commentaires

Garcà­a Linera : La Bolivie abandonne l’État d’apparence et se dirige vers l’État intégral, à l’horizon socialiste

Le vice président à lvaro Garcà­a Linera a affirmé que le second mandat du président Evo Morales qui débute ce vendredi et se terminera en 2015 marque la fin de l’État apparent pour laisser place à l’État intégral, à l’horizon socialiste.

« Notre modernité étatique, celle que nous allons construire et que nous sommes déjà en train de construire avec le leadership populaire est très distinct de la modernité capitaliste et il faut lui donner un nom. Notre horizon étatique est une horizon socialiste » a-t-il assuré lors de l’acte d’investiture du second mandat du Président indigène.

Dans un discours magistral, Garcà­a Linera, a cité le plus grand penseur marxiste bolivien du XXe siècle, René Zabaleta Mercado ainsi que le philosophe marxiste Antonio Gramsci pour justifier le changement transcendantal qui, selon lui, constitue le point de balancement, entre un avant et un après, entre l’État colonial et le nouvel État Plurinational.

Linera a souligné que Zabaleta a touché avec sa pensée une manière novatrice de comprendre la Bolivie : l’État apparent est un État illusoire, qui ne peut se résumer ni se synthétiser, ne peut rassembler l’ensemble de la population, sinon un petit groupe de privilégiés de la société. C’est cet État qui ne peut arriver à articuler la territorialité, les régions et qui ne représente et unifie que des petits groupes isolés, fragmentés, du territoire, de la patrie.

« L’État apparent était également pour Zabaleta cet État qui ne peut intégrer les modes de vie, la culture et les formes d’organisation politique de la société ».

Cet État partiel et partial laisse donc de côté, à la marge les autres secteurs sociaux, les autres territoires, les autres régions et les autres formes d’action politique.

Garcà­a Linera a assuré que durant la période s’étendant de 1825 à 2005, la Bolivie était un État apparent, car « il excluait avant tout la majorité indigène » rappelant que la Bolivie est un pays où la population indigène est majoritaire et cet état de fait demeurera pour encore de nombreuses années.

« Cette majorité indigène n’a pas été intégrée, sa culture niée, dans es héros, ses traditions, ses modes d’action politiques, sa présence et sa citoyenneté. La citoyenneté qu’à instauré la Répulique Libérale a été la citoyenneté de caste, de renom et censitaire » a-t-il souligné qualifiant cette action comme la première faille « tectonique » de l’État.

Action qui, a-t-il certifié, a perforé la structure de la République Libérale depuis sa naissance dans un régime que l’on nomme communément « colonialisme et racisme, qui a caractérisé l’État depuis 1825 à 2005, année de l’investiture du premier mandataire du président Morales.

Dans ce contexte pernicieux, Linera a déclaré que la Bolivie doit s’orienter vers un État intégral, que le philosophe marxiste Gramsi définit comme l’État dans lequel il y a une correspondance entre la société civile, les citoyens, les régions, les travailleurs, les classe sociales et la représentation politique étatique.

« C’est cet appareil gouvernemental qui unit et synthétise tous les secteurs sociaux, les classes au groupe national, régional, aux collectivités et à l’État intégral, entier, qui est celui où le leadership est moral, intellectuel et politique, permettant l’union de tous. »

Dans ce sens, Linera a déclaré que la Bolivie était sur le point de vivre un nouveau destin, un nouvel État, qui ne sera plus colonial, car il garantit l’égalité, qui ne sera plus patrimonial car il distribue les richesses, qi ne sera plus centralisé, car il garantit l’autonomie et qui enfin ne sera plus un État mendiant car il garantit la souveraineté matérielle.

« En Bolivie, cette harmonie entre société et État, la décolonisation, dé-patrimoniale, n’est pas encore effectuée. Cela était impossible pour les vieilles classes dominante, car elles vivaient de ce même colonialisme et patrimonialisme. Ce sont les classes populaires qui ont dû le faire, les mouvements indigènes, et cela n’est pas rien car cela change la nature même de l’Etat ».

