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L’ordre institutionnel international viole-t-il les droits de l’homme des plus pauvres ?

Je livre ici une synthèse d’un long article remarquable de Thomas Pogge, professeur de philosophie à Yale accompagné de quelques réflexions personnelles.

Son article porte sur les relations entre l’ordre mondial international et la pauvreté. Pour se faire il mobilise la notion de droits de l’homme qu’il épure afin d’en garder l’essence morale. Ce critère épuré lui permet de juger le droit international existant, d’interroger l’ordre mondial actuel sur les causes de la pauvreté. Il appelle in fine à une réforme institutionnelle mondiale comme moyen préférentiel de remédier à la situation.Cet article est notable dans la mesure où l’auteur mène une réelle réflexion interrogeant la situation actuelle, fait naître un véritable dialogue sur les arguments, interroge des justifications, contre-argumente.

Article initial paru dans "Raison Publique n°6 avril 2007" sous le titre « Reconnus et bafoués par le droit international : les droits de l’homme des pauvres du monde » et mis en ligne le 22 avril 2010 sur le site raison-publique.fr

La méthode de synthèse :

1° Sur la base de l’article initial je retranche les exemples surabondants, les répétitions du raisonnement initial, les reformulations. Je conserve toute la structure du raisonnement (transitions, annonces, définitions, points successifs à aborder) pour ne pas m’en éloigner.

2° C’est sur cette base que je fais ma propre synthèse en tâchant de donner une vue d’ensemble de cet article, d’en suivre la structure tout en la formulant de manière plus concise.

3° Je livrerai mes réflexions personnelles à la fin de l’article. Mais il est suffisamment éloquent et clair pour en faire de trop longues...

" Le droit international, dans ses codes et ses pratiques, reconnaît de nombreux droits de l’homme. Ces droits sont censés garantir tous les êtres humains contre les maux les plus graves qui peuvent leur être infligés par leurs compatriotes ou par des étrangers. Pourtant, le droit international établit et maintient des structures institutionnelles qui contribuent largement à la violation de ces droits. Des éléments essentiels du droit international forment obstacle, de manière systématique, aux aspirations des populations pauvres à un gouvernement démocratique, aux droits civiques, à une indépendance économique minimale. Le fonctionnement d’institutions internationales aussi importantes que l’OMC, le FMI ou encore la Banque Mondiale contribue de manière systématique à entretenir l’extrême pauvreté. "

1. Droits de l’homme et devoirs afférents

Si les systèmes juridiques créent des droits de l’homme légaux, il est apparu après la 2ème guerre mondiale que différents droits de l’homme "moraux" existaient. Ceux ci sont la mesure de la légitimité d’un gouvernement. La distinction d’une approche morale et d’une approche légale des droits se fait nettement dans le préambule de la DUDH (elle proclame des droits moraux qui existent indépendamment d’elle). La reconnaissance des droits de l’homme, au sens moral, permet de fournir un critère indépendant d’appréciation d’un ordre. Un système juridique ne pourrait qu’au mieux juger de la garantie dans les faits des droits de l’homme reconnus officiellement. L’officialité de la reconnaissance laissant ces droits à la merci d’un revirement légal.

Les droits de l’homme envisagé moralement se fondent sur la "solidité d’un raisonnement plutôt que sur la volonté des dirigeants". Pour pallier à d’éventuelles critiques, le choix est fait de retenir une acception étroite des droits de l’homme et des devoirs afférents, connexes. La prétention n’est pas de fixer un contenu mais d’établir des conditions minimales d’application.

L’article vise la situation des droits des plus pauvres car ils subissent principalement ces violations (notamment les droits socio-économiques). Il retient le seuil de 2 dollars par jour retenu par la Banque Mondiale qui concerne entre 40% et 45% de la population mondiale.

