le faire. Toute la crise que nous vivons actuellement est simplement basée sur ces brouilles communautaires et uniquement sur celles-ci, alors que bon nombre d’autres problèmes autrement plus importants et urgents inquiètent la population belge dans son ensemble, aussi bien les Wallons que les Flamands et les travailleurs belges de se demander en quoi ces revendications nationalistes qui bloquent tout le processus social et économique feront avancer celles qui concernent réellement les travailleurs et leurs familles.

Si on se réfère à l’histoire européenne récente, on constate que le nationalisme est une calamité récurrente depuis le dix-neuvième siècle occupant le devant de la scène politique depuis la révolution de 1848 dans toute l’Europe où elles se confondent avec les revendications démocratiques contre la domination dictatoriale des royaumes, de l’aristocratie et du système féodal encore en vogue dans nombres de pays à cette époque.

Au vu de la situation à cette époque, il est normal que les mouvements populaires aient soutenu les revendications de la bourgeoisie de l’époque, étant donné qu’à ce moment-là le capitalisme était progressif et révolutionnaire, mais cette donne change radicalement au début du vingtième siècle principalement avec l’avènement de la Première Guerre Mondiale, de progressif le capitalisme qui a assis au niveau mondial sa prédominance, va devenir réactionnaire afin de protéger ses acquis et développer ses lois économiques, le progrès n’est plus destiné à l’humanité mais bien au développement continu du Capital.
Dès ce moment, les revendications nationales, fondées sur la langue, la religion, la race ou toute autre spécificité, n’ont absolument plus rien de progressif et n’ont plus à être soutenues par la classe ouvrière. Au contraire, ils deviennent un moment dans la lutte impérialiste entre puissances, comme l’illustrent tragiquement les deux guerres mondiales et les nombreux conflits locaux sanglants (du Moyen-Orient jusqu’aux Balkans par exemple) et constituent une entrave au développement international des luttes de la classe. Dans ce sens, le nationalisme flamand a été exploité dès la première guerre mondiale par l’impérialisme allemand et, après la seconde guerre mondiale, il a été systématiquement utilisé pour diviser la classe ouvrière (pendant la grève générale de 1960-61, par exemple).

On remarquera que, depuis plus de six mois déjà , les politiciens belges font du surplace en se traînant lamentablement d’échec en échec sans obtenir de réels résultats, bien que si l’on y regarde de plus près on remarque que petit à petit se dessine une réorganisation de la Belgique qui permettra principalement de maintenir si pas de développer les intérêts des factions capitalistes de la société belge. Le grand dénominateur commun de ces différentes factions étant bien sûr, de faire payer la crise aux travailleurs par le biais d’une restructuration de la gestion de l’argent public par le biais d’une « responsabilisation » des différents niveaux de pouvoir. Etant donné que plus que par le passé, les différentes régions et communautés seront responsables de leurs rentrées et dépenses, cela impliquera une dichotomie entre les impôts et les salaires selon les régions, des variations dans les systèmes et allocations de chômage, etc… Les restrictions budgétaires et les attaques contre les salaires et les conditions de vie seront ainsi camouflées sous des mesures de régionalisation des budgets et de responsabilisation des régions. D’une certaine manière, l’Etat belge opère comme une multinationale qui filialise un certain nombre de ses activités au sein du groupe industriel, ce qui permet d’imposer des conditions de travail et de salaire différentes et d’opposer les travailleurs entre eux comme des concurrents.

La population contrairement à ce qu’on essaie de lui faire croire, n’a donc absolument rien à gagner dans la mise en avant de revendications nationalistes ou dans la création de nouvelles entités nationales. Dans le temps, la Belgique était dominée par la bourgeoisie francophone et les travailleurs flamands avaient souvent affaire à un patron qui parlait français. Cela pouvait nourrir l’illusion qu’en refusant de parler français, ils résistaient à leur patron et à la bourgeoisie.

Aujourd’hui les travailleurs flamands parlent flamand avec les cadres supérieurs et les PDG et cela n’a absolument rien changé à leurs conditions d’exploitation, ils peuvent s’adresser à un gouvernement flamand, qui, comme l’exemple d’Opel Anvers l’a bien démontré, les défend aussi peu que le gouvernement belge. Aujourd’hui, travailleurs flamands comme francophones doivent défendre leurs conditions de vie face à des patrons francophones, flamands mais aussi américains, allemands, chinois, ... , et les campagnes nationalistes constituent une entrave majeure au développement d’une riposte large et unie dans la mesure où elles appellent à l’union des travailleurs et des patrons de même nationalité, parlant la même langue, etc. contre les travailleurs d’autres nationalités, parlant d’autres langues, vus comme des concurrents, voire des ennemis et dans la mesure où elles multiplient les divisions entre travailleurs et stimulent même ceux-ci à s’opposer les uns aux autres.

Le « divorce belge » est actuellement en plein sous la lumière des projecteurs des médias, mais l’exploitation du nationalisme et du régionalisme n’est nullement un phénomène purement belge, loin s’en faut. De telles tendances parcourent de nombreux pays et la crise et le pourrissement du système exacerbent encore plus ces tendances : on les retrouve de la Turquie au Canada, de la Bolivie à la Chine, et l’Europe de l’Ouest ne fait sûrement pas exception : développement des nationalismes catalan, basque, galicien, en Espagne, tendances autonomistes du Nord de l’Italie, velléités autonomistes en Ecosse, en Suisse ... L’expression de revendications nationalistes particulières - avec l’exacerbation générale du nationalisme et d’attitudes xénophobes dans tous les Etats - n’est qu’une des expressions de la montée du chacun pour soi qui découle de la décomposition sociale d’un système capitaliste totalement dans l’impasse.

Aujourd’hui, la faillite du capitalisme peut être constatée chaque jour et les diverses expressions de lutte seront de plus en plus amenées à se poser des questions fondamentales concernant les perspectives que le neo-libéralisme peut encore nous offrir. Les tenants du système actuel s’en rendent parfaitement compte et savent que la politique d’austérité peut déclencher une réaction radicale de la part des populations. Ceci explique l’intensité des campagnes en vue de mystifier les différentes classes de la population et les monter les unes contre les autres.

Les travailleurs ne peuvent donc sous-estimer le poison instillé par l’extension de ces revendications nationalistes, dans le sens où, non seulement, elles véhiculent des attaques très importantes contre les conditions de vie et de travail de la population, mais, de plus limitent la capacité de cette dernière à s’unir contre les mesures et à développer une alternative. La classe dominée, ou la majorité de la population, (Marx aurait parlé de prolétariat, mais il parait que le mot est démodé, est-ce bien certain ?), est en effet la seule classe de la société dans cette période de décomposition, à pouvoir développer une dynamique qui va à l’encontre de l’effritement des Etats et de la dispersion des rapports de production capitalistes, une dynamique qui vise à réaliser une unité internationale à travers une « forme de gouvernement » qui correspond et répond au développement planétaire des travailleurs et de leurs familles.

Luc Torreele. MediaBeNews

Sources : Michel Collon : les 7 péchés d’hugo Chavez

CCI : Nationalismeflamands ou sentiments antiflamands des francophones : le nationalismes est une arme pour briser la lutte unitaire contre l’austérité

La Libre Belgique : Qu’est-ce être belge aujourd’hui ?

Le Soir : 200 jours de crise

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