Le vice-président a également soutenu que la consolidation de l’État intégral mènera nécessairement à un État socialiste. Pour Linera, le socialisme est le bien -être, « c’est mettre en commun la richesse, c’est seulement faire ce qu’ont faits nos ancêtres iidgènes mais à une échelle plus importante, avec les technologies et la modernité productive »

Le vice-président a reconnu que ce processus ne sera pas facile et prendra sûrement des décennies : « peut être des siècles, mais il est clair que les mouvements sociaux ne peuvent arriver au pouvoir sans s’inscrire dans un horizon socialiste et communautaire pour être construit avec la volonté de l’ensemble du peuple, avec pour bases le bien-être et le bien-vivre ».

Rubén Sandi

Source : Agence Bolivienne d’Information

http://www.larevolucionvive.org.ve/spip.php?article1312&lang=fr

Print Friendly and PDF

COMMENTAIRES  

25/01/2010 11:17 par Mauro

Mouais. Cet article me laisse sceptique

Alvaro Garcia Linera est plus clair dans d’autres textes (cf. lien) , où il défend le capitalisme andino-amazonien, l’exploitation des ressources pétrolières de l’Amazonie ! etc...

Et au final cet Etat "intégral" dont on parle ici ressemble fort à l’Etat populiste classique d’Amérique Latine, qui tente de créer une grande alliance de classes au service d’un capitalisme national (par opposition au capitalisme néo-colonial et à la dépendance économique qui en résulte).

Dire qu’il faudra des "centaines d’années" avant d’arriver au socialisme, c’est reprendre le discours des réformistes du début du XXè (à la Kautsky).

Sous prétexte de "réalisme", l’expérience bolivienne risque de désillusionner encore beaucoup de militants d’Europe. Car elle est très loin de représenter un exemple de ce que pourrait être le socialisme du XXI ème siècle.

Une critique de gauche des processus en cours au Vénézuela, en Bolivie ou en Equateur doit pouvoir être possible aussi. Cela n’équivaut évidemment pas à être d’accord avec les réactionnaires néo-libéraux qui sont leurs opposants aussi.

SCR

25/01/2010 14:53 par Jeanne Notet

"Mouais" , rien que ce mot : "mouais" dit tout. Comme si les boliviens étaient pendus aux oracles d’une poignée de bobos "sceptiques" qui remettent en cause, du bout de leurs claviers européens, 64 % de votes exprimés par une population, en fonction d’un programme et d’un bilan concret.

Ah mais vous disent-ils nous sommes plus intelligents que les boliviens et avons le droit de critiquer leur vote, car nous sommes, nous, écologistes et de gauche, et contrairement à Evo Morales et à Garcia Lineira, nous avons lu Saint-Upéry. Ce gouvernement nouveau n’est pas 100 % écolo. La preuve : il ose outrepasser nos conseils, exploiter les ressources miniéres, créer une industrie nationale. La France a usé de ce droit et nous en profitons bien, mais la Bolivie doit rester un jardin pour y faire nos thèses, nos récups, nos calendriers couleurs. Et l’industrie nationale, l’exploitation du pétrole, cela pollue, cela fait de la déprédation de la nature. Pas question. Nous devons expliquer aux 64 % qu’ils doivent obéir à notre minorité éclairée, c’est cela la démocratie.

Ce circuit est bien huilé : sites "indiens" , idéalisation des indigènes, qui sait en Europe que certains de ces "indiens" forment des lobbys capitalistes, séparatistes, et se cachent derrière un langage écolo européen pour gêner les États qui veulent redistribuer nationalement les fruits d’un développement. Cela Mauro ne le dira pas bien sûr.

Son discours, c’est un discours de classe. Le simple fait que ceux qui le tiennent en France tournent leur dos à la politique dans leur propre pays, au moment oú l’État s’y défait, n’est pas un hasard. Il y a une alliance de fait entre l’écologisme de classe moyenne et la critique conte les États nouveaux qui se recréent en Amérique Latine, de la part de de ceux qui ont assez de ressources pour vivre dans la société de marché.