L’existence de droits économiques et sociaux fait parfois débat dans les pays développés car on suppose l’existence de devoirs positifs de protection et d’aide. Les droits de l’homme ne sont pas refusés ce sont les devoirs positifs qu’ils impliquent. Le cadre de l’article se situe alors dans un cadre où on entend les droits de l’homme comme n’imposant que des devoirs négatifs. Ces devoirs prennent 2 formes :Une forme interractionnelle qui concerne les responsables directs et matériels de la violation et une forme institutionnelle qui visent ceux qui contribuent à forger l’ordre institutionnel dans lequel s’inscrivent ces exactions et qui en portent une responsabilité indirecte. Sont visés les politiques et fonctionnaires qui ordonnent et supervisent, mais également les citoyens passifs face à une situation qui permet une mise en danger de la vie d’autrui par la pauvreté.

L’auteur soutient que la part principale du déficit de droits de l’homme dans le monde relève de facteurs institutionnels, arrangements institutionnels nationaux mais aussi internationaux. Il soutient également que les arrangements internationaux constituent une violation collective des droits de l’homme et plus principalement du droit "à ce que règne, sur le plan social et sur le plan international, un ordre tel que les droits et libertés (de la DUDH) puissent y trouver plein effet" (DUDH, article 28).

La lecture de l’article s’organise autour de 4 hypothèses qui permettent d’évaluer la moralité, la justice d’un ordre institutionnel donné : 1° Les systèmes peuvent être classés selon qu’ils s’approchent plus ou moins d’une réalisation complète des droits de l’homme // 2° Leur capacité à le faire se mesure par la manière dont ils sont, ou pourraient être, réalisés // 3° Un système réalise un droit si et seulement si ce droit est rempli pour les individus qui vivent dans ce système // 4° Un droit est rempli si un individu jouit d’un accès sûr à l’objet de ce droit.

En conséquence : " l’article 28 signifie que la qualité morale, ou la justice, d’un ordre institutionnel donné dépend d’abord de sa capacité à assurer à tous ses participants un accès sûr aux objets des droits de l’homme : tout ordre institutionnel doit être évalué et réformé d’abord en fonction de ses conséquences relatives pour la réalisation des droits de l’homme. Un ordre institutionnel viole les droits de l’homme s’il donne lieu, de manière prévisible, à un déficit substantiel et évitable de droits "

2. Comment l’ordre mondial actuel engendre une pauvreté extrême et massive

La démarche est ici d’interroger, de discuter les 3 façons de contester l’accusation selon laquelle : Les gouvernements des pays riches, en défendant leurs intérêts propres, ceux de leurs entreprises et de leurs citoyens, mettent en place et contribuent à maintenir un ordre institutionnel mondial qui, "continuellement, et de manière complètement prévisible, engendre un large excès de pauvreté". Ces 3 stratégies étant

1° Nier l’impact d’une modification de l’ordre mondial sur la pauvreté.

2° Prétendre que l’ordre existant est optimal.

3° Prétendre que bien que sous-optimal il n’est pas la cause de l’extrême pauvreté.

2.1. La thèse de la pauvreté domestique

Certains, notamment Rawls, soutiennent que la pauvreté provient principalement de la nature de la culture politique et des traditions religieuses ou philosophiques nationales, de la corruption des élites etc... La responsabilité morale des pays riches à cet égard serait un devoir d’assistance.

L’auteur replace néanmoins cette thèse dans un contexte historique hérité de l’esclavage et du colonialiste qui a laissé place à une situation d’inégalité économique et sociale flagrante telle qu’avec 1 point de croissance en plus que les pays européens il faudrait 2 siècles à l’Afrique pour rattraper son retard en terme de revenus par tête. L’inégalité économique place les africains notamment dans une situation d’inégalité diplomatique pour la détermination de leurs rapports. C’est pourquoi l’inégalité du revenu par tête a augmenté depuis la décolonisation pour attendre un rapport de 40 sur 1 selon l’auteur.

Indépendamment de cela on soutient encore que les clés de l’éradication se trouvent pleinement entre les mains des pays pauvres, cela serait prouvé par la divergence des scénarios de développement des anciennes colonies. Néanmoins l’auteur soutient sur un plan théorique que l’incidence de facteurs locaux n’exclut en rien un rôle, majeur, des facteurs internationaux.