Sauf que les 64 % qui ont voté pour le programme expliqué par Lineira sont en majorité indigènes. Après tout, la critique leur appartient.

25/01/2010 20:07 par Mauro

Chère Mme Notet :

1) Je ne dis pas que l’élection de Morales est un phénomène négatif, au contraire c’est un progrès pour la Bolivie et l’Amérique Latine. Je dis simplement qu’il ne doit pas être interdit de pouvoir regarder ce qui s’y passe d’un oeil critique, nécessaire aussi pour les expériences de la gauche latino-américaine.

2) J’aurais donc aimé une réponse qui allait au-delà de l’insulte de "bobo" (Qu’est-ce qu’un bobo d’ailleurs ? Le fait de faire d’émettre un doute, des craintes de gauche, serait le signe indéniable d’une condition "bobo" ?).

3) A ce que je sache, je ne mentionnais pas que le pétrole amazonien. Du reste, vous n’en dites mot. Etrange...

4) Enfin pour en venir à votre unique argument : si on vous suit, "ce que les pays capitalistes avancés ont fait, les pays en rupture avec le néolibéralisme peuvent le faire aussi" ? Vraiment ? Mais où sont les limites ? A la pollution ? Au productivisme ? Aucune ? Pensez-vous que les travailleurs chinois sont ravis des choix politiques de Pékin sur ce sujet notamment ?

5) Dans ce commentaire, j’ai aussi posté un lien vers un article d’Eric Toussaint (encore un infâme "bobo" je suppose ?). Ca m’intéresserait d’avoir votre avis sur cet article.

Merci d’avance pour une réponse argumentée et sans anathèmes, y compris sur les quelques mots exprimés dans ma première réaction.

PS : j’ai ajouté un lien vers un article sur le Venezuela. Restez zen...

28/01/2010 02:14 par Greg

Mauro

Je vais tenter de répondre moins de but en blanc,

vu que c’est moi qui me suis chargé de traduire le texte, sur la traduction, il est possible que celle-ci soit moins bonne que d’autres, ayant été réalisée un jour plutot chargé niveau travail. Et c’est vrai qu’elle me parait plutot lourde sur le plan de la lecture.

sur le fond :
Sous prétexte de "réalisme", l’expérience bolivienne risque de désillusionner encore beaucoup de militants d’Europe."
l’attribution de "bobo" de mme notet, signifie à mon sens que la question qui se pose ici en Amérique Latine n’est pas la satisfaction ou la désillusion de militants d’Europe. C’est la construction d’un processus original et nouveau. Qu’on le veuille ou non, nous avons échoué dans la construction d’une alternative chez nous, alors que l’amérique latine est sur la voie de la réussite. Avec de larges contradictions et problèmes.

Mais vous préféreriez que linera dise : "désormais, avec ce deuxieme mandat, nous faisons la révolution socialiste imémdiate". Bien sûr que non. D’ailleurs le MAS est bien le mouvement VERS le socialisme. Ca a la mérite de la franchise. A noter également que le MAS est un mouvement de l’ancienne république, avec toute la classe bureaucratique que cela engendre.

Comme au venezuela, c’est un processus, et oui ça prendra du temps dix, vingt ou cent ans, car changer la politique c’est rapide, mais faire évoluer la conscience c’est beaucoup plus lent et ça ne dépend pas de la critique interne ou externe, mais des acteurs du processus eux-même.

l’Etat intégral c’est simplement un concept théorique pour expliquer que le dirigeant doit être inclut dans le peuple. Qu’il faut en finir avec d’un coté les puissants et l’administration et de l’autre le peuple. Les expériences "populistes" en amérique latine, jusqu’à preuve du contraire ont été surtout les dictateurs mis au pouvoir par les américains. Ah mais Chavez ? Castro ? le prisme européen rend difficile d’avoir une vision claire. Pas fanatique pour un sou, je n’ai personnellement plus aucune critique sur le liderazgo depuis que la population m’a dit qu’elle "aime" chavez. c’est de l’amour, emmerdant non ? Et c’est ça qui fait tenir le processus. maiiiis, c’est pas comme qu’on a jamais) fait la révolution !