Dans les faits, les échanges sont modelés en profondeur par un système de traités, de conventions qui régulent profondément le commerce, mais aussi les orientations économiques et sociales générales des états les plus pauvres notamment. Ces aspects traduisent des choix parmi des possibilités diverses dont l’auteur doute qu’elles auraient produit la même évolution d’ensemble et la même répartition géographique de la pauvreté.

2.2. L’ordre mondial actuel vu par Pangloss [recours au meilleur des mondes possibles]

4 éléments permettent de conclure que ce point de vue n’est pas recevable :

1° Les institutions mondiales n’ont pas principalement pour but de lutter contre la pauvreté.

2° Les négociateurs les plus influents ont souvent des intérêts multiples.

3° Ces négociateurs auront tendance, de manière naturelle, à favoriser les intérêts de leurs gouvernements, entreprises, citoyens etc...

4° Les pays riches ont un avantage certain dans la négociation et donc un avantage pour faire prévaloir leurs intérêts.

La conclusion est donc que la construction du système international tend à refléter les intérêts des plus riches et non des plus pauvres dans la mesure où les 2 buts sont quasi-systématiquement en conflit.

L’auteur appuie ces arguments par le fait que les règles du "jeu" sont asymétriques, en ce que les quotas, tarifs douaniers, aides financières, crédits à l’export, règlements sur l’investissement ou le droit de la propriété intellectuelle, contribuent à augmenter la part de croissance qui revient aux pays pauvres par rapport à une situation où les règles seraient symétriques. De même le coefficient de Gini a pu sur certaines périodes s’accroitre [il est même susceptible de différentes acceptions]

L’ordre mondial ne serait donc pas optimal et l’auteur livre différentes pistes pour mieux servir l’objectif d’éradication de la pauvreté : aide financière plutôt que d’embaucher des experts pour défendre leur cause à l’OMC, alléger les contraintes à l’exportation, fixer des normes sociales minimales pour limiter la course vers le bas, garantir une part des ressources marines recuillies globalement, faire payer les pays riches pour les externalités négatives des pays pauvres etc..

2.3. L’ordre mondial n’est-il pas simplement moins bon qu’il ne pourrait être ?

Ici l’auteur répond à l’objection suivante : nous ne faisons simplement pas encore assez collectivement et individuellement pour réduire la pauvreté, mais l’ordre mondial n’est pas une cause de cette pauvreté.

Pour ce faire, il mobilise son concept étroit des droits de l’homme, une violation ne serait que l’action positive qui violerait un devoir négatif. La distinction entre l’acte et l’omission utilisée dans l’objection est délicate à apprécier, il faudrait distinguer les effets que le système cause positivement et ceux qu’il néglige. Plusieurs éléments sont alors à prendre en compte pour rétorquer à l’argument de l’absence de cause de la pauvreté.

2.3.1. Le recours à des comparaisons de niveaux de pauvreté

Comparer est un processus qui nécessite un standard. Or les standards utilisés sont sujet à critiques :

- La comparaison du nombre de personnes en situation d’extrême pauvreté n’est pas pertinente car elle ne répond pas à la question morale qui consiste à déterminer si l’ordre mondial actuel qui laisse persister cette pauvreté violent les droits de l’homme des pauvres (cela reviendrait à légitimer l’esclavage en le fondant sur la réduction du nombre d’esclaves au fil du temps). Les mesures de la pauvreté sont également sujettes à caution (pauvreté ? extrême pauvreté ? mesure etc...) et ne permettent pas de conclure à un progrès moral significatif.

- Les comparaisons historiques ne valent pas tellement mieux dans la mesure où intellectuellement il ne tranche pas la question morale. Il en va de même concernant les arguments se rattachant à la fiction de l’isolement mutuel (sans contact avec l’extérieur alors : etc...). Rien ne permet de trancher et cela est purement spéculatif et fait fi de toute l’histoire.

- Les points de références fictifs du type état de nature, ne sont pas pertinent non plus dans la mesure où celui ci est construit.

2.3.2. Le recours au consentement des pauvres

Recourir au principe romain "volenti non fit injuria" : il n’y a pas d’injustice là ou il y a consentement n’est pas pertinent [Ne serait-ce que par le fait de sortir de son contexte]. L’adhésion à l’ordre mondial actuel se ferait de manière volontaire (ex : participation volontaire à l’OMC). 4 considérations balaient cet argument selon l’auteur :

1° Le recours au consentement est recevable si les droits de l’homme étaient aliénables par consentement.

2° La pauvreté des enfants ne peut entrer dans le champ d’un hypothétique consentement.

3° La signature des gouvernants vaut elle consentement ? Non.

4° Même dans un processus démocratique, la portée du consentement initial est affaibli si cela est contraint d’une manière ou d’une autre.

L’argument du consentement vaut d’autant moins dans des circonstances délicates, catastrophiques et quand la catastrophe est imputable à ceux dont le consentement doit justifier la conduite. Si pour développer leur commerce les pays doivent adhérer à l’OMC à des conditions dévaforables ils le feront sinon ils ne pourront pas écouler leurs produits dans les marchés des pays riches. Néanmoins les accords actuels reviennent à extorquer un prix pour tout secteur de leur marché qu’ils sont destiné à ouvrir : ce prix est constitué du respect de toutes les normes de l’OMC. L’alternative est alors bien mince pour des engagements massifs.

Un autre raisonnement fallacieux réside dans le recours à des études qui démontreraient que les pays pauvres qui adoptes les nouvelles règles réussiraient mieux économiquement parlant : On confondrait alors la question du "étant donné" avec celle du "en elle-même" : [Du raisonnement dans le cadre et du raisonnement hors cadre, avec une prise de recul]. La coopération d’un pays est elle meilleure étant donnée l’ordre mondial actuel fondée sur la domination des pays riches ? est une question différente de : Est ce que cet ordre est en lui même un bien pour les pays pauvres ?

2.3.3. Le recours à la responsabilité des institutions et des élites des pays pauvres

Il faudrait selon certaines argumentations faire reporter la "faute" sur les institutions et le gouvernement des pays ne se développant pas suffisamment en se fondant sur la "réussite" d’autres. L’erreur consiste alors à opposer des élites politiques compétentes pour faire se développer le pays aux autres incompétentes pour exploiter leurs avantages et corrompues.

Cet argument s’écroule pour une question de pure logique qui résulte du constat selon lequel les 2 facteurs nécessaires pour que persiste la pauvreté dans le monde sont reliés (l’ordre institutionnel international et les politiques économiques nationales). Si l’on affirme qu’agir sur l’un suffirait pour exonérer l’autre alors l’inverse est également vrai (c’est la situation par défaut où il y aurait une symétries des responsabilités). L’accusation réciproque des 2 facteurs permet de convaincre beaucoup de personnes qu’ils n’ont rien à voir la dedans. Mais si chacun à de bonnes raisons de critiquer l’autre, nul de peut s’acquitter soi-même. Chacun est donc responsable.

En affinant, on voit qu’il y a une asymétrie car les facteurs locaux n’ont pas l’influence sur l’ordre mondial que ce dernier a sur les facteurs locaux (ex : c’est seulement en 1999 qu’une convention a été adoptée pour tenter de réguler la corruption de fonctionnaires étrangers dans les relations commerciales). Les pratiques passées et présentent corrompent les fonctionnaires de ces pays mais également incitent à la sous performance dans la mesure où c’est l’habilité à corrompre et non la qualité du service rendu qui comptera.

La corruption n’est qu’un aspect du problème plus vaste de la nature des relations entre les élites des pays pauvres et leurs interlocuteurs, selon qu’ils sont leurs subordonnées ou des entreprises et gouvernements étrangers . La richesse et le pouvoir des interlocuteurs, de même que l’absence d’un poids des subordonnés renvoie au problème de l’éloignement de ces pays pauvres d’un fonctionnement démocratique.

On peut citer 4 éléments :

1° On peut s’étonner du fait que c’est le groupe qui contrôle les forces de coercition qui soit reconnu, sur un plan international, comme le gouvernement légitime du territoire indépendamment de l’accession.