bref, la critique, ce n’est certainement pas à nous occidentaux de la faire. Tout au plus nous pouvons interroger des acteurs locaux sur certains aspects. mais sinon, c’est du néocolonialisme intellectuel comme nous savons très bien le faire, à donner des leçons au monde entier et de ne rien arriver chez nous. et les acteurs du processus, en tout cas ici au Venezuela, détestent ça. La critique de "gauche" croyez-moi, elle est faite, mais à l’intérieur même du processus.

et le comparatif avec la chine est quand même très mauvais. Il n’y a pas de parti unique en Bolivie, et le président chinois n’est pas élu avec 65% des suffrages. si vous ne voulez pas etre caricaturé à outrance, choisissez mieux vos exemples. Cela nuit à votre crédit.

29/01/2010 19:50 par Mauro

Salut Greg,

merci pour la traduction.
Deux-trois remarques sur ta réponse :

 Pour moi, il est tout autant dangereux de tomber dans l’idolâtrie à distance que dans la critique systématique. Il me semble quand même qu’il y a une grande intolérance à la critique chez beaucoup de partisans de Chavez ou Morales en Europe. Ceci dit, comme tu le dis toi-même, on ne leur apporte pas grand-chose et de toute façon on n’ira pas faire la révolution à la place des latino-américains. C’est plutôt par rapport à nous-mêmes et à nos illusions ici en Europe, notamment électorales, que ces processus peuvent être intéressants.

 Garcia Linera va bien plus loin que ce que tu dis. Il défend le capitalisme andin, dans une optique "étapiste" vers le socialisme. Je maintiens qu’il s’agit d’une conception néo-réformiste aussi inepte que celle de Kautsky il y a cent ans. Ce qui ne m’empêche pas d’être d’accord avec toi sur ce point : passer du capitalisme au socialisme, c’est pas simple.

 Je ne pense pas que Peron ait été placé par les USA. Les régimes dont je parle sont les régimes interclassistes des années 30-50 qui ont tenté de développer un capitalisme endogène en Amérique Latine en pratiquant des nationalisations, le tout avec l’accord de certains secteurs syndicaux. Les discours de l’époque ressemblent parfois fort à ceux des bolivariens aujourd’hui, tout comme l’amour pour les dirigeants. Dans le fond, se souvient-on aussi de qui était Bolivar ? Je ne critique pas la volonté d’indépendance de l’Amérique Latine, mais celle-ci doit-elle se faire pour les paysans et ouvriers ou pour la petite-bourgeoisie locale ?

 Il faut quand même regarder et les progrès objectifs significatifs et les dangers tout aussi clairs qui pèsent sur les gouvernements progressistes. A ce sujet, le développement de la bourgeoisie, la soumission des mouvements sociaux, une permissivité très grande vis-à -vis des réactionnaires peuvent jouer de mauvais tours aux boliviens et aux vénézuéliens.

 quand à la critique de gauche à l’intérieur de ces gouvernements, pourquoi n’est-elle pas plus relayée chez nous ?? Sorry mais je n’en vois que très peu de traces, et quand celles-ci existent c’est par des canaux confidentiels.

 rapport avec la Chine : je n’ai pas dit que Bolivie=Chine. Soyons clairs. Mais le productivisme semblait tellement vivement défendu par ma contradictrice (?) qu’il fallait quand même montrer l’absurde d’une telle position au XXIème siècle. Le socialisme peut et doit être écologique. Ca ne m’intéresse pas d’avoir un paradis socialiste sur une Terre Morte. D’ailleurs c’est impossible.

Salutations révolutionnaires

(Commentaires désactivés)
 Twitter        
 Contact |   Faire un don
logo
« Informer n'est pas une liberté pour la presse mais un devoir »
© CopyLeft :
Diffusion du contenu autorisée et même encouragée.
Merci de mentionner les sources.