2° La souveraineté sur les ressources accordées à ce groupe permet au pouvoir légal (sinon légitime) de conférer de pleins droits de propriété sur ces mêmes ressources. Les recettes que ce groupe dégage lui permet de se maintenir au pouvoir par la force et cet avantage. Il incite à la corruption et à la guerre pour la prise de contrôle de ces ressources de la part des opposants qui n’ont aucun autre biais démocratique pour conquérir le pouvoir. Ceci explique que dans les pays riches en matière premières, les performances économiques sont souvent très faibles.

3° Le droit d’emprunter permet d’assujettir tous le pays pour les emprunts du groupe dirigeant. Ce droit d’emprunter incite à l’emprunt dans la mesure où la charge pèsera sur le pays entier [d’autant plus facilement que l’élite se sentira protégée]. Il ne reconnaît pas la dette "corrompue" comme illégitime quand un gouvernement démocratique arrive au pouvoir. Il incite aux coups d’état pour la prise du pouvoir et la conquête de ce droit.

4° Le droit de passer des traités internationaux contraignant au nom de la population et le privilège international sur les armes sont également des facteurs de maintien au pouvoir propices à la corruption.

L’ordre international actuel n’interdit pas le progrès économique et social, mais certaines de ces caractéristiques le bride véritablement tout en expliquant le manque de volonté et l’incapacité des élites des pays pauvres à lutter contre la pauvreté.

Malgré le progrès technologique, malgré la croissance économique, malgré la forte diminution de la pauvreté en Chine, malgré l’aide officielle au développement et les organisations internationales, l’inégalité continue d’augmenter et la pauvreté ne se réduit pas, de même que la malnutrition.

2.4. Conclusion

" Cette catastrophe s’est déroulée, et continue de se dérouler, sous la houlette d’un ordre mondial conçu pour profiter aux pays les plus riches, à leurs gouvernements, leurs entreprises, leurs citoyens, et aux élites politiques et militaires des pays pauvres ."

L’auteur prend l’exemple de la souveraineté inconditionnelle sur les ressources. " Ces droits sont donc un désastre absolu pour les pauvres du monde, qui se trouvent dépossédés par des accords régissant le prêt et les ressources, sur lesquels ils n’ont pas leur mot à dire, et dont ils ne tirent aucun profit".

" Cet exemple illustre l’injustice indiscutable des institutions internationales actuelles. S’il y a encore tant de pauvreté, un tel besoin d’assistance, c’est uniquement parce que les pauvres sont systématiquement appauvris par les arrangements institutionnels actuels, et cela depuis fort longtemps.

Étant donné que l’ordre institutionnel mondial actuel s’accompagne, de manière tout à fait prévisible, de conséquences pourtant évitables sur l’extrême pauvreté, son maintien sans compensation est le signe d’une violation persistante des droits de l’homme - sans nul doute la plus large violation jamais commise dans l’histoire humaine. "

3. La promesse d’une réforme institutionnelle mondiale

" Les droits de l’homme imposent un devoir négatif : nous ne devons pas contribuer à la mise en place d’un ordre international qui engendre, de manière prévisible, un déficit de droits sans nous efforcer de le compenser et d’en corriger les effets pour ceux qui en sont les victimes ".

L’auteur affirme sa préférence pour une réforme institutionnelle étant donné que les règles internationales sont celles qui ont le plus d’impact sur la pauvreté mondiale. Dans ce cadre, même des changements minimes auraient potentiellement de grandes conséquences. Les règles sur le commerce sont "visibles", elles bénéficient d’une "expertise", les effets des modifications sont connus et étudiés. Des règles moralement satisfaisantes seraient plus facile à maintenir qu’une conduite individuelle morale soumise par nature à des pressions contraires.

Aucun état ne souhaite s’infliger un handicap dans la compétition économique. L’aide internationale est faible pour lutter contre la pauvreté et prend souvent la forme d’aide pour les filiales de ses propres entreprises nationales.

Il est possible d’après l’auteur d’en faire plus dans le cadre de règlements communs qui réduiraient la crainte de perdre du terrain sur des concurrents bien qu’historiquement la chose ait été délicate jusqu’ici. L’objectif est de recueillir le soutien des populations et des gouvernements en répartissant les coûts.

La réforme institutionnelle serait plus réaliste et durable pour 3 raisons :

1° Un apport personnel pour une réforme institutionnel aura des effets sur la pauvreté bien plus important qu’un apport personnel en donation dont la destination est connue et certaine (900 dollars restent 900 dollars dans une donation simple)

2° Une réforme de structure assure une répartition équilibrée des coûts.

3° La réforme structurelle n’a pas besoin d’être renouvelée et permet de lutter contre un certain effet de lassitude, d’accoutumance, de mépris voire d’aversion.

" Pour toutes ces raisons, je crois que l’immense déficit en droits qui prévaut de nos jours, tout particulièrement parmi les plus pauvres dans le monde, doit être combattu par des efforts de réforme institutionnelle au niveau international (et national). Des réformes relativement faibles, et dont les conséquences seront minimes sur les pays riches, suffiraient à éliminer la plus grande part de ce déficit en droits, dont l’ampleur fait de ces réformes notre devoir moral le plus important et le plus urgent ."

Quelques réflexions personnelles :

- La crise économique provoquée structurellement par le fonctionnement de l’ordre actuel justifie actuellement une diminution du soutien financier pour lutter contre la pauvreté. La chose étant perçue comme un coût par des acteurs sans doute un peu las de la situation.

- Les questions de légitimité des gouvernants pour porter la parole du peuple dans des négociations internationales où seront fixées des règles engageant chacun se pose pour toutes les questions d’intégration, de constitutions de zone de libre-échange etc... Que des élus, démocratiquement, puissent décider d’approfondir un processus, d’adopter des règles, soit... mais qu’ils y aient une réelle réflexion sur d’éventuelles alternatives sans devoir recourir à un scénario catastrophe.

- Réfléchir dans le cadre et réfléchir avec un oeil extérieur à celui ci est essentiel. Il faut toujours se demander s’il n’y a pas une cause plus profonde au risque de confondre un sous-cadre avec le cadre global.

- Il importe de toujours discuter les fondements des arguments pour et contre, préalablement au contenu. A titre personnel j’ai l’impression que ce processus n’est jamais vraiment réalisé totalement même dans les pays "avancés". Toutes les solutions possibles peuvent être envisagées dans le contenu de réformes ou de règles, mais si le fondement moral est mauvais, les solutions seront mauvaises.

- On peut faire dire aux chiffres ce que l’on veut. Il convient alors de repenser la construction d’un ordre nouveau sur autre chose que la batterie d’indicateur réfutables que l’on a aujourd’hui pour le baser sur des principes moraux juridiquement contraignant. Ce sont les principes qui doivent être contraignants, pas les indicateurs macro-économiques sujet à critique et à caution. Si le fondement est juste, les corrections seront marginales. Si le fondement est injuste, toutes les corrections possibles aboutiront à des échecs.

- Il importe de repenser toute une architecture de la négociation internationale en chapeautant celle ci de principes clairs et de questions clefs qui devraient toujours trouver une réponse publique, du style : Dans quelle mesure la règle adoptée permet un progrès pour toutes les parties sur différents aspects etc... Le débat doit porter la dessus.

- Un exemple absolument frappant des asymétries de négociations entre pays riches et pauvre se trouve dans les tentatives de renégociation des contrats d’exploitation entre l’Afrique et la Chine notamment. Sous la pression populaire des gouvernements tentent parfois de renégocier certains contrats mais se heurtent aux réalités économiques qui résulteraient de négociations trop abruptes par rapport aux apporteurs de capitaux.

- Un autre exemple des répercutions de l’ordre international sur les politiques locales est frappant dans l’analyse des réseaux de transports en Afrique. Partout ou vous avez une belle et large route bitumée en Afrique centrale notamment, vous pouvez être sur qu’elle reliera une grande entreprise à un centre économique important suivant un tracé bien droit indépendamment de toute cohérence urbanistique.

- Etc...

Points de vue alternatifs

Source : http://points-de-vue-alternatifs.over-blog.fr/article-synthese-droits-...